Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 139 V 176



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Urteilskopf

139 V 176

26. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit social dans la cause X. en
liquidation concordataire et consorts contre Fondation Fonds de garantie LPP
(recours en matière de droit public)
9C_400/2012 et autres du 4 avril 2013

Regeste

Art. 85 Abs. 1 lit. a BGG; Art. 52 und 56a BVG; Zulässigkeit der Beschwerde in
öffentlich-rechtlichen Angelegenheiten in verantwortlichkeitsrechtlichen
Streitigkeiten der beruflichen Vorsorge.
Frage offengelassen, ob Rechtsstreitigkeiten gestützt auf die
Verantwortlichkeitsbestimmungen von Art. 52 und 56a BVG Fälle einer
Staatshaftung im Sinne von Art. 85 Abs. 1 lit. a BGG darstellen (E. 2.2).

Regeste

Art. 73 BVG; Klageverfahren vor dem zuständigen kantonalen Vorsorgegericht.
Zu Grundsätzen der erstinstanzlichen Rechtspflege im Bereich der beruflichen
Vorsorge (E. 5).

Regeste

Art. 56a BVG (in der bis 31. Dezember 2004 geltenden Fassung);
Verantwortlichkeit bei Zahlungsunfähigkeit einer Vorsorgeeinrichtung; Prüfung
der Haftungsvoraussetzungen.
Zu den Haftungsvoraussetzungen (E. 8).
Die Klage des Sicherheitsfonds verhält sich nicht nachrangig zu einer
allfälligen Klage nach Art. 52 BVG (E. 9.1).
Ist das Ausmass des Schadens im Zeitpunkt der Klageanhebung weder exakt noch
annähernd bestimmbar, weil die Höhe des Erlöses aus der Liquidation der
Vorsorgeeinrichtung noch nicht feststeht, kann der Sicherheitsfonds gleichwohl
den gesamten Schaden geltend machen, sofern der Liquidationserlös an den
Schadensverursacher abgetreten wird (E. 9.2).
Der Schaden entspricht der durch die vorgeworfenen unerlaubten Verhaltensweisen
verursachten objektiven Verschlechterung der finanziellen Lage der
Vorsorgeeinrichtung. Mit Blick darauf, dass das Vermögen einer
Vorsorgeeinrichtung zahlreichen Einflüssen unterliegt, ist jede vorgeworfene
Verhaltensweise danach zu beurteilen, ob und wieweit sie zum Schaden der
Vorsorgeeinrichtung beigetragen hat (E. 11).

Regeste

Art. 71 Abs. 1 BVG; Art. 49 ff. und 60 BVV 2 (in der bis 31. März 2000
geltenden Fassung); Sanierung einer Vorsorgeeinrichtung; Beurteilung der
Zulässigkeit einer Immobilienübertragung zwecks Bezahlung von
Beitragsrückständen; Wirkungen der Übertragung.
Bei der Sanierung einer Vorsorgeeinrichtung durfte ein Beitragsrückstand unter
den damaligen Umständen selbst dann mittels einer Übertragung von verwertbaren
Liegenschaften ausgeglichen werden, wenn dies zu einer vorübergehenden
Verletzung von gesetzlichen Vorschriften über die Vermögensanlage der
Vorsorgeeinrichtungen führte (E. 12.5).
Mit der Übertragung wurde die Beitragsschuld an Zahlungsstatt beglichen;
kausale Verbindungen des Schadens zu Tatsachen, die vor der Übertragung
eingetreten sind, wurden dadurch unterbrochen (E. 13.3 und 14.2).

Regeste

Art. 11 BVG; Wirkungen einer Auflösung des Anschlussvertrages zwischen
Arbeitgeber und Vorsorgeeinrichtung.
Die Zahlungsunfähigkeit einer Vorsorgeeinrichtung kann sich nur aus Handlungen
im Rahmen ihrer Verwaltung, Geschäftsführung und Kontrolle ergeben. Die
Auflösung des Vorsorgeverhältnisses durch den Arbeitgeber als solche ist nicht
geeignet, die Vorsorgeeinrichtung zu schädigen (E. 15.3).

Regeste

Kantonales Verwaltungsrechtspflegeverfahren; Parteientschädigungsanspruch von
mit öffentlich-rechtlichen Aufgaben betrauten Körperschaften; Kantonalbank.
Als Anstalt des öffentlichen Rechts hat sich die Neuenburger Kantonalbank nicht
notwendigerweise in der Eigenschaft einer mit öffentlich-rechtlichen Aufgaben
betrauten Körperschaft am Verfahren beteiligt. Natur und Tragweite ihrer
Verfahrensbeteiligung müssen im Einzelfall konkret geprüft werden (E. 17).

Sachverhalt ab Seite 180

BGE 139 V 176 S. 180

A.

A.a La société en nom collectif X. exploitait une entreprise de construction et
de génie civil active principalement dans le canton de Neuchâtel. Les associés
de la société étaient F. et G. Le personnel de l'entreprise était assuré pour
la prévoyance professionnelle auprès de la Fondation de prévoyance en faveur du
personnel cadre de l'entreprise X. (ci-après: la Fondation du personnel cadre)
et auprès de la Fondation en faveur du personnel d'exploitation de l'entreprise
X. (ci-après: la Fondation du personnel d'exploitation). F. et G. siégeaient
dans les conseils de fondation de ces deux institutions de prévoyance, le
premier en qualité de président. L'organe de contrôle de ces institutions de
prévoyance était la société Y. SA.

A.b A la fin des années 1980, X. a commencé à rencontrer des difficultés
financières. Dans ce contexte, la société n'a plus versé régulièrement les
cotisations de prévoyance dues aux deux institutions de prévoyance auprès
desquelles son personnel était assuré. D'après les rapports de contrôle établis
par Y. SA à compter de l'exercice 1991, les montants des créances des
institutions de prévoyance auprès de l'employeur ne respectaient pas les normes
légales admissibles en matière de placement chez l'employeur. Au 31 décembre
1996, le montant de la dette à l'égard de la Fondation du personnel cadre
s'élevait à 4'883'547 fr. 95 sur un total du bilan de 8'021'074 fr. 30, tandis
que le montant de la dette à l'égard de la Fondation du personnel
d'exploitation s'élevait à 1'947'432 fr. 16 sur un total du bilan de 2'687'874
fr. 81; les liquidités disponibles semblaient par ailleurs insuffisantes pour
le règlement des engagements à court terme et des prestations de libre passage.

A.c Propriétaire d'un important parc immobilier dans le canton de Neuchâtel, X.
a proposé au début de l'année 1995, dans le but d'éteindre par compensation ses
dettes de cotisations, de transférer aux institutions de prévoyance l'un de ses
immeubles. Après avoir initialement exprimé son opposition à une telle
opération, l'Autorité de surveillance des institutions de prévoyance et des
fondations de la République et canton de Neuchâtel (ci-après: l'autorité de
surveillance)
BGE 139 V 176 S. 181
a donné son accord au transfert de propriété au mois d'avril 1996. L'opération
a toutefois échoué en raison du refus signifié par la banque créancière
hypothécaire.

A.d Vu la situation préoccupante dans laquelle se trouvaient les institutions
de prévoyance, l'autorité de surveillance a, par décision du 25 novembre 1996,
relevé les membres des deux conseils de fondation de leurs fonctions et désigné
la société Z. SA en qualité de curatrice. Dans le prolongement de cette mesure,
les responsables de X., les créanciers bancaires et hypothécaires, la curatrice
des institutions de prévoyance, la société Y. SA (en exécution d'un mandat
d'assistance technique et de coordination) ainsi que des représentants de la
République et canton de Neuchâtel ont élaboré un plan de sauvetage de
l'entreprise X. incluant notamment l'assainissement des deux institutions de
prévoyance. Dans ses grandes lignes, la solution adoptée comprenait la reprise,
avec effet au 1^er janvier 1997, de l'exploitation de l'entreprise de
construction (y compris les obligations courantes en matière de prévoyance
professionnelle incombant précédemment à X.) par une nouvelle société dénommée
X. SA et le transfert aux deux institutions de prévoyance, à titre de paiement
des dettes de cotisations, d'un certain nombre d'immeubles appartenant à X.

A.e Le 24 novembre 1997, X., X. SA et la Fondation du personnel cadre ont
conclu une convention - dont le contenu avait été préalablement approuvé par
l'autorité de surveillance - aux termes de laquelle X. s'engageait notamment à
transférer à l'institution de prévoyance des biens immobiliers (garages et
terrains à bâtir) pour une valeur de 4'883'547 fr. 95 en compensation de la
dette qu'elle avait à son égard. Le même jour, une convention similaire portant
sur une valeur de 1'640'072 fr. 16 a été passée avec la Fondation du personnel
d'exploitation. Les engagements respectifs des parties ont été complétés par
une convention additionnelle conclue le 17 février 1998.

A.f X. a déposé une demande de sursis concordataire le 25 février 1998, qui a
abouti à l'homologation d'un concordat par abandon d'actifs le 7 juin 1999. La
procédure de liquidation n'est à ce jour pas terminée.

A.g Le 3 novembre 2000, l'autorité de surveillance a déposé auprès du Ministère
public de la République et canton de Neuchâtel une dénonciation pénale portant
sur la gestion de la Fondation du personnel cadre et de la Fondation du
personnel d'exploitation. Une information a été ouverte à l'encontre de F. et
de M., ancien directeur
BGE 139 V 176 S. 182
financier de X., pour faits de gestion déloyale. Par ordonnance du 7 juin 2004,
le Ministère public a prononcé un non-lieu pour motifs de droit et insuffisance
de charges.

B.

B.a X. SA a mis un terme avec effet au 31 décembre 1998, respectivement au 31
décembre 2000 aux rapports de prévoyance avec la Fondation du personnel
d'exploitation (courriers des 30 septembre et 17 décembre 1998) et la Fondation
du personnel cadre (courrier du 8 décembre 2000). Par deux décisions du 12 mars
2001, l'autorité de surveillance a constaté la dissolution des deux
institutions de prévoyance, prononcé leur mise en liquidation, relevé Z. SA de
son mandat de curatrice et désigné deux liquidateurs. La procédure de
liquidation des deux fondations n'est à ce jour pas terminée.

B.b En réponse à une demande des liquidateurs de la Fondation du personnel
cadre, le Fonds de garantie LPP a, par décision du 26 juin 2002, accepté de
verser la somme de 5'235'000 fr. à titre de garantie des prestations légales et
réglementaires en faveur des assurés de l'institution de prévoyance.

C. La Fondation du personnel cadre et la Fondation du personnel d'exploitation
ont ouvert devant le Tribunal administratif de la République et canton de
Neuchâtel (depuis le 1^er janvier 2011: la Cour de droit public du Tribunal
cantonal de la République et canton de Neuchâtel) des actions en responsabilité
contre Z. SA (le 14 février 2006), Y. SA (le 17 février 2006), M. (le 5 mai
2006), la République et canton de Neuchâtel, en qualité d'autorité répondant
des actes commis par l'autorité de surveillance (le 14 novembre 2006), et X.
(le 8 mai 2007). Le traitement de ces actions a été tacitement ajourné en
attendant que la juridiction cantonale se prononce sur l'action introduite dans
l'intervalle par le Fonds de garantie LPP.

D. Par mémoire du 5 avril 2006, le Fonds de garantie LPP a ouvert action devant
le Tribunal administratif de la République et canton de Neuchâtel contre la
République et canton de Neuchâtel, la Banque cantonale neuchâteloise (en
qualité de banque hypothécaire et commerciale), Y. SA, X., F., G., X. SA et Z.
SA, en concluant à ce que les défendeurs soient condamnés solidairement à lui
payer la somme de 5'234'387 fr. 05 avec intérêt de 5 % dès le 26 juin 2002,
sous déduction du produit de la liquidation de la Fondation du personnel cadre
revenant au Fonds de garantie LPP, ou, à titre subsidiaire, à ce qu'ils soient
condamnés solidairement à lui verser un montant équitable à fixer par le
Tribunal.
BGE 139 V 176 S. 183
La juridiction cantonale a ordonné le 29 octobre 2010 la jonction des causes et
requis la production de divers dossiers et documents, puis refusé le 23
septembre 2011 l'administration de preuves supplémentaires.
Le 5 avril 2012, le Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel a
rendu l'arrêt suivant:
LA COUR DE DROIT PUBLIC
1. Condamne la République et canton de Neuchâtel, Y. SA, X. en liquidation
concordataire et X. SA, solidairement, à payer à la Fondation Fonds de garantie
LPP le montant de 5'234'387.05 francs plus intérêts à 5 % dès le 26 juin 2002,
sous déduction du produit éventuel de la liquidation des deux fondations de
prévoyance en faveur du personnel de l'entreprise X. revenant à la Fondation
Fonds de garantie LPP.
2. Rejette la demande dans la mesure où elle était dirigée contre la Banque
cantonale neuchâteloise, F., G. et Z. SA en liquidation.
3. Dit qu'il n'est pas perçu de frais de justice.
4. Alloue à la Fondation Fonds de garantie LPP une indemnité de dépens de
399'150 francs, solidairement à la charge des quatre défendeurs condamnés.
5. Alloue à Z. SA en liquidation une indemnité de dépens de 317'000 francs à la
charge de la Fondation Fonds de garantie LPP.
6. Alloue à F. et à G. une indemnité de dépens globale de 285'772 francs à la
charge de la Fondation Fonds de garantie LPP.

E. Le Tribunal fédéral a été saisi de cinq recours en matière de droit public
interjetés contre l'arrêt du Tribunal cantonal de la République et canton de
Neuchâtel du 5 avril 2012:
X. en liquidation concordataire a conclu à la réforme du jugement attaqué dans
le sens du rejet des conclusions prises par le Fonds de garantie LPP. A titre
subsidiaire, elle a demandé l'annulation du jugement et le renvoi de la cause à
la juridiction cantonale (cause 9C_400/2012).
X. SA a conclu à la réforme du jugement attaqué dans le sens du rejet de la
demande dirigée contre elle par le Fonds de garantie LPP et, en tant que
besoin, au renvoi de la cause à la juridiction cantonale pour nouvelle décision
sur les dépens (cause 9C_407/2012).
La Banque cantonale neuchâteloise a conclu à la réforme du jugement attaqué
dans le sens de l'allocation d'une indemnité de dépens de 316'209 fr. 05 à la
charge du Fonds de garantie LPP. A titre subsidiaire, elle a demandé
l'annulation du jugement et le renvoi de la
BGE 139 V 176 S. 184
cause à la juridiction cantonale pour nouvelle décision au sens des
considérants (cause 9C_411/2012).
La République et canton de Neuchâtel a conclu à la réforme du jugement attaqué
dans le sens du rejet de la demande dirigée contre elle par le Fonds de
garantie LPP et au renvoi de la cause à la juridiction cantonale pour nouvelle
décision sur les dépens (cause 9C_412/2012).
Y. SA a conclu à la réforme du jugement attaqué dans le sens du rejet de la
demande dirigée contre elle par le Fonds de garantie LPP. A titre subsidiaire,
elle a demandé l'annulation du jugement et le renvoi de la cause à la
juridiction cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants (cause
9C_422/2012).

F. Le Fonds de garantie LPP a conclu au rejet des recours dans la mesure de
leur recevabilité, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales n'a pas
déposé d'observations. Les parties recourantes ont renoncé à déposer des
observations complémentaires.

Erwägungen

Extrait des considérants:

2.

2.2 En matière de responsabilité étatique, le recours en matière de droit
public n'est recevable que si la valeur litigieuse s'élève au moins à 30'000
fr. (art. 85 al. 1 let. a LTF). En cas de recours contre une décision finale,
cette valeur est déterminée par les conclusions - recevables - restées
litigieuses devant l'autorité précédente juste avant que celle-ci prononce le
jugement (art. 51 al. 1 let. a LTF). Lorsque la valeur litigieuse est
inférieure au montant déterminant, le recours en matière de droit public est
néanmoins recevable si la contestation soulève une question juridique de
principe (art. 85 al. 2 LTF). Le Tribunal fédéral n'a pas encore été amené à se
prononcer sur la recevabilité de recours en matière de droit public portant sur
des litiges fondés sur les règles de responsabilité des art. 52 et 56a LPP dont
la valeur litigieuse est inférieure à 30'000 fr., singulièrement sur la
question de savoir si de tels litiges constituent des cas de responsabilité
étatique au sens de l'art. 85 al. 1 let. a LTF (sur la notion de
"responsabilité étatique", cf. ATF 137 V 51 consid. 4 p. 54; ATF 135 V 98
consid. 5 p. 101; MÉLANIE FRETZ, La responsabilité selon l'art. 52 LAVS: une
comparaison avec les art. 78 LPGA et 52 LPP, REAS 2009 p. 249). La question
peut demeurer indécise, car les conclusions restées litigieuses sur le fond
devant l'autorité précédente juste avant que celle-ci
BGE 139 V 176 S. 185
ne prononce le jugement s'élevaient à 5'234'387 fr. 05, de sorte que la valeur
litigieuse atteint en tout état de cause le seuil de 30'000 fr. fixé à l'art.
85 al. 1 let. a LTF. (...)
(...)

5. (...)

5.1 D'après l'art. 73 LPP, la procédure en matière de prévoyance
professionnelle doit être simple, rapide et, en principe, gratuite. Lorsque le
litige porte sur une contestation opposant le Fonds de garantie LPP aux
personnes responsables de l'insolvabilité de l'institution de prévoyance ou du
collectif d'assurés (art. 73 al. 1 let. d LPP), l'action est ouverte à
l'initiative du premier nommé par une écriture qui doit désigner les personnes
recherchées, contenir des conclusions ainsi qu'une motivation; c'est elle qui
déclenche l'ouverture de la procédure et détermine l'objet du litige et les
parties en cause (maxime de disposition; ATF 129 V 450 consid. 3.2 p. 453 et la
référence). Dans les limites de l'objet du litige tel qu'il a été déterminé par
les conclusions de la demande et les faits invoqués à l'appui de celle-ci, le
juge de première instance n'est toutefois pas lié par les prétentions des
parties; il peut ainsi adjuger plus ou moins que demandé à condition de
respecter leur droit d'être entendues (ATF 135 V 23 consid. 3.1 p. 26; voir
également arrêt 4A_487/2007 du 19 juin 2009 consid. 7.1).

5.2 Conformément à l'art. 73 al. 2, 2^e phrase, LPP, la maxime inquisitoire est
applicable à la procédure en matière de prévoyance professionnelle. En vertu de
ce principe, il appartient au juge d'établir d'office l'ensemble des faits
déterminants pour la solution du litige et d'administrer, le cas échéant, les
preuves nécessaires. En principe, les parties ne supportent ni le fardeau de
l'allégation ni celui de l'administration des preuves. Cette maxime doit
cependant être relativisée par son corollaire, soit le devoir de collaborer des
parties, lequel comprend l'obligation d'apporter, dans la mesure où cela est
raisonnablement exigible, les preuves commandées par la nature du litige et des
faits invoqués (ATF 138 V 86 consid. 5.2.3 p. 97; ATF 125 V 193 consid. 2 p.
195). Si le principe inquisitoire dispense les parties de l'obligation de
prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve, dans la mesure où, en
cas d'absence de preuve, c'est à la partie qui voulait en déduire un droit d'en
supporter les conséquences, sauf si l'impossibilité de prouver un fait peut
être imputée à la partie adverse. Cette règle ne s'applique toutefois que s'il
se révèle impossible, dans le cadre de la maxime inquisitoire et en application
du principe de la libre appréciation des preuves, d'établir un état de fait qui
BGE 139 V 176 S. 186
correspond, au degré de la vraisemblance prépondérante, à la réalité (ATF 117 V
261 consid. 3b p. 264 et les références; voir également MEYER/UTTINGER, in LPP
et LFLP, Commentaire, Schneider/Geiser/Gächter [éd.], 2010, n° 94 ad art. 73
LPP).

5.3 Dans le domaine des assurances sociales, le juge fonde généralement sa
décision sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable,
apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un
degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse
être considéré seulement comme une hypothèse possible; la vraisemblance
prépondérante suppose que, d'un point de vue objectif, des motifs importants
plaident pour l'exactitude d'une allégation, sans que d'autres possibilités ne
revêtent une importance significative ou n'entrent raisonnablement en
considération (ATF 135 V 39 consid. 6.1 p. 45 et les références; voir également
arrêt 9C_717/2009 du 20 octobre 2009 consid. 3.3).
(...)

7. Le Fonds de garantie LPP a, sur la base des art. 56 al. 1 let. b et c et 56a
al. 1 LPP, garanti les prestations légales et réglementaires dues par la
Fondation du personnel cadre devenue insolvable, puis exercé son droit de
recours à l'encontre des personnes qu'il jugeait responsables de
l'insolvabilité de l'institution de prévoyance.

7.1 Dans sa teneur initiale en vigueur jusqu'au 31 décembre 1996, l'art. 56 al.
1 let. b LPP (RO 1983 797) confiait le soin au Conseil fédéral d'édicter des
prescriptions sur les conditions dont dépendait la prise en charge des
prestations légales dues par des institutions de prévoyance devenues
insolvables, ainsi que sur le droit de recours contre les organes
d'institutions de prévoyance insolvables. Sur la base de cette délégation de
compétence, le Conseil fédéral a édicté l'ordonnance du 7 mai 1986 sur
l'administration du "fonds de garantie LPP" (OFG 2; RO 1986 867; en vigueur
jusqu'au 30 juin 1998, RO 1998 1662). Selon l'art. 11 de cette ordonnance, le
Fonds de garantie LPP avait, dans les limites des prestations garanties, un
droit de recours contre les personnes responsables de l'insolvabilité de
l'institution de prévoyance.

7.2 Afin de consacrer le droit de recours du Fonds de garantie LPP dans une
règle de niveau législatif, le législateur a adopté l'art. 56a al. 1 LPP,
disposition qui est entrée en vigueur le 1^er janvier 1997 (RO 1996 3067; voir
le rapport du 24 août 1995 de la Commission de la sécurité sociale et de la
santé publique du Conseil national en réponse
BGE 139 V 176 S. 187
à l'initiative parlementaire Rechsteiner, FF 1996 I 528; voir également arrêt
du Tribunal fédéral des assurances B 10/05 du 30 mars 2006 consid. 8.2.3.4, in
SVR 2006 BVG n° 34 p. 131). En vertu de cette disposition, le Fonds de garantie
LPP disposait, à concurrence des prestations garanties, d'un droit de recours
contre des personnes responsables de l'insolvabilité de l'institution de
prévoyance ou du collectif d'assurés.

7.3 Dans sa teneur applicable depuis le 1^er janvier 2005, l'art. 56a al. 1 LPP
prévoit que le Fonds de garantie LPP peut, vis-à-vis des personnes responsables
de l'insolvabilité de l'institution de prévoyance ou du collectif d'assurés
(depuis le 1^er janvier 2012: de la caisse de pension affiliée [RO 2011 3385]),
participer aux prétentions de l'institution au moment du versement des
prestations garanties et jusqu'à concurrence de celles-ci. Le Fonds de garantie
LPP est désormais subrogé aux droits de l'institution de prévoyance à
concurrence des prestations garanties (BEAT CHRISTEN, in LPP et LFLP,
Commentaire, Schneider/Geiser/Gächter [éd.], 2010, n° 6 ad art. 56a LPP).

7.4 Le Fonds de garantie LPP a fondé ses prétentions sur des faits qui étaient
antérieurs au 31 décembre 2004. Au regard de la réglementation applicable au
moment des faits litigieux, le Fonds de garantie LPP n'était pas subrogé aux
droits de l'institution de prévoyance, mais disposait d'un droit propre et
autonome non seulement contre les organes de celle-ci, mais aussi - à la
différence de la responsabilité réglée à l'art. 52 LPP - contre d'autres
personnes responsables de l'insolvabilité de l'institution de prévoyance,
telles que l'autorité de surveillance ou la société de réassurance (ATF 135 V
163 consid. 5.2 p. 168; ATF 130 V 277 consid. 2.1 p. 280; voir également arrêt
précité B 10/05 du 30 mars 2006 consid. 8.1, ainsi qu'ISABELLE
VETTER-SCHREIBER, Staatliche Haftung bei mangelhafter BVG-Aufsichtstätigkeit,
1996, p. 254).

8. En tant que norme générale de responsabilité, l'art. 56a al. 1 LPP (dans sa
teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2004) présuppose la violation fautive
d'une obligation (acte illicite); une négligence, même légère, suffit. Il faut
également que le lésé ait subi un dommage ainsi que l'existence d'un lien de
causalité naturel et adéquat entre le comportement reproché et le dommage (ATF
135 V 373 consid. 2.3 p. 375 et les références).

8.1

8.1.1 Le dommage juridiquement reconnu réside dans la diminution involontaire
de la fortune nette; il correspond à la différence entre le
BGE 139 V 176 S. 188
montant actuel du patrimoine du lésé et le montant qu'aurait ce même patrimoine
si l'événement dommageable ne s'était pas produit. Il peut se présenter sous la
forme d'une diminution de l'actif, d'une augmentation du passif, d'une
non-augmentation de l'actif ou d'une non-diminution du passif (ATF 133 III 462
consid. 4.4.2 p. 471; ATF 132 III 359 consid. 4 p. 366 et les références). Dans
le cas particulier, celui-ci consiste dans le montant pris en charge par le
Fonds de garantie LPP au titre des prestations qui auraient normalement dû être
allouées par l'institution de prévoyance si celle-ci n'était pas devenue
insolvable (ATF 135 V 373 consid. 2.3 p. 375 et les références).

8.1.2 Selon une jurisprudence constante, le lésé a également droit, en plus du
montant en capital de l'indemnité réparatrice, à l'intérêt compensatoire de ce
capital. L'intérêt compensatoire a pour but de placer le lésé dans la situation
où il se trouverait si le dommage, respectivement ses conséquences économiques,
avaient été réparés au jour de l'acte illicite. Cet intérêt, dont le taux
s'élève en principe à 5 % (art. 73 al. 1 CO; ATF 122 III 53 consid. 4b p. 54),
est dû dès le moment où les conséquences économiques du fait dommageable se
sont produites et court jusqu'au paiement de l'indemnité (ATF 131 III 12
consid. 9.1 p. 22 et les références).

8.1.3 Dire s'il y a eu dommage et quelle en est la quotité est une question de
fait qui lie en principe le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 et 2 LTF). C'est
en revanche une question de droit (art. 106 al. 1 LTF) de dire si la notion
juridique du dommage a été méconnue et de déterminer si l'autorité cantonale
s'est fondée sur des principes de calcul admissibles pour le fixer (ATF 132 III
359 consid. 4 p. 366; ATF 130 III 145 consid. 6.2 p. 167 et les références).

8.2 L'illicéité implique une atteinte à un bien juridiquement protégé, qu'il
s'agisse de l'atteinte à un droit subjectif absolu (illicéité par le résultat;
Erfolgsunrecht) ou de l'atteinte au patrimoine par la violation d'une norme de
protection du bien juridiquement atteint (illicéité par le comportement;
Verhaltensunrecht). Le patrimoine en soi n'est pas un bien juridique, son
atteinte donc pas illicite à elle seule. Les atteintes au patrimoine ne sont
par conséquent illicites que si elles découlent d'un comportement proscrit en
tant que tel par l'ordre juridique indépendamment de ses effets patrimoniaux
(théorie objective de l'illicéité). La condition est que les normes de
comportement violées visent la protection contre de telles atteintes. Le
comportement exigé par la loi peut consister soit dans une action, soit dans
une omission - auquel cas il faut qu'il existât, au moment déterminant,
BGE 139 V 176 S. 189
une norme juridique qui sanctionnait explicitement l'omission commise ou qui
imposait de prendre en faveur du lésé la mesure omise (position de garant
vis-à-vis du lésé). Les devoirs dont la violation est en cause résultent
d'abord de la loi; pour les organes au sens de l'art. 52 LPP sont déterminantes
en outre les obligations et prescriptions statutaires et réglementaires, ainsi
que les directives des autorités de surveillance et les obligations résultant
d'un contrat (ATF 135 V 373 consid. 2.4 p. 376 et les références). Savoir si un
comportement constitue un acte illicite susceptible d'entraîner la
responsabilité est une question de droit que le Tribunal fédéral peut examiner
librement. Pour trancher cette question de droit, il faut cependant se fonder
sur le contenu du comportement et sur les circonstances, lesquelles relèvent du
fait.

8.3 La responsabilité est déjà engagée par un comportement constitutif d'une
négligence légère. Commet une telle négligence celui qui, de façon même légère,
manque à son devoir de diligence. La diligence requise dans le cas concret
correspond à ce qu'un homme consciencieux et raisonnable, appartenant au même
cercle que le responsable, tiendrait pour exigible dans des circonstances
identiques; pour en juger, il ne faut pas se fonder sur un critère individuel
mais sur un critère objectif, qui tienne compte des circonstances concrètes.
Déterminer dans le cas concret si un comportement doit être qualifié de
négligence relève d'un jugement de valeur et repose largement sur
l'appréciation du juge (ATF 128 V 124 consid. 4e p. 132; voir également UELI
KIESER, in LPP et LFLP, Commentaire, Schneider/Geiser/Gächter [éd.], 2010, n°
27 ad art. 52 LPP). En pareil cas, le Tribunal fédéral fait preuve de retenue
et n'intervient que si le juge a abusé de son pouvoir d'appréciation, en se
référant à des critères dénués de pertinence ou en ne tenant pas compte
d'éléments essentiels, ou lorsque la décision, dans son résultat, est
manifestement inéquitable ou heurte de manière choquante le sentiment de
justice (arrêt 5C.18/2006 du 18 octobre 2006 consid. 7.1 in fine et les
références, in SJ 2007 I 238).

8.4 Enfin, pour que le dommage doive être réparé, il faut qu'il existe entre
l'insolvabilité et le comportement reproché au responsable un lien de causalité
naturelle et adéquate.

8.4.1 Un fait est la cause naturelle d'un résultat s'il en constitue l'une des
conditions sine qua non. En d'autres termes, il existe un lien de causalité
naturelle entre deux événements lorsque, sans le premier, le
BGE 139 V 176 S. 190
second ne se serait pas produit, ou du moins pas de la même manière; il n'est
pas nécessaire que l'événement considéré soit la cause unique ou immédiate du
résultat (ATF 133 III 462 consid. 4.4.2 p. 470 et les références).

8.4.2 Le rapport de causalité est adéquat lorsque le comportement incriminé
était propre, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de
la vie, à entraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit. Pour
savoir si un fait est la cause adéquate d'un préjudice, le juge procède à un
pronostic rétrospectif objectif: se plaçant au terme de la chaîne des causes,
il lui appartient de remonter du dommage dont la réparation est demandée au
chef de responsabilité invoqué et de déterminer si, dans le cours normal des
choses et selon l'expérience générale de la vie humaine, une telle conséquence
demeure dans le champ raisonnable des possibilités objectivement prévisibles (
ATF 129 II 312 consid. 3.3 p. 318 et les références). La jurisprudence a
précisé que, pour qu'une cause soit adéquate, il n'est pas nécessaire que le
résultat se produise régulièrement ou fréquemment. Si un événement est en soi
propre à provoquer un effet du genre de celui qui est survenu, même des
conséquences singulières, c'est-à-dire extraordinaires, peuvent constituer des
conséquences adéquates de cet événement (ATF 119 Ib 334 consid. 5b p. 344).
Lorsqu'il s'agit de juger de l'existence d'un lien de causalité adéquate entre
une ou des omissions et un dommage, il convient alors de s'interroger sur le
cours hypothétique qu'auraient pris les événements si le défendeur avait agi
conformément à ses devoirs (ATF 129 III 129 consid. 8 p. 134; ATF 127 III 453
consid. 5d p. 456).

8.4.3 L'existence d'un lien de causalité naturelle entre le fait générateur de
responsabilité et le dommage est une question de fait (ATF 130 III 591 consid.
5.3 p. 601). En revanche, la méconnaissance du concept même de la causalité
naturelle ainsi que l'existence d'un rapport de causalité adéquate constituent
des questions de droit que le Tribunal fédéral examine librement (ATF 123 III
110 consid. 2 p. 111 et les références).

8.5 Si deux ou plusieurs personnes sont tenues de réparer le même dommage, il y
a responsabilité plurale. La théorie générale de la pluralité de responsables
consacrée par le Tribunal fédéral distingue entre solidarité parfaite et
solidarité imparfaite (ATF 115 II 42 consid. 1b p. 45; ATF 104 II 225 consid. 4
p. 229). Dans les cas où plusieurs responsables ont commis une faute commune,
le préjudice causé est
BGE 139 V 176 S. 191
logiquement imputable à chacun d'eux (solidarité parfaite). Dans les cas où les
différents responsables ont agi indépendamment les uns des autres, chacun
d'entre eux répond certes de la totalité du préjudice qu'il a personnellement
causé, mais pas au-delà (solidarité imparfaite). Si une personne n'a causé
qu'une partie du préjudice, elle doit donc répondre de celle-ci, mais non du
préjudice dans son entier; il en va du respect des règles de la causalité, en
vertu desquelles nul n'est tenu de réparer un préjudice qu'il n'a pas causé. La
solidarité n'existe donc que dans la mesure de la responsabilité préalable de
chacun (ATF 130 III 362 consid. 5.2 p. 369; ATF 127 III 257 consid. 5a p. 262
et les références citées; voir également FRANZ WERRO, La responsabilité civile,
2^e éd. 2011, p. 457 ch. 1627 ss).

9. (...)

9.1 On ne saurait suivre les recourantes lorsqu'elles soutiennent, en se
fondant sur un arrêt rendu le 17 septembre 2009 par la Cour des assurances
sociales du Tribunal cantonal du canton de Fribourg (causes 605 2009-179 et 605
2009-180), que les actions en responsabilité fondées sur l'art. 56a al. 1 LPP
(dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2004) seraient subsidiaires à
celles fondées sur l'art. 52 LPP. Leur argumentation ne repose sur aucun
fondement légal ou jurisprudentiel et méconnaît manifestement le caractère
propre et autonome de l'action fondée sur l'art. 56a al. 1 LPP, tel que la
jurisprudence l'a consacré (cf. supra consid. 7.4). Malgré les difficultés
procédurales engendrées par la juxtaposition d'actions ouvertes par une
institution de prévoyance sur la base de l'art. 52 LPP et par le Fonds de
garantie LPP sur la base de l'art. 56a al. 1 LPP, il n'y a pas lieu de remettre
en cause ce principe.

9.2 Il n'en est pas moins vrai que le dommage effectif subi par le Fonds de
garantie LPP était encore incertain au moment où celui-ci a ouvert action.
Selon la jurisprudence, lorsque le dommage ne peut pas, vu l'incertitude
planant par exemple sur le dividende d'une faillite ou le bénéfice d'une
liquidation, être exactement déterminé ou du moins ne peut pas l'être d'une
manière suffisamment fiable, le lésé peut néanmoins faire valoir l'entier de
son préjudice supposé dans le cadre d'une action en responsabilité, à la
condition que le dividende de faillite ou le bénéfice de liquidation soit cédé
à l'auteur du dommage. Cette solution, retenue en droit public (ATF 108 Ib 97
consid. 1c p. 100) et en droit civil (ATF 111 II 164 consid. 1b p. 167), puis
étendue en matière d'assurances sociales (ATF 113 V 180
BGE 139 V 176 S. 192
consid. 3b p. 183), doit également être reprise dans le cadre du droit de
recours du Fonds de garantie LPP contre les personnes responsables de
l'insolvabilité d'une institution de prévoyance. Il serait contraire en effet
aux intérêts des parties d'ajourner indéfiniment l'exercice de créances en
dommages-intérêts, notamment lors de liquidations compliquées. Cette manière de
procéder respecte par ailleurs mieux le but des règles en matière de
responsabilité. Elle permet de remettre le lésé dans la situation dans laquelle
il se serait trouvé s'il n'avait pas été victime du comportement illicite de
l'auteur du dommage et, indirectement, d'exclure qu'il se trouve, en raison de
l'intrication des procédures, surindemnisé. Il paraît en outre plus équitable
que ce soit l'auteur du dommage qui supporte en définitive les conséquences
dues à l'incertitude planant sur le résultat définitif de la liquidation (voir
également ISABELLE VETTER-SCHREIBER, Staatliche Haftung bei mangelhafter
BVG-Aufsichtstätigkeit, 1996, p. 134).

9.3 Il résulte de ce qui précède que le Fonds de garantie LPP était en droit,
quand bien même son dommage réel ne pouvait pas, compte tenu des circonstances,
être chiffré ou ne pouvait pas l'être avec une précision suffisante, d'ouvrir,
moyennant cession du dividende de la liquidation de l'institution de prévoyance
en faveur des auteurs du dommage, une action en réparation du dommage pour le
montant total de son préjudice supposé. Sous réserve des précisions apportées
au présent considérant, la juridiction cantonale n'a par conséquent pas violé
le droit fédéral en entrant en matière sur l'action ouverte par le Fonds de
garantie LPP.
(...)

11. Comme on l'a vu (cf. supra consid. 8.4), un responsable n'est tenu de
réparer que le dommage qui se trouve dans un rapport de causalité naturelle et
adéquate avec le comportement qui fonde sa responsabilité. Contrairement à ce
qu'ont retenu les premiers juges, le préjudice indemnisé ne saurait simplement
résulter de la somme allouée par le Fonds de garantie LPP, mais doit
correspondre à l'aggravation objective de la situation financière de
l'institution de prévoyance engendrée par le ou les différents comportements
illicites reprochés. Viole donc le droit fédéral, car contraire au principe de
la causalité, le raisonnement de la juridiction cantonale consistant, par
exemple, à condamner la République et canton de Neuchâtel à payer la somme de
5'234'387 fr. 05 au motif que l'autorité de surveillance aurait négligé son
devoir de diligence en laissant augmenter sans réagir le montant des placements
auprès de l'employeur jusqu'à la
BGE 139 V 176 S. 193
somme de 4'883'547 fr. 95 (cf. infra consid. 13). Par ailleurs, c'est le lieu
de préciser qu'une institution de prévoyance peut essuyer des pertes pour de
multiples motifs: actes illicites, violation de devoirs contractuels,
non-paiement des cotisations de l'employeur ou des travailleurs, rendements
insuffisants, perte sur placements, frais de gestion (interne ou externe)
exorbitants, retraits importants d'avoirs de libre passage, etc. Il n'est ainsi
pas impossible que tout ou partie d'une perte soit imputable à des facteurs non
liés à un comportement individuel, comme par exemple une conjoncture économique
défavorable. Au regard de la diversité des facteurs pouvant influer sur la
fortune d'une institution de prévoyance, il y a lieu d'examiner pour chaque
comportement reproché si et dans quelle mesure il est en relation avec
l'insolvabilité de l'institution de prévoyance. Cela présuppose une analyse
chronologique détaillée de l'activité de l'institution de prévoyance (à la
lumière de l'évolution de la fortune, du personnel assuré, des rendements
réalisés, etc.) et de l'impact concret sur la fortune de chaque décision prise
et de chaque omission commise. Faute de savoir de quels éléments se composait
la perte de la Fondation du personnel cadre, la juridiction cantonale n'était
raisonnablement pas en mesure de se prononcer sur la responsabilité des parties
recherchées. Pour ce motif, il se justifierait d'annuler le jugement attaqué et
de renvoyer la cause à la juridiction cantonale pour qu'elle rende un nouveau
jugement sur le fond.

12. La juridiction cantonale a retenu que X., X. SA, la République et canton de
Neuchâtel et Y. SA avaient pris une part active dans l'établissement de la
convention passée le 24 novembre 1997, laquelle contenait, à son avis, une
solution inconciliable avec les exigences de l'ordonnance du 18 avril 1984 sur
la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (OPP 2; RS
831.441.1) et propre à mettre en péril le but de prévoyance. Elles auraient
commis ainsi un acte illicite ayant entraîné l'insolvabilité de la Fondation du
personnel cadre et l'intervention du Fonds de garantie LPP.

12.1 Plus précisément, la juridiction cantonale a examiné la question de savoir
s'il était admissible de procéder à l'assainissement de la Fondation du
personnel cadre par le truchement d'un transfert d'immeubles. Si la dette de la
société fondatrice (X.) avait été entièrement amortie, permettant de mettre fin
à la situation contraire à l'OPP 2 consistant dans le dépassement de la limite
admissible pour les placements chez l'employeur, le transfert d'immeubles avait
néanmoins créé à son tour une situation non conforme aux exigences de l'OPP 2.
BGE 139 V 176 S. 194
A la suite dudit transfert, la fortune immobilière de la Fondation atteignait
plus de 97 % des actifs au bilan à fin 1997, situation qui ne s'était guère
modifiée au cours des années suivantes. La plupart des immeubles cédés, à
savoir essentiellement des terrains à bâtir, n'avaient aucun rendement; ils ne
pouvaient procurer des liquidités à la Fondation que dans les limites des
possibilités offertes par leur mise en gage et leur vente, vente qui ne pouvait
guère être espérée dans un avenir proche compte tenu du marché immobilier
défavorable. Ce dernier élément avait très probablement été la raison pour
laquelle X. - acculée à la faillite et désireuse d'assurer rapidement sa survie
- ne les avait pas vendus elle-même. La solution consacrée par la convention
comportait donc clairement l'intention de favoriser le sauvetage de la société
fondatrice, et n'aurait vraisemblablement pas été acceptée par l'autorité de
surveillance s'il s'était agi uniquement d'empêcher la survenance d'un dommage
à l'encontre de l'institution de prévoyance (ou de ses assurés). Le manque de
liquidités de la Fondation pour faire face aux engagements à court terme,
relevé par les organes de contrôle successifs, ne pouvait pas être ignoré et le
risque que cette situation perdure était patent. A cela s'ajoutait le fait que
l'assainissement de la Fondation était censé se dérouler sur plusieurs années,
ce qui impliquait le maintien d'une situation contraire aux exigences légales
et réglementaires en matière de prévoyance professionnelle pendant une longue
période. De plus, la restructuration de la société fondatrice - si elle
présentait peut-être de bonnes chances de succès, lesquelles semblaient s'être
vérifiées depuis lors - n'offrait pas encore la garantie d'une remise à flot
durable de la Fondation. En conséquence, le concept même qu'incorporait la
convention de 1997 constituait une solution non seulement inconciliable avec
les exigences de l'OPP 2, mais également propre à causer le dommage invoqué par
le Fonds de garantie LPP. En d'autres termes, il n'était pas possible de
considérer que la solution prévue par la convention de 1997 ne mettait pas en
péril le but de prévoyance et que sa justification était suffisante, puisque
celle-ci résidait dans une large mesure dans la volonté d'assurer la poursuite
des activités de la société fondatrice sous une nouvelle raison sociale.
Dans ce contexte, la responsabilité de X. et de X. SA était engagée en tant que
principales intéressées à l'aboutissement des négociations et aux solutions
adoptées à l'issue de celles-ci. Pour sa part, Y. SA avait pris une part active
dans cette opération en assumant, ce qui était illicite, la double fonction
d'organe de contrôle de la
BGE 139 V 176 S. 195
Fondation et de conseiller financier de X., double fonction qui conférait non
seulement la faculté - résultant du mandat qu'elle avait reçu de X. - de
veiller aux intérêts de celle-ci, mais également une position de force à
l'égard de la Fondation et de l'autorité de surveillance. Quant à l'autorité de
surveillance, elle avait prêté son concours aux négociations qui avaient abouti
à l'adoption des solutions retenues à l'issue de celles-ci et donné son
approbation à la convention du 24 novembre 1997.

12.2 Il n'est pas contesté que la solution adoptée dans le cadre de la
convention conclue le 24 novembre 1997 par la Fondation du personnel cadre, X.
et X. SA, ratifiée par l'autorité de surveillance, entraînait le non-respect
par l'institution de prévoyance des règles fixées par le législateur en matière
de placement de la fortune d'une institution de prévoyance (art. 71 al. 1 LPP
et art. 49 ss OPP 2), singulièrement les principes de la sécurité et de la
répartition appropriée des risques au sens de l'art. 50 OPP 2. Le résultat
auquel conduisait cette transaction, en tant qu'elle aboutissait - d'après les
constatations de fait opérées par la juridiction cantonale - au placement de
plus de 97 % des actifs en immeubles et terrains à bâtir (art. 54 let. c OPP 2)
et à un manque de liquidités ne permettant pas de verser les prestations
d'assurance et de libre passage exigibles (art. 52 OPP 2), était contraire à la
réglementation applicable.

12.3 Cela étant, l'existence d'une situation contraire au droit ne signifie pas
que celle-ci est nécessairement en rapport de causalité avec le dommage survenu
postérieurement. Encore faut-il démontrer que le déséquilibre dans la
répartition de la fortune à la suite de la convention du 24 novembre 1997 a eu
des conséquences délétères sur la situation financière de l'institution de
prévoyance et qu'elle est une, sinon la cause (naturelle et adéquate), de
l'insolvabilité de celle-ci (voir ATF 137 V 446 consid. 7 p. 459). Pour toute
motivation à ce sujet, la juridiction cantonale a retenu que "le concept même
qu'incorpore la convention de 1997 constitue une solution non seulement
inconciliable avec les exigences de l'OPP 2 mais également propre à causer le
dommage invoqué". En vérité, il ressort de l'arrêt attaqué que la juridiction
cantonale n'a pas véritablement examiné, malgré les objections soulevées par
les recourantes, la question du rapport de causalité entre la conclusion de
cette convention et l'insolvabilité de la Fondation du personnel cadre. Ce
motif justifierait également d'annuler le jugement attaqué et de renvoyer la
cause à la juridiction cantonale pour qu'elle examine cet aspect du litige.
BGE 139 V 176 S. 196

12.4

12.4.1 X., X. SA, la République et canton de Neuchâtel et Y. SA allèguent dans
leurs mémoires respectifs que la situation de la Fondation du personnel cadre
aurait été bien plus défavorable si les mesures d'assainissement concrétisées
notamment par la convention du 24 novembre 1997 n'avaient pas été mises en
oeuvre. Compte tenu de la situation extrêmement difficile dans laquelle se
trouvait X. en 1997, il est évident que l'échec des mesures d'assainissement
aurait entraîné la faillite de la société. Dans cette hypothèse, le Fonds de
garantie LPP aurait dû également intervenir afin de garantir les prestations
légales et réglementaires en faveur des assurés de la Fondation du personnel
cadre, avec une perte probablement supérieure à celle qui sera finalement la
sienne en l'occurrence. Dans ces conditions, la convention du 24 novembre 1997
ne pouvait être considérée comme étant la cause du dommage.

12.4.2 Au travers de cette argumentation, les recourantes font implicitement
référence à la théorie dite du comportement de substitution licite (
rechtmässiges Alternativverhalten). Elle revêt le caractère d'une objection,
par laquelle le défendeur à l'action en responsabilité fait valoir que le
dommage serait également survenu s'il avait agi conformément au droit (cf. ATF
131 III 115 consid. 3.1 p. 119; ATF 122 III 229 consid. 5a/aa p. 233; arrêts
2C_147/2007 du 23 janvier 2008 consid. 8.1 et 4C.156/2005 du 28 septembre 2005
consid. 3.5.6, in SJ 2006 I p. 221). Sans nier que son comportement ait été
inadéquat, il affirme cependant que s'il avait agi de manière correcte, cela
n'aurait rien changé au résultat. En vertu de cette théorie, le défendeur à
l'action n'est responsable que dans la mesure où l'acte illicite qui lui est
reproché a lui-même causé le dommage ou contribué à augmenter un dommage
préexistant.

12.4.3 La réponse à l'objection soulevée par les recourantes nécessiterait en
principe de comparer le dividende qu'aurait pu obtenir la Fondation du
personnel cadre dans le contexte de la liquidation de X. si la faillite était
survenue au début de l'année 1997 avec le montant de la perte effectivement
subie par le Fonds de garantie LPP au terme de la liquidation de la Fondation
du personnel cadre. Il s'agit à l'évidence d'une question complexe, à laquelle
les faits constatés par la juridiction cantonale ne permettent pas de répondre.
En tout état de cause, on ne saurait suivre la démonstration à laquelle procède
l'intimé dans ses réponses au recours pour établir qu'une faillite
BGE 139 V 176 S. 197
aurait été préférable à la poursuite des activités. Dans le but de démontrer
que les actifs existants auraient permis de couvrir la somme due à la Fondation
du personnel cadre, l'intimé renvoie au document du 30 juin 1997 intitulé
"contrat d'acquisition de divers actifs avec reprises de dettes entre la
société en nom collectif X. et la société anonyme X. SA" et à la liste des
actifs qu'il contient. Le raisonnement de l'intimé ne tient toutefois pas
compte du fait que la faillite de X. aurait entraîné la liquidation de la
société selon les règles de la procédure ordinaire; il convenait à tout le
moins d'inclure les importants frais que la liquidation d'une société de cette
taille aurait induits ou encore la perte de valeur qu'auraient indubitablement
subie les actifs immobiliers non gagés à la suite de leur vente forcée. Pour
les motifs qui suivent, cette question peut toutefois souffrir de demeurer
indécise.

12.5 Malgré son contenu et les conséquences qu'elle entraînait, la convention
du 24 novembre 1997 ne constituait pas un acte illicite.

12.5.1 En premier lieu, il convient de souligner que la convention du 24
novembre 1997 aboutissait à une solution qui, contrairement à ce qu'a retenu la
juridiction cantonale, n'était que partiellement non conforme aux exigences de
l'OPP 2. D'après l'art. 54 let. c OPP 2 (dans sa teneur en vigueur au moment
des faits), la fortune d'une institution de prévoyance pouvait être placée à
raison de 50 % au maximum dans des immeubles. Dans ces conditions, la
convention ne pouvait être qualifiée d'illicite que dans la mesure où la part
des placements dans des immeubles dépassait 50 % de la fortune de la Fondation
du personnel cadre.

12.5.2 Plus généralement, la convention du 24 novembre 1997 n'était pas
contraire au droit.

12.5.2.1 Il n'est pas contesté que la Fondation du personnel cadre présentait
une situation particulièrement obérée en date du 31 décembre 1996, puisque la
somme due à l'institution de prévoyance par X. s'élevait à 4'883'547 fr. 95 et
qu'il y avait nécessité impérieuse de prendre des mesures afin de solder cette
dette et de mettre un terme à une situation qui était contraire à la
réglementation applicable. Le fait que la solution choisie pour mettre fin à
cet état de choses entraînait elle-même une situation contraire à la
réglementation applicable peut de prime abord paraître critiquable. On ne
saurait toutefois juger le bien-fondé de cette démarche sans en examiner les
modalités et la finalité. De fait, la convention du 24 novembre 1997 avait,
BGE 139 V 176 S. 198
il est vrai, pour premier résultat de maintenir une situation contraire à la
réglementation applicable, à la nuance près que la structure des placements,
telle que modifiée par la convention, autorisait désormais d'envisager un
assainissement à plus ou moins brève échéance de la structure financière de la
Fondation du personnel cadre. Un examen plus avant du contenu de la convention
fait apparaître que les parties s'étaient engagées à procéder le plus
rapidement possible à la vente des biens transférés (art. 8 in fine). Selon les
déclarations faites par Z. SA au cours de la procédure (reprises par X. SA dans
son recours), il avait notamment été veillé à ce que les immeubles réalisables
à court terme - à savoir libres de gage - reviennent à la Fondation du
personnel cadre. Qui plus est, la juridiction cantonale a constaté que les
valeurs immobilières retenues par les parties à la convention correspondaient à
une moyenne raisonnable entre les deux expertises établies à l'époque pour
fixer le prix de transfert des immeubles. Dans l'hypothèse où la Fondation du
personnel cadre ne pouvait faire face à ses obligations en raison de liquidités
insuffisantes, X. SA s'était également engagée à assumer les frais d'actes
comme les intérêts des crédits hypothécaires qui seraient contractés et
garantis par les immeubles de la Fondation du personnel cadre (art. 8 in
initio).
Contrairement à ce qu'a retenu la juridiction cantonale, cette solution n'était
pas inconciliable avec les exigences de l'OPP 2. En vertu de l'art. 60 OPP 2
(dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 mars 2000 [RO 1984 561]), l'institution
de prévoyance qui ne remplissait pas les conditions permettant un écart avec
les normes en matière de placements ou ne présentait pas une justification
suffisante n'était pas tenue de corriger immédiatement la situation, mais
pouvait, en fonction de la liberté accordée par l'autorité de surveillance et
compte tenu du degré d'urgence, bénéficier d'un délai pour procéder à
l'adaptation de ses placements. Eu égard à la situation difficile dans laquelle
se trouvait X. et des enjeux économiques et sociaux pour le canton de
Neuchâtel, une certaine flexibilité quant aux modalités de la solution qui
devait conduire à l'assainissement financier de la Fondation du personnel cadre
pouvait être tolérée. Dans ce contexte, la convention du 24 novembre 1997
constituait, malgré le maintien provisoire d'une situation contraire à la
réglementation applicable, un compromis acceptable et raisonnable, attendu que
la vente des immeubles transférés devait se dérouler dans les plus brefs délais
et compte tenu des garanties fournies quant aux prix de transfert des immeubles
concernés et en matière de fourniture de liquidités.
BGE 139 V 176 S. 199

12.5.2.2 On ne peut suivre la juridiction cantonale lorsqu'elle affirme qu'au
moment de la conclusion de la convention, la vente des immeubles "ne pouvait
guère être espérée dans un avenir proche au regard du marché immobilier
défavorable". Ce raisonnement revient en effet à remettre implicitement en
question, alors même qu'elles n'avaient pas été jugées critiquables, les
expertises immobilières sur lesquelles les parties à la convention se sont
fondées. Faute de s'appuyer sur des éléments objectifs permettant d'établir -
ou même simplement de rendre vraisemblable - que les immeubles en cause
n'étaient pas vendables dans les conditions du marché de l'époque ou qu'ils
avaient été intentionnellement surévalués, le raisonnement de la juridiction
cantonale relève manifestement d'une analyse a posteriori de la situation, ce
qui n'est pas admissible.

12.5.2.3 Le fait que la vente des immeubles ne s'est pas déroulée aussi
rapidement que prévu et pour le montant fixé par la convention relève de
problèmes liés à l'administration et à la gestion de la Fondation du personnel
cadre et concerne une période et des comportements postérieurs à la conclusion
de la convention. A ce propos, la juridiction cantonale a constaté qu'aucun
comportement répréhensible ne pouvait être reproché durant cette période à Z.
SA (en qualité de curatrice de la Fondation du personnel cadre) et à l'autorité
de surveillance (consid. 8 et 13f de l'arrêt attaqué), appréciation sur
laquelle il n'y a pas lieu de revenir.

12.6 Sur le vu de ce qui précède, il y a lieu de constater que la conclusion de
la convention du 24 novembre 1997 ne constituait pas un acte illicite
susceptible d'engager la responsabilité des recourantes. Dans ces conditions,
les aspects indécis du litige liés à la double fonction prétendument exercée
par Y. SA ou à l'absence de pondération des fautes respectives des divers
intervenants peuvent demeurer sans réponse.

13. La juridiction cantonale a retenu que l'autorité de surveillance n'avait
pas fait preuve entre 1989 et 1996 de la diligence suffisante dans le cadre de
ses tâches de surveillance de la Fondation du personnel cadre.

13.1 Plus précisément, la juridiction cantonale a constaté que l'autorité de
surveillance n'avait pas remis en cause l'exactitude des pièces établissant
l'évolution de la situation de la Fondation du personnel cadre depuis 1989, en
particulier des placements chez l'employeur et des placements immobiliers. S'il
était exact que l'autorité de
BGE 139 V 176 S. 200
surveillance était consciente de cette situation et qu'elle n'était pas restée
inactive, puisqu'elle s'était adressée à plusieurs reprises, dès 1989 en tout
cas, à l'organe de contrôle, à X. et à la Fondation du personnel cadre, pour
s'inquiéter de la créance non garantie contre l'employeur et du dépassement de
la limite admise en matière de placements immobiliers, il était également vrai
qu'elle s'était limitée à exiger le rétablissement d'une situation conforme aux
exigences de la loi et de l'OPP 2, sans prendre de mesures coercitives à
l'égard de la Fondation ou sur le plan pénal. Pour la juridiction cantonale, ce
comportement pouvait s'expliquer par la volonté de l'autorité de surveillance -
ou du département dont elle dépendait, voire du Conseil d'Etat - de ne pas
mettre en péril à la fois l'entreprise fondatrice et la fondation de
prévoyance, les difficultés économiques de la première étant à l'origine de
l'accroissement de sa dette à l'égard de la seconde. Certes, l'autorité de
surveillance n'avait pas à effectuer des évaluations périodiques de la
situation financière de l'entreprise fondatrice, tâche qui incombait à
l'institution de prévoyance, ni à se charger du contrôle complet de la gestion
et des comptes de celle-ci. Cependant, informée par les rapports annuels
successifs de l'organe de contrôle du non-respect des règles de l'OPP 2, elle
ne pouvait pas se limiter à exprimer sa préoccupation et se contenter, pendant
plusieurs années, d'inviter les organes de l'institution de prévoyance à les
corriger, fût-ce en leur impartissant des délais pour ce faire, sans prendre
elle-même des mesures contraignantes. Or, ce n'est finalement qu'en automne
1996 qu'une curatrice a été désignée, après l'échec définitif de la proposition
de X. de transférer aux deux fondations de l'entreprise un immeuble situé à O.,
décision prise selon l'autorité de surveillance "d'urgence", soit parce que la
situation de la Fondation du personnel cadre était désormais quasi désespérée.
En résumé, la surveillance présentait des insuffisances, non par ignorance de
la situation, mais par manque de rigueur dans l'application des exigences
légales et probablement par égard envers une entreprise occupant une place
importante dans l'économie et le marché du travail.
Les autorités de surveillance disposaient cependant de moyens préventifs et
répressifs, soit par exemple la faculté de donner des instructions à
l'institution de prévoyance et d'exiger leur application sous peine de
sanctions. Contrairement à ce qui était allégué, il n'était pas possible
d'affirmer qu'une attitude plus stricte de la part de l'autorité de
surveillance aurait nécessairement provoqué la faillite de X. et donc entraîné
un dommage comparable à celui qui était en cause.
BGE 139 V 176 S. 201
X. était propriétaire d'un parc immobilier considérable, dont elle ne
souhaitait pas se défaire parce que les investissements dans l'immobilier
constituaient pour les entreprises de construction des réserves leur permettant
de traverser les périodes de crise. Malgré les difficultés dues à l'évolution
défavorable du marché de la construction et à des charges hypothécaires trop
lourdes, il est probable que X. eût pu, si des mesures d'assainissement des
fondations avaient été exigées à temps, prendre des dispositions qu'elle
n'aurait sans doute pas souhaitées mais qui eussent permis de diminuer la dette
et mettre fin à l'augmentation constante de ses comptes courants. Le
comportement de l'autorité de surveillance était ainsi propre à causer la
survenance d'un dommage et y a effectivement contribué. Les violations des
exigences susmentionnées, lesquelles avaient pour finalité précisément de
réduire les risques et de protéger les destinataires des institutions de
prévoyance, devaient être qualifiées, à défaut de justification pertinente,
d'attitude illicite et fautive.

13.2 Selon l'art. 62 al. 1 LPP, l'autorité de surveillance s'assure que
l'institution de prévoyance se conforme aux prescriptions légales. En
particulier, elle vérifie la conformité des dispositions réglementaires avec
les prescriptions légales (let. a), exige de l'institution de prévoyance un
rapport périodique, notamment sur son activité (let. b), prend connaissance des
rapports de l'organe de contrôle et de l'expert en matière de prévoyance
professionnelle (let. c) et prend les mesures propres à éliminer les
insuffisances constatées (let. d). Si l'autorité de surveillance ne peut pas
intervenir directement dans la gestion d'une institution de prévoyance, sa
tâche consiste néanmoins à contrôler la conformité au droit de l'activité de
ladite institution, à la lumière des dispositions légales et réglementaires, en
particulier de l'OPP 2. Ainsi, la loi prévoit expressément que les institutions
de prévoyance doivent offrir en tout temps la garantie qu'elles peuvent remplir
leurs engagements (art. 65 al. 1 LPP). Elles doivent administrer leur fortune
de manière à garantir la sécurité des placements, un rendement raisonnable, une
répartition appropriée des risques et la couverture des besoins prévisibles de
liquidités (art. 71 al. 1 LPP et art. 49 ss OPP 2). Les prescriptions légales
ne contiennent pas d'énumération exhaustive des mesures qui sont à la
disposition de l'autorité de surveillance pour l'accomplissement de sa tâche;
celle-ci dispose d'un large pouvoir d'appréciation pour décider des mesures
qu'elle juge appropriées, sans qu'elle n'ait besoin de se référer à un
catalogue de mesures prévues dans une disposition expresse. L'étendue des
BGE 139 V 176 S. 202
compétences de l'autorité de surveillance résulte de la nature juridique du
contrôle étatique qu'elle exerce. En l'absence de dispositions topiques, ce
sont les principes généraux du droit administratif qui sont déterminants, soit
notamment l'égalité de traitement, l'interdiction de l'arbitraire, la
proportionnalité ou encore la bonne foi. D'éventuelles sanctions doivent
néanmoins être compatibles avec la finalité, telle que voulue par le
législateur, de la surveillance sur les institutions de prévoyance, à savoir de
garantir l'emploi conforme de la fortune de l'institution (pour une liste de
mesures envisageables, cf. Message du 19 décembre 1975 à l'appui d'un projet de
loi sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité, FF
1976 I 230; sur l'ensemble de la question, arrêt 2A.395/2002 du 14 août 2003
consid. 3.3 et les références; voir également CHRISTINA RUGGLI, in LPP et LFLP,
Commentaire, Schneider/Geiser/Gächter [éd.], 2010, n° 18 ss ad art. 62 LPP).

13.3 En l'occurrence, la République et canton de Neuchâtel ne formule aucun
grief à l'encontre des reproches qui lui ont été adressés par les premiers
juges, selon lesquels elle a, bien qu'elle fût parfaitement informée de
l'ampleur de la situation et de la violation des dispositions réglementaires en
matière de placement de l'OPP 2, tardé à prendre les mesures nécessaires afin
de corriger cette situation et, par ce comportement, contribué à l'augmentation
du compte courant de la société fondatrice auprès de la Fondation du personnel
cadre au-delà de toute proportion raisonnable. Si la recourante ne remet pas en
cause le caractère illicite et fautif de ce comportement, elle conteste
toutefois que celui-ci soit en lien de causalité avec le dommage subi par
l'intimé. Or, force est de constater, à l'instar de ce qui a déjà été mis en
évidence au considérant précédent, que les premiers juges n'ont pas procédé à
un examen détaillé de cette question. S'il est vrai qu'un tel comportement est
propre, dans l'absolu, à entraîner un préjudice, cela ne signifie pas encore
qu'il est à l'origine de tout ou partie du préjudice subi par l'intimé dans le
cas d'espèce. Dans la mesure où il a été constaté que la conclusion de la
convention du 24 novembre 1997 ne constituait pas un acte illicite susceptible
d'engager la responsabilité de la recourante, le transfert d'immeubles qu'elle
consacrait valait par conséquent paiement de la dette de cotisations et,
partant, extinction de celle-ci, et entraînait la rupture de tout lien de
causalité entre le dommage et l'ensemble des faits survenus antérieurement à la
conclusion de la convention. Il convient par conséquent de libérer la
recourante de sa responsabilité à raison du défaut de
BGE 139 V 176 S. 203
diligence dont elle aurait fait preuve dans le cadre de ses tâches de
surveillance de la Fondation du personnel cadre entre 1989 et 1996.

13.4 On ajoutera que dans l'hypothèse où une responsabilité de la recourante
aurait dû être reconnue, le montant du dommage ne pouvait en aucun cas s'élever
à 5'234'387 fr. 05. Les faits reprochés à la recourante concernaient
principalement le défaut de surveillance quant à l'augmentation constante de la
somme des placements auprès de l'employeur jusqu'au 31 décembre 1996. A cette
date, la somme due par X. à la Fondation du personnel cadre s'élevait à
4'883'547 fr. 95. D'après l'art. 57 al. 2 OPP 2 (dans sa teneur en vigueur
jusqu'au 31 mars 2004), la fortune d'une institution de prévoyance pouvait être
placée sans garantie chez l'employeur à raison de 20 % au maximum. Le préjudice
que l'intimé pouvait faire valoir à l'encontre de la recourante ne pouvait donc
s'élever qu'à la différence entre la somme de 4'883'547 fr. 95 et les 20 % de
la fortune de l'institution de prévoyance au 31 décembre 1996, montant auquel
il convenait encore de déduire le produit de la vente des immeubles objets de
la convention du 24 novembre 1997.

14. La juridiction cantonale a encore retenu que X. n'avait pas satisfait à
l'obligation qui lui incombait de payer les cotisations de prévoyance.

14.1 Pour la juridiction cantonale, il était incontestable que les comptes
courants de X. auprès des deux Fondations de prévoyance représentaient
l'accumulation de cotisations impayées pendant plusieurs années. Il ne faisait
ainsi pas de doute que X. avait contrevenu pendant plusieurs années à ses
obligations en matière de paiement des cotisations, comportement qui était à
l'origine de la créance de la Fondation du personnel cadre de 4'883'547 fr. 95
mentionnée par l'organe de contrôle dans son rapport pour l'exercice 1996.
Cette créance était de 353'000 fr. en 1985 et n'avait cessé d'augmenter depuis
lors, sous réserve d'une légère diminution pendant les années 1988 et 1989, et
dépassait à nouveau, dès 1990, largement le taux de 20 % admissible selon l'
art. 57 OPP 2 (dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 mars 2004). Que cette
situation fût due aux difficultés financières de l'entreprise fondatrice
n'était pas un motif d'exculpation et restait le résultat d'un comportement
illicite fautif qui s'étendait sur une dizaine d'années. Il ne pouvait dès lors
être question d'un retard momentané qu'aurait pu justifier un espoir concret de
voir la situation s'améliorer dans un avenir proche. L'existence de cette dette
constituait l'élément central
BGE 139 V 176 S. 204
de la convention de 1997 et, manifestement, une cause adéquate de
l'insolvabilité de la Fondation du personnel cadre et de la mise à contribution
du Fonds de garantie LPP à hauteur du dommage invoqué.

14.2 X. ne conteste pas avoir accumulé du retard dans le paiement de ses
contributions à la Fondation du personnel cadre et le caractère illicite de ce
comportement. Elle considère en revanche que la convention du 24 novembre 1997
emportait transfert d'immeubles pour le prix équivalent à sa dette et, par
conséquent, paiement de celle-ci. Or, comme déjà indiqué (cf. supra consid.
13.3), la conclusion de la convention du 24 novembre 1997 a entraîné la rupture
du lien de causalité entre le dommage et l'ensemble des faits survenus
antérieurement à la conclusion de la convention. Il convient par conséquent de
libérer la recourante de sa responsabilité à raison du non-respect de son
obligation de payer les cotisations de prévoyance.

15. La juridiction cantonale a encore considéré que X. SA avait engagé sa
responsabilité en résiliant en temps inopportun le contrat d'affiliation qui la
liait avec la Fondation du personnel cadre.

15.1 Pour la juridiction cantonale, la résiliation du 8 décembre 2000 était à
l'origine de la procédure de liquidation. Elle avait obligé la Fondation du
personnel cadre à effectuer d'importantes prestations de libre passage, alors
qu'elle se trouvait déjà, à la suite des conventions conclues en 1997, en
difficulté pour se procurer les liquidités lui permettant de satisfaire à ses
obligations prévisibles et normales. Dans la mesure où cet état de fait ne
pouvait échapper à X. SA, il était évident que la résiliation était une cause
adéquate de l'intervention du Fonds de garantie LPP. La résiliation constituait
par ailleurs une violation d'une norme de comportement destinée à protéger
l'institution de prévoyance contre une atteinte à son patrimoine. La convention
de 1997 prévoyait à son art. 5 que "la repreneuse maintient l'affiliation à la
Fondation de l'ensemble du personnel cadre de la fondatrice, sous réserve de
licenciements ordinaires" et dans son préambule que "afin d'éviter une
dissolution et une mise en liquidation de la Fondation suite au transfert du
personnel affilié à la repreneuse, celle-ci reprend les obligations de la
fondatrice, dès le 01.01.1997". Quoiqu'aucune durée minimale de la future
affiliation de X. SA à la Fondation du personnel cadre n'ait été prévue, le
sens du maintien convenu de l'affiliation par X. SA résidait dans la volonté
des parties de ne pas créer, par le transfert massif et simultané d'assurés
dans une
BGE 139 V 176 S. 205
autre institution de prévoyance, une situation à laquelle la Fondation ne
pourrait pas faire face faute de liquidités. Or, il était patent que la
situation restait précaire pour la Fondation du personnel cadre en 2000 et que
cette insuffisance de moyens perdurerait aussi longtemps que les immeubles
reçus en paiement ne seraient pas réalisés. X. SA savait que la résiliation du
contrat d'affiliation entraînerait la liquidation de la Fondation du personnel
cadre et devait donc nécessairement se douter qu'elle conduirait à
l'intervention du Fonds de garantie LPP.

15.2 La recourante peine à voir, sur la base de la motivation développée par la
juridiction cantonale, quels auraient été son comportement illicite et sa faute
en relation de causalité adéquate avec l'insolvabilité de la Fondation du
personnel cadre. Elle relève que l'entreprise X. SA a été constituée le 16 mai
1997, soit à une date où l'insolvabilité de la Fondation du personnel cadre
existait déjà; que les conventions du 24 novembre 1997 avaient eu pour effet
d'éteindre les dettes que la société fondatrice avait vis-à-vis des deux
Fondations au 31 décembre 1996; et que dès le 1^er janvier 1997, les
cotisations et primes dues aux deux Fondations avaient été acquittées par X.
SA. Dans ces conditions, le dommage lié à l'insolvabilité préexistante de la
société fondatrice et des Fondations n'avait pas pu être augmenté par un fait
susceptible d'être opposé à X. SA.

15.3 Si la décision de X. SA de mettre un terme aux rapports de prévoyance
qu'elle entretenait avec la Fondation du personnel cadre a entraîné la mise en
liquidation de l'institution de prévoyance et l'intervention du Fonds de
garantie LPP (causalité naturelle), la résiliation n'est manifestement pas à
l'origine de l'insolvabilité de la Fondation et, partant, du dommage subi par
l'intimé (causalité adéquate). L'insolvabilité d'une institution de prévoyance
ne peut résulter que d'actes commis dans le cadre de l'administration, de la
gestion ou du contrôle de celle-ci. Or, comme le relève à juste titre la
recourante, il n'est pas établi que X. SA a, au cours de la période où ses
employés étaient assurés auprès de la Fondation du personnel cadre, exercé, de
façon directe ou par l'intermédiaire de ses organes, une quelconque fonction au
sein de la Fondation, que ce soit dans l'administration, la gestion ou le
contrôle de celle-ci, dès lors que les pouvoirs de gestion avaient été confiés
par l'autorité de surveillance à Z. SA (décision de l'autorité de surveillance
du 25 novembre 1996). En considérant que la responsabilité de X. SA était
engagée à raison de la résiliation des rapports de prévoyance avec la Fondation
du
BGE 139 V 176 S. 206
personnel cadre, la juridiction cantonale a méconnu, ici également, la notion
de causalité et, partant, violé le droit fédéral.

15.4 Cela étant constaté, la question de savoir si la résiliation des rapports
de prévoyance constituait en soi un acte illicite au regard des dispositions
légales, réglementaires ou contractuelles applicables au moment des faits, peut
demeurer indécise.
(...)

17. (...)

17.1 Bien que la Banque cantonale neuchâteloise ait été libérée de toute
responsabilité à raison de l'insolvabilité de la Fondation du personnel cadre,
la juridiction cantonale a refusé de lui allouer des dépens à charge de
l'intimé, au motif que seuls les organismes qui n'étaient pas chargés de tâches
de droit public avaient droit à des dépens, condition que la Banque cantonale
neuchâteloise ne remplissait pas en sa qualité d'établissement de droit public.

17.2 La Banque cantonale neuchâteloise fait valoir que la juridiction cantonale
a, en refusant de lui allouer des dépens, d'une part, violé le principe de
l'égalité de traitement et, d'autre part, fait une application arbitraire de l'
art. 48 de la loi du 27 juin 1979 sur la procédure et la juridiction
administratives (LPJA; RSN 152.130).
Si la Banque cantonale neuchâteloise est un établissement de droit public
indépendant de l'Etat doté de la personnalité juridique, qui bénéficie d'une
garantie de l'Etat et a pour but de contribuer au développement économique et
social du canton, elle offrirait néanmoins, selon la recourante, les services
d'une banque universelle, soumise à la surveillance intégrale de l'Autorité
fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA), et serait gérée selon
les principes de l'économie bancaire. En d'autres termes, si la Banque
cantonale neuchâteloise est certes un établissement de droit public, elle
fonctionnerait en réalité de manière identique à une banque commerciale privée.
Dans le cadre du plan de sauvetage de l'entreprise X., la Banque cantonale
neuchâteloise serait intervenue en qualité de créancière hypothécaire et, dans
une moindre mesure, en qualité de créancière de crédits commerciaux, au même
titre que d'autres banques privées. Dans ces circonstances, son intervention ne
relèverait pas de l'exercice d'attributions officielles, mais de la défense de
ses intérêts patrimoniaux.
En allouant des dépens au Fonds de garantie LPP sur la base de la jurisprudence
fédérale, la juridiction cantonale a par ailleurs admis que des dispositions
réservées de droit fédéral pouvaient s'appliquer
BGE 139 V 176 S. 207
et, partant, que des exceptions au principe selon lequel les organismes chargés
de tâches de droit public n'avaient pas droit à des dépens étaient possibles.
Toujours selon la recourante, la juridiction cantonale n'aurait cependant pas
examiné si le même principe était applicable à la Banque cantonale
neuchâteloise. Or, au regard des principes développés par la jurisprudence
fédérale, une exception au principe selon lequel des dépens ne doivent pas être
alloués à un organisme chargé de tâches de droit public ne serait pas fonction
de l'établissement de droit public en question, mais de la nature de l'affaire
et du fait que la partie ayant obtenu gain de cause a recouru aux services d'un
mandataire qualifié. Dans la mesure où la Banque cantonale neuchâteloise a été
actionnée dans une procédure complexe en matière de responsabilité selon l'art.
56a LPP, dans le cadre de laquelle elle s'est vue contrainte de faire appel à
un mandataire professionnel pour défendre ses droits et pour laquelle elle a
finalement obtenu totalement gain de cause au fond, la juridiction cantonale ne
pouvait pas, sans procéder à un examen plus détaillé, lui refuser l'octroi de
dépens au seul motif qu'elle est un établissement de droit public.

17.3 L'allocation de dépens à la partie qui obtient gain de cause ne découle ni
des principes généraux du droit ni des garanties de procédure de la
Constitution fédérale; cette question relève de la seule législation de
procédure applicable à la cause (ATF 134 II 117 consid. 7 p. 199). Aux termes
de l'art. 48 al. 1 LPJA - qui, en vertu de la jurisprudence cantonale,
s'applique par analogie à la procédure de l'action de droit administratif
(arrêt du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel, Cour de
droit public, TA.2000.288 du 24 mars 2009) -, l'autorité de recours peut
allouer d'office ou sur requête une indemnité de dépens à l'administré qui a
engagé des frais, à condition que les mesures qu'il a prises lui paraissent
justifiées. En tant que la juridiction cantonale considère a contrario que les
organismes chargés de tâches de droit public n'ont, en vertu de cette
disposition, pas droit à des dépens, elle ne procède pas à une interprétation
arbitraire de cette disposition.

17.4 Autre est la question de savoir si la Banque cantonale neuchâteloise est
intervenue dans la procédure en qualité d'organisme chargé de tâches de droit
public.

17.4.1 Si d'un point de vue formel, la Banque cantonale neuchâteloise est un
établissement de droit public (art. 2 de la loi du 28 septembre 1998 sur la
Banque cantonale neuchâteloise [LBCN; RSN 621])
BGE 139 V 176 S. 208
soumis à la surveillance étatique (art. 5 LBCN) et chargé, de par la loi, d'une
tâche étatique (art. 1 LBCN), elle est fonctionnellement une entreprise
commerciale qui exerce des activités comparables à celles d'une banque privée,
gérée selon les principes de l'économie bancaire (art. 12 al. 1 LBCN), exerçant
son activité en toute indépendance (art. 12 al. 2 LBCN) et participant
largement au jeu de la concurrence. Dans les faits, rien ne la distingue des
entreprises privées actives dans le même secteur d'activité, si ce n'est
qu'elle est détenue entièrement par l'Etat (voir également ATF 120 II 321
consid. 2h p. 329).

17.4.2 Dans ce contexte, le fait que la Banque cantonale neuchâteloise revêt la
forme juridique d'un établissement de droit public - plutôt que celle d'une
société anonyme (cf. art. 3a de la loi fédérale du 8 novembre 1934 sur les
banques et les caisses d'épargne [loi sur les banques, LB; RS 952.0]) - ne
permet pas de conclure qu'elle est intervenue dans le cas d'espèce en qualité
d'organisme chargé d'une tâche de droit public. C'est bien plutôt la fonction
que la recourante a endossée dans le cadre du sauvetage de X. qu'il importe de
connaître. S'il est établi que la Banque cantonale neuchâteloise est intervenue
dans le cadre de ses activités bancaires ordinaires, elle peut prétendre à être
traitée sur le plan procédural de la même manière que n'importe quel autre
administré. Faute toutefois de constatations de fait précises et exhaustives
sur la nature et l'ampleur de l'intervention effectuée par la Banque cantonale
neuchâteloise dans le cadre du sauvetage de X., le Tribunal fédéral est dans
l'impossibilité de se prononcer sur les griefs articulés par la recourante. Il
convient par conséquent de renvoyer la cause à la juridiction cantonale pour
qu'elle examine cette question et, le cas échéant, fixe, dans le respect du
principe de l'interdiction de l'arbitraire (ATF 93 I 116 consid. 5 p. 122), le
montant de l'indemnité de dépens due à la recourante.