Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 80 IV 35



80 IV 35

7. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 22 janvier 1954 dans la cause
Ministère public du canton de Neuchâtel contre Monnerat. Regeste

    Art. 191 Ziff. 1 Abs. 2, Ziff. 2 Abs. 5 StGB. Begriff des Lehrlings.

Sachverhalt

    A.- Adrien Hoeltschi, né le 25 septembre 1936, a été placé par son
père, à la fin de mai 1952, à titre d'aide, chez le plâtrier-peintre
Dubois, à Fleurier. Au début de juillet 1952, manquant d'ouvrage, Dubois
demanda à un concurrent de la place, Armand Monnerat, qui y consentit,
d'occuper l'enfant. Hoeltschi père n'en fut informé qu'une fois le
changement accompli.

    Au cours de l'été, Monnerat fit subir à l'enfant des actes analogues
à l'acte sexuel et commit sur lui d'autres actes contraires à la pudeur.

    B.- Le 14 septembre 1953, le Tribunal correctionnel du district
du Val-de-Travers a infligé à Monnerat deux ans de réclusion, en vertu
de l'art. 191 ch. 1 al. 2 et ch. 2 al. 5 CP; il l'a en outre privé des
droits civiques pour cinq ans. Il a estimé que le jeune Hoeltschi avait
été l'apprenti du prévenu.

    C.- Sur recours du condamné, la Cour de cassation neuchâteloise a cassé
ce jugement le 11 novembre 1953 et elle a renvoyé la cause au Tribunal
correctionnel du district de Boudry, pour qu'il applique l'art. 191 ch. 1
al. 1 et ch. 2 al. 1 à 4 CP. Elle a considéré, en effet, que Hoeltschi, qui
pouvait en tout temps être placé ailleurs par son père et à l'égard de qui
Monnerat n'avait pas assumé la responsabilité d'un maître d'apprentissage,
ne pouvait être tenu pour un apprenti au sens de l'art. 191 ch. 1 al. 2 CP.

    D.- Contre cet arrêt, le Ministère public du canton de Neuchâtel
se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Il soutient en substance
que la notion pénale de l'apprenti est plus large que celle qui découle
des art. 325 CO et 2 de la loi sur la formation professionnelle (LFP);
qu'il faut entendre par là tout jeune garçon ou jeune fille qui, dans
le travail exécuté pour un maître, ne fait qu'apprendre son métier, à
condition toutefois qu'il y ait un contrat pour une certaine durée, même
s'il est résiliable sans délai; que, dès lors, le tribunal de première
instance a correctement appliqué la loi en retenant le crime qualifié.

    E.- Monnerat conclut au rejet du pourvoi.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Bien que les conditions d'engagement d'Adrien Hoeltschi n'aient
pas été débattues entre son père et Monnerat, il n'est pas douteux
- et le prévenu ne le conteste pas - qu'un contrat de travail a été
conclu. Mais l'état de dépendance dans lequel l'adolescent se trouvait
envers son patron ne suffit pas à constituer la cause d'aggravation prévue
par l'art. 191 ch. 1 al. 2 CP. Si le législateur avait voulu menacer de
deux ans de réclusion le délinquant qui prend un employé pour victime, il
aurait ou bien complété l'énumération par les mots "employé" et "ouvrier",
ainsi qu'il l'a fait à l'art. 135 ch. 1 al. 1 CP, ou bien usé d'une clause
générale analogue à celle des art. 197 al. 1 et 202 ch. 2 al. 5. Il est par
conséquent impossible d'assimiler à un apprenti n'importe quel employé de
moins de 16 ans, d'autant plus que la jurisprudence interdit d'interpréter
extensivement l'art. 191 ch. 1 al. 2 CP (RO 71 IV 192 consid. 4).

    Pour distinguer de l'employé l'apprenti au sens pénal du mot, il
faut se rappeler que l'art. 191 ch. 1 al. 2 CP vise des circonstances
où la victime se trouve dans un état de dépendance particulière envers
le délinquant. Dans le cas de l'apprenti, ce rapport de subordination
est caractérisé par l'obligation, assumée par l'employeur, de veiller
à l'instruction professionnelle de l'adolescent. Pour que le délinquant
puisse être reconnu coupable d'attentat qualifié à la pudeur d'un enfant,
il faut donc en tout cas qu'il soit tenu, en vertu d'un contrat, de
pourvoir à la formation professionnelle de sa victime. A cet égard,
les critères du droit civil ne sont pas déterminants. Il n'est pas
indispensable que le contrat soit conclu par écrit, qu'il règle tous les
points indiqués aux art. 325 al. 2 CO et 7 al. 1 LFP, que l'apprenti soit
libéré des écoles et ait accompli sa quinzième année (art. 2 al. 1 LFP)
ni que la profession faisant l'objet de l'apprentissage soit visée par
la loi sur la formation professionnelle.

Erwägung 2

    2.- Rien, en l'espèce, ne permet d'admettre que Monnerat ait
assumé l'obligation de s'occuper de l'instruction professionnelle de
Hoeltschi. Il ressort au contraire de l'arrêt attaqué que l'adolescent
travaillait comme manoeuvre. Le pourvoi lui-même ne cite aucun fait d'où
l'on pourrait inférer que Hoeltschi était l'apprenti de l'intimé. La Cour
cantonale a par conséquent eu raison de lui dénier cette qualité.

Entscheid:

      Par ces motifs, la Cour de cassation pénale prononce:

    Le pourvoi est rejeté.