Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 84 IV 89



84 IV 89

27. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Il septembre
1958 dans la cause Gübler. Regeste

    Betrug. Art. 148 StGB setzt nicht voraus, dass der dem Irrenden
zugefügte Schaden der vom Täter beabsichtigten Bereicherung entspricht
(Grundsatz der "Stoffgleichheit").

Sachverhalt

    A.- Le 18 novembre 1957, Hans Gübler, voyageur de commerce, offrit
des produits de nettoyage à dame Hotz, qui avait repris quelques semaines
auparavant l'exploitation de l'hôtel de France, au Locle. Se présentant
comme membre d'une société de skieurs qui logeaient régulièrement en
hiver dans cet établissement, il réussit à obtenir une commande de 350 fr.

    Le 25 novembre suivant, Gübler s'engagea à faire annuler partiellement
le contrat. Il promit en outre une parure, à titre de cadeau, et loua
toutes les chambres de l'hôtel pour le samedi suivant. Il obtint ainsi
une seconde commande de 280 fr. Confiante, l'hôtelière refusa de louer
les chambres que le voyageur avait réservées. Les promesses du recourant
se révélèrent fallacieuses, et les clients annoncés, imaginaires. Dame
Hotz apprit en outre que l'hôtel n'avait jamais hébergé de club de ski.

    B.- Le 17 avril 1958, le Tribunal de police du Locle infligea à Gübler,
en application de l'art. 148 CP, un mois d'emprisonnement. Le condamné
adressa à la Cour de cassation pénale neuchâteloise un recours qu'elle
rejeta le 21 mai 1958.

    C.- Gübler s'est pourvu en nullité; il conteste s'être rendu coupable
d'escroquerie.

Auszug aus den Erwägungen:

                       Extrait des motifs:

    Abstraction faite des produits de nettoyage, il est certain que
l'hôtelière n'a pas reçu les prestations promises le 25 novembre et
que, partant, la tromperie du recourant lui a été préjudiciable. Elle
n'a pas bénéficié d'une annulation partielle de la première commande,
ni obtenu le cadeau promis, ni encaissé le prix des chambres réservées;
ayant refusé des clients dans l'attente des hôtes annoncés par Gübler, elle
n'a pu compenser sa perte de loyer. Pour obtenir les prestations promises
(outre les produits de nettoyage), elle a disposé de son patrimoine, non
seulement en s'engageant à payer la marchandise à livrer, mais aussi en
réservant des locaux qu'elle exploite.

    Selon certains auteurs suisses, le préjudice causé à la victime doit
correspondre à l'enrichissement recherché par l'escroc (principe de la
"Stoffgleichheit"): l'un veut gagner ce que l'autre perd; enrichissement
et dommage seraient de même nature, ou l'envers l'un de l'autre (HAFTER,
Schweiz. Strafrecht, Bes. Teil p. 273; LOGOZ, Commentaire du code
pénal suisse, partie spéc. I p. 159). La jurisprudence et la doctrine
allemandes se prononcent dans le même sens (BGHSt. 6 p. 116; RGSt. 64
p. 435, 75 p. 379; SCHÖNKE/SCHRÖDER, Commentaire 8e éd. p. 937 litt. b;
Leipz. Komm. 6e et 7e éd. p. 349; FRANK, Anm. VII 3 ad § 263 RStGB).
La Cour a réservé la question dans l'arrêt Theiler du 18 octobre 1946,
cons. 3. La Chambre d'accusation, dans l'arrêt Untersuchungsrichteramt
St. Gallen et Helwig, du 1er mars 1950 (cons. 2 in fine), a appliqué le
principe sans en entreprendre la démonstration.

    Dans le cas particulier, l'annulation partielle de la première
commande aurait exercé une influence sur le montant des commissions
de Gübler; dès lors, le refus de procéder à cette annulation a causé
à la victime une perte qui est le pendant d'une partie du profit visé
par l'escroc. Toutefois, en ne recevant ni le cadeau promis ni le prix
des chambres réservées, dame Hotz a subi un préjudice sans rapport avec
l'enrichissement escompté par Gübler. Si l'on s'en tenait au principe de
la "Stoffgleichheit", elle n'aurait donc été lésée que dans la mesure
où le refus d'annuler partiellement la première commande a pu enrichir
le recourant.

    Ce principe est toutefois étranger au droit suisse. L'art. 148 CP
requiert un lien de causalité entre le comportement de l'escroc et le
préjudice de la victime; on ne saurait, par interprétation, déceler
une condition supplémentaire. Il n'y a là rien qui choque. L'escroc ne
paraît pas moins fautif lorsque le dommage qu'il cause ne correspond pas
au profit qu'il recherche; or, l'on ne voit guère quelle disposition du
droit pénal réprimerait ses mensonges astucieux si, comme en l'espèce,
il ne paraît pas avoir agi avec la méchanceté requise par l'art. 149 CP.

    Peu importe, dès lors, que le dommage subi par dame Hotz ne corresponde
pas, pour la plus grande part, à l'enrichissement désiré par le recourant.