Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 85 III 38



85 III 38

8. Arrêt du 11 février 1959 dans la cause Kammacher. Regeste

    Art. 93 SchKG. Pfändung des Einkommens aus dem Betrieb einer
Auto-Fahrschule nach Art einer Lohnpfändung. Bemessung des pfändbaren
Teils.

Sachverhalt

    A.- Werner Rickenbach exploite un service d'autoécole, à Genève. Me
Kammacher, avocate audit lieu, a dirigé contre lui une poursuite no 432
750 pour recouvrer, en qualité de cessionnaire, les frais et dépens de deux
litiges qui ont divisé le débiteur d'avec sa cliente, dame Morel. L'Office
des poursuites de Genève a saisi divers objets et notifié le procès-verbal
de l'opération le 17 novembre 1958.

    B.- La créancière a formé à temps une plainte à l'autorité de
surveillance; elle demandait qu'on ordonnât à l'office de saisir, sur
présentation de la comptabilité du débiteur, 300 fr. par mois sur les
gains acquis par celui-ci comme moniteur de conduite automobile et qu'on
le rendît attentif à la peine de l'art. 169 CP. Appelé à donner son avis,
l'office a estimé que ce revenu était insaisissable et paraissait en outre
inférieur au minimum vital L'autorité de surveillance a rejeté la plainte
le 16 janvier 1959. Le gain du débiteur, dit-elle, n'est pas un salaire au
sens large donné à ce terme par la jurisprudence; le nombre des débiteurs
du moniteur est élevé et chaque créance peu importante; en outre, le revenu
est trop aléatoire pour permettre de déterminer la quotité saisissable;
faute d'éléments suffisants et certains d'appréciation, le risque serait
trop grand d'en arriver au système prohibé de la prison pour dette.

    C.- La plaignante recourt au Tribunal fédéral en concluant à
l'annulation de la décision attaquée.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Dans un arrêt Allemann du 5 décembre 1958 (84 IV 155) la Cour de
cassation pénale a jugé qu'on peut ordonner une retenue de salaire en
main d'un artisan indépendant qui exploite un institut de beauté. Par
salaire au sens de l'art. 93 LP, on entend toutes sommes représentant
essentiellement la rétribution d'un travail personnel et notamment la
rétribution d'une activité libérale (RO 48 III 153, 59 III 120, 71 III 176,
77 III 68; FRITZSCHE, Schuldbetreibung, Konkurs und Sanierung I, 179). Sont
ainsi saisissables une somme à soustraire chaque mois des honoraires d'un
avocat, les gains d'un maîtrepaveur et d'un mécanicien sur automobile,
les pourboires d'une sommelière (RO 79 III 157, 82 IV 189). Il n'est
donc pas nécessaire que le revenu du débiteur provienne d'un emploi (ni
même qu'il lui soit juridiquement dû). La loi n'entend pas réserver aux
artisans non inscrits au registre du commerce et dont les prestations sont
payées comptant, de sorte qu'il n'y a pas de créances à saisir, un sort
meilleur qu'à l'employé réduit au seul salaire versé par le patron en leur
permettant de disposer de tous leurs revenus au mépris des droits de leurs
créanciers. Sans doute, les recettes d'un artisan ne constituent-elles
pas un gain net. Ce n'est toutefois pas une raison d'exclure la saisie;
il incombe à l'office, à la suite d'une enquête ou, si c'est nécessaire,
par appréciation (RO 54 III 161), de prendre en considération, outre
les besoins du débiteur et de sa famille, les charges et les aléas de
l'entreprise (RO 69 III 54, 75 III 100 au milieu).

Erwägung 2

    2.- La Chambre des poursuites, qui avait été amenée à donner un
avis favorable à la Cour de cassation, ne peut que se rallier à cette
jurisprudence. Celle-ci s'applique à la présente espèce. Le grand nombre
des débiteurs de Rickenbach et le montant peu élevé de chaque créance
ne changent rien à la situation. Il est pareillement sans importance
que le rapport du moniteur à ses clients soit un contrat de travail ou,
plus justement, un mandat; les revenus de l'artisan sont saisissables;
si l'on ne devait pas faire application de l'art. 93 LP, ils le seraient
simplement de façon illimitée, sous réserve de l'art. 92 LP. La décision
attaquée doit donc être annulée et la cause renvoyée à l'autorité cantonale
pour qu'elle prenne ou fasse prendre, après enquête, une nouvelle décision.

Erwägung 3

    3.- L'art. 93 LP étant applicable, l'autorité cantonale compétente
établira ce qui est indispensable au débiteur et à sa famille; elle tiendra
compte du gain de l'épouse, notamment du produit de la sous-location
qu'elle revendique (210 fr. par mois). Le revenu brut sera diminué des
seules dépenses nécessaires à l'exercice de la profession de moniteur de
conduite automobile et à l'emploi d'un véhicule à cette fin; les frais de
voiture ne seront pas décomptés dans la mesure où celle-ci sert à d'autres
buts; en outre, on ne déduira pas d'amortissement; on peut réserver
la question de savoir si, dans certains cas, une telle déduction serait
légitime; en l'espèce, le débiteur ne prétend rien distraire, à cette fin,
de ses revenus. Quant à la quotité saisissable, on la fixera de manière
différente suivant les circonstances; ce sera un montant déterminé par
mois ou, si les gains varient trop, l'excédent des revenus sur le minimum
vital et les déductions admissibles; dans ce dernier cas, l'office pourra
être amené à veiller à une certaine stabilité du montant à prélever en
s'efforçant de régulariser les fluctuations prévisibles dans l'exercice
de la profession du débiteur.

Entscheid:

    Par ces motifs. la Chambre des poursuites et des faillites:

    Admet le recours, annule la décision attaquée et renvoie la cause à
l'autorité cantonale pour qu'elle procède dans le sens des considérants.