Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 85 III 203



85 III 203

41. Arrêt de la IIe Cour civile du 22 décembre 1959 dans la cause Union
Vaudoise du Crédit contre la Masse en faillite Richoz, Tatti et Cie.
Regeste

    Art. 316 c Abs. 2 SchKG ist nur beim Nachlassvertrag mit
Vermögensabtretung anwendbar; diese Art von Nachlassvertrag muss mindestens
in Aussicht genommen worden sein.

Sachverhalt

    A.- Le 4 septembre 1956, Richoz, Tatti et Cie, Fonderie d'Echallens, à
Echallens, obtint un sursis concordataire de trois mois, prolongé de deux
mois le 15 novembre suivant. Le 16 janvier 1957, la débitrice conclut
avec ses créanciers un concordat-sursis ordinaire homologué le 5 mars
suivant; elle ne tint pas ses engagements et fut déclarée en faillite le
2 juillet 1958.

    Pendant le sursis concordataire, la débitrice continua son
exploitation.

    a) En sa qualité de commissaire au sursis, le préposé aux faillites
de l'arrondissement d'Echallens donna un assentiment général libellé
ainsi dans une lettre adressée à l'Union Vaudoise du Crédit (en abrégé:
l'Union), à Lausanne:

    "Sursis concordataire Richoz, Tatti & Cie, Fonderie d'Echallens.

    Pour faire suite aux entretiens téléphoniques que j'ai eus avec
M. Givel, sous-directeur de votre Etablissement, je vous confirme,
par la présente, que, en qualité de commissaire au sursis concordataire
de la Société susindiquée, je suis d'accord à ce que vous fassiez des
avances de fonds à cette dernière, de façon à lui permettre de continuer
l'exploitation de la fonderie, par cessions de factures, sous votre
entière responsabilité et à vos risques et périls, ceci d'entente avec
M. Paltengi, chargé de la direction de l'usine, lequel devra tenir une
comptabilité spéciale de ces opérations."

    La destinataire ouvrit aussitôt un compte no C 1512 au nom de la
fonderie, qui remit des factures en garantie; celles-ci portent le visa
du commissaire. L'Union récupéra 7913 fr. 05 sur les créances cédées.

    L'un des crédits fut ouvert pour permettre à la débitrice d'exécuter
une commande des maisons Borle, à Lausanne et Louis Brandt Frères SA Omega,
à Bienne. L'Union requit et obtint auparavant, vu le caractère spécial de
la demande, la cession de la commande et l'autorisation ad hoc écrite du
commissaire au sursis. Elle subit, dans ce cas, une perte de 1451 fr. 30.

    b) Par lettre du 10 décembre 1956 signée par le commissaire, la
débitrice sollicita une avance de 5484 fr. 35; elle obtint au total 5529
fr. 35 dont le commissaire signa les reçus; l'Union subit une perte de
2575 fr. 75; on ne lui céda des créances que pour un montant global de
2953 fr. 60.

    Du 13 novembre 1956 au 15 janvier 1957, l'Union avança 6987 fr. 85 à
la débitrice sans exiger la remise de factures, mais avec l'approbation
du commissaire.

    Le 9 janvier 1957 enfin, la débitrice adressa à l'Union, pour règlement
direct, une note de la fiduciaire Experta, à Lausanne, munie du visa du
commissaire. L'Union paya 1852 fr. le 11 janvier 1957.

    c) A la suite de ces opérations, le débiteur devait encore, outre
les frais de recouvrement et des écritures de bouclement du compte par
2811 fr. 95, le solde non réglé des créances mentionnées ci-dessus;
ce solde s'élevait à 22 140 fr. 50.

    B.- Dans la faillite de la Fonderie d'Echallens, l'Union produisit
une créance de 23 691 fr. 80 et demanda qu'elle fût reconnue comme dette
de la masse en vertu de l'art. 316 litt. c al. 2 LP. L'administration de
la masse colloqua la créancière, mais refusa le privilège; elle impartit
un délai de dix jours pour ouvrir action.

    C.- Le 10 octobre 1958, la créancière introduisit en justice une
demande tendant à l'application de l'art. 316 litt. c al. 2 LP à sa
créance. La Masse en faillite de la débitrice a conclu à libération.

    Par jugement du 16 septembre 1959, la Seconde Chambre de la Cour
civile du Tribunal cantonal vaudois a rejeté la demande.

    D.- L'Union vaudoise du crédit recourt en réforme contre ce
jugement. La Masse conclut au rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- La cause relève de la compétence du juge (RO 78 III 174).

    Aux termes de l'art. 316 litt. c LP, le concordat par abandon
d'actif s'applique à toutes les dettes nées avant la publication du
sursis concordataire, de même qu'à celles qui sont nées depuis lors et
jusqu'à l'homologation définitive du concordat sans l'assentiment du
commissaire; les dettes contractées pendant le sursis concordataire,
avec l'assentiment du commissaire, constituent des dettes de la masse,
même dans une faillite subséquente.

    En l'espèce, il faut décider si la disposition légale citée fait
aussi règle dans le concordat ordinaire. La Chambre des poursuites et
des faillites du Tribunal fédéral l'a admis (RO 78 III 173); elle n'a
toutefois pas motivé son opinion; la solution de ce point de droit n'était
d'ailleurs pas nécessaire pour résoudre le cas qui lui était soumis. La
masse intimée, au contraire, soutient que l'art. 316 litt. c al. 2 LP
s'applique dans le seul cas du concordat par abandon d'actif. La question,
tranchée brièvement, mérite d'autant plus un nouvel examen que des arrêts
cantonaux ont exprimé un avis différent de celui du Tribunal fédéral
(cf. décisions du 14 décembre 1950 prise par le Bezirksgericht Kulm,
Blätter für Schuldbetreibung und Konkurs, 1954, p. 60, et du 13 janvier
1955 prise par l'Obergericht Luzern, RSJ 51, p. 90).

Erwägung 2

    2.- Le texte et l'interprétation systématique de la loi ne laissent
guère place au doute. L'al. 1 par le expressément du concordat par
abandon d'actif et se trouve dans le chapitre du titre onzième qui régit
spécialement cette institution dans la mesure où elle diffère du concordat
ordinaire (cf. art. 316 litt. t LP). Dérogeant au droit de la faillite
(art. 262 LP; cf. RO 48 III 225 et 78 III 174 in fine), cette règle
ne doit recevoir une application généralisée que si celle-ci s'impose
absolument. On ne saurait en tout cas songer d'emblée à une méprise
du législateur lors de la revision partielle du 28 septembre 1949,
car les problèmes du concordat ont été examinés dans leur ensemble,
la revision n'étant pas limitée au seul concordat par abandon d'actif
(cf. FF 1948 I 1210 ss.). Le texte même de la disposition exclut d'ailleurs
l'inadvertance. Il n'existe en effet de masse que dans le concordat par
abandon d'actif.

Erwägung 3

    3.- La genèse de la loi n'impose pas une solution différente. Avant
la revision de 1949, la jurisprudence s'était fixé dans le sens qu'une
dette contractée pendant le sursis concordataire par le commissaire ou avec
son assentiment ne crée pas d'obligations à la charge de la masse dans un
concordat par abandon d'actif ou dans la faillite subséquente (RO 48 III
224; 60 III 173). En revanche, l'ordonnance du Tribunal fédéral concernant
la procédure de concordat pour les banques et les caisses d'épargne des
11 avril 1935/26 février 1936 (RS X p. 383 ss.), rendue en application
de l'art. 54 al. 5 du règlement d'exécution du 26 février 1935 pour la
loi fédérale du 8 novembre 1934, statua en son art. 22 al. 2 que les
dettes contractées valablement pendant la durée du sursis sont réputées
dettes de la masse en faillite même dans le cas du concordat-sursis
et du concordat-dividendes (cf. art. 25 al. 2 pour le concordat par
abandon d'actif). HAAB, dans la Festgabe für Fritz Götzinger (Bâle
1935, p. 128 ss., spécialement p. 138), se prononça pour l'application
de cette disposition en dehors du domaine de l'ordonnance. Mais le 24
janvier 1941, le Conseil fédéral, pour atténuer à titre temporaire le
régime de l'exécution forcée (ROLF 1941 p. 79; art. 51), se borna à
déclarer applicables par analogie à tout concordat par abandon d'actif
les articles correspondants de l'ordonnance précitée du Tribunal fédéral
(dont l'art. 25 al. 2).

    Ces faits démontrent que le législateur de 1949, connaissant la
jurisprudence du Tribunal fédéral, l'exception prévue en 1935 et le
voeu de la doctrine, s'est néanmoins tenu, comme en 1941 et bien qu'il
examinât à nouveau les règles du concordat dans leur ensemble, à une
application limitée, dans le droit ordinaire, des principes valables en
matière de concordat des banques et des caisses d'épargne. Le Message du
Conseil fédéral du 16 mars 1948 précise d'ailleurs que les dispositions
de l'ordonnance du Tribunal fédéral ont été "adaptées" à la portée plus
générale qui leur était conférée (FF 1948 I p. 1213).

Erwägung 4

    4.- L'art. 316 litt. c al. 2 LP, interprété restrictivement, s'explique
par de bonnes raisons tirées de la nature et des effets juridiques spéciaux
du concordat par abandon d'actif.

    Les art. 316 litt. a ss. LP sont l'aboutissement d'une évolution.
Commencée par la jurisprudence du Tribunal fédéral, elle repose notamment
sur les considérations suivantes. Lorsque le débiteur en sursis
concordataire abandonne ses biens, ceux-ci forment une masse active
analogue à la masse en faillite; sa liquidation doit, en règle générale,
s'opérer par analogie avec les principes régissant ce mode d'exécution
forcée (RO 85 I 190), dont le concordat par abandon d'actif est une forme
atténuée. Dans les deux cas, le patrimoine du débiteur (éventuellement une
partie seulement) est mis à la disposition de tous ses créanciers. Dès que
le concordat est envisagé ou la faillite déclarée, l'activité - restreinte
- du débiteur et du commissaire, respectivement des organes de la masse,
ne tend désormais, en principe, qu'à réaliser le maximum de biens. A cette
fin, il est parfois nécessaire, dans l'intérêt de tous les créanciers, de
maintenir, dans la mesure indiquée par les circonstances, l'exploitation
du débiteur et d'engager certaines dépenses (cf. en cas de faillite:
RO 57 III 88 et 58 III 6). L'aide nécessaire ne sera toutefois accordée
que si le risque de perte est diminué. Or, dans le cas du concordat par
abandon d'actif, le moyen prévu à l'art. 316 litt. c al. 2 LP s'avère
souvent le seul praticable.

    Le débiteur, en effet, se voit privé de la disposition de ses biens
dans la mesure fixée par la disposition générale de l'art. 298 al. 1
LP et, s'il contrevient aux injonctions du commissaire, l'autorité
compétente peut, sur le rapport de celui-ci, révoquer le sursis. A ces
restrictions s'ajoutent les effets particuliers du concordat par abandon
d'actif. Le créancier qui traite sans l'assentiment du commissaire verra
sa créance soumise au concordat (art. 316 litt. c al. 1 LP) au lieu d'en
pouvoir attendre la pleine et régulière exécution. Il semble, en outre,
que l'art. 204 LP, conformément à l'arrêt RO 56 III 91 ss., s'applique
en principe aussi - par analogie - sous l'empire du texte issu de la
revision de 1949 (Blätter für Schuldbetreibung und Konkurs, 1954 p. 60 ss.,
consid. 1 et 4; contra: SCHODER, Nachlassvertrag mit Vermögensabtretung,
ZbJV 1952 p. 419); l'art. 316 litt. d LP peut s'entendre en effet en ce
sens que le débiteur perd son droit de disposition dès l'homologation
définitive du concordat par abandon d'actif, mais qu'il ne peut l'exercer
auparavant qu'avec le consentement du commissaire. Quoi qu'il en soit de
cette dernière question, il reste que le débiteur est considérablement
entravé dans ses activités, qu'il ne peut guère constituer des sûretés
réelles et encore moins obtenir des sûretés personnelles, vu l'état de
son crédit. Aussi bien la loi recourt-elle à l'effet du consentement
du commissaire prévu à l'art. 316 litt. c al. 2 LP. Cela s'explique
naturellement; le rôle du commissaire, orienté vers le succès de la
liquidation, est si essentiel pour l'ensemble des créanciers (RO 63 III 91)
qu'il se justifie de traiter les dettes contractées avec son assentiment
différemment des autres obligations du débiteur nées pendant le sursis
concordataire; celles-là seules ont droit à un privilège qui tendent à
assurer la réalisation la plus favorable; or c'est le devoir précisément
du commissaire d'y pourvoir dans l'intérêt de tous les créanciers;
son consentement garantira donc le privilège aux seules créances qui
le méritent.

    Dans un concordat ordinaire, en revanche, la situation est différente
et l'argumentation de l'arrêt RO 48 III 226 consid. 2 conserve sa valeur.
Certes, la jurisprudence et la doctrine ne sont pas unanimes sur la
question de savoir à quel moment les créances contre le débiteur doivent
avoir pris naissance pour être soumises au concordat (art. 311 LP). Est-ce
l'homologation du concordat (BRAND, Fiches juridiques suisses, no 958
p. 7; implicite: RO 64 II 271; Semaine judiciaire, 48 p. 175 = SJZ 22 p.
361; voir aussi la première opinion de JAEGER, édition française III
p. 121 no 2, au début)? N'est-ce pas plutôt l'expiration du délai de
production (art. 300 LP; FAVRE, Cours de droit des poursuites, p. 367;
JAEGER-DÄNIKER, p. 543; SJZ 32 p. 202, no 144), la publication du sursis
(art. 296 LP; cf. RO 84 III 107; JAEGER-DÄNIKER, p. 542; ZbJV 50 p.
326; cf. art. 22 OTF du 11 avril 1935; FRITZSCHE, II p. 324/325, avec
une réserve tirée d'un rapprochement erroné avec l'art. 316 litt. c. LP)
ou l'octroi du sursis (BLUMENSTEIN, p. 920; cf. ZbJV 1936, vol. 72 p. 359
in fine)? Cette dernière solution part d'une application analogique des
principes de la faillite, selon lesquels la réalisation se fait au profit
des créances existant au moment de la déclaration de faillite; elle paraît
s'imposer. La précédente peut s'appuyer sur l'art. 316 litt. c al. 1 LP,
aux termes duquel le concordat par abandon d'actif s'applique à toutes les
dettes nées avant la publication du sursis concordataire, de même qu'à
celles qui sont nées depuis lors et jusqu'à l'homologation définitive
du concordat sans l'assentiment du commissaire; la liaison laisserait
entendre que les secondes créances mentionnées s'ajoutent à celles que
comprend un concordat ordinaire (cf. art. 316 litt. t LP). Quoi qu'il
en soit, le choix entre les trois dernières solutions rappelées n'est
pas important en l'espèce. Il suffit de s'en tenir à leur idée commune:
le moment décisif se place au début de la procédure concordataire. Il suit
de là que, dans un concordat ordinaire, le créancier qui vient au secours
du débiteur possède une prétention qui n'est pas soumise au concordat et
devra être désintéressée complètement à l'échéance prévue (elle sera en
revanche comprise dans la masse passive d'une faillite subséquente). Ce
n'est pas là un espoir vain. Le débiteur continue à disposer de ses biens,
il peut se relever et faire fructifier son patrimoine; il peut changer
d'activité et profiter au maximum de l'aide qui lui a été apportée pour
mener à bien le concordat. Ces raisons expliquent que la législateur
n'ait pas cru nécessaire d'accorder au créancier, dans le cas du concordat
ordinaire, le privilège de l'art. 316 litt. c al. 2 LP.

    Certes, les créanciers songeront à prétendre qu'ils ne savent pas
d'emblée vers quelle forme de concordat le débiteur s'oriente. Cela est en
partie inexact, sauf défaillance des organes concordataires. Le Tribunal
fédéral a décidé, en effet, que la publication du sursis doit indiquer,
le cas échéant, que le débiteur tend à un concordat par abandon d'actif
(RO 56 III 91 ss.). Le résultat de la procédure concordataire peut, il est
vrai, différer de celui qu'escomptaient les créanciers et le débiteur. Si
le concordat par abandon d'actif envisagé n'est pas homologué, ce fait
pourrait peut-être enlever à la prétention le privilège de dette de la
masse. Cet inconvénient, non négligeable, ne peut toutefois faire échec,
de lege lata, au sens clair de la loi.

Erwägung 5

    5.- La créance de la recourante, née durant le sursis ayant abouti à
l'homologation d'un concordat ordinaire, ne constitue donc pas une dette
de la masse. L'art. 316 litt. c al. 2 LP n'est pas applicable. Le recours
doit dès lors être rejeté, mais pour cette raison seulement.

Entscheid:

               Par ces motifs, le Tribunal fédéral

    Rejette le recours et confirme le jugement attaqué.