Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 84 IV 111



84 IV 111

33. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 11 septembre 1958 dans la
cause Steiner. Regeste

    Art. 27 MFG. Vorsichtspflicht des nicht vortrittsberechtigten Führers
an einer unübersichtlichen Einmündung. Fall eines Führers, der nur den
von rechts kommenden Fahrzeugen die Durchfahrt frei zu geben hat (Art. 27
Abs. 1 MFG). Bedeutung des Umstandes, dass der Vortrittsberechtigte
vorschriftswidrig fährt.

Sachverhalt

    A.- Le chemin de la Colline, fortement incliné, débouche à angle
droit sur le chemin de Marcolet, large de 4 m 75, à Crissier. Steiner,
qui le descendait le 14 juillet 1957 au volant d'une voiture VW, s'arrêta
avant de pénétrer sur le chemin de Marcolet. Constatant que des arbustes
supprimaient la visibilité à droite, il avança lentement. Entendant un
véhicule arriver sur sa droite, il stoppa immédiatement; l'avant de sa
voiture se trouvait à 43 cm du milieu du chemin de Marcolet. L'autre
véhicule, une voiture "Vauxhall", pilotée par Becker, longeait ce chemin
à la vitesse de 50 km/h; il occupait le milieu de la chaussée, tout en
étant plus près du bord gauche que du bord droit. Quand il aperçut la VW,
Becker freina et donna un coup de volant à droite, mais ne put éviter
une collision.

    B.- Estimant que Steiner aurait dû s'arrêter à l'endroit d'où il
pouvait voir arriver un véhicule prioritaire et non 20 ou 30 cm plus loin,
le Tribunal de simple police du district de Lausanne lui a infligé une
amende de 20 fr. pour contravention à l'art. 27 al. 1 LA.

    La Cour de cassation vaudoise a confirmé ce jugement le 9 juin 1958.

    C.- Le condamné se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral, en
concluant à libération.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- La Cour cantonale rappelle que le conducteur tenu de céder le
passage en vertu de l'art. 27 al. 1 LA n'est pas autorisé à s'avancer
jusqu'au milieu de la route empruntée par le véhicule prioritaire (RO 66
I 122). Le recourant n'a pas méconnu ce principe, puisqu'il s'est arrêté
à 43 cm de l'axe médian du chemin de Marcolet. Cette circonstance n'exclut
cependant pas nécessairement une contravention à l'art. 27 LA.

    La plus grande prudence s'impose en effet à l'automobiliste qui, sans
bénéficier de la priorité, débouche sur une route masquée. Il est tenu d'y
pénétrer en quelque sorte en tâtonnant (RO 66 I 122). La jurisprudence a
précisé qu'il doit commencer par n'y avancer que de façon à signaler sa
présence et s'arrêter; après quelques secondes, son véhicule ayant été vu,
il reprendra lentement sa marche jusqu'au point où l'artère à priorité
entre dans son champ visuel; il sera alors en mesure d'apprécier s'il
peut achever la manoeuvre ou s'il doit attendre que d'autres véhicules
aient passé (arrêts Huser du 1er mars 1951 consid. 4 b, Laube du 11
septembre 1953 consid. 3; RO 83 IV 89). Steiner ne s'est pas conformé
à cette méthode. Certes, il s'est arrêté à la bifurcation, mais cette
halte était inutile, car sa voiture n'était alors pas visible pour les
usagers circulant sur le chemin de Marcolet. Lui-même ne prétend pas le
contraire. Ensuite, tandis qu'il n'aurait dû s'avancer que jusqu'au point
d'où il pouvait observer le tronçon ouest du chemin prénommé, il a dépassé
cette limite, selon une constatation souveraine (art. 277bis al. 1 PPF),
de 20 ou 30 cm.

Erwägung 2

    2.- Il importe toutefois de relever que les trois derniers arrêts
cités concernent des cas où le conducteur non prioritaire devait céder
le passage aussi bien à gauche qu'à droite, soit qu'il débouchât sur
une route principale au sens de l'art. 27 al. 2 LA, soit qu'il sortît
d'un chemin privé. Steiner était seulement tenu de laisser passer les
véhicules venant de droite (art. 27 al. 1 LA). Cette différence ne paraît
pas négligeable. Le maximum de précautions s'impose, lorsque la visibilité
est mauvaise, à l'automobiliste obligé de respecter également la priorité
des véhicules venant de gauche. Ces précautions sont celles que prescrivent
ces trois arrêts. On peut se demander s'il n'est pas excessif de les
exiger aussi du conducteur qui doit seulement accorder le passage aux
véhicules venant de droite. Sa pénétration sur la route où il débouche
crée un moindre danger - un danger moins imminent -, car il est en droit
de compter que les véhicules pouvant surgir de gauche s'arrêteront au
besoin pour le laisser passer. Si, conformément à l'arrêt RO 66 I 122, on
ne lui permet pas de s'avancer d'emblée jusqu'au milieu de la chaussée,
devrait-on cependant lui reconnaître le droit de traverser la première
moitié de la route, moitié sur laquelle des véhicules venant de droite
ne se trouvent pas normalement (art. 26 al. 1 et 3 LA), avec moins de
timidité que s'il devait en outre céder le pas à des véhicules venant
de gauche? Ne peut-on se départir d'une certaine rigueur au moins dans
le cas où la chaussée n'est pas particulièrement étroite? C'est cette
considération qui a amené la Cour à juger, dans l'affaire Bär, qu'à une
croisée ou à un débouché masqués, le conducteur peut, en règle générale,
s'avancer prudemment (sich hervorwagen), au-delà de l'objet masquant la
vue, aussi loin qu'il est possible sans mettre en danger un prioritaire
roulant correctement à droite (RO 80 IV 200 consid. 2).

    D'après les constatations des juridictions cantonales, la voiture
du recourant a laissé sur le chemin de Marcolet, à vrai dire étroit, un
espace libre de 2 m 80. Si Becker avait correctement tenu sa droite, il
aurait pu passer aisément. S'ensuit-il, vu l'arrêt Bär, que le recourant
doive être libéré?

Erwägung 3

    3.- Une réponse affirmative ne se justifie pas. Outre que le principe
énoncé par l'arrêt Bär n'est pas absolu, il est en effet de jurisprudence
constante que le conducteur astreint à céder le pas doit compter avec
la vitesse effective du titulaire de la priorité, laquelle n'est pas
supprimée par une allure exagérée (RO 79 II 214 et les références;
82 II 538). Il faut admettre que la priorité ne dépend pas non plus de
la position du véhicule prioritaire par rapport aux côtés de la route;
elle subsiste même si, au mépris de la règle légale (art. 26 al. 1 LA),
il roule à gauche. La faute de circulation commise par le prioritaire
ne le prive pas de son droit; il en est tenu compte dans l'appréciation
de son propre cas (RO 79 II 214). La Cour de cassation belge s'est
prononcée dans ce sens. Elle a jugé que la disposition légale relative à
la priorité de droite est d'une portée générale et ne subordonne pas le
droit qu'elle consacre à une quelconque condition touchant la marche du
véhicule jouissant de la priorité; il suit de là que la priorité s'étend
à toute la largeur de la voie que l'usager parcourt et que le débiteur
de la priorité ne doit poursuivre sa marche que s'il peut le faire sans
risque d'accident eu égard à la position réelle de l'autre conducteur
(arrêt cité et approuvé par VAN ROYE, Le Code de la circulation, p. 391).

    Cette règle claire et simple mérite la préférence. Elle oblige le
conducteur qui débouche sur une artère masquée à prendre les précautions
indiquées par les arrêts Huser, Laube et RO 83 IV 89, même s'il doit
seulement céder le passage aux véhicules venant de droite; il doit
s'attendre, notamment quand la route n'est pas très large, qu'ils roulent
au milieu, voire à gauche de la chaussée.

Erwägung 4

    4.- Le recourant a donc violé la priorité de Becker; cette violation
procède d'une négligence. Il aurait dû stopper 20 à 30 cm plus haut,
car, de cet endroit, il aurait déjà été en mesure d'inspecter le chemin
de Marcolet. Cette manoeuvre ne présentait aucune difficulté technique.