Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 81 III 136



81 III 136

37. Arrêt du 20 décembre 1955 dans la cause Renevey. Regeste

    Art. 92 Ziff. 3 SchKG. Voraussetzungen der Unpfändbarkeit von Sachen,
die zu Studienzwecken und zur beruflichen Ausbildung dienen.

Sachverhalt

    A.- Dans les poursuites intentées par la Banque cantonale vaudoise
(No 364 et 405) et Albert Amann (No 437) contre Louis Renevey, l'Office
des poursuites d'Avenches a saisi notamment un piano estimé à 300 fr. Le
débiteur a porté plainte contre cette saisie, faisant valoir que le piano
litigieux constitue un bien insaisissable, car il est indispensable aux
études de musique de ses enfants. L'Autorité inférieure de surveillance
a rejeté la plainte, le 7 septembre 1955. Saisie d'un recours formé par
Renevey, la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois,
par arrêt du 3 novembre 1955, a confirmé cette décision. Elle a considéré
que, la fille du recourant faisant un apprentissage de commerce et ne
suivant qu'accessoirement les cours du Conservatoire, le piano saisi
n'était pas indispensable à la formation professionnelle du débiteur ou
des membres de sa famille et que dès lors les conditions d'application
de l'art. 92 ch. 3 LP n'étaient pas réalisées.

    B. - Renevey a, en temps utile, interjeté recours au Tribunal fédéral
contre cet arrêt et conclu à ce que le piano saisi à son préjudice fût
déclaré insaisissable. Il relève que c'est à tort que l'autorité cantonale
a admis que sa fille Marie-Noëlle, née en 1937, faisait un apprentissage
de commerce et n'étudiait le piano qu'à titre accessoire; en réalité,
la fille du recourant est inscrite à l'Ecole de commerce et suit, depuis
huit ans, des cours au Conservatoire de musique de Fribourg, où elle
se trouve en degré supérieur; elle tient l'orgue à l'église catholique
d'Avenches, les autorités paroissiales lui ayant demandé de continuer à
le faire après que sa famille se fut fixée à Fribourg; elle est en outre
engagée à l'occasion pour jouer du piano pendant des cours de danse.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

    Selon l'arrêt RO 56 III 41, le piano qui sert simplement d'instrument
d'étude à un enfant du débiteur est saisissable; l'obligation légale des
parents d'assurer à leurs enfants une instruction professionnelle doit
être, conformément à l'art. 275 CC, proportionnée à leurs facultés et,
si légitime que soit le désir des père et mère de donner à leurs enfants
une instruction dépassant la moyenne, ils ne sauraient le faire prévaloir
sur les droits de leurs créanciers.

    Dans la mesure où elle implique l'idée que les objets servant à
l'étude et à la formation professionnelle sont en tout cas saisissables,
l'interprétation de l'art. 92 ch. 3 LP donnée par l'arrêt précité est
trop restrictive. Toutefois, l'insaisissabilité de ces objets ne peut
être admise que si leur enlèvement doit avoir pour conséquence d'empêcher
l'intéressé de parvenir à l'activité lucrative à laquelle il se prépare
ou de l'obliger à un changement d'orientation qui ne peut lui être
raisonnablement demandé.

    Ce n'est, cependant, pas le cas en l'espèce. S'il est vrai que la
fille du recourant n'accomplit pas un apprentissage de commerce, elle
suit les cours d'une école de commerce, ce qui ne peut avoir d'autre but
que de la former en vue de l'exercice d'une profession dans le commerce,
l'industrie ou l'administration et n'a aucun rapport avec une activité
future dans la musique. Grâce à ses études commerciales, la fille du
débiteur sera en mesure de gagner sa vie et, si la saisie du piano peut
avoir momentanément des effets défavorables pour sa culture en général,
elle ne portera pas préjudice, dans une mesure digne d'être prise en
considération, à ses possibilités de gain dans la profession commerciale
qu'elle s'est choisie ni ne la contraint à un changement de carrière. La
fréquentation des cours d'une école de commerce est propre à assurer à
la fille du recourant une formation professionnelle lui permettant de
gagner convenablement sa vie, et Renevey ne saurait exiger de pouvoir
lui procurer, au détriment de ses créanciers, une éventuelle seconde
source de gain en lui faisant apprendre le piano. Demoiselle Renevey,
qui est née en 1937, sera au surplus à la fin de ses études commerciales,
soit dans un proche avenir, en mesure d'occuper un emploi lucratif et
pourra ainsi s'acheter un piano en vue de continuer, si elle le veut,
sa formation musicale.

Entscheid:

    Par ces motifs, la Chambre des poursuites et des faillites prononce:

    Le recours est rejeté.