Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 84 II 550



84 II 550

75. Arrêt de la Ire Cour civile du 26 septembre 1958 dans la cause Fabrique
de boîtes "La Centrale" SA contre Brandt. Regeste

    Aktiengesellschaft.

    1.  Die Generalversammlung kann keine Tantièmen zusprechen, wenn die
Ausrichtung solcher in den Statuten nicht vorgesehen ist. Art. 627 Ziff. 2,
677 und 698 Abs. 2 Ziff. 3 OR (Erw. 1).

    2.  Statutenbestimmung, wonach der Verwaltungsrat für seine Tätigkeit
zu entschädigen ist. Kriterien für die Entscheidung darüber, ob die
zugesprochene Entschädigung eine verschleierte Tantième darstelle. Einfluss
der finanziellen Lage der Gesellschaft (Erw. 2).

    3.  Art. 706 OR gibt dem Richter die Befugnis, einen
Generalversammlungsbeschluss nur soweit als nichtig zu erklären, als er
gegen das Gesetz oder die Statuten verstösst (Erw. 2 i.f.).

Sachverhalt

                      Résumé des faits:

    A.- Les statuts de la Fabrique de boîtes "La Centrale" SA (ci-après:
la société) ne prévoient point que les administrateurs participent au
bénéfice net. En revanche, ils disposent à leur art. 14 al. 3:

    "Le Conseil d'administration doit être rétribué pour son activité;
l'indemnité sera fixée par l'assemblée générale."

    B.- (Rappel de l'arrêt publié dans RO 82 II 148, rendu le 13 février
1956 dans une cause opposant les mêmes parties et relatif à l'exercice
1953/54.)

    C.- Le 28 septembre 1955, l'assemblée générale des actionnaires
a décidé, pour l'exercice 1954/55, de répartir un dividende de 15% et
d'allouer aux administrateurs une rétribution de 70 000 fr.

    Un actionnaire minoritaire, Louis César Brandt, a intenté action
à la société devant la Cour d'appel du canton de Berne, en concluant
principalement à l'annulation de la décision du 28 septembre 1955 et à
la fixation de la rétribution des administrateurs à 35 000 fr. La société
a proposé le rejet de l'action.

    Après avoir ordonné une expertise, la Cour cantonale a, par jugement du
12 mars 1958, annulé la décision attaquée dans la mesure où elle allouait
au conseil d'administration une rétribution supérieure à 50 000 fr. Ce
jugement est, en bref, motivé comme il suit:

    De par sa nature, le montant de 70 000 fr. constitue une rétribution
allouée en vertu de l'art. 14 des statuts. Il n'est donc admissible que
s'il est justifié par l'activité des administrateurs. Certes, ceux-ci
sont à même, par leur expérience et leur situation dans l'industrie,
de rendre des services importants à la société. Mais leur activité n'a
pas été plus intense durant l'exercice 1954/55 qu'au cours de l'année
précédente. Si leur rétribution a été augmentée, c'est uniquement parce
que le bénéfice d'exploitation a passé de 434 586 fr. à 620 000 fr. en
chiffre rond. Du reste, cette augmentation est due partiellement à la
revalorisation dans le bilan d'un stock de marchandises. Or, si l'on tient
compte des réserves ouvertes et latentes, le rendement du capital propre
n'est que de 3 ou 4%. Aussi les experts ont-ils déclaré que le montant
de 70 000 fr. était extraordinairement élevé et que dans aucune société,
à leur connaissance, la rétribution des administrateurs ne représentait une
fraction aussi importante de la somme des dividendes. Dans ces conditions,
cette rétribution ne peut être justifiée, en tant qu'elle dépasse 50 000
fr., par des considérations commerciales raisonnables et elle constitue,
dans cette mesure, des tantièmes déguisés.

    D.- Contre ce jugement, la société recourt en réforme au Tribunal
fédéral, en reprenant ses conclusions libératoires.

    L'intimé propose le rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- On peut se demander en premier lieu si, outre la rétribution
fondée sur l'art. 14 al. 3 des statuts, l'assemblée générale n'était
pas en droit d'allouer aux administrateurs un certain montant à titre
de participation aux bénéfices. Cette question est controversée en
doctrine. Pour SIEGWART (Komm. zum OR, ad art. 627, rem. 5), SCHUCANY
(Kommentar zum schweizerischen Aktienrecht, ad art. 627, rem. 5) et F. VON
STEIGER (Das Recht der Aktiengesellschaft in der Schweiz, 2e éd., p. 62),
l'assemblée générale ne peut attribuer de tantièmes aux administrateurs
que si les statuts l'y autorisent. En revanche, STAEHELIN (Die Bedeutung
der Materialien für die Auslegung des neuen Obligationenrechts, dans RDS,
1939, p. 31 et suiv.) et BÜRGI (Kommentar zum OR, ad art. 677, rem. 21)
estiment que si, faute de prescription dans les statuts, l'assemblée
générale n'est pas tenue d'allouer des tantièmes, elle peut le faire
volontairement d'année en année, puisqu'elle est compétente pour déterminer
l'emploi du bénéfice net en vertu de l'art. 698 al. 2 ch. 3 CO.

    Cette dernière thèse se heurte cependant à l'art. 627 ch. 2 CO,
aux termes duquel les dispositions concernant la participation des
administrateurs au bénéfice ne sont valables qu'à la condition de figurer
dans les statuts. Il est vrai que la doctrine a vu des contradictions
entre les art. 627 ch. 2, 677 et 698 al. 2 ch. 3 CO (cf. STAEHELIN,
loc.cit.). Mais ces dispositions sont, en réalité, conciliables et
complémentaires. L'art. 677 CO limite les tantièmes en faveur des fonds
de réserve et du dividende. Cependant, il ne signifie pas que, si les
conditions qu'il énonce sont remplies, l'assemblée générale puisse
toujours allouer aux administrateurs une participation au bénéfice. Il
faut que cette possibilité soit prévue par les statuts selon l'art. 627
ch. 2 CO, qui est implicitement réservé. Quant à l'art. 698 al. 2 ch. 3
CO, il confère notamment à l'assemblée générale le droit de fixer la
participation des administrateurs au bénéfice. Mais cette disposition
signifie simplement qu'il appartient à l'assemblée générale de déterminer
le montant des tantièmes lorsque les statuts lui prescrivent ou lui
permettent d'en allouer.

    Ainsi, le montant de 70 000 fr. que l'assemblée générale du
28 septembre 1955 a attribué au conseil d'administration ne saurait
légitimement constituer, même en partie, une participation au bénéfice. Il
ne peut être justifié que par l'art. 14 al. 3 des statuts.

Erwägung 2

    2.- Comme le Tribunal fédéral l'a exposé dans son arrêt du 13 février
1956, l'art. 14 al. 3 des statuts de la société ne limite pas le pouvoir
d'appréciation de l'assemblée générale et c'est seulement si elle en
a abusé que le juge peut intervenir; cette condition est remplie si le
montant alloué n'est pas proportionné au travail des administrateurs, aux
services qu'ils ont rendus à la société et à la situation de l'entreprise.

    Pour l'exercice 1953/54, le Tribunal fédéral a estimé qu'un montant
de 50 000 fr. pouvait se justifier par des considérations économiques
raisonnables, encore qu'il fût élevé. Il l'a donc considéré comme le
maximum admissible. Or, selon la Cour d'appel, le travail du conseil
d'administration n'a été ni plus intense ni plus fructueux durant
l'exercice 1954/55; la seule différence est que le bénéfice d'exploitation
a passé de 434 586 fr. 63 à 620 000 fr. en chiffre rond, ce qui a permis
de porter le dividende à 15%; mais cette amélioration n'est pas due à
l'activité ou aux relations des administrateurs.

    Aussi bien, la recourante ne prétend pas que l'augmentation du montant
alloué au conseil d'administration soit justifiée par un travail ou des
services accrus. Elle soutient simplement que, le bénéfice d'exploitation
étant supérieur d'environ 186 000 fr. à celui de l'exercice précédent,
il est normal d'augmenter la rétribution des administrateurs.

    Cette argumentation se heurte d'abord au fait que, d'après la
juridiction cantonale, le bénéfice supplémentaire de 186 000 fr. procède en
partie de la revalorisation d'un stock de marchandises. Dans cette mesure,
l'amélioration de la situation de l'entreprise n'est donc qu'apparente
et ne saurait justifier une augmentation du montant attribué au conseil
d'administration.

    En outre, si le Tribunal fédéral a déclaré qu'il fallait tenir compte
de la situation de l'entreprise pour arrêter cette rétribution, cela
ne signifie pas que celle-ci puisse être proportionnelle au bénéfice
d'exploitation. Autrement, il s'agirait de tantièmes déguisés. Les
statuts prévoyant la rétribution de l'"activité" des administrateurs, les
éléments essentiels qu'on doit prendre en considération sont l'importance
du travail fourni et les profits qu'il a procurés à la société. Quant à
la situation économique de l'entreprise, il faut qu'elle se soit modifiée
de façon sensible pour justifier à elle seule une augmentation ou une
réduction du montant auquel peut prétendre le conseil d'administration.

    Cette condition n'est pas remplie en l'espèce. Lorsqu'il a sanctionné
la rétribution de 50 000 fr., le Tribunal fédéral a tenu compte de la
situation prospère de la société, qui disposait de réserves telles que
la valeur interne des actions était cinq fois supérieure à leur valeur
nominale. Ces conditions n'ont pas été modifiées sensiblement par
l'augmentation que le bénéfice d'exploitation réel a subi de 1953/54
à 1954/55. Par conséquent, en allouant 70 000 fr. aux administrateurs
pour ce dernier exercice, l'assemblée générale a abusé de son pouvoir
d'appréciation et a pris une décision qui ne peut être justifiée par des
considérations économiques raisonnables.

    La recourante relève cependant que les premiers juges ont déclaré
(consid. 3) que le montant de 70 000 fr. était "de par sa nature une
'rétribution' attribuée dans le cadre de l'art. 14 des statuts". Mais,
par là, ils ont simplement défini le caractère que la société avait
donné formellement à cette allocation. Ayant admis que celle-ci n'était
justifiée par l'art. 14 al. 3 des statuts qu'à concurrence de 50 000 fr.,
ils pouvaient, sans se contredire, considérer qu'il s'agissait pour le
reste de tantièmes déguisés.

    D'autre part, la société relève que la décision du 28 septembre 1955 a
été prise par 389 voix contre 188, les administrateurs s'étant abstenus de
prendre part au vote. Mais cela ne change rien au fait que la rétribution
allouée au conseil d'administration est excessive. Peu importe que les
actionnaires majoritaires qui ont contrevenu aux statuts l'aient fait à
leur profit ou dans l'intérêt d'autres personnes.

    Enfin, la recourante prétend à tort que la décision litigieuse ne
saurait être divisée en deux parties dont une seule serait annulée. En
vertu de l'art. 706 CO, chaque actionnaire peut attaquer les décisions
de l'assemblée générale en tant qu'elles violent la loi ou les statuts
et le juge a également le pouvoir de ne les infirmer que dans cette mesure.

    Ainsi, c'est avec raison que les premiers juges ont annulé la décision
du 28 septembre 1955 en tant qu'elle allouait aux administrateurs une
rétribution supérieure à 50 000 fr. pour leur activité durant l'exercice
1954/55.

Entscheid:

              Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le recours et confirme le jugement attaqué.