Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 80 IV 140



80 IV 140

28. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 28 avril 1954 dans la cause
Veillon et consorts contre Cornu. Regeste

    Art. 277 bis Abs. 1, 277 ter BStP.

    Der kantonale Richter ist immer an den Schluss gebunden, den der
Kassationshof des Bundesgerichts für den betreffenden Fall aus seinen
rechtlichen Erwägungen zieht. Er darf nicht prüfen, ob die Bundesbehörde
sich wirklich auf die von ihm festgestellten Tatsachen gestützt hat.

Sachverhalt

    A.- Sur plainte d'Henri Cornu, le Tribunal de police correctionnelle
du district d'Aigle a infligé à Adrien Veillon et à Franz Meli 75 jours
d'emprisonnement sans sursis, pour calomnie et injure. Ida Veillon fut
reconnue coupable de complicité à ces délits et condamnée à un mois
d'emprisonnement avec sursis et à 1000 fr. d'amende.

    La Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois a maintenu
ce jugement par arrêt du 26 janvier 1953.

    Les condamnés s'étant pourvus en nullité à la Cour de cassation
fédérale, celle-ci a, le 18 décembre 1953, annulé l'arrêt cantonal et
renvoyé la cause à la juridiction vaudoise, pour qu'elle acquittât Ida
Veillon et mît Adrien Veillon et Franz Meli au bénéfice du sursis.

    B.- Le 15 février 1954, la Cour de cassation cantonale a rendu un
nouvel arrêt, par lequel elle maintenait derechef le jugement du Tribunal
de police correctionnelle du district d'Aigle.

    C.- Les trois condamnés se pourvoient de nouveau en nullité à la Cour
de cassation pénale du Tribunal fédéral. Ils concluent à l'annulation de
l'arrêt cantonal du 15 février 1954 et au renvoi de la cause à l'autorité
vaudoise, pour qu'elle acquitte Ida Veillon et accorde le bénéfice du
sursis à Adrien Veillon et à Franz Meli. Le plaignant Cornu conclut au
rejet des pourvois et le Ministère public se rapporte à justice.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Aux termes de l'art. 277 ter PPF, la Cour de cassation fédérale,
si elle juge le pourvoi fondé en ce qui concerne l'action pénale, annule
la décision attaquée et renvoie la cause à l'autorité cantonale pour
qu'il soit statué à nouveau; celle-ci doit fonder sa décision sur les
considérants de droit de l'arrêt de cassation.

    Dans une jurisprudence constante, la Cour de cassation du Tribunal
fédéral considère que, lorsqu'elle admet le pourvoi et renvoie la cause au
juge cantonal, elle a la faculté d'indiquer dans le dispositif de son arrêt
le sens dans lequel le nouveau jugement devra être rendu (cf. par exemple
RO 79 IV 73, 133 et 156). Cette pratique n'est nullement inconciliable
avec le caractère cassatoire du pourvoi en nullité. Lorsque les faits
ne doivent pas être complétés par la juridiction cantonale, celle-ci,
qui est liée par les considérants de droit de l'arrêt de cassation, ne
peut statuer que dans le sens voulu par l'autorité fédérale. Aussi est-il
naturel que cette dernière le précise dans le dispositif de son prononcé,
ce point du dispositif constituant alors le résumé et la conclusion des
considérants juridiques qui lient le juge cantonal. Du reste, la Cour de
cassation pénale vaudoise ne conteste pas cette faculté à la Cour fédérale.

Erwägung 2

    2.- En revanche, elle souligne qu'en vertu de l'art. 277 bis
PPF, la Cour de cassation fédérale est liée par les constatations de
l'autorité cantonale. Cette disposition, dit-elle, doit être rapprochée
de l'art. 277 ter, par lequel le législateur a retiré à la juridiction
fédérale le droit de statuer au fond lorsqu'elle admet le pourvoi, même
si sa décision aboutit à un acquittement; dans ce cas, la cause doit donc
toujours être renvoyée au juge cantonal, qui continue à porter, dans le
jugement à rendre, la responsabilité de la partie relative aux faits;
or il ne peut assumer cette responsabilité que si les faits sur lesquels
s'est fondée la Cour fédérale sont identiques à ceux qu'il a constatés
lui-même; il a donc le droit de vérifier si cette condition est remplie;
quand elle ne l'est pas, il ne saurait être lié par les considérants de
droit de l'arrêt fédéral.

    Cette argumentation est erronée. En premier lieu, la Cour de cassation
vaudoise croit à tort qu'en ordonnant toujours le renvoi de la cause en cas
d'admission du pourvoi, le législateur a voulu sauvegarder l'indépendance
du juge cantonal. Cette règle remonte à l'arrêté fédéral du 11 décembre
1941 modifiant à titre provisoire l'organisation judiciaire fédérale. Elle
ne fut alors édictée que pour rendre au pourvoi en nullité son caractère
de moyen de cassation et permettre ainsi une reprise ultérieure de la
procédure aux dépens de l'accusé, ainsi que l'application des prescriptions
cantonales suivant lesquelles l'accusé acquitté peut être tenu de payer
tout ou partie des frais de procédure (cf. message du Conseil fédéral du 10
octobre 1941, FF 1941 p. 785). En 1943, cette réglementation a été insérée
sans discussion dans la loi fédérale sur la procédure pénale, de sorte
qu'on peut admettre que les motifs invoqués à l'appui de la modification
de 1941 étaient encore valables deux ans plus tard. En particulier,
c'est en vain que la juridiction cantonale arguë de certaines déclarations
faites en 1943 devant le Conseil des Etats à propos des art. 64 et 66 OJ;
elle perd de vue que ces dispositions concernent seulement le renvoi de
l'affaire au juge civil cantonal pour qu'il complète l'état de fait et
qu'elles ne correspondent donc nullement à l'art. 277 ter PPF.

    D'autre part, la Cour de cassation fédérale est certes liée par les
faits qu'a constatés le juge cantonal. Mais elle leur applique librement
la loi et ses considérants - de même que la conclusion qu'elle en tire
dans son dispositif - règlent définitivement le cas concret et excluent
toute autre décision. Elle-même ne saurait plus rien y changer après
coup. Sans doute l'art. 136 litt. d OJ dispose-t-il qu'il y a ouverture
à revision lorsque, par inadvertance, le tribunal n'a pas apprécié des
faits importants qui ressortent du dossier. Mais cette disposition n'est
pas applicable aux arrêts rendus sur l'action pénale par les autorités
fédérales de répression (art. 139 i. f. OJ) et la loi fédérale sur la
procédure pénale ne prévoit aucune possibilité de revision. On doit en
conclure que la Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral ne peut plus
revenir sur ses arrêts, même s'ils reposent sur des erreurs de fait ou
des inadvertances manifestes. La juridiction cantonale ne saurait donc,
à plus forte raison, revoir un arrêt fédéral sur la question des faits et,
selon le résultat de son examen, refuser de se soumettre aux instructions
obligatoires que ce prononcé contient (cf. arrêts Bossard du 13 septembre
1946 et Roth du 12 février 1952).

Erwägung 3

    3.- Dans ces conditions, il n'est pas nécessaire de juger si, comme
le prétend l'autorité vaudoise, la Cour de cassation fédérale a fondé
son arrêt du 18 décembre 1953 sur des faits différents de ceux que la
juridiction cantonale avait admis. Le nouvel arrêt attaqué doit donc
être annulé. La cause est renvoyée à la Cour de cassation vaudoise pour
qu'elle statue dans le sens que l'autorité fédérale lui a indiqué par
son premier arrêt.

Entscheid:

      Par ces motifs, la Cour de cassation pénale prononce:

    Les pourvois sont admis, l'arrêt attaqué est annulé et la cause est
renvoyée à la juridiction cantonale:

    a)  pour qu'elle acquitte la recourante Ida Veillon;

    b)  pour qu'elle mette les recourants Adrien Veillon et Franz Meli
au bénéfice du sursis.