Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 85 IV 241



85 IV 241

62. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 23 décembre 1959 dans la
cause Blanc contre Ministère public du canton de Vaud. Regeste

    Schuldhafte Nichtbezahlung des Militärpflichtersatzes.

    Fall eines Pflichtigen, der weniger verdient, als er für den
Unterhalt seiner Familie aufwenden muss (Erw. 1). Welcher Zeitabschnitt ist
massgebend bei der Beurteilung der Frage, ob den säumigen Ersatzpflichtigen
ein Verschulden treffe? (Erw. 2).

Sachverhalt

    A.- Edouard Blanc, né en 1928, marié, père d'un enfant de 6 ans,
a reçu deux sommations légales, le 29 octobre 1957 et le 5 août 1959,
l'invitant à payer sa taxe militaire de 1957, soit 159 fr. 10. N'y ayant
pas donné suite, il fut condamné le 28 septembre 1959 par le Tribunal
de simple police du district de Lausanne à 8 jours d'arrêts en vertu de
l'art. 1er de la loi du 29 mars 1901, complétant celle du 28 juin 1878
sur la taxe d'exemption du service militaire.

    La Cour de cassation pénale du Tribunal cantonalvaudois rejeta,
le 19 octobre 1959, le recours que Blanc avait formé contre ce jugement.

    B.- Blanc s'est pourvu en nullité au Tribunal fédéral.  Il prétend que
sa carence n'est pas due à sa faute, car, outre les acomptes importants
qu'il est tenu de verser chaque mois pour le paiement de ses meubles,
il doit faire face à des frais spéciaux pour transporter en taxi, quatre
fois par jour, son enfant qui souffre d'un défaut de langage. Sa femme
serait, en outre, constamment malade.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- L'art. 1er de la loi fédérale du 29 mars 1901, qui complète celle
du 28 juin 1878 sur la taxe d'exemption du service militaire, menace d'une
peine d'un à dix jours d'arrêts quiconque n'a pas payé la taxe militaire
par sa faute, nonobstant deux sommations. Le recourant admet n'avoir pas
donné suite aux sommations qu'il a reçues; il conteste seulement que sa
carence soit due à sa faute.

    Pour définir la faute prévue dans cette disposition, il importe de
rappeler que la taxe militaire n'est pas une redevance de nature fiscale,
ni une prestation ordinaire. C'est bien plutôt une forme d'accomplissement
du service militaire (RO 51 I 348; 68 IV 144). Or, un soldat ne saurait
se soustraire à un ordre de marche sous prétexte que l'abandon de ses
obligations civiles l'empêchera de satisfaire à ses engagements. Par
conséquent, le débiteur de la taxe n'a pas davantage le droit d'en
différer le versement jusqu'après l'extinction d'autres obligations (RO
69 IV 142). Le devoir d'acquitter la taxe, prime n'importe quelle dette.

    Le non-paiement de la taxe peut être fautif même si le contribuable
ne gagne pas assez pour pourvoir à ses besoins et à ceux des personnes
qu'il a la charge d'entretenir. Sans doute, maintenant que les militaires
bénéficient généralement d'allocations pour perte de salaire ou de gain,
est-il difficile de soutenir qu'en entrant en service, ils risquent
de priver leur famille du nécessaire (cf. art. 8 de la loi nouvelle
du 12 juin 1959). Dès lors, il ne se justifie guère d'invoquer les
sacrifices matériels imposés au soldat pour exiger que le débiteur de
la taxe en prélève le montant sur des ressources qui ne dépassent pas
le minimum vital. Mais une autre considération est décisive. La taxe
militaire n'est pas seulement l'équivalent des désavantages économiques
qu'entraîne l'accomplissement du service (voir message du Conseil fédéral
accompagnant le projet de la loi du 12 juin 1959 sur la taxe d'exemption
du service militaire, FF 1958 II p. 356 et 358). Elle doit compenser,
sans distinction, "les sacrifices, les efforts, les inconvénients et
les risques inhérents à la vie militaire" (FF 1958 II p. 378). C'est
pourquoi, sous réserve d'exceptions déterminées, tous les citoyens
qui n'exécutent pas d'obligations militaires sont astreints au moins
à une taxe personnelle, quelle que soit leur situation financière et
quand bien même leurs revenus n'excéderaient pas la quotité saisissable
(FF 1958 II p. 376 et 377). Or, il serait illogique que l'Etat impose
une redevance sans pouvoir en assurer le recouvrement. Tel serait
pourtant le cas si le débiteur de la taxe échappait à une sanction en
prouvant l'insuffisance de ses ressources. Non seulement il ne serait
pas punissable, mais il parviendrait à éviter toutes mesures d'exécution
forcée. L'Etat pourrait être complètement désarmé à son égard. (HUNZINGER,
RSJ vol. 53 p. 343). L'institution d'une taxe personnelle prouve donc
que le législateur n'avait l'intention ni de faire dépendre l'obligation
du débiteur de ses revenus, ni de renoncer à frapper pénalement les
récalcitrants en raison de la précarité de leur condition. L'impécuniosité
n'exclut donc pas la faute au sens de l'article premier de la loi du
29 mars 1901. Au besoin, le contribuable devra s'acquitter en entamant
un salaire inférieur au montant strictement indispensable. Toutefois,
il ne s'ensuit pas que la loi soit impitoyable. Elle ne va pas jusqu'à
exiger un sacrifice illimité. Au contraire, pour déterminer celui qu'il
est raisonnable d'attendre, le juge aura égard dans une certaine mesure
aux gains et aux charges du retardataire.

Erwägung 2

    2.- Quant au moment où il convient de se reporter pour statuer sur
l'existence d'une faute, le Tribunal fédéral s'est placé jadis à la date de
la dénonciation (arrêt Mäglin du 22 mai 1925, consid. 3 non publié). Plus
récemment, il a tenu compte de l'attitude du débiteur pendant le délai fixé
par la seconde sommation et même auparavant (arrêt Hotz du 21 janvier 1945,
non publié). C'est la solution préférable. Dès qu'un contribuable se sait
astreint au paiement d'une taxe, il doit prendre ses dispositions pour
s'exécuter à temps. Par conséquent, il peut être en faute en tous cas
depuis la réception de la première sommation. En revanche, il n'importe
que sa situation soit plus ou moins prospère une fois le dernier délai
écoulé, c'est-à-dire après la consommation de l'infraction (RO 51 I 343;
68 IV 144).

Erwägung 3

    3.- En l'espèce, selon les faits retenus par le premier juge, puis par
l'autorité vaudoise de recours, Blanc travaille régulièrement et gagne
normalement sa vie. Les jugements cantonaux ne disent pas exactement à
quelle époque ont trait ces constatations. Il ressort cependant du dossier
que la première sommation a été notifiée le 29 octobre 1957 et la seconde
le 5 août 1959. Le laps de temps déterminant s'est ainsi étendu sur plus
de 20 mois. Or il n'est pas abusif d'exiger que, pendant une période aussi
prolongée, quelles que soient ses charges, un homme valide paie 159 fr. 10
de taxe militaire, quitte à s'imposer certaines privations. C'est aussi
vrai pour le recourant. S'il a subi quelques mois de détention en 1958 et
1959, il ne se plaint nulle part de sa santé et offre même de s'acquitter
maintenant par des mensualités de 10 fr. En ne s'exécutant pas jusqu'au
dernier terme imparti, il a donc commis une faute dans l'acceptation de
l'art. 1er de la loi du 29 mars 1901 et mérite la condamnation prononcée
en vertu de cette disposition.

Entscheid:

           Par ces motifs, la Cour de cassation pénale

    Rejette le pourvoi.