Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 83 II 458



83 II 458

62. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 1er octobre 1957 dans la
cause Arts Ménagers SA contre Brugger & Cie et consorts. Regeste

    Unlauterer Wettbewerb.

    1.  Bei der Beurteilung von Zeitungsannoncen ist der Gesamteindruck
massgebend, den sie beim Publikum erwecken. Entsprechende Anwendbarkeit
der für die Vergleichung von Marken geltenden Grundsätze (Erw. 2 a).

    2.  Für die Beurteilung des Charakters einer Werbeaktion kommt der
Art ihrer Ankündigung entscheidende Bedeutung zu. Die Verwendung des
Wortes "Festival", die Angabe des Datums, von dem an die angebotenen
Vergünstigungen erhältlich sind und die ungefähre Bezifferung der zu
Verteilung gelangenden Zugaben verleihen der so angekündigten Aktion den
Charakter einer zeitlich begrenzten Massnahme (Erw. 2 b).

    3.  Die Ankündigung und Durchführung eines Verkaufs mit Gewährung
besonderer Vergünstigungen, der einem bewilligungspflichtigen, tatsächlich
aber nicht bewilligten Ausverkauf entspricht, sowie die Ausrichtung von
branchefremden Zugaben verstossen, in ihrer Gesamtheit betrachtet, gegen
die geschäftliche gute Treue (Erw. 2 b).

    4.  Der Wert der verteilten Zugaben ist an sich unter dem Gesichtspunkt
der Bestimmungen über den unlauteren Wettbewerb belanglos (Erw. 2 b).

    5.  Begriff der ausverkaufsähnlichen Veranstaltung im Sinne der Vo vom
16. April 1947 über Ausverkäufe und ähnliche Veranstaltungen (Erw. 2 c).

Sachverhalt

    A.- La société Arts Ménagers SA, dont le siège est à Genève, exploite
un commerce d'appareils de radio et de télévision ainsi que d'appareils
ménagers (cuisinières à gaz, cuisinières électriques, cuisinières à bois
et charbon, calorifères à mazout ou à charbon, cireuses, aspirateurs et
autres articles). Au début de janvier 1955, Arts Ménagers SA a lancé,
pour sa succursale de Neuchâtel, une campagne publicitaire intitulée
"Action: Bicyclettes gratuites aux enfants". Elle offrait une bicyclette
d'enfant pour tout achat à partir de 450 fr. et accordait en outre un
escompte de 3% en cas de paiement au comptant. De grandes annonces furent
publiées dans les journaux neuchâtelois en particulier sous le titre
"Festival Torre et Arts Ménagers SA". Elles contenaient notamment les
indications suivantes:

    "Dès le 7 janvier 1955 à 8 heures, chaque acheteur de l'un des
appareils suivants, d'un prix de Fr. 450.-- déjà, payable au comptant
ou par mensualités, recevra en plus, gratis, une splendide bicyclette
d'enfant ..."

    "Plus de 1500 bicyclettes d'enfant et probablement bien davantage
seront ainsi distribuées gratuitement ..."

    "Profitez de cette offre surprenante pour offrir à l'enfant qui vous
tient à coeur une bicyclette suisse de qualité ..."

    Par acte notifié le 10 février 1955, Brugger & Cie et consorts,
à savoir cinquante-deux demandeurs, comprenant vingt-cinq marchands de
radios, quatre marchands d'appareils électriques, dix-sept marchands de
cycles et six marchands d'articles de ménage, tous établis dans le canton
de Neuchâtel, ont introduit action contre Arts Ménagers SA et conclu:

    "Plaise au Tribunal:

    1. Constater que l'offre de la remise par la maison Arts Ménagers
SA de bicyclettes d'enfant, à titre gratuit, aux acheteurs d'articles
d'une valeur égale ou supérieure à Fr. 450.-- ainsi que la publicité se
rapportant à cette remise, constituent des actes de concurrence déloyale,
partant des actes illicites;

    2. Interdire à la défenderesse, sous la menace des peines d'arrêts
ou d'amende jusqu'à vingt mille francs, prévues par l'art. 292 CPS, de
faire de telles offres, de consentir de tels avantages et de faire une
telle publicité, sous quelque forme que ce soit."

    La défenderesse a conclu à libération.

    Par jugement du 4 février 1957, le Tribunal cantonal de Neuchâtel
a constaté qu'en la forme en laquelle elle avait été faite la publicité
se rapportant à la remise par Arts Ménagers SA de bicyclettes d'enfant à
titre gratuit à tout acheteur d'articles d'une valeur égale ou supérieure
à 450 fr. constituait un acte de concurrence déloyale, et interdit à la
défenderesse sous la menace des peines prévues par l'art. 292 CP (arrêts
ou amende) de faire pareille publicité.

    B.- Contre ce jugement, Arts Ménagers SA a recouru en réforme au
Tribunal fédéral en reprenant ses conclusions libératoires.

    Brugger & Cie et quarante consorts ont conclu au rejet du recours
et à la confirmation de la décision attaquée. Un des demandeurs, Arnold
Grandjean SA, a déposé sa réponse au recours après l'expiration du délai
de vingt jours fixé à cet effet. Les onze autres intimés n'ont pas répondu
au recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- .....

Erwägung 2

    2.- a) La juridiction cantonale estime que la campagne publicitaire
de la défenderesse comportant la remise gratuite de bicyclettes
d'enfant constitue une opération analogue à une liquidation au sens
de l'art. 17 LCD qui est soumise à une autorisation du service cantonal
compétent. Elle relève que, dans les annonces publiées dans la presse,
la recourante "par le d'un avantage qu'elle offre actuellement et qu'elle
limite son offre à 1500 bicyclettes en laissant entrevoir seulement la
possibilité d'en livrer bien davantage". Elle considère dès lors "comme un
acte de concurrence déloyale la forme que la défenderesse a donnée à ses
publications, lesquelles étaient de nature à faire croire au public qu'il
s'agissait d'une opération analogue à une liquidation, soit d'une offre
temporaire d'avantages exceptionnels dont il fallait se hâter de profiter".

    Bien que le texte des annonces publiées par la recourante ne soit
pas sans importance, on ne saurait, pour les apprécier, rechercher
principalement quel sens peut leur être attribué d'après quelques mots ou
passages isolés. Ce qui compte avant tout en l'espèce, c'est l'impression
d'ensemble produite par la réclame sur le public. Il y a là une certaine
analogie avec les principes qui régissent la comparaison des marques de
fabrique (cf. RO 82 II 351). Dans sa publicité, par exemple dans l'annonce
de l'"Impartial" du 17 janvier 1955, la défenderesse offrait différents
avantages placés sur le même plan entre lesquels les clients avaient le
choix, à savoir la remise gratuite de bicyclettes d'enfant, la reprise
de vieux appareils, le crédit familial ou la baisse des prix. Ce sont ces
avantages annoncés au moyen de grands titres qui faisaient impression sur
le lecteur et non le texte en petits caractères. C'est dès lors à tort
que la juridictìon cantonale s'est arrêtée au mot "actuellement", imprimé
en petites lettres grasses dans des annonces comportant de grands titres,
qui attiraient principalement l'attention du public, pour en déduire que
les avantages offerts étaient temporaires et que la campagne publicitaire
de la défenderesse était une opération analogue à une liquidation.

    En outre, Arts Ménagers SA n'a pas limité son offre à 1500 bicyclettes
en laissant seulement entrevoir la possibilité d'en distribuer davantage,
comme le déclare le tribunal neuchâtelois. Les réclames publiées dans la
presse annonçaient au contraire que "plus de 1500 bicyclettes d'enfant et
probablement bien davantage" seraient remises gratuitement. L'estimation de
ce nombre, qui ne constitue pas une limitation, n'est dans aucune annonce
liée directement au mot "actuellement", ainsi que le laisse supposer la
décision cantonale en déclarant que la défenderesse "offre actuellement
et ... limite son offre à 1500 bicyclettes ...".

    b) Les éléments mis en lumière par le jugement attaqué, qui sont
insuffisants pour faire admettre que la défenderesse a annoncé et exécuté
publiquement une opération analogue à une liquidation au sens de l'art. 17
LCD, ne sont cependant pas les seuls qui entrent en considération pour
apprécier la nature de la campagne publicitaire qu'elle a entreprise. A
ce sujet, la façon dont l'opération est annoncée revêt une importance
décisive. La recourante a fait publier dans les journaux neuchâtelois de
grandes réclames portant le titre "Festival Torre et Arts Ménagers SA"
imprimé en lettres grasses de dimension beaucoup plus grande que les
caractères utilisés pour le texte des annonces. Le terme "festival" se
trouve dans une série de journaux avant, pendant et après le lancement
de la campagne. Il est en général suivi d'indications précisant la date
à partir de laquelle les avantages offerts peuvent être obtenus. Les
annonces mentionnent, par exemple, ce qui suit:

    "Dès le 7 janvier 1955, à 8 heures, chaque acheteur ... recevra
... gratis une splendide bicyclette d'enfant ..."

    "Malgré notre désir de donner satisfaction à chacun, il ne nous sera
pas possible de faire bénéficier de l'action Bicyclettes gratuites aux
enfants les personnes ayant passé commande ... avant le 7 janvier 1955
à 8 heures."

    "Le règlement complet de cette Action a paru dans ce journal, vendredi
7 janvier. Il est exposé, avec les bicyclettes, dans nos vitrines, et
vous sera envoyé gratuitement, sur simple demande."

    Par là, le début dans le temps de l'opération entreprise par Arts
Ménagers SA est nettement marqué. Dans certaines réclames publiées au
cours de la campagne figure la photographie d'un enfant recevant une
bicyclette; sous le titre "Voilà l'étonnante vérité", les unes annoncent
en caractères gras la remise de "plus de 1500 bicyclettes d'enfants"
et font suivre cette mention des mots "et probablement bien davantage"
imprimés en lettres ordinaires; d'autres contiennent le slogan "Le plus
beau souvenir de son enfance" et indiquent: "Les vélos sont exposés
dans nos vitrines, ainsi que le règlement complet de cette Action". Des
annonces où l'on peut voir une cuisinière électrique et le dessin d'un
enfant chevauchant une bicyclette renvoient de même au règlement paru
dans la presse le "vendredi 7 janvier" et exposé dans les vitrines.

    Au sens propre, le mot "festival" désigne une grande fête musicale
qui dure quelques jours. Actuellement, il est utilisé aussi dans d'autres
domaines; c'est ainsi que l'on connaît pour le théâtre lyrique le "Festival
d'opéras italiens", pour le cinéma le "Festival de Venise", etc. Dans
tous ces usages, le terme "festival" se rapporte à des manifestations
d'une importance et d'un éclat particuliers mais de nature temporaire;
il implique toujours l'idée d'une durée limitée.

    L'utilisation du mot "festival", les indications concernant la
date précise à partir de laquelle les avantages offerts pouvaient être
obtenus et l'estimation du nombre des bicyclettes qui seraient distribuées
conféraient à la campagne lancée par Arts Ménagers SA le caractère d'une
opération temporaire. La défenseresse a dès lors agi contrairement aux
règles de la bonne foi en annonçant et en exécutant une vente accompagnée
d'avantages particuliers analogue à une liquidation pour laquelle une
autorisation officielle était nécessaire, alors qu'en réalité elle ne
l'avait pas. De plus, elle a remis à titre de primes des objets d'une
espèce toute différente des articles qu'elle vend. Cette manière d'agir
constitue, dans son ensemble, un acte contraire à la bonne foi en affaires;
l'offre d'une bicyclette d'enfant gratuite pour l'achat d'un appareil de
radio ou d'un article de ménage était de nature à fausser le jugement de
l'acheteur (cf. pour le droit allemand, BAUMBACH/HEFERMEHL, Wettbewerbs-
und Warenzeichenrecht, Zugabeverordnung § 1, note 44 p. 549); en outre, en
remettant des bicyclettes aux acheteurs, la défenderesse a fait concurrence
aux commerçants d'une autre branche, à savoir aux marchands de cycles,
qui ne sont point ses concurrents.

    En revanche, la valeur des dons distribués n'importe pas en soi du
point de vue des règles sur la concurrence déloyale. D'une part, elle
n'est pas légalement limitée. D'autre part, dans le commerce de détail des
appareils de radio dont s'occupe en particulier la recourante, la marge
de bénéfice est élevée: elle atteint 40 à 42% et il s'y ajoute, le cas
échéant, 8 à 10% de primes dites de quantité et 5% d'escompte pour paiement
au comptant (RO 82 IV 53); elle permet ainsi aux marchands d'accorder des
avantages importants aux clients. Il est indifférent par ailleurs que le
vendeur octroie ces avantages ouvertement comme l'a fait la défenderesse.

    c) Les liquidations et opérations analogues ont pour but l'écoulement
de stocks de marchandises (art. 2 de l'ordonnance sur les liquidations et
opérations analogues; pour le droit allemand, BAUMBACH/HEFERMEHL, op.cit.,
Gesetz gegen den unlauteren Wettbewerb, § 7 note 1 p. 348, § 7 a note
2 p. 352; CALLMANN, Der unlautere Wettbewerb, §§ 7 ss. p. 265 ss.). Cet
élément fait défaut en l'espèce, où il s'agit exclusivement d'une campagne
de publicité comportant la remise de primes aux acheteurs. Tandis que le
droit allemand interdit en principe les primes (§ 1 Zugabeverordnung),
la loi fédérale sur la concurrence déloyale se borne à statuer (art. 20)
que le Conseil fédéral est autorisé à édicter par voie d'ordonnance des
dispositions sur les abus en matière de primes. Une ordonnance spéciale
sur cet objet n'a cependant pas été élaborée. En revanche, l'ordonnance du
16 avril 1947 ne réglemente pas seulement les liquidations et opérations
analogues au sens strict. Selon son art. 1er al. 1, une liquidation ou une
opération analogue est une vente au détail pour laquelle les acheteurs
se voient offrir, par des annonces publiques, des avantages momentanés
que le vendeur ne leur accorderait pas ordinairement. Aux termes de son
art. 2 al. 2, constituent des opérations analogues les ventes dites "au
rabais" qui, tout en remplissant les conditions de l'art. 1er, n'ont
cependant pas pour but ou pour but exclusif l'écoulement complet de
certains stocks déterminés de marchandises, par exemple les ventes avec
rabais extraordinaire, les ventes réclame, les ventes spéciales, ainsi que
toutes autres opérations exécutées sous des désignations analogues. Par
là, l'ordonnance étend la notion de liquidation ou opération analogue et
s'écarte de la signification que l'on attribue généralement à ces termes
dans la langue juridique et dans les milieux du commerce. En l'espèce,
on est en présence d'une opération analogue à une liquidation au sens
large où l'entend l'ordonnance, c'est-à-dire d'une vente au détail pour
laquelle des avantages temporaires sont annoncés au public mais dont le
but n'est pas d'écouler des stocks.

    Sans interdire de façon absolue les liquidations et opérations
analogues, la loi sur la concurrence déloyale les soumet à des restrictions
et ne les permet que moyennant une autorisation du service cantonal
compétent, les dispositions d'exécution étant contenues dans l'ordonnance
du 16 avril 1947. Celui qui annonce ou exécute publiquement une opération
analogue à une liquidation sans avoir requis et obtenu l'autorisation
officielle contrevient aux règles que tout commerçant est tenu d'observer
et agit dès lors contrairement aux règles de la bonne foi en affaires. Son
comportement constitue ainsi un abus de concurrence découlant d'un procédé
contraire aux règles de la bonne foi et, partant, un acte de concurrence
déloyale, au sens de l'art. 1er al. 1 LCD. Pour qu'il y ait concurrence
déloyale, il n'est pas nécessaire que l'abus de la concurrence consiste
dans une tromperie à l'égard du public mais il suffit, selon l'art. 1er
al. 1 LCD, qu'il résulte "d'un autre procédé contraire aux règles de
la bonne foi". Il en est ainsi en particulier pour les liquidations et
opérations analogues (GERMANN, Concurrence déloyale, p. 259). Il suit
de là qu'en l'espèce, eu égard aux conditions dans lesquelles ont eu
lieu l'annonce et la remise des primes offertes par la recourante, elles
constituent un acte de concurrence déloyale (cf. BAUMBACH/HEFERMEHL, §
1 Zugabeverordnung, note 17 p. 532; REIMER, Wettbewerbsrecht, § 1 Gesetz
gegen den unlauteren Wettbewerb, note 8 p. 390).

Entscheid:

         Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

    Le recours est rejeté et le jugement attaqué est confirmé.