Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 83 I 285



83 I 285

40. Arrêt du 1er novembre 1957 dans la cause B. contre Genève. Regeste

    Art. 21 Abs. 1 lit. c WStB. Der Anteil des Aktionärs am Überschuss
aus der Teilliquidation einer amerikanischen Aktiengesellschaft unterliegt
der Steuer vom Einkommen.

Sachverhalt

    A.- En 1954, B. était propriétaire de 100 actions de la Briggs
Manufacturing Co., à Détroit. Cette société réorganisa peu après sa
structure financière, ayant vendu ses ateliers de carrosserie à la
société Chrysler. Elle paya à ses actionnaires 32'263 $ pour chacune de
ses 1947 469 actions et procéda en outre à un échange, émettant 21 titres
nouveaux pour 100 anciens. Les uns ni les autres n'avaient aucune valeur
nominale. Les 62.830.485 $ que la société paya en espèces furent prélevés
sur les comptes suivants:

    "Common stock account" (= "capital

    account")     9.945.698 $

    "Capital surplus account"     5.407.571 $

    "Earned surplus account"      47.477.216 $
          Total .... 62.830.485 $

    En 1955, la Briggs Manufacturing Co. attribua une valeur nominale
de 3,50 $ à ses nouvelles actions. De plus, pour chacune d'entre elles,
elle en distribua gratuitement deux, qui avaient la même valeur nominale.

    Lors de la taxation pour la 8e période de l'impôt pour la défense
nationale, l'autorité fiscale ajouta au revenu déclaré par B. une somme
de 10 791 fr., correspondant aux 3226,30 $ touchés en espèces de la Briggs
Manufacturing Co., considérant qu'il s'agissait là d'une part aux bénéfices
selon l'art. 21 al. 1 lit. c AIN. Elle calcula cette valeur comme il suit:

    D'après les instructions de l'Administration fédérale des contributions
touchant les bénéfices de liquidation de sociétés américaines, on
considère comme remboursement des parts au capital social, remboursement
non imposable,

    la totalité du prélèvement sur le

    "capital account"     9.945.698 $

    7/10 du prélèvement sur le "capital

    surplus account"      3.785.299 $
          Total .... 13.730.997 $

    Cela représente une somme de 7'051 $ pour chacune des 1.947.469
actions. La différence entre cette somme et celle qui a été payée
(32'263 $), c'est-à-dire 25'212 $, représente le montant imposable au
titre du revenu pour chaque action. Ce sont donc, pour les 100 titres de
B., 2521,20 $ ou, au cours de 4,28 fr. pour un dollar, 10 791 fr.

    Le contribuable forma une réclamation, mais la Commission genevoise
de recours de l'impôt fédéral pour la défense nationale le débouta,
le 4 juin 1957, en bref par les motifs suivants:

    Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l'art. 21 al. 1 lit. c AIN
est aussi applicable à l'émission d'actions gratuites. Il l'est également
lorsque, comme en l'espèce, une société anonyme procède à une liquidation
partielle. N'est exclu de l'imposition que le remboursement des parts au
capital social existantes. L'Administration fédérale des contributions a
fixé dans des instructions comment il faut calculer les sommes afférentes
à ce remboursement. Elle s'est fondée, ce faisant, sur un "modus vivendi"
dont elle est convenue avec l'Association suisse des banquiers. La taxation
du recourant est conforme à ces instructions.

    B.- B. a formé un recours de droit administratif. Il conclut à
l'annulation de la décision du 4 juin 1957 et à la déduction d'une somme
de 10 791 fr. sur son revenu imposable. Son argumentation se résume comme
il suit:

    a) L'imposition, au titre du revenu, des actions gratuites et des
bénéfices de liquidation frappe en réalité un bénéfice qui a déjà été
réalisé par l'augmentation du cours des titres. La charge fiscale
se justifie lorsque le contribuable a bénéficié lui-même de cette
plus-value. En revanche, lorsqu'il a acquis les actions au cours déjà
élevé en raison des réserves accumulées, il est imposé contrairement à
la loi, arbitrairement, sur un gain qu'un autre a réalisé.

    b) Il en va de même à fortiori lorsqu'il s'agit d'une société anonyme
étrangère et que le bénéfice résultant du cours a été fait par un titulaire
étranger. L'art. 21 al. 1 lit. c AIN, sa genèse le montre, ne peut avoir
le sens que l'autorité cantonale lui donne. Il doit frapper les mêmes
prestations que le timbre sur les coupons et l'impôt anticipé. Ceux-ci ne
grevant pas les actions étrangères, il doit en aller de même de l'impôt
sur le revenu selon l'art. 21 al. 1 lit. c AIN.

    c) C'est en outre violer la loi que d'appliquer "des règles de
droit fiscal conçues en fonction du droit privé suisse à des phénomènes
économiques qui se déroulent sous l'empire d'un droit étranger",
c'est-à-dire à des actions du droit américain sans valeur nominale. Ces
titres n'ont qu'une valeur commerciale et il n'est pas possible de
reconstituer pour eux une autre valeur. Le "modus vivendi" convenu entre
l'Administration fédérale des contributions et l'Association suisse des
banquiers ne saurait être opposé au recourant qui n'y a pas adhéré. Un
impôt ne peut être fondé que sur la loi, non pas sur une convention. De
plus, la taxation n'est pas conforme à l'arrangement invoqué, car elle
n'exonère que 7/10 du montant prélevé sur le "capital surplus account",
au lieu des 9/10 convenus. C'est seulement la valeur commerciale connue
des actions qui pouvait entrer en ligne de compte; cette valeur est égale
au cours.

    d) La Commission genevoise de recours estime à tort que la Briggs
Manufacturing Co. a créé de nouveaux droits de participation. Elle a
racheté 79% de ses actions et émis de nouveaux titres pour le reste. Mais
la participation des actionnaires à ce reste est demeurée la même et ils
n'ont, dans cette mesure, reçu aucune prestation appréciable en argent.

    e) Si, la veille du rachat de ses actions, le recourant les avait
vendues pour un prix identique, il n'aurait pas réalisé un gain imposable,
mais au contraire subi une perte. En décembre 1953, il a acheté ses
titres pour 3620,44 $ et n'a reçu, pour leur rachat, que 3226,30 $, de
sorte qu'il a perdu 394,14 $. Sans doute a-t-il reçu en compensation 21
actions nouvelles. Mais elles ne valaient que 429,48 $. Sa fortune a donc
augmenté de 141 fr. 41.

    C.- La Commission genevoise de recours et l'Administration fédérale
des contributions concluent au rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- L'art. 21 al. 1 AIN impose le revenu total du contribuable
provenant d'une activité lucrative, du rendement de la fortune ou
d'autres sources de recettes. La lettre c du même article compte dans
le rendement de la fortune mobilière en particulier les intérêts, les
rentes et parts de bénéfices provenant de créances et de participations
de toutes natures. D'après un complément que cette disposition légale a
reçu par l'ACF du 31 octobre 1944, les parts aux bénéfices provenant de
participations comprennent "toutes les prestations appréciables en argent,
faites par la société au porteur de droits de participation, sous forme
de versement, virement, inscription au crédit, inscription ou d'une autre
manière, qui ne constituent pas un remboursement des parts au capital
social existantes". Constitue aussi une part de bénéfice d'après cette
définition la part proportionnelle au produit de la liquidation d'une
société anonyme, part attribuée à l'actionnaire, dans la mesure où elle
dépasse sa mise de fonds effective (arrêt du 11 octobre 1957 en la cause
X. c. Bern, RO 83 I 278).

    La réorganisation de sa structure financière opérée par la Briggs
Manufacturing Co. constitue une liquidation partielle. Elle a réduit
à 21% le nombre de ses actions (sans valeur nominale) et, pour chacune
des actions anciennes, elle a payé 32'263 $. Elle a prélevé les fonds
nécessaires en partie sur son capital social - 79% du "capital account"
et du "capital surplus account", proportion correspondant à la réduction
- mais principalement sur le "earned surplus account" (cet article
comprenait sans doute, en plus des réserves précédemment accumulées, le
prix payé par la société Chrysler pour les ateliers de carrosserie). Il
n'est donc plus resté qu'une entreprise réduite avec un capital diminué,
mais auquel les anciens actionnaires participent dans la même proportion
qu'auparavant, tandis que, pour leur ancienne participation aux ateliers
de carrosserie, ils ont reçu le paiement indiqué plus haut. Les nouvelles
actions qui leur ont été remises, c'est-à-dire 21 titres nouveaux pour
100 anciens, représentent leur participation aux éléments de l'entreprise
qui subsistent; quant au paiement de 32'263 $ par titre, il provient du
produit de la liquidation partielle. Dans la mesure où cette prestation
ne constitue pas un remboursement des parts au capital social existantes
(c'est-à-dire excède le montant du capital afférent aux biens réalisés),
elle doit, de par l'art. 21 al. 1 lit. c AIN, être considérée comme une
part aux bénéfices imposable au titre du revenu.

Erwägung 2

    2.- Les objections que le recourant formule ne sont pas fondées.

    a) Il allègue qu'en réalité, l'imposition du bénéfice de liquidation,
dans son cas, grève un bénéfice qui s'est déjà manifesté précédemment
par la hausse du cours des actions. Il estime que cette imposition
se justifie lorsque c'est le contribuable lui-même qui a réalisé le
bénéfice, mais non pas lorsqu'il a acquis les actions au cours déjà élevé.
Cette distinction est incompatible avec le système de la loi. L'art. 21
al. 1 lit. c AIN définit comme part aux bénéfices imposables toutes les
prestations appréciables en argent, faites aux actionnaires et qui ne
constituent pas le remboursement des parts au capital social existantes. On
ne peut qualifier de "part au capital social" que le montant payé comptant
ou d'une autre manière par l'actionnaire à la société ou pour lui par la
société elle-même comme contribution au capital social. Cette définition
est conforme à la jurisprudence constante du Tribunal fédéral (RO 80 I 42,
consid. 2; arrêt X. c. Bern, précité, et les arrêts cités). La formule de
l'art. 21 al. 1 lit. c AIN est plus courte que celle de l'art. 5 al. 2 LC,
mais elle a le même sens: "remboursement des parts au capital social versé,
parts donnant droit aux dividendes et existant au moment où la prestation
est effectuée". Introduite par l'ACF du 31 octobre 1944, elle avait pour
but, précisément, de définir la notion de part aux bénéfices de la même
façon que le fait l'art. 5 al. 2 LC (FF 1944, p. 1159). N'est franc de
l'impôt sur le revenu que le remboursement de ce que la société a reçu
de l'actionnaire au titre du capital (ou a versé pour lui au capital
par prélèvement sur ses propres biens). La valeur vénale de la part au
capital n'entre pas en ligne de compte, pas plus que le montant versé par
le dernier acquéreur des actions comme prix d'achat. Ce montant représente
la valeur économique des titres au moment de la vente, y compris le droit
au produit de la liquidation. Mais il ne constitue en aucune manière une
prestation à la société, que celle-ci rembourserait lors de la liquidation.

    b) Du rapprochement qu'il y a lieu de faire entre la dernière partie
de l'art. 21 al. 1 lit. c AIN et l'art. 5 al. 2 LC, le recourant croit
pouvoir conclure que les parts aux bénéfices provenant des actions
étrangères ne sont pas soumises à l'impôt sur le revenu, car, dit-il,
elles ne le sont pas non plus au droit de timbre sur les coupons. Cette
opmion est erronée. Le législateur a voulu définir de la même façon
les parts aux bénéfices dans les deux systèmes d'impôts, mais non pas
apporter les mêmes limites à l'imposition de cet objet. Le timbre sur les
coupons et l'impôt anticipé ne frappent que les actions et les obligations
suisses, tandis que l'impôt pour la défense nationale touche - avec les
exceptions prévues aux art. 18bis, 19, 20, 22 et 25, qui n'entrent pas
ici en ligne de compte - le revenu total du contribuable, sans faire
aucune distinction entre celui qui provient de biens mobiliers suisses
et étrangers. Il en était déjà ainsi avant que l'art. 21 al. 1 lit. c
eût été complété par l'ACF du 31 octobre 1944. Alors déjà, le Tribunal
fédéral avait jugé que toutes les prestations des sociétés aux porteurs
de participations étaient, de par l'art. 21 AIN, imposables au titre du
revenu et non pas seulement au titre de l'impôt pour la défense nationale
perçu à la source - lequel a été remplacé par l'impôt anticipé (RO 70 I
321). Cela exclut toute différence dans le traitement des actions suisses
et étrangères. L'adjonction apportée, en 1944, à l'art. 21 al. 1 lit. c
AIN n'a fait que préciser le sens de cette disposition légale.

    c) Dans le cas des sociétés anonymes suisses, le montant des
participations au capital social résulte immédiatement de la valeur
nominale ou de la part libérée des titres. S'agissant d'actions
américaines, le calcul de ce montant n'est pas aussi simple, car ces
titres sont fréquemment émis sans valeur nominale ou pour un prix égal à
un multiple de cette valeur. C'est pourquoi il faudrait, pour fixer le
montant réel de la participation, se référer à la somme effectivement
payée par l'actionnaire lors de l'émission, somme qui est versée non
seulement au "capital account", mais le plus souvent aussi, et même
principalement, au "capital surplus account", lequel comprend également des
fonds d'autres origines. Il est dès lors très difficile de constater le
montant de la participation au capital social. C'est pourquoi, d'accord
avec l'Association suisse des banquiers, l'Administration fédérale des
contributions a établi des directives pour la fixation de la part non
imposable des excédents de liquidation provenant de sociétés anonymes
américaines. Elle y constate qu'outre le "capital account", en cas
d'augmentation gratuite de la valeur nominale et d'émission d'actions
gratuites, 9/10 du "capital surplus account" et, en cas de liquidation,
7/10 de cet article du bilan doivent être considérés comme représentant les
participations des actionnaires au capital social. La taxation du recourant
sur sa part à la liquidation partielle de la Briggs Manufacturing Co. est
conforme à ces directives.

    Celles-ci ne constituent pas une transaction fiscale conclue avec les
membres de l'Association suisse des banquiers, mais une estimation faite
in abstracto des parts au capital social visées par l'art. 21 al. 1 lit. c
AIN dans le cas des actions américaines, parts dont l'estimation se heurte
à de graves difficultés. L'Association suisse des banquiers a collaboré
à l'établissement de ces directives en raison de ses connaissances
spéciales en la matière. Le recourant n'allègue pas que, dans le cas de
la Briggs Manufacturing Co. l'estimation soit fausse et qu'il faudrait
donc s'écarter des règles établies par l'administration. Il affirme
seulement que ces règles auraient été mal appliquées; qu'il aurait fallu
considérer comme soustraits à l'impôt 9/10 et non pas seulement 7/10 des
sommes provenant du "capital surplus account". Mais c'est seulement pour
le cas de l'augmentation gratuite de la valeur nominale ou de l'émission
gratuite que les instructions prévoient une proportion de 9/10; elles
s'en tiennent à 7/10 lorsque, comme dans la présente espèce, il y a eu
liquidation partielle. Le Tribunal fédéral n'a aucune raison de s'écarter
des principes ainsi posés par l'administration.

    d) Si, dans la réorganisation de la Briggs Manufacturing Co., les
actionnaires n'ont point reçu de droits de participation nouveaux, mais
ont conservé ceux qu'ils avaient précédemment, réduits par la liquidation
partielle, il n'en reste pas moins que, par suite de cette liquidation,
ils ont touché 32'263 $ par action. C'est là incontestablement une
prestation appréciable en argent, faite par la société à ses actionnaires
sur ses fonds propres. Peu importe, à cet égard, que les bénéficiaires ne
soient pas enrichis, en ce sens qu'auparavant déjà, ils avaient droit au
bénéfice de liquidation du seul fait de leur participation. La situation
est la même dans le cas le plus typique du revenu provenant d'actions,
à savoir la distribution de dividendes: Là aussi, le droit au dividende
existait dès avant la distribution et se répercutait sur la valeur vénale
(cours) des titres. Vu la teneur formelle de l'art. 21 al. 1 lit. c AIN,
le point décisif n'est pas que l'actionnaire soit enrichi, ni qu'il ait
joui d'un revenu - ce dernier terme étant pris dans son acception commune
-, mais bien qu'il ait reçu une prestation appréciable en argent qui ne
constitue pas un remboursement de sa part au capital social. Pas plus que
le dividende, le bénéfice de liquidation, c'est-à-dire la somme excédant
le capital social libéré, ne donne lieu à un tel remboursement lorsqu'on
le distribue aux actionnaires.

    e) Le recourant objecte enfin que, si l'on ne tient pas compte des
actions nouvelles reçues ou tout au moins des 42 actions gratuites reçues
en dernier lieu (en 1955), l'achat et la revente de ses titres lui ont
causé une perte ou, tout au moins, ne lui ont laissé qu'un bénéfice de
141 fr. 41. Cette argumentation est sans pertinence. Selon l'exposé qui
précède, l'art. 21 al. 1 lit. c AIN ne permet pas de tenir compte du
bénéfice ou de la perte que le contribuable peut avoir faits par l'achat
ou la revente des titres. Il n'autorise à prendre en considération que la
somme payée à la société par les actionnaires pour l'émission et celle
qu'elle leur a versée lors de la liquidation; la différence constitue
le bénéfice de liquidation; elle est imposable au titre du revenu de
la fortune.

Entscheid:

              Par ces motifs, le Tribunal fédéral:

    Rejette le recours.