Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 80 I 397



80 I 397

66. Arrêt du 13 juillet 1954 en la cause Nicolet contre Département
fédéral de l'économie publique. Regeste

    Art. 4, Abs. 1, lit. a, und Abs. 2 UB.

    Wer eine Unternehmung, deren Inhaber er ist, an einen Dritten
abgetreten hat, kann sich für die Bewilligung zur Eröffnung einer neuen
Unternehmung nicht auf Art. 4, Abs. 1, lit. a UB berufen.

    - Bei ihm kommt nur Art. 4, Abs. 2 UB in Frage.

Sachverhalt

    A.- Georges Nicolet, né en 1911, a tout d'abord travaillé dans un
atelier de terminage, du 1er avril 1926 au 31 mars 1927, puis il a fait
un apprentissage d'une année comme remonteur de mécanismes et rouages. Il
a ensuite travaillé dans diverses entreprises horlogères jusqu'en 1942,
année où il s'associa avec son frère, Eric Nicolet, pour ouvrir un
atelier de terminage de mouvements d'horlogerie. Le 24 novembre 1947,
le Département fédéral de l'économie publique (en abrégé: le Département)
les autorisa à entreprendre la fabrication de la montre à ancre.

    Au début de l'année 1954, les associés décidèrent de se séparer. Sous
réserve d'approbation par le Département, ils conclurent, le 11 janvier,
une convention par laquelle ils stipulaient la dissolution de la société
en nom collectif, Eric Nicolet reprenant l'exploitation avec l'actif et
le passif. Le 19 février 1954, l'avocat Nahrath, à La Neuveville, demanda
au Département d'approuver cette convention. Le Département avait été
saisi de l'affaire auparavant déjà; le 12 janvier 1954, Georges Nicolet
lui avait demandé l'autorisation d'ouvrir un atelier de terminage pour
son propre compte.

    Par deux décisions du 20 avril 1954, le Département, d'une part,
autorisa Eric Nicolet à reprendre avec l'actif et le passif la fabrique de
montres à ancre précédemment exploitée par la société en nom collectif
Georges et Eric Nicolet et, d'autre part, refusa à Georges Nicolet
l'autorisation d'ouvrir un atelier de terminage. Les motifs de cette
dernière décision se résument comme il suit:

    Nicolet remplit les conditions de l'art. 4 al. 1 lit. a AIH. Il ne
saurait cependant se réclamer de cette disposition légale, car il serait
contraire aux intérêts de l'horlogerie, visés par le préambule de l'art. 4
al. 1 AIH, "qu'une personne qui a réalisé un bénéfice en se dessaisissant
d'une entreprise dont elle est propriétaire se prévale de ses capacités
et de son expérience pour revendiquer le droit d'exploiter une nouvelle
entreprise". L'autorisation demandée ne peut pas non plus être accordée
en vertu de l'art. 4 al. 2 AIH, car, vu le "resserrement du marché de
l'horlogerie", des autorisations ne peuvent être accordées que dans des
circonstances spéciales, qui n'existent pas dans la présente espèce.

    B.- Contre cette décision, Nicolet a formé, en temps utile, un recours
de droit administratif que, dans son premier mémoire et dans sa réplique,
il fonde, en bref, par les motifs suivants:

    L'ouverture d'un atelier de terminage par le recourant n'entraînerait
aucun accroissement de la main-d'oeuvre horlogère, car Nicolet est
lui-même horloger, comme son fils et son épouse, qui travailleront dans
son entreprise. Il n'a fait aucun bénéfice, mais a au contraire subi une
perte dans son association avec son frère; le bilan produit devant le
Tribunal fédéral le prouve. L'existence de pertes est du reste la raison
qui explique que les associés ne se soient pas partagé l'entreprise. S'ils
se sont séparés, c'est qu'il y avait incompatibilité d'humeur entre eux.

    C.- Le Département conclut au rejet du recours. Dans sa réponse et
sa duplique, il argumente en résumé comme il suit:

    Selon l'art. 3 al. 1 i.f. AIH, le titulaire d'une entreprise peut la
céder avec l'actif et le passif sans autorisation, même à une personne
qui ne présente aucune garantie. S'il remplit les conditions de l'art. 4
al. 1 lit. a, il pourrait, après la cession, obtenir l'autorisation
d'ouvrir une nouvelle entreprise et la céder à nouveau librement. Il y
aurait danger que, par cette voie, les exigences de l'art. 4 al. 1 lit. a
AIH soient éludées. Cela serait contraire aux intérêts prépondérants de
l'industrie horlogère. C'est pourquoi, sauf circonstances spéciales,
le Département, selon une pratique constante, refuse l'autorisation
d'ouvrir une nouvelle entreprise aux personnes qui, ayant déjà été
titulaires d'un permis, l'ont cédé à un tiers. Il n'y a, en l'espèce,
aucun motif de déroger à cette règle.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Dans son arrêt Etienne, du 12 février 1954 (RO 80 I 91,
consid. 5), le Tribunal fédéral a mis en doute que le titulaire d'une
fabrique d'horlogerie puisse, après l'avoir cédée à un tiers, faire état
de ses connaissances et de son expérience selon l'art. 4 al. 1 lit. a AIH
pour obtenir l'autorisation d'en ouvrir une nouvelle. La question, qui
avait pu alors rester ouverte, doit être tranchée aujourd'hui: Nicolet,
qui avait reçu en 1947, avec son frère, l'autorisation d'entreprendre la
fabrication de montres, a remis sa part d'entreprise avec l'actif et le
passif et demande l'autorisation d'ouvrir une nouvelle exploitation.

    Dans les limites fixées par l'art. 3 al. 1 AIH, le titulaire
d'une entreprise peut la céder avec l'actif et le passif sans permis,
même à une personne qui ne possède aucune qualification ni garantie
quelconques. Supposé qu'il remplisse les conditions que pose l'art. 4
al. 1 lit. a AIH, il pourrait, la cession étant opérée, faire usage
du droit à l'autorisation que lui confère cette disposition légale et
ouvrir ainsi une nouvelle entreprise, puis la remettre à nouveau et ainsi
de suite. Ce procédé, d'une part, augmenterait l'appareil de production
dans la branche dont il s'agit, sans que l'administration puisse exercer
aucun contrôle; d'autre part, il permettrait à un nombre croissant de
personnes qui ne remplissent pas les conditions de l'art. 4 al. 1 lit. a
AIH de s'établir dans l'horlogerie en éludant les exigences de cette
disposition légale. L'art. 3 al. 1 dernière phrase crée, il est vrai,
cette possibilité, mais le nombre de ces cas, s'il augmentait au-delà de
certaines limites, compromettrait l'équilibre de la production et de la
concurrence, que doit précisément établir l'arrêté du 22 juin 1951. Enfin,
de telles cessions suivies d'autant de nouvelles ouvertures n'auraient lieu
qu'au bénéfice des spéculateurs. C'est précisément en vue d'excès de ce
genre que le législateur a réservé, dans le préambule de l'art. 4 al. 1,
les "importants intérêts de l'industrie horlogère dans son ensemble
ou d'une de ses branches dans son ensemble". Le droit à l'autorisation
que confère en particulier l'art. 4 al. 1 lit. a n'existe que dans les
limites qu'imposent ces intérêts. Ceux-ci seraient manifestement lésés
si l'appareil de production pouvait être augmenté sans contrôle, si les
exigences de la loi touchant les capacités et l'expérience des candidats
pouvaient être éludées, enfin si de nouvelles entreprises pouvaient
être créées en vue de la spéculation. Pour prévenir toute manoeuvre dans
ce sens, il faut, par référence aux intérêts importants de l'industrie
horlogère, refuser le bénéfice de l'art. 4 al. 1 lit. a AIH à celui qui,
ayant été titulaire d'une entreprise, l'a cédée à un tiers et demande
ensuite l'autorisation d'en ouvrir une nouvelle.

    Ce principe, cependant, souffrira certaines exceptions, qui
pourront être faites par application de l'art. 4 al. 2 AIH. En effet,
cette disposition légale permet d'accorder l'autorisation dans d'autres
cas encore que ceux qui sont fixés par l'al. 1. Pour que l'autorisation
puisse être accordée en vertu de l'al. 2, il faut notamment et en tout
cas que la bonne marche de l'entreprise soit assurée. Ainsi le requérant
pourra recevoir l'autorisation même s'il ne satisfait pas intégralement
aux conditions de l'art. 4 al. 1 lit. a, si des circonstances spéciales le
justifient. Il appartient à la pratique et à la jurisprudence de définir
ces circonstances (RO 78 I 469).

Erwägung 2

    2.- Dans la présente espèce, Nicolet a reçu, en 1947, avec son frère,
l'autorisation d'entreprendre la fabrication de montres. Au regard des
principes posés plus haut, son cas semble particulier en ce sens qu'il
a remis sa part à son associé et qu'ainsi l'entreprise n'a pas été cédée
à un tiers qui lui aurait été primitivement étranger. Mais il n'en reste
pas moins qu'il s'agit d'une reprise avec l'actif et le passif, puisque
la société titulaire a disparu et a été remplacée par une personne
physique, Eric Nicolet, qui a repris l'actif et le passif. De plus,
le fait que le recourant n'a pas cédé une entreprise dont il aurait
été seul titulaire, mais seulement sa part d'une entreprise commune,
ne diminue nullement l'atteinte que subiraient les intérêts importants
de l'industrie horlogère s'il pouvait se mettre au bénéfice de l'art. 4
al. 1 lit. a et revendiquer le droit d'ouvrir une nouvelle entreprise,
qu'il lui serait ensuite loisible de céder sans autorisation dans les
limites fixées par l'art. 3 al. 1 i.f. Même donc s'il remplissait les
conditions de l'art. 4 al. 1 lit. a AIH, il ne pourrait revendiquer le
bénéfice de cette disposition légale.

    On ne voit pas quelles autres circonstances spéciales permettraient
d'accorder néanmoins au recourant l'autorisation qu'il requiert. Supposé
qu'il possède les capacités exigées pour l'ouverture d'un atelier de
terminage, il n'a en tout cas fait preuve d'aucune aptitude exceptionnelle.
On peut retenir qu'il n'a pas réclamé la scission de l'entreprise dont la
société en nom collectif était titulaire, en raison des mauvais résultats
de l'exploitation. Cependant, du point de vue de l'art. 4 al. 2, ce
motif d'aliénation d'une entreprise ne crée aucune circonstance spéciale
justifiant l'ouverture d'une nouvelle entreprise. Il était simplement
de l'intérêt du recourant de remettre sa part à son frère. Au surplus,
le Département affirme, à l'encontre de la présente requête, que, dans
la branche du terminage, la situation serait actuellement défavorable.

Entscheid:

               Par ces motifs, le Tribunal fédéral

    Rejette le recours.