Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 81 II 171



81 II 171

29. Arrêt de la IIe Cour civile du 28 janvier 1955 dans la cause Etat de
Vaud contre Deike Stiftung et dame Rickmers. Regeste

    1.  In welchen Fällen kann das Bundesgericht in einer zivilrechtlichen
Streitigkeit auf Grund einer Schiedsklausel angerufen werden (Art. 41
litt. c Abs. 2 OG und Art. 2 BZP)?

    2.  Wie weit geht nach Art. 9 quater des BRB vom 16. Februar 1945
/29. April 1947 über die vorläufige Regelung des Zahlungsverkehrs zwischen
der Schweiz und Deutschland der Aufgabenbereich der Schweizerischen
Verrechnungsstelle?

Sachverhalt

                      Résumé des faits:

    P. Rickmers, de nationalité suisse, a constitué en 1923 une fondation
à laquelle l'acte constitutif attribuait le caractère d'une fondation
de famille. L'Etat de Vaud a contesté qu'il s'agît d'une fondation de
famille, ce qui, si sa thèse était reconnue fondée, devait lui permettre
de percevoir un impôt sur la part de la fortune du fondateur qui revenait
à sa veuve, domiciliée dans le canton. Après de nombreuses tractations,
l'Etat de Vaud et la Deike Stiftung sont convenus de porter directement
devant le Tribunal fédéral, jugeant en première et dernière instance, la
question de la validité de la fondation. Dame veuve Rickmers a déclaré se
joindre à l'Etat de Vaud en qualité de partie intervenante et a conclu
également à l'annulation de la fondation. Vu la nationalité allemande
de dame Rickmers, l'Office suisse de compensation est intervenu dans la
procédure et a conclu à ce que le Tribunal fédéral se déclare incompétent,
motif pris de ce qu'il était seul qualifié pour la représenter dans
le procès.

    Le Tribunal fédéral s'est estimé compétent pour connaître du litige;
il a admis que si l'Office suisse de compensation était recevable à
intervenir dans le procès, cela n'excluait cependant pas le droit de Dame
Rickmers d'y intervenir personnellement aussi et, quant au fond, adoptant
la thèse de l'Etat de Vaud, a prononcé l'annulation de la fondation.

Auszug aus den Erwägungen:

                       Extrait des motifs:

Erwägung 1

    1.- Aux termes de l'art. 41 OJ, le Tribunal fédéral connaît en
instance unique des contestations de droit civil "lorsque les deux parties
saisissent le tribunal à la place des juridictions cantonales et que la
valeur du litige est d'au moins 10 000 francs". A s'en tenir à cette
disposition, comme d'ailleurs à l'art. 2 al. 1 de la loi de procédure
civile fédérale du 4 décembre 1947, la faculté pour les parties de porter
leur différend directement devant le Tribunal fédéral en vertu d'une
clause compromissoire serait, il est vrai, subordonnée à la condition
qu'elles eussent eu, d'après une loi cantonale, le droit d'en saisir un
tribunal cantonal, ce dont elles n'ont pas justifié en l'espèce. L'art. 2
précité dispose toutefois que le Tribunal fédéral doit se saisir de la
cause lorsque le demandeur a son domicile en Suisse ou qu'une partie est
de nationalité suisse. La première question qui se pose est de savoir
si, en vertu de cette dernière disposition, le législateur a entendu
étendre dans ces deux hypothèses la compétence du Tribunal fédéral telle
qu'elle est fixée aux art. 41 OJ et 2 al. 1 PCF. La réponse n'est pas
douteuse. Tout comme l'art. 41 OJ, l'avant-projet de la loi de procédure
civile subordonnait expressément la compétence du Tribunal fédéral à la
condition qu'il existât, d'après le droit fédéral ou le droit cantonal, un
tribunal suisse compétent pour connaître de la cause. Il prévoyait même que
le Tribunal fédéral n'était pas lié par la clause en vertu de laquelle les
parties seraient convenues de soumettre leur litige à un tribunal suisse.
Mais, si cette disposition a bien été reproduite dans le projet soumis aux
Chambres fédérales (FF 1947 I 1012), elle était toutefois complétée par une
autre, aux termes de laquelle le tribunal devait se saisir de la cause si
le demandeur avait son domicile en Suisse ou était de nationalité suisse,
adjonction que le Conseil fédéral justifiait en relevant que si l'on se
contentait d'énoncer le principe posé dans l'avant-projet, le Tribunal
fédéral serait en droit de décliner sa compétence lorsqu'il serait saisi
d'une contestation portée devant lui en vertu d'une clause compromissoire
intervenue entre deux ressortissants suisses domiciliés à l'étranger. A son
avis, le litige avait en pareil cas "un rapport suffisant avec le pays"
pour justifier l'obligation pour le Tribunal fédéral de se saisir de la
cause, tout comme aussi dans le cas où le demandeur avait son domicile
en Suisse ou était de nationalité suisse. Or, sous la seule réserve du
remplacement des mots "lorsque le demandeur a son domicile en Suisse ou est
de nationalité suisse" par les mots "lorsque le demandeur a son domicile
en Suisse ou qu'une partie est de nationalité suisse", la proposition du
Conseil fédéral a été adoptée par les deux Chambres. Il n'est donc pas
douteux que lorsque l'une ou l'autre de ces conditions sont réalisées - et
il en est ainsi en l'espèce -, le Tribunal fédéral ne doive se saisir de
la cause quand bien même il ne serait pas prouvé que les parties eussent
pu porter leur différend devant un autre tribunal suisse...

Erwägung 2

    2.- L'argumentation présentée par l'Office suisse de compensation
pour contester la compétence du Tribunal fédéral, à savoir qu'il serait
seul qualifié pour représenter la défenderesse dans le présent procès,
n'est pas fondée. L'art. 9 quater de l'arrêté du Conseil fédéral du
16 février 1945 instituant des mesures provisoires pour le règlement
des paiements entre la Suisse et l'Allemagne (disposition introduite
par l'arrêté du 29 avril 1947) prévoit bien, il est vrai, que "pour les
avoirs des personnes morales auxquelles, au 16 février 1945 au plus tard,
des ressortissants allemands sont principalement intéressés", l'Office
suisse de compensation "peut ... 4) prendre des mesures pour conserver
la valeur de ces avoirs, ... pour les représenter, pour ester en justice
en matière civile et pénale, pour exercer tous les droits des créanciers
selon la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite". Mais
cette disposition signifie simplement que l'Office a qualité pour
ester en justice ou intervenir dans un procès où seraient engagés les
intérêts qu'il a à sauvegarder. On ne saurait l'interpréter en ce sens
qu'il serait seul qualifié pour introduire un procès de ce genre ou, à
supposer le procès déjà lié, pour exiger que les ressortissants allemands
intéressés n'exécutent aucun acte de procédure sans son autorisation. Le
seul droit que cette disposition lui confère est celui de faire valoir
les prérogatives qui lui sont réservées. Sans doute faut-il aussi entendre
l'arrêté en ce sens qu'il a qualité pour représenter des personnes morales
aux avoirs desquelles peuvent être intéressés ces mêmes ressortissants,
mais non pas en tant que représentant légal de celles-ci. Or, en
l'espèce, l'Office a eu tout loisir d'exercer ses prérogatives. Pour
autant qu'il s'agit de l'objet même du litige, à savoir la validité
de la fondation, il n'en a cependant pas fait usage, autrement dit n'a
pas abordé les questions de fait et de droit que soulevait le litige. Sa
thèse se ramenait simplement à soutenir que le procès visait à éluder les
dispositions concernant le blocage des valeurs situées ou administrées en
Suisse pour le compte ou en faveur des personnes qui y sont mentionnées,
et ne pouvait en conséquence être engagé sans son assentiment, en qualité
de représentant légal de la fondation, ce qui est insoutenable.

    Ces arrêtés ne peuvent avoir eu pour but d'empêcher le juge civil
de trancher une question qui est de sa compétence et dont il a été
régulièrement saisi.