Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 83 IV 71



83 IV 71

19. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 10 mai 1957 dans la cause
X. contre Ministère public du canton de Vaud. Regeste

    Art. 191 Ziff. 1 Abs.2und Ziff.2Abs.2 StGB. Steht das für die Dauer der
Ferien bei Dritten untergebrachte Kind zu diesen in einem Pflegeverhältnis?

Sachverhalt

    A.- Mariette B., née en 1942, est apparentée à l'épouse de X. De
1954 à 1956, ses parents l'ont envoyée assez régulièrement passer ses
vacances scolaires chez les époux X. Dès 1954, X. a commis sur elle, à de
nombreuses reprises, des actes contraires à la pudeur. En 1955 et 1956,
il a entretenu avec elle des relations sexuelles.

    Anne H., née en 1945, a été placée par ses parents, en juillet
1956, pour la durée des vacances, chez les époux X., dont elle est la
cousine. X. a aussi commis sur elle des actes contraires à la pudeur.

    Pendant plusieurs années, X. a également attenté à la pudeur de sa
fille, née en 1936 et faible d'esprit.

    Par jugement du 30 janvier 1957, le Tribunal de police correctionnelle
de V. a condamné X., en raison de ces faits, à trois ans et demi de
réclusion et à la privation des droits civiques pendant cinq ans. Il a
appliqué l'art. 191 ch. 1 et 2 CP aux agissements dont Mariette B. avait
été la victime et l'art. 191 ch. 2 CP à ceux qu'avait subis Anne H. Il
a retenu une des circonstances aggravantes prévues par l'art. 191 ch. 1
al. 2 et ch. 2 al. 2 CP, à savoir qu'il s'agissait d'enfants confiés aux
soins de l'accusé, considérant que les fillettes avaient été placées chez
les époux X. non seulement pour quelques heures ou pour un ou deux jours,
mais pour toute la durée des vacances, que ceux-ci exerçaient sur elles
l'autorité domestique et que les victimes se trouvaient dans un rapport
de subordination vis-à-vis du délinquant et de sa femme.

    B.- X. a recouru contre ce jugement à la Cour de cassation pénale du
Tribunal cantonal vaudois, faisant valoir, comme seul moyen, que Mariette
B. et Anne H. n'étaient pas des enfants confiés à ses soins au sens de
l'art. 191 ch. 1 al. 2 et ch. 2 al. 2 CP et que, partant, l'aggravation
de la peine prévue par ces dispositions ne lui était pas applicable.

    Par arrêt du 18 février 1957, la Cour de cassation pénale vaudoise
a rejeté le recours. Elle a admis en particulier ce qui suit: S'il ne
suffit pas que l'enfant soit en vacances chez l'auteur pour qu'il puisse
être considéré comme confié aux soins de celui-ci, "la dépendance protégée
existe cependant dès qu'il s'ajoute à cette situation de fait un rapport
de confiance participant du contrat de travail, entendu dans un sens large,
du mandant, et aussi d'une délégation de surveillance émanant des parents,
même tacitement". En l'espèce, X. remplaçait les parents des victimes,
exerçait leurs droits par délégation et assumait leurs obligations,
et représentait leur autorité dans l'esprit des enfants. Le lien de
parenté existant entre X. et les fillettes, le caractère durable des
séjours de celles-ci, le rapport évident de subordination qui résulte de
la comparaison des âges des intéressés et la dépendance étroite découlant
de la vie domestique commune conféraient incontestablement aux victimes
la qualité d'enfants confiés.

    C.- X. s'est pourvu en nullité au Tribunal fédéral contre cet arrêt,
concluant à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale
pour qu'elle l'acquitte du chef d'attentat qualifié à la pudeur des enfants
(art. 191 ch. 1 al. 2 et ch. 2 al. 2 CP) et qu'elle réduise en conséquence
la peine prononcée contre lui.

    Le Ministère public conclut au rejet du pourvoi.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

    Aux termes de l'art. 191 ch. 1 al. 2 et ch. 2 al. 2 CP, la peine
qui réprime l'attentat à la pudeur des enfants de moins de seize ans est
aggravée (réclusion pour deux ans au moins si l'auteur a commis l'acte
sexuel ou un acte analogue, réclusion ou emprisonnement pour trois mois
au moins s'il s'est rendu coupable d'un autre acte contraire à la pudeur)
lorsque la victime est l'élève, l'apprenti ou le domestique du délinquant,
ou son descendant, son enfant adoptif, l'enfant de son conjoint, son
pupille ou un enfant confié à ses soins. Le recourant conteste que ces
dispositions lui soient applicables pour les actes qu'il a commis sur
Mariette B. et Anne H., prétendant qu'elles n'étaient pas des enfants
confiés à ses solns.

    Selon la jurisprudence (RO 82 IV 192/193), un enfant ne doit pas
être considéré comme confié aux soins de l'auteur lorsque celui-ci n'en
a la garde qu'à titre purement passager; cela résulte non seulement des
peines sévères prévues par l'art. 191 ch. 1 al. 2 et ch. 2 al. 2 CP, mais
encore du fait que l'enfant confié aux soins du délinquant bénéficie de
la même protection que le descendant de celui-ci, son enfant adoptif,
l'enfant de son conjoint et son pupille; un enfant n'est confié aux
soins de l'auteur selon les dispositions précitées que s'il existe entre
eux des rapports étroits; toutefois, l'application de la peine aggravée
ne suppose pas qu'il y ait entre la victime et le délinquant des liens
aussi intimes que ceux qui unissent un enfant à des parents nourriciers
tenant pour lui lieu et place d'un père ou d'une mère de façon durable;
une telle restriction de la notion d'enfant confié aux soins de l'auteur
est inconciliable avec le fait que l'élève, l'apprenti ou le domestique
sont inclus parmi les enfants qui jouissent d'une protection spéciale;
la qualité d'enfant confié aux soins du délinquant est caractérisée par
la circonstance que l'auteur a la garde du mineur, qu'il exerce sur lui
une autorité particulière à laquelle correspond un état de dépendance du
côté de la victime; les peines aggravées ont pour but de réprimer l'abus
de cette autorité et de cette dépendance.

    Dans le sens de cette jurisprudence, on doit considérer un enfant comme
confié aux soins d'une personne selon l'art. 191 ch. 1 al. 2 et ch. 2 al.
2 CP lorsqu'elle est chargée de s'occuper de lui et de lui donner des
soins, qu'elle assume des obligations d'ordre éducatif, qu'elle exerce
sur lui l'autorité domestique (art. 331 CC) et qu'elle a un pouvoir de
commandement qui est du même ordre que celui des parents. Ces éléments sont
réunis dans le cas où un enfant est placé chez des tiers pour y passer
des vacances. Cette interprétation se justifie d'autant plus si l'on
compare la situation d'un enfant confié à une personne pour ses vacances,
par exemple, avec celle de l'élève vis-à-vis du maître. Un maître, qui
donne des leçons particulières une ou deux fois par semaine à un enfant
et qui attente à la pudeur de celui-ci, est passible des peines aggravées
prévues par l'art. 191 ch. 1 al. 2 et ch. 2 al. 2 CP. Si la loi accorde
une protection particulière à l'élève qui peut immédiatement informer
ses parents des entreprises déshonnêtes du maître et cesser sans délai
toutes relations avec lui, elle doit à plus forte raison le faire pour
l'enfant qui est placé chez des tiers loin de sa famille, qui ne peut
pas se soustraire aussi facilement aux agissements de la personne à qui
il est confié et qui se trouve dans un état de dépendance plus étroite
envers elle.

    En l'espèce, Mariette B. et Anne H. avaient été envoyées par leurs
parents chez les époux X. pour passer auprès d'eux leurs vacances. Le
recourant en avait la garde pendant cette période, leur devait les soins
incombant aux parents, exerçait les droits et assumait les obligations
de ces derniers, était investi de l'autorité domestique et remplaçait en
quelque sorte leur père durant leur séjour chez lui. C'est dès lors à bon
droit que la Cour cantonale a estimé que les deux fillettes étaient des
enfants confiés à X. au sens de l'art. 191 ch. 1 al. 2 et ch. 2 al. 2 CP
et qu'elle a fait application de ces dispositions.

Entscheid:

      Par ces motifs, la Cour de cassation pénale prononce:

    Le pourvoi est rejeté.