Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 85 I 186



85 I 186

30. Arrêt du 22 avril 1959 dans la cause Chambre suisse de l'horlogerie
contre Piguet. Regeste

    Art. 11 Abs. 1 UB. Die Beschwerde ist auch gegeben, wenn das
eidg. Volkswirtschaftsdepartement nicht nur vorfrageweise, sondern eigens
darüber entschieden hat, ob eine Bewilligung in einem bestimmten Falle
erforderlich sei (Erw. 1).

    Art. 3 Abs. 1 letzter Satz UB. Ist eine Übernahme eines
Unternehmens mit Aktiven und Passiven im Falle des Nachlassvertrages mit
Vermögensabtretung möglich? (Erw. 2 und 3).

Sachverhalt

    A.- Jusqu'à la fin de 1958, Piguet a exploité, à Aubonne, sous le
nom de Francis-Louis Piguet, G.H. Piguet successeur, une fabrique de
roues pour l'horlogerie et autres industries, spécialités de fournitures
d'horlogerie. Il travaillait à la fois pour des entreprises horlogères
et et non horlogères. Pour les premières, Fidhor a estimé son chiffre
d'affaires à 58,2% du total en 1956, à 27, 7% en 1957 et à 25,7% en
1958. Selon la même expertise, sur un total de 3 à 4 ouvriers, il en
a employé trois pour des travaux horlogers en 1956, deux en 1957 et un
en 1958. Le 27 novembre 1958, le président du Tribunal civil d'Aubonne
a homologué le concordat par abandon d'actif intervenu entre Piguet et ses
créanciers. La raison sociale de l'entreprise fut dès lors modifiée comme
il suit: Francis-Louis Piguet, G. H. Piguet successeur, en liquidation
concordataire. L'actif commercial comporte:

    Machines                       15 271.--

    Matériel                        2 050.--

    Outillage, étampes, métal       2 250.--

    Droits divers, clientèle etc.   4 000.--

    L'actif non commercial comprend deux maisons locatives et une police
d'assurance. Le passif se monte au total à 176 000 fr. environ et le
découvert présumé à 39 000 fr.

    B.- Le 29 janvier 1959, avant la vente, le liquidateur concordataire
s'est adressé au Département fédéral de l'économie publique (en abrégé:
le Département) pour lui demander si la cession de l'entreprise Piguet à
un tiers était subordonnée à un permis. Le 27 janvier 1959, le Département
répondit en ces termes:

    "Notre avis est que la reprise de l'entreprise, par achat au cours
de la liquidation d'un concordat par abandon d'actif, n'est pas soumise
à autorisation. Dans le cas du concordat, en effet, les créanciers
abandonnent une partie de leurs créances, si bien que l'on doit admettre
que le tiers reprend l'entreprise avec l'actif et le passif existant au
moment de la reprise."

    Copie de cette lettre fut envoyée à l'UBAH, à la Chambre suisse de
l'horlogerie, à la Fédération horlogère et à Ebauches SA

    C.- La Chambre suisse de l'horlogerie a formé un recours de droit
administratif contre cette décision. Elle demande que l'entreprise Piguet
soit rayée du registre des entreprises horlogères.

    La Chambre suisse de l'horlogerie ayant demandé que l'effet suspensif
soit accordé à son recours, le président de la cour de céans fut informé,
au moment où il devait statuer, que la vente avait déjà eu lieu et
il rejeta la requête. Dans une lettre adressée, le 5 mars 1959, au
Département, le liquidateur concordataire déclara que la vente avait eu
lieu avec mention de la procédure pendante devant le Tribunal fédéral,
conformément à la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite
et sans aucune garantie de sa part. Il ressort du procès-verbal de vente
que l'acquéreur Rochat n'a repris que quelques dettes courantes, soit
au total de 571 fr. pour le loyer de l'atelier commercial, des machines,
pour l'éclairage, la force électrique, les assurances, etc.

    D.- Le Département propose de déclarer le recours recevable, mais de
le rejeter quant au fond.

    E.- Le liquidateur concordataire conclut également au rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Selon la lettre de l'art. 11 al. 1 AIH la voie du recours de droit
administratif n'est ouverte qu'à l'encontre des décisions relatives à une
demande d'autorisation ou au retrait d'une autorisation. Cependant, selon
la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, lorsque le Département
a décidé à titre non pas seulement préjudiciel mais principal si une
autorisation est nécessaire dans un cas donné (art. 3 AIH), les parties
peuvent également former un recours de droit administratif (RO 79 I 105
et 101 et plusieurs arrêts subséquents, non publiés). Tel est le cas dans
la présente espèce, de sorte que le recours de Piguet, qui satisfait par
ailleurs aux exigences des art. 101 ss. OJ, est recevable.

Erwägung 2

    2.- Il est constant que l'acquéreur de l'exploitation ne l'a pas
reprise avec l'actif et le passif (art. 3 al. 1 i. f. AIH; cf. art. 181
CO). L'actif proprement commercial, c'est-à-dire affecté à l'entreprise
par son titulaire, est estimé à 23 751 fr. Le passif total, y compris les
dettes privées, se monterait à 174 000 fr. et laisserait un découvert
de 39 000 fr. environ, lequel concerne manifestement le commerce, les
dettes privées étant garanties par des hypothèques. Or l'acquéreur n'a
repris que quelques petites dettes courantes pour 571 fr. au total, ce
qui ne représente pas - et de loin - la totalité du passif commercial;
aussi bien l'entreprise n'était-elle pas vendable avec les dettes.

    Le procès-verbal de vente, il est vrai, par le d'une "remise de
l'entreprise avec actif et passif" et de "cession de l'entreprise avec
actif et passif au sens de l'AIH", mais ces indications ne correspondent
pas aux faits.

Erwägung 3

    3.- Il reste à savoir si, du fait que l'entreprise a été réalisée
dans une procédure de concordat par abandon d'actif, on peut néanmoins
la considérer comme reprise avec l'actif et le passif. Dans son arrêt
Néo-Décolletage (RO 79 I 105, précité), le Tribunal fédéral a laissé la
question ouverte; elle doit être tranchée en l'espèce.

    Selon le système du concordat par abandon d'actif, les biens du
débiteur sont soustraits à sa disposition et soumis à celle des créanciers
(art. 316 lit. a LP); ils font l'objet d'une réalisation qui les fait
passer dans la propriété des acquéreurs lorsqu'il s'agit d'une vente. Les
dettes, en revanche, après avoir été produites et portées dans un état
(art. 316 lit. t, 300 et 316 lit. c LP), restent celles du débiteur;
elles sont payées suivant le résultat de la liquidation par dividendes,
conformément à un tableau de distribution (art. 316 lit. n et p LP);
elles sont donc éteintes par paiement partiel. Elles ne changent pas de
titulaire et ne font l'objet d'aucune reprise, notamment par les acquéreurs
des biens qui composent l'actif.

    En l'espèce, les dettes de Piguet seront éteintes par la distribution
du dividende qu'aura rendu possible la réalisation de l'actif. L'acquéreur
de l'actif commercial a repris quelques dettes courantes, mais cela est
sans conséquence; il ne s'agit que d'une somme minime, bien inférieure
au passif de l'entreprise.

    L'intimé croit pouvoir tirer argument du fait que, dans le concordat
ordinaire (art. 293 ss. LP), le débiteur peut vendre son entreprise
avec l'actif et le passif sitôt après l'homologation. Dans ce cas, il
s'agit effectivement d'une cession avec l'actif et le passif, le passif
étant réduit par un accord avec les créanciers, mais subsistant après
l'opération. La situation n'est pas la même s'agissant d'un concordat par
abandon d'actif, où le débiteur, précisément, ne conserve pas ses biens,
mais en cède la disposition à ses créanciers, tandis que ses dettes ne
subsistent que jusqu'à la distribution du dividende et ne peuvent faire
l'objet d'une cession.

    Le concordat par abandon d'actif serait bien plutôt comparable à la
faillite, dont il n'est du reste qu'une forme atténuée; dans chacune de
ces deux procédures, la disposition des biens qui composent l'actif passe
à la masse, tandis que les dettes sont éteintes, dans la faillite, il est
vrai, sous réserve de l'art. 265 LP, par l'attribution d'un dividende
(distribution des deniers). Or il ne paraît pas douteux qu'en cas de
faillite il ne saurait y avoir cession d'une entreprise avec l'actif et
le passif selon l'art. 3 al. 1 i. f. AIH.

    Le Département allègue aussi, en faveur de la solution qu'il propose,
les conséquences graves qu'une décision contraire comporterait pour les
créanciers qui ne peuvent bénéficier de la disposition légale précitée, ce
qui déprécierait considérablement toute entreprise horlogère comprise dans
un concordat par abandon d'actif. Mais, comme dans le cas de la faillite,
si une entreprise a échoué financièrement et fait l'objet d'une liquidation
par la voie soit de la faillite, soit de l'abandon d'actif, qui aboutissent
pratiquement à une extinction des dettes, il apparaît conforme à l'esprit -
comme à la lettre - du statut horloger que le cessionnaire de l'entreprise
soit assimilé à un requérant qui désire ouvrir une nouvelle exploitation
de l'industrie horlogère et que sa qualification soit examinée du point
de vue de l'art. 4 al. 1 lit. a et 4 al. 2 AIH.

    Enfin, il est juste de ne pas interpréter extensivement l'art. 3
al. 1 i. f. AIH, qui permet à tout acquéreur d'une entreprise, pourvu
qu'il la reprenne avec l'actif et le passif, de s'introduire dans
l'industrie horlogère sans faire la preuve qu'il remplit les conditions
auxquelles doivent satisfaire tous les nouveaux venus selon l'art. 4 AIH.
Le législateur a du reste considéré comme indispensable l'exigence d'une
reprise "avec l'actif et le passif". Dans le projet du Conseil fédéral,
le Conseil national avait voulu biffer ces mots (Bull. stén. 1951,
p. 323 et 325). Mais le Conseil des Etats les a réintroduits, vu les
explications fournies par son rapporteur Ackermann (Bull. stén. 1951,
p. 275), et le Conseil national s'est rangé à cet avis (ibidem, p. 497).

Entscheid:

              Par ces motifs, le Tribunal fédéral

    Admet le recours, annule la décision attaquée, constate que la reprise
de l'exploitation par l'acquéreur Rochat est subordonnée à un permis.