Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 83 II 538



83 II 538

74. Arrêt de la IIe Cour civile du 21 novembre 1957 dans la cause Commune
de Sion et consorts contre Jordan. Regeste

    Art. 69 EntG.

    1.  Berufung gegen das auf Grund von.Art. 69 EntG ausgefällte Urteil
des ordentlichen Richters. Überprüfungsbefugnis des Bundesgerichts
(Erw. 1).

    2.  Die Frage des Rechtes der Anstösser oder anderer Personen auf
Zugang zum öffentlichen Verkehrsweg untersteht dem kantonalen Recht und
kann vom Bundesgericht im Berufungsverfahren nicht nachgeprüft werden
(Erw. 2).

    3.  Der nach Art. 69 EntG angerufene ordentliche Richter hat zu
entscheiden, ob jemand, der in seinem Recht auf Zugang zur öffentlichen
Strasse beeinträchtigt wird, grundsätzlich eine Entschädigung zu
beanspruchen hat, und darf nur deren Bemessung der Schätzungskommission
anheimgeben (Erw. 3).

    4.  Er hat über den bestrittenen Bestand eines Anspruchs aus
Nachbarrecht zu befinden, ebenso über die Beeinträchtigung dieses
Anspruchs; der Schätzungskommission steht nur die Bemessung der allfälligen
Entschädigung zu (Erw. 4).

Sachverhalt

    A.- Les époux Alphonse et Emma Jordan sont propriétaires de l'immeuble
dans lequel ils exploitent le café du Pont du Rhône, à Sion; ils l'ont
acquis en 1944. Le bâtiment est situé à proximité de la route communale
Sion-Chandoline. La voie ferrée industrielle, qui relie la gare de Sion
à l'usine électrique de la société anonyme l'Energie de l'Quest-Suisse
(EOS), à Chandoline, est parallèle à cette route; elle se trouve entre
l'immeuble des époux Jordan et la route. Elle a été construite sur le
terrain appartenant à la commune de Sion par la Dixence SA dans les
années 1930, au moment de l'érection du premier barrage de la Dixence et
de l'usine de Chandoline. Le niveau de la chaussée a été alors surélevé;
à l'est de l'entrée du bâtiment des époux Jordan, la voie ferrée a été
établie à environ 80 cm plus haut que la route. L'EOS a repris plus tard
la Dixence SA En 1949/1950 ont commencé les travaux de construction du
deuxième barrage de la Dixence par la société La Grande Dixence SA Depuis
lors, la voie ferrée a été utilisée de façon accrue pour le transport des
matériaux jusqu'à l'usine de Chandoline, d'où part le téléphérique qui
va jusqu'au chantier du barrage. Le 24 février 1955, les époux Jordan
ont saisi la Commission fédérale d'estimation du 2e arrondissement d'une
demande d'indemnité de 100 000 fr. dirigée contre la Commune de Sion
en sa qualité de propriétaire du terrain sur lequel se trouve la voie
industrielle, l'EOS comme propriétaire de la voie et La Grande Dixence
SA à titre d'usager de la voie. Ils ont fait valoir que l'utilisation
accrue de la voie, depuis le début des travaux de la Grande Dixence,
leur causait un préjudice considérable, du fait que de nombreux trains
passaient et stationnaient à proximité du café, coupaient son accès à
la route, ébranlaient et lézardaient le bâtiment, faisaient du bruit et
dégageaient des odeurs malsaines.

    Les défenderesses ont conclu à l'irrecevabilité de la demande
pour cause d'incompétence de la Commission d'estimation et ont demandé
subsidiairement que la procédure devant cette autorité fût suspendue et
un délai d'un mois, fixé à l'expropriant pour ouvrir action devant le
juge ordinaire.

    Le 15 octobre 1955, les parties ont conclu, devant la Commission
d'estimation, une convention disposant notamment ce qui suit:

    "Les époux Jordan admettent que l'art. 69 de la loi fédérale sur
l'expropriation est applicable.

    En conséquence, la procédure pendante devant la Commission fédérale
d'estimation pour le 2e arrondissement est suspendue et un délai d'un
mois dès ce jour est fixé à l'expropriant pour ouvrir action devant le
juge ordinaire afin de faire constater l'inexistence des droits faisant
l'objet de la demande d'indemnité des époux Jordan.

    A défaut d'ouverture d'action dans le délai fixé, les droits seront
considérés comme existants."

    Par acte du 14 novembre 1955, la Commune de Sion, l'EOS et La Grande
Dixence SA ont introduit action contre les époux Jordan devant le Tribunal
cantonal du Valais et pris les conclusions suivantes:

    "Plaise au Tribunal cantonal valaisan statuer:

    1) La réclamation des époux Alphonse Jordan est mal fondée, les
demandeurs ne s'étant rendus coupables d'aucun excès quelconque, au
détriment de la propriété des défendeurs, en exploitant leur ligne de
chemin de fer.

    Il n'existe en conséquence aucun droit pouvant faire l'objet
d'une demande d'indemnité de la part des époux Jordan contre les trois
demandeurs.

    2) Les époux Alphonse Jordan sont condamnés aux frais de la procédure
et du jugement."

    Les défendeurs ont conclu au rejet de l'action.

    Par jugement du 1er février 1957, le Tribunal cantonal du Valais
a prononcé:

    "La demande est écartée dans le sens des considérants.

    Toutes autres conclusions sont écartées..."  Se référant à LEYVRAZ
(Les utilisations normales de la voie publique par les particuliers,
thèse Lausanne 1956, p. 70 ss.) et à l'arrêt du Tribunal fédéral du 3
décembre 1952 dans la cause Frei, la juridiction valaisanne estime que les
époux Jordan ont un droit d'accès à la route de Bramois et que cet accès
direct leur a été coupé par la voie ferrée industrielle. A son avis, la
question de savoir s'il y a atteinte à ce droit d'accès et si l'atteinte
est grave ou non ressortit à la compétence de la Commission d'estimation,
à laquelle il appartient d'apprécier les circonstances de la cause et
d'accorder ou de refuser l'indemnité réclamée.

    Quant aux droits résultant des dispositions sur les rapports de
voisinage, le Tribunal cantonal exprime l'opinion qu'il incombe à la
Commission d'estimation de dire si et dans quelle mesure les trépidations,
le bruit, les émissions de gaz et d'odeurs provoqués par les trains
circulant sur la voie industrielle sont de nature à porter atteinte à la
propriété des défendeurs.

    B.- Contre ce jugement, les demanderesses ont recouru en réforme au
Tribunal fédéral en reprenant les conclusions qu'elles avaient formulées
dans l'instance cantonale.

    Les intimés concluent au rejet du recours dans la mesure où il est
recevable et subsidiairement au renvoi de la cause à la juridiction
cantonale pour nouveau jugement.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Selon l'art. 5 LEx, peuvent faire l'objet de l'expropriation
les droits réels immobiliers, les droits résultant des dispositions
sur la propriété foncière en matière de rapports de voisinage, en
outre les droits personnels des locataires ou fermiers de l'immeuble à
exproprier. D'autre part, aux termes de l'art. 69 LEx, si l'existence d'un
droit faisant l'objet d'une demande d'indemnité est contestée, la procédure
est suspendue et il est fixé à l'expropriant un délai pour ouvrir action
devant le juge ordinaire, à défaut de quoi le droit est considéré comme
existant; les parties peuvent toutefois, par une déclaration expresse,
attribuer le jugement de la contestation à la commission; la décision
de celle-ci est, sur ce point, susceptible d'être déférée au Tribunal
fédéral conformément à l'art. 77 LEx.

    En l'espèce, les parties sont convenues de soumettre au juge
ordinaire la question de l'existence des droits faisant l'objet de la
demande d'indemnité des époux Jordan. C'est comme juridiction de réforme
et non comme autorité de recours au sens de l'art. 77 LEx que le Tribunal
fédéral est saisi de la contestation divisant les parties, et sa cognition
est déterminée par les art. 43 ss. OJ. Il ne peut dès lors revoir que
l'application du droit fédéral. A cet égard, il est compétent pour examiner
librement si la décision attaquée viole le droit fédéral.

Erwägung 2

    2.- Le Tribunal cantonal a admis que les époux Jordan avaient un
droit d'accès à la route qui passe à proximité de leur immeuble. Il est
constant d'autre part que cette route est une voie publique. Or, selon
l'art. 664 CC, les biens du domaine public sont soumis à la haute police
de l'Etat sur le territoire duquel ils se trouvent; c'est la législation
cantonale qui règle l'exploitation et le commun usage des biens du domaine
public tels que routes, places, cours d'eau et lits de rivière. Dès lors,
la question de savoir quel droit d'accès à la route publique peuvent avoir
les riverains ou d'autres personnes relève du droit cantonal (arrêt du
Tribunal fédéral du 3 décembre 1952 en la cause Frei, consid. 3; HAAB,
note 17 à l'art. 664). Il s'ensuit que le Tribunal fédéral saisi d'un
recours en réforme ne peut pas revoir si les intimés ont un droit d'accès
à la route publique et dans quelle mesure ils sont lésés. En tant qu'il
critique sur ce point le jugement déféré, le recours est irrecevable.

Erwägung 3

    3.- Le jugement attaqué (p. 14) cite LEYVRAZ (op. cit. p. 75) selon
lequel les riverains n'ont droit à une indemnité qu'en cas d'atteinte
grave au droit d'accès et ne peuvent par conséquent faire valoir aucune
réclamation tant que la voie publique qui dessert leurs propriétés reste
affectée à l'usage de tous et assure un accès suffisant à leurs immeubles,
compte tenu de toutes les circonstances. Le Tribunal cantonal ne dit pas
expressément qu'il partage l'opinion de l'auteur auquel il se réfère;
comme il ne la critique pas non plus, on peut en déduire qu'il la fait
sienne. Il ne pouvait toutefois se borner à énoncer le principe qu'une
indemnité n'est due qu'en cas d'atteinte grave au droit d'accès et renvoyer
à la Commission d'estimation la question de savoir si, dans l'espèce,
cette condition est réalisée. En procédant ainsi, il a violé l'art. 69
LEx. Il devait examiner si l'atteinte au droit d'accès des époux Jordan à
la voie publique est grave ou non et décider si elle justifie en principe
une indemnité. Il ne pouvait renvoyer à la Commission d'estimation que la
fixation du montant de l'indemnité. Cela étant, le jugement déféré doit
être annulé et la cause renvoyée à la juridiction valaisanne pour qu'elle
dise si les intimés sont en principe fondés à réclamer une indemnité pour
atteinte à leur droit d'accès à la route. A cet égard, le Tribunal cantonal
tiendra compte du fait que le niveau de la chaussée a été surélevé et la
voie ferrée, établie à 80 cm plus haut que la route vers les années 1930
déjà, et que, par conséquent, l'accès à la voie publique ne laissait pas
d'être malaisé avant que les intimés acquissent l'immeuble.

Erwägung 4

    4.- Il est de jurisprudence que les art. 679 et 684 CC sont applicables
lorsqu'une corporation publique excède son droit de propriété. Il
faut cependant distinguer suivant qu'il s'agit d'actes ressortissant à
l'exercice de la puissance publique ou d'actes de la corporation publique
comme propriétaire foncier. Dans le premier cas, la prétention à une
indemnité de droit public remplace l'action civile; dans le second, la
corporation publique répond des abus de son droit de propriété selon
les art. 679 et 684 CC (RO 75 II 119, 79 I 202, arrêts du 3 décembre
1952 dans la cause Frei et du 4 juillet 1956 dans la cause Aregger).
Si, dans la procédure en fixation de l'indemnité d'expropriation,
l'existence du droit de voisinage est contestée, il appartient au juge
ordinaire de trancher ce point, à moins que les parties n'aient attribué
le jugement de la contestation à la Commission d'estimation (art. 69 LEx.,
RO 79 I 203). Dans l'espèce, les parties sont convenues de soumettre le
litige au juge ordinaire. Dès lors, le Tribunal cantonal ne pouvait
pas, sans violer l'art. 69 LEx, renvoyer à la Commission d'estimation
la question de savoir s'il y avait atteinte aux droits résultant pour
les époux Jordan des dispositions sur la propriété foncière en matière
de rapports de voisinage. Il était tenu au contraire de juger ce point,
la Commission d'estimation n'ayant qu'à fixer l'éventuelle indemnité qui
pourrait être due. Il s'ensuit qu'à cet égard l'affaire doit être renvoyée
à la juridiction cantonale pour qu'elle se prononce sur l'existence des
droits de voisinage que prétendent les intimés.

Entscheid:

         Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

    Le recours est admis dans la mesure où il est recevable, le jugement
attaqué est annulé et l'affaire est renvoyée à l'autorité cantonale pour
qu'elle statue à nouveau dans le sens des considérants.