Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 84 IV 158



84 IV 158

46. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 21 novembre
1958 dans la cause Maurer contre Ministère public du canton de Neuchâtel.
Regeste

    Art. 170 StGB. Nach dieser Vorschrift ist auch strafbar, wer, um eine
Nachlassstundung zu erwirken, gegenüber seinen Gläubigern, dem Sachwalter
oder der Nachlassbehörde seine Vermögenslage zu günstig darstellt.

Sachverhalt

    A.- Depuis 1946, Charles Maurer exploitait un commerce de fourrages,
engrais, paille et denrées coloniales à La Chaux-de-Fonds. Il était
inscrit au registre du commerce. Le 13 août 1956, il forma une demande
de concordat; elle fut prise en considération le 16 août. Le bilan
qu'il adressa à cette fin à l'autorité compétente se révéla inexact,
de même que les indications figurant dans une circulaire aux créanciers,
et les renseignements oraux qu'il donna; au lieu du bénéfice allégué (25
418 fr. 45), l'expertise de la comptabilité du débiteur fit ressortir un
solde passif de 121 710 fr. 38 et la faillite, ordonnée le 25 octobre
1956, révéla une perte de 199 897 fr. 40. Selon Maurer, l'omission -
volontaire - d'éléments passifs était compensée par la sous-évaluation
de certains actifs; le requérant espérait, pendant le sursis, réaliser
ses biens et désintéresser complètement ses créanciers.

    B.- Le Tribunal correctionnel de La Chaux-de-Fonds, par jugement du
12 juin 1958, a condamné Maurer à trois mois d'emprisonnement avec sursis
pendant trois ans. Considérant que l'infraction prévue à l'art. 170 CP
est un délit de mise en danger contre l'administration de la justice
au cours de la procédure de concordat, il constata que les éléments de
l'infraction étaient réunis, bien que le débiteur ait présenté dans sa
requête une situation pécuniaire supérieure à la réalité et n'ait ainsi
pas tenté de payer à ses créanciers moins qu'il ne pouvait.

    Maurer recourut. La Cour de cassation pénale neuchâteloise rejeta
son pourvoi le 17 septembre 1958. Elle s'en tint à l'interprétation de
la loi donnée par les premiers juges.

    C.- Maurer se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Il reprend
le moyen invoqué devant la Cour cantonale; l'art. 170 CP ne réprimerait
pas l'indication, dans un bilan, d'une situation pécuniaire supérieure
à la réalité.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Le débiteur qui, pour obtenir un sursis concordataire ou
l'homologation d'un concordat judiciaire, aura, notamment au moyen
d'une comptabilité inexacte ou d'un faux bilan, induit en erreur sur
sa situation pécuniaire ses créanciers, le commissaire au concordat ou
l'autorité compétente est puni de l'emprisonnement (art. 170 CP). La
Cour doit dégager le sens de cette disposition et rechercher si elle ne
réprime, comme le prétend le recourant, que le fait, pour qui requiert un
sursis concordataire, de présenter aux intéressés une situation pécuniaire
inférieure à la réalité.

Erwägung 2

    2.- On ne peut saisir, dans les travaux préparatoires, l'intention
claire et certaine du législateur, encore que certaines opinions émises
inclinent à suivre le recourant dans ses développements. L'infraction
est prévue pour la première fois dans l'avant-projet de 1908 (art. 103).
L'exposé des motifs la caractérise comme une escroquerie en vue d'obtenir
des créanciers "un rabais déterminé", l'étendue du sacrifice demandé
dépendant de la situation pécuniaire du débiteur, telle qu'il l'expose
(art. 293, 294, 301 LP). ZÜRCHER précisa, devant la IIe Commission
d'experts, les moyens prohibés (die Verheimlichung von Aktiven und
Vortäuschung von Verbindlichkeiten) qui tendent à représenter la
situation du débiteur pire qu'elle n'est, et à causer un préjudice
aux créanciers. BOLLI déposa un projet de rédaction qui citait divers
exemples d'amoindrissement de la fortune; ce projet contenait toutefois une
clause générale, qui ne comportait pas de restriction mais incriminait
tout renseignement inexact (cf. IIe Comm. exp. vol. II p. 416; IV
p. 135). Rédigée comme délit de mise en danger dans les avant-projets
de 1915 (art. 151) et 1916 (art. 153), la disposition fut présentée
aux Chambres sans allusion à la tendance restrictive qui paraît se
dégager des travaux antérieurs (projet du Conseil fédéral, art. 147);
elle fut adoptée sans que personne en limitât l'application dans le
sens désiré par le recourant (Bull. stén. CN 1929 p. 113 à 116; CE 1931
p. 520). Il n'en reste pas moins que l'on paraît avoir songé avant tout,
au cours des travaux préparatoires, au cas où le débiteur qui requiert
un sursis concordataire se propose de faire admettre qu'il se trouve
dans une situation plus précaire qu'elle ne l'est en réalité, et veut
ainsi obtenir de ses créanciers un sacrifice injustifié. L'intention
restrictive, cependant, n'est pas certaine; on eût pu aisément rédiger
le texte de façon à exclure tout doute; on ne l'a pas fait; il faut donc
s'en remettre à l'interprétation objective.

Erwägung 3

    3.- A s'en tenir au texte de la loi, il ne fait aucun doute que le
législateur n'a nullement restreint le champ d'application de l'art. 170
CP; il réprime le fait d'induire en erreur sans limiter les cas d'erreur.

    La logique interne de la loi, la considération du bien protégé et
le but poursuivi par le législateur confirment cette interprétation
littérale. Certes, l'art. 170 se trouve dans le titre deuxième du
code pénal, qui réprime les infractions contre le patrimoine. Plusieurs
dispositions de ce titre exigent un préjudice causé aux tiers, spécialement
aux créanciers (art. 163, 164, 167, 169, par ex.). D'autres, cependant, en
font abstraction (art. 152, 162, 166, 168, 170). C'est à dessein qu'elles
diffèrent des premières. Le délit de l'art. 170 CP, bien que très proche
de l'escroquerie, se révèle avant tout comme une infraction aux règles
à suivre dans la poursuite pour dettes et la faillite (subdivision 4 du
titre; GERMANN, Das Verbrechen, p. 302; HAFTER, Part. spéc. I p. 366 et
370; HASLER, Die Erschleichung eines Nachlassvertrages, thèse Zurich,
1948, p. 60 ss.; THORMANN/OVERBECK, Commentaire, ad art. 170). S'il en
résulte en général un désavantage pour les créanciers, c'est néanmoins la
tromperie qui est visée en premier lieu, c'est-à-dire une faute contre
la clarté et la sincérité qui doivent dominer la procédure du concordat
judiciaire. L'art. 170 CP est peut-être resté lettre morte parce qu'on a eu
trop tendance à n'y voir qu'une escroquerie (art. 148 CP), sans distinguer
d'autres comportements du débiteur qu'il doit aussi réprimer. D'ailleurs,
l'inexactitude du bilan est parfois sanctionnée sans égard au préjudice
qu'elle peut avoir provoqué (art. 166 CP). De même le failli et le
débiteur objet d'une saisie, d'un séquestre ou d'une prise d'inventaire
sont punissables, s'ils renseignent l'autorité de manière inexacte,
indépendamment de tout préjudice (art. 323 ch. 2 à 4 CP).

Erwägung 4

    4.- Il serait d'ailleurs erroné de croire que l'exposé d'une situation
pécuniaire supérieure à la réalité n'offre aucun désavantage et ne peut
causer aucun détriment aux créanciers; au contraire, il serait en général
punissable même si la loi exigeait une mise en danger ou une lésion des
intérêts des créanciers (HAFTER, dans Revue pénale suisse 1936, p. 340). La
procédure concordataire entraîne des retards dans le paiement des dettes et
des frais importants. Les poursuites sont, en règle générale, suspendues
dès l'octroi du sursis (art. 297 LP). L'homologation du concordat fait
tomber les saisies dont l'objet n'a pas été réalisé avant le sursis
concordataire (art. 312 LP). Le débiteur, pendant le répit qu'il obtient,
peut commettre des actes de fraude; une dépréciation des actifs et une
augmentation du passif sont toujours possibles. Les actions révocatoires
tendantes à la nullité d'actes passés dans un certain délai risquent de
perdre toute chance de succès, la saisie ou l'ouverture de la faillite
ayant été retardée.

    Ces désavantages, indiqués à titre d'exemples, sont assez graves pour
que la révocation du sursis ou du concordat (art. 298 al. 2, 315 et 316 LP)
ne paraisse pas la sanction suffisante de la mauvaise foi du débiteur. La
révocation, en effet, se borne à le placer à nouveau dans l'état où il
se trouvait avant la requête du sursis concordataire, c'est-à-dire dans
le cours normal des choses; elle lui retire simplement une faveur.

    Il suit de là que, bien souvent, le sursis ne serait pas accordé ni
un concordat accepté et homologué en faveur d'un débiteur qui a trompé -
fût-ce en surestimant sa situation pécuniaire - ses créanciers, l'autorité
compétente ou le commissaire au concordat.