Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 139 IV 137



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Urteilskopf

139 IV 137

19. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause X. contre
Département fédéral des finances (recours en matière de droit public)
2C_84/2012 du 15 décembre 2012

Regeste

Verantwortlichkeit der Schweizerischen Eidgenossenschaft; Rechtshilfe in
Strafsachen mit Brasilien; unaufgeforderte Übermittlung von Bankinformationen;
Art. 3 Abs. 1 VG; Art. 3 Abs. 3, Art. 64, 67 und 67a IRSG.
Haftungsvoraussetzungen (E. 4.1 und 4.2). Unaufgeforderte Weitergabe von in den
Geheimbereich nach Art. 67a IRSG fallenden Informationen; Modalitäten;
Abgrenzung zwischen Information und Beweismittel (E. 4.3-4.6). Tragweite der
Grundsätze der doppelten Strafbarkeit und der Spezialität bei unaufgeforderter
Übermittlung von Informationen aus dem Geheimbereich (E. 5).

Sachverhalt ab Seite 138

BGE 139 IV 137 S. 138

A. X., citoyen brésilien domicilié à Rio de Janeiro, a été admis en 1985 comme
fonctionnaire auprès de l'administration fiscale brésilienne.
Sur dénonciation de la Banque C., Genève, le Ministère public de la
Confédération (ci-après: le Ministère public) a, le 29 juillet 2002, ouvert une
enquête préliminaire pour soupçon de blanchiment d'argent contre huit
ressortissants brésiliens, tous fonctionnaires dans l'administration fiscale
brésilienne, parmi lesquels figurait A., mais non X.

B. Le 29 août 2002, le Ministère public a déposé une demande d'entraide auprès
du Procureur général de la République fédérative du Brésil (ci-après: le
Procureur général du Brésil). Le 17 octobre 2002, au cours d'une rencontre
organisée au Brésil, le Procureur fédéral de la Confédération (ci-après: le
Procureur fédéral) a remis au Procureur général du Brésil diverses informations
relatives à l'enquête ouverte en Suisse. En faisait partie un tableau
mentionnant certains détails des comptes saisis auprès de la Banque C. (numéro
de compte, titulaire d'une procuration, date d'ouverture du compte, premier
versement et montant des avoirs saisis), sur lequel apparaissait le nom de X.
comme personne ayant disposé d'une procuration ("power of attorney") sur le
compte de A., dès son ouverture le 22 juin 1995 jusqu'à l'annulation des
pouvoirs le 29 septembre 1995.
Le 5 décembre 2002, le Ministère public a ouvert une enquête de police
judiciaire à l'encontre de B., un autre fonctionnaire brésilien objet de la
dénonciation de la Banque C.
Le 12 février 2003, le Ministère public a présenté une demande d'entraide
complémentaire au Brésil détaillant différents mouvements opérés sur les
comptes des personnes suspectées. Dans la requête complémentaire portant sur la
cause A., la procuration en faveur de X. a été évoquée. Dans le complément à la
demande d'entraide dans la cause B., le Ministère public a exposé qu'une
procuration avait été octroyée à X. à l'ouverture d'un compte bancaire au nom
dudit suspect le 29 mai 1990; de plus, ce dernier était fondé de procuration
sur un compte ouvert le 22 mars 1995 au nom de X., sa signature ayant été
radiée le 19 octobre 1995.
Une procédure pénale a été ouverte au Brésil en relation avec les éléments
susmentionnés. Le 17 février 2003, l'Ambassade du Brésil à
BGE 139 IV 137 S. 139
Berne a adressé à l'Office fédéral de la Justice (ci-après: l'Office fédéral)
une demande d'entraide, datée du 14 février, présentée pour les besoins de la
procédure pénale ouverte au Brésil; cette demande se fondait sur les
renseignements transmis par le Ministère public dans le cadre de l'enquête et
de la demande d'entraide suisses et tendait notamment à la remise de la
documentation bancaire des huit personnes initialement visées.
Le 22 mai 2003, le Ministère public a étendu à X. la procédure pénale ouverte
en Suisse contre B.

C. Par jugement du 31 octobre 2003, le Tribunal pénal de Rio de Janeiro a
condamné vingt-deux personnes, parmi lesquelles A., B. et X., à des peines
d'emprisonnement et pécuniaires, ce dernier écopant d'une peine totale de
quinze ans de réclusion, notamment pour la commission des délits de corruption
passive et de blanchiment d'argent. X. a fait appel de ce jugement.
A la suite d'une demande d'entraide complémentaire formée par la Suisse le 12
février 2003, les autorités brésiliennes ont complété leur demande d'entraide
du 14 février 2003, en produisant notamment le jugement pénal brésilien de
première instance. Le 16 novembre 2005, le Juge d'instruction fédéral a ordonné
la transmission de la documentation bancaire relative au compte détenu auprès
de la Banque C. par A.; le recours formé contre cette ordonnance a été rejeté
par le Tribunal fédéral par arrêt du 20 février 2006 (cause 1A.338/2005).
Par arrêt du 19 septembre 2007, X. a été condamné en deuxième instance pénale,
au Brésil, à neuf ans et sept mois de prison et à la perte de sa charge de
fonctionnaire pour crime en bande, blanchiment d'argent, ainsi que violation de
l'exportation de devises et atteinte à l'équilibre de la balance commerciale de
la nation.

D. Le 24 septembre 2007, X. a formé une demande, complétée le 20 février 2008,
en dommages-intérêts et en indemnité pour tort moral contre la Confédération
helvétique. Il a notamment fait valoir qu'il avait été condamné au Brésil sur
la base de renseignements que le Ministère public avait illégalement transmis
aux autorités brésiliennes. Le Département fédéral des finances (ci-après: le
Département fédéral) a rejeté cette demande par décision du 12 juin 2009. Par
arrêt rendu le 28 novembre 2011, le Tribunal administratif fédéral a rejeté le
recours formé contre la décision du 12 juin 2009.

E. X. saisit le Tribunal fédéral d'un "recours" à l'encontre de l'arrêt du
Tribunal administratif fédéral du 28 novembre 2011; il conclut à
BGE 139 IV 137 S. 140
l'annulation de cet arrêt ainsi qu'à la condamnation de la Confédération
helvétique à lui payer divers montants à titre de dommages-intérêts et tort
moral. Le Tribunal fédéral a rejeté le recours, traité en tant que recours en
matière de droit public, dans la mesure de sa recevabilité.
(résumé)

Erwägungen

Extrait des considérants:

4. Le recourant reproche au Tribunal administratif fédéral de ne pas avoir
considéré que c'était de manière illicite que le Ministère public avait
transmis aux autorités brésiliennes des renseignements touchant à son domaine
secret, si bien que la responsabilité de la Confédération était engagée à son
égard.

4.1 Aux termes de l'art. 3 al. 1 de la loi fédérale du 14 mars 1958 sur la
responsabilité de la Confédération, des membres de ses autorités et de ses
fonctionnaires (loi sur la responsabilité, LRCF; RS 170. 32), la Confédération
répond du dommage causé sans droit à un tiers par un fonctionnaire dans
l'exercice de ses fonctions, sans égard à la faute de celui-ci. Selon l'art. 1^
er al. 1 let. e LRCF, ladite loi s'applique également aux membres du Ministère
public de la Confédération (cf. aussi les art. 7 ss, en particulier l'art. 22
de la loi fédérale du 19 mars 2010 sur l'organisation des autorités pénales de
la Confédération [LOAP; RS 173.71]). L'art. 3 al. 1 LRCF consacre une
responsabilité primaire, exclusive et causale de l'Etat, en ce sens que le
tiers lésé ne peut rechercher que l'Etat, à l'exclusion du fonctionnaire ou de
l'agent responsable, et qu'il n'a pas à établir l'existence d'une faute de ce
dernier; il lui suffit d'apporter la preuve d'un acte illicite, d'un dommage
ainsi que d'un rapport de causalité entre ces deux éléments (cf. ATF 106 Ib 354
consid. 2b p. 360 s.; arrêts 2A.511/2005 du 16 février 2009 consid. 5.1; 2C_518
/2008 du 15 octobre 2008 consid. 2.1). Ces conditions doivent être remplies
cumulativement (cf. notamment arrêt 2C_518/2008 du 15 octobre 2008 consid. 2.4;
ATF 118 Ib 473 consid. 25 p. 485).

4.2 La condition de l'illicéité au sens de l'art. 3 al. 1 LRCF ("sans droit")
suppose que l'Etat, au travers de ses organes ou de ses agents, ait violé des
prescriptions destinées à protéger un bien juridique. Selon les circonstances,
un excès ou un abus du pouvoir d'appréciation conféré par la loi peut réaliser
cette condition (ATF 132 II 305 consid. 4.1 p. 317; arrêt 2C_852/2011 du 10
janvier 2012 consid. 4.3.1). En présence d'une atteinte à un droit absolu (cf.
infra), la
BGE 139 IV 137 S. 141
jurisprudence a également considéré comme illicite la violation de principes
généraux du droit, telle l'obligation, pour celui qui crée une situation
dangereuse, de prendre les mesures propres à prévenir un dommage. Une omission
peut aussi, le cas échéant, constituer un acte illicite, mais il faut alors
qu'il ait existé, au moment déterminant, une norme juridique qui sanctionnait
explicitement l'omission commise ou qui imposait à l'Etat de prendre en faveur
du lésé la mesure omise; un tel chef de responsabilité suppose donc que l'Etat
ait eu une position de garant vis-à-vis du lésé et que les prescriptions qui
déterminent la nature et l'étendue de ce devoir aient été violées (ATF 132 II
305 consid. 4.1 p. 317; arrêt 2C_834/2009 du 19 octobre 2010 consid. 2.2).
Si le fait dommageable consiste dans l'atteinte à un droit absolu (comme la vie
ou la santé humaines, ou le droit de propriété), l'illicéité est d'emblée
réalisée, sans qu'il soit nécessaire de rechercher si et de quelle manière
l'auteur a violé une norme de comportement spécifique; on parle à ce propos
d'illicéité par le résultat ("Erfolgsunrecht"). Si, en revanche, le fait
dommageable constitue une atteinte à un autre intérêt (par exemple le
patrimoine), l'illicéité suppose qu'il existe un "rapport d'illicéité", soit
que l'auteur ait violé une norme de comportement ayant pour but de protéger le
bien juridique en cause; c'est ce que l'on appelle l'illicéité par le
comportement ("Verhaltensunrecht"). La simple lésion du droit patrimonial d'un
tiers n'emporte donc pas, en tant que telle, la réalisation d'un acte illicite;
il faut encore qu'une règle de comportement de l'ordre juridique interdise une
telle atteinte et que cette règle ait pour but la protection du bien lésé.
Lorsque l'illicéité reprochée procède d'un acte juridique (une décision, un
jugement ...), seule la violation d'une prescription importante des devoirs de
fonction est susceptible d'engager la responsabilité de la Confédération (cf.
ATF 132 II 305 consid. 4.1 p. 318 et les références citées).
L'illicéité peut être levée en présence de motifs justificatifs, tels que la
légitime défense, le consentement du lésé ou l'accomplissement d'un devoir
légal (cf. ETIENNE POLTIER, La responsabilité de l'Etat pour acte illicite:
l'exigence de l'illicéité, in La responsabilité de l'Etat, Anne-Christine Favre
et al. [éd.], 2012, p. 45 ss, 54; cf. arrêt 2A.312/2004 du 22 avril 2005
consid. 4.3; ATF 115 II 15 consid. 3a p. 18 s.).

4.3 Le présent litige porte essentiellement sur la transmission spontanée, par
le Ministère public aux autorités brésiliennes, d'informations d'ordre bancaire
mentionnant le recourant en tant que détenteur
BGE 139 IV 137 S. 142
de procurations sur des comptes ouverts auprès de la Banque C. aux noms de A.
et de B. Alors que le recourant ne faisait pas encore l'objet d'enquêtes
pénales ni en Suisse, ni au Brésil et qu'il n'était pas partie à la procédure
relative à la transmission de la documentation bancaire concernant ces deux
prévenus (cf. arrêt 1A.338/2005 précité), il est constant que le Ministère
public a, au cours du déplacement du Procureur fédéral au Brésil en octobre
2002 et dans le cadre des demandes complémentaires d'entraide suisses formulées
le 12 février 2003, transmis des données mentionnant le recourant en tant que
fondé de procuration sur lesdits comptes bancaires. Il y a dès lors lieu de
s'interroger au sujet de la licéité de ces communications, que le recourant
qualifie de "sauvages", au regard de la législation applicable.
L'arrêt querellé retient à bon droit que le traité d'entraide judiciaire en
matière pénale (RS 0.351.919.81) conclu le 12 mai 2004 entre la Confédération
suisse et la République fédérative du Brésil et entré en vigueur le 27 juillet
2009, ne s'applique pas au présent état de fait alors déjà entièrement révolu
(cf. ATF 137 II 409 consid. 7.4.5 p. 417; ATF 131 V 425 consid. 5.1 p. 429).
Quant au traité d'extradition du 23 juillet 1932 entre la Suisse et le Brésil
(RS 0.353.919.8), il trouve application aux faits considérés. Son art. XVII,
qui n'a été abrogé qu'à l'entrée en vigueur du traité d'entraide de 2004 (RO
1934 166), se contentait toutefois de disposer que les Parties pouvaient
requérir la déposition ou la citation de témoins, "ou tout autre acte
d'instruction" nécessaire, lorsque la procédure pénale résultait d'un délit
pouvant donner lieu à l'extradition suivant ledit traité (cf. art. II ch. 11 et
12). Les modalités pratiques de l'entraide en matière d'échange d'informations
ne sont ainsi pas réglementées par ce traité, qui doit dès lors être complété
par l'EIMP (RS 351.1), conformément à son art. 1^er al. 1 let. b, ainsi que par
l'OEIMP (RS 351.11).

4.4 La transmission spontanée de moyens de preuve et d'informations par les
autorités d'entraide suisses est réglée à l'art. 67a EIMP (RO 1997 114; FF 1995
III 1), aux termes duquel:
^1 L'autorité de poursuite pénale peut transmettre spontanément à une autorité
étrangère des moyens de preuve qu'elle a recueillis au cours de sa propre
enquête, lorsqu'elle estime que cette transmission:
a. est de nature à permettre d'ouvrir une poursuite pénale, ou
b. peut faciliter le déroulement d'une enquête en cours. (...)
^2 (...)
BGE 139 IV 137 S. 143
^3 La transmission d'un moyen de preuve à un Etat avec lequel la Suisse n'est
pas liée par un accord international requiert l'autorisation de l'Office
fédéral.
^4 Les al. 1 et 2 ne s'appliquent pas aux moyens de preuve qui touchent au
domaine secret.
^5 Des informations touchant au domaine secret peuvent être fournies si elles
sont de nature à permettre de présenter une demande d'entraide à la Suisse.
^6 Toute transmission spontanée doit figurer dans un procès-verbal.
A l'aune de cette disposition, la jurisprudence considère que la transmission
spontanée est possible comme forme complémentaire ou anticipée de coopération
internationale. Dans le premier cas, l'Etat, déjà saisi d'une demande
d'entraide judiciaire, livre spontanément des informations propres à favoriser
la procédure dans l'Etat requérant, mais qui n'ont pas été requises; ces
informations ne peuvent ainsi pas porter sur les documents ou renseignements
sollicités dans la demande d'entraide, sans quoi les règles ordinaires sur la
procédure d'exécution, en particulier l'obligation de rendre une décision de
clôture sujette à recours (art. 80d et 80g EIMP), s'en trouveraient
contournées. Dans le second cas, les renseignements sont transmis
indépendamment de toute procédure d'entraide, et sont propres à motiver une
telle demande d'entraide. Le but d'une telle transmission est d'éviter que des
renseignements utiles à une procédure pénale demeurent inexploités faute
d'information adéquate à l'autorité étrangère (cf. ATF 130 II 236 consid. 6 p.
244 ss; ATF 129 II 544 consid. 3.2 p. 546 s.; ATF 125 II 356 consid. 12 p. 366
ss; ATF 125 II 238 consid. 4 p. 242 ss). Dans ce contexte, notamment en cas de
suspicion de blanchiment d'argent, il peut arriver, dans l'optique de mieux
retracer les flux financiers ou certaines transactions, que les informations
transmises spontanément contiennent le nom ou des indications au sujet de
personnes qui ne sont pas (encore) visées par les enquêtes pénales ouvertes en
Suisse à l'encontre d'autres personnes, ce qui est licite dans les limites
posées par l'art. 67a EIMP et, entre autres, par le principe de
proportionnalité (cf. CHRISTOPH PETER, Zum Schicksal des echten 'unbeteiligten
Dritten' in der Strafrechts- und Amtshilfe, in Rechtliche Rahmenbedingungen des
Wirtschaftsstandortes Schweiz, 2007 , p. 673 ss).

4.5 Le recourant se plaint en premier lieu de ce que le Tribunal administratif
fédéral n'a pas retenu l'incompétence du Ministère public pour communiquer
directement des informations le concernant
BGE 139 IV 137 S. 144
aux autorités brésiliennes. Afin de respecter les règles gouvernant l'entraide
pénale internationale, il lui aurait en effet fallu procéder par l'entremise du
Département fédéral ou de l'Office fédéral, lequel aurait rendu une décision de
clôture attaquable (cf. art. 80d et 80e EIMP).
Cette position ne peut être suivie. Les transmissions spontanées de moyens de
preuve et d'informations sont en effet régies par l'art. 67a EIMP, qui fonde un
type d'entraide particulier destiné aux autorités de poursuite pénale, dont
fait partie le Ministère public (cf., de façon générale, l'art. 16 CPP actuel,
à l'époque les art. 14 ss de la loi fédérale sur la procédure pénale du 15 juin
1934 [aPPF; anc. RS 312.0]), qui s'écarte des formes habituelles de coopération
judiciaire (cf. ATF 125 II 238 consid. 2b p. 243 s.; LAURENT MOREILLON ET AL.,
Commentaire romand, Entraide internationale en matière pénale, 2004, n° 1 ad
art. 67a EIMP p. 328). C'est à l'aune de cette disposition et des conditions
qu'elle renferme qu'il convient partant d'examiner si les transmissions en
cause étaient licites.

4.6 Sur le terrain de l'art. 67a EIMP, le recourant reproche aux premiers juges
de ne pas avoir considéré que le Ministère public avait illicitement transmis
aux autorités brésiliennes des moyens de preuve touchant à son domaine secret,
à savoir ceux concernant la procuration détenue sur des comptes bancaires
auprès de la Banque C. Ce faisant, l'arrêt attaqué aurait cautionné une
violation du secret de fonction commise par le Ministère public (cf. art. 320
CP), sans que la transmission ne puisse se baser sur un fait justificatif au
sens de l'art. 14 CP.

4.6.1 La loi ne limite pas les moyens de transmission spontanée; sous réserve
de l'obligation faite aux autorités de consigner toute transmission spontanée
dans un procès-verbal (art. 67a al. 6 EIMP), le législateur a non seulement
renoncé à édicter toute prescription de forme dans ce domaine, mais a même
envisagé la possibilité de communications informelles, téléphoniques ou
verbales, entre les autorités. Simultanément, le législateur a néanmoins
cherché à prévenir, dans toute la mesure du possible, le risque de voir éludées
les normes régissant l'entraide par la transmission incontrôlée et informelle
de renseignements, en particulier ceux touchant au domaine secret. A cette fin,
il a distingué la transmission de moyens de preuve et celle d'informations (cf.
ATF 125 II 238 consid. 5d p. 246 s.).
Cette distinction est importante dès lors que, s'agissant du domaine secret, l'
art. 67a al. 5 EIMP autorise uniquement la transmission
BGE 139 IV 137 S. 145
d'informations, qui plus est sous condition que ces dernières soient de nature
à permettre de présenter une demande d'entraide à la Suisse (cf. arrêt 1C_344/
2010 du 26 juillet 2010 consid. 4.2); en revanche, la transmission spontanée de
moyens de preuve touchant au domaine secret est prohibée (cf. art. 67a al. 4
EIMP). Constituant un moyen de preuve protégé par l'art. 47 de la loi fédérale
du 8 novembre 1934 sur les banques et les caisses d'épargne [loi sur les
banques,LB; RS 952.0], une documentation bancaire ne peut être fournie parle
biais de la transmission spontanée (ROBERT ZIMMERMANN, La coopération
judiciaire internationale en matière pénale, 3^e éd. 2009, p. 383 n. 415;
MOREILLON ET AL., op. cit., n° 15 ad art. 67a EIMP p. 330; cf. BO 1995 CN 2652,
BO 1996 CE 229).
Dans une affaire jugée en 2003, le Tribunal fédéral a laissé ouverte la
question de savoir si un document officiel de l'autorité suisse mentionnant les
références des comptes, leurs dates d'ouverture et de clôture, l'identité des
personnes habilitées à les faire fonctionner, ainsi que le montant des sommes
qui s'y trouvent, constituait un moyen de preuve ou de simples informations; en
effet, le tableau que les autorités suisses avaient "spontanément" remis à
l'Etat requérant l'avait en réalité été en exécution d'une demande d'entraide
formelle et aurait dès lors dû être communiqué en conformité avec la procédure
d'entraide ordinaire (cf. ATF 129 II 544 consid. 3.4 p. 547 s.).
Le présent dossier se distingue de l'affaire susmentionnée. En effet, la
transmission spontanée effectuée durant la visite du Procureur fédéral à
Brasilia, et celle du 12 février 2003 sont intervenues alors que les autorités
brésiliennes n'avaient pas encore formé leur demande d'entraide pénale
internationale, datée du 14 février 2003, si bien qu'il ne saurait être
question d'un quelconque contournement des garanties inhérentes à la demande
formelle d'entraide au moyen de "transmissions sauvages".

4.6.2 Reste donc la délimitation entre une information, admissible sous
condition (art. 67a al. 5 EIMP), et un moyen de preuve, dont la transmission
spontanée est prohibée (art. 67a al. 4 EIMP).
Il est délicat de fournir une définition générale de ces deux notions, dont les
contours peuvent se recouper; leur différence apparaît en effet davantage
graduelle que fondamentale, eu égard en particulier au principe de la libre
appréciation des preuves applicable dans le droit pénal de nombreux Etats, dont
la Suisse (cf. ATF 133 I 33 consid. 2 p. 36 s.; arrêt 6B_79/2007 du 23 juillet
2007 consid. 2.2.2; art. 10
BGE 139 IV 137 S. 146
al. 2 CPP). La qualité de "moyen de preuve" ou "d'information" d'un
renseignement ou document transmis à un Etat étranger doit dès lors s'apprécier
au cas par cas.
Cela dit, il ressort de l'art. 67a EIMP que l'Etat souhaitant communiquer une
"simple information" doit à tout le moins s'efforcer de ne pas transmettre de
données ni de documents officiels qui, de par leur nature, un contenu
informatif très détaillé ou leur caractère officiel, pourraient directement
servir à l'Etat étranger à des fins de preuve dans le cadre d'une procédure
nationale; dans la mesure où l'appréciation des preuves est susceptible de
varier d'un Etat à l'autre, il appartiendra en tous cas aux autorités suisses
de rendre attentifs leurs homologues étrangers à la finalité particulière des
informations transmises, laquelle consiste uniquement à favoriser leurs
éventuelles enquêtes pénales ou le dépôt d'une demande d'entraide formelle.
A la lumière de ce qui précède, il est possible de retenir qu'un magistrat
suisse est, de manière générale, en droit d'informer son homologue étranger de
l'existence d'un compte bancaire, sans pour autant lui communiquer des
documents et correspondances bancaires et autres pièces y relatives, qui
constitueraient en tout état des moyens de preuve. Dans ce contexte, tout en
précisant qu'il s'agit d'un cas dans lequel l'autorité doit faire montre de
circonspection (cf. ATF 129 II 544 consid. 3.4 p. 547 s.), on peut admettre que
la transmission de notes internes de l'autorité et pour autant qu'elles ne
s'accompagnent pas des pièces originales ou de leurs copies, mentionnant des
références à des comptes suspects, ainsi que le nom de leurs titulaires, ayants
droit ou des éventuels chargés de procuration, correspond à la fourniture
d'informations et non de moyens de preuve au sens de l'art. 67a EIMP. Ces
renseignements, qui ne présentent aucun caractère officiel et dont le contenu
n'est pas suffisant à lui seul pour fonder une condamnation pénale, sont en
effet utiles à l'Etat étranger dans la (seule) perspective de pouvoir présenter
une éventuelle demande d'entraide portant sur l'obtention de moyens de preuve.
En revanche, la transmission par les autorités suisses d'informations, par
exemple un tableau détaillé, dont la valeur probante aurait été renforcée par
l'apposition d'un sceau ou d'une attestation officielle de l'autorité,
relèverait des moyens de preuve touchant au domaine secret des intéressés et ne
pourrait avoir lieu que par le biais de la procédure d'entraide ordinaire (cf.
ATF 130 II 236 consid. 6.2 p. 245; ATF 125 II 356 consid. 12c p. 367 s.;
ZIMMERMANN, op. cit., p. 383 n. 415).
BGE 139 IV 137 S. 147
i) La transmission spontanée d'informations du 17 octobre 2002

4.6.3 Les données que le Ministère public a spontanément transmises à son
homologue brésilien, au cours de la visite du Procureur fédéral au Brésil le 17
octobre 2002, contenaient des informations regroupées sous la forme d'un
tableau rédigé en langue anglaise. Dans ce dernier apparaissent le nom des huit
prévenus dans l'enquête pénale suisse, le numéro de procédure relatif à chacun
d'eux, des informations concernant leur date de naissance, activité
professionnelle, état civil et numéro de carte d'identité (colonnes concernant
le numéro de procédure et le nom du titulaire du compte); y figurent également
le numéro de compte bancaire, le nom et le cas échéant la date de naissance de
la ou des personnes disposant d'une procuration sur ces comptes, l'éventuelle
radiation dudit pouvoir, la date d'ouverture des comptes, les montants s'y
trouvant, de même que d'éventuelles remarques quant au blocage des avoirs. Par
rapport au compte n° xxx ouvert au nom de A., dans la colonne relative aux
procurations, figurent en particulier les noms de B. et de X., précédés par la
mention selon laquelle leurs pouvoirs ont été annulés le 29 septembre 1995
("power of attorney cancelled on 29.09.95").

4.6.4 En l'occurrence et à l'aune des principes précédemment dégagés, le
tableau que le Ministère public a transmis au Procureur général du Brésil au
sujet des comptes détenus par les huit prévenus dans la procédure pénale
ouverte en Suisse doit être qualifié d'information, au sens de l'art. 67a al. 5
EIMP, et non de moyen de preuve touchant au domaine secret.
En effet, imprimé sur des pages dépourvues - exception faite de l'acronyme
"MPC-IG" figurant au bas des pages - du sceau (cf. arrêt 1A.149/2003 du 27
octobre 2003 consid. 1.2, non publié in ATF 129 II 544), de la signature ou de
tout autre élément officiel de l'autorité suisse, ce tableau procure un résumé
synoptique des données essentielles recueillies au sujet des comptes bancaires
suspects, sans pour autant fournir, a priori, des éléments probants à l'Etat
requérant sur ces comptes (s'agissant de l'indication - ou de son défaut - de
la finalité de la transmission spontanée, cf. consid. 5 infra). Contrairement
donc à ce qui est soutenu par le recourant et par l'avis de droit privé auquel
ce dernier se réfère, les informations n'étaient pas, à elles seules, du point
de vue du droit suisse ici en examen, propres à corroborer une accusation
pénale à l'égard du recourant. En effet, elles se contentent de dévoiler
l'existence d'un compte
BGE 139 IV 137 S. 148
bancaire auprès d'une banque sise en Suisse, sur lequel le recourant avait
brièvement bénéficié d'une procuration. Les autorités brésiliennes ne s'y sont
d'ailleurs pas trompées, dès lors que, comme le relèvent sans arbitraire les
premiers juges, le Brésil a, sur la base des informations spontanément reçues,
adressé une demande d'entraide à la Suisse en date du 14 février 2003, suivie
de deux demandes complémentaires, auxquelles les autorités suisses ont fini par
donner suite (cf. arrêt 1A.338/2005 du 20 février 2006).

4.6.5 En la présence de simples informations relevant du domaine secret du
recourant, la transmission litigieuse ne requérait pas, selon la lettre de l'
art. 67a EIMP, l'autorisation préalable de l'Office fédéral (cf. ATF 125 II 238
consid. 6d p. 249 e contrario; FRANÇOIS ROGER MICHELI, L'entraide spontanée [
art. 67a EIMP]: le contrôle de la transmission spontanée d'informations, PJA
2002 p. 156 ss, 158; MOREILLON ET AL., op. cit., n° 10 ad art. 67a EIMP p. 330;
CAROLINE GSTÖHL, Geheimnisschutz im Verfahren der internationalen Rechtshilfe
in Strafsachen, 2008, p. 353. Contra: DONATSCH/HEIMGARTNER/SIMONEK,
Internationale Rechtshilfe unter Einbezug der Amtshilfe im Steuerrecht, 2011,
p. 126; ALEXANDER M. GLUTZ VON BLOTZHEIM, Die spontane Übermittlung, 2010, p.
20 ss). Il est dès lors inutile de trancher la question de savoir si le traité
d'extradition du 23 juillet 1932 qui liait la Suisse et le Brésil pouvait être
assimilé, au sens de l'art. 67a al. 3 EIMP, à un "accord international"
dispensant les autorités suisses compétentes d'obtenir l'autorisation préalable
de l'Office fédéral (cf. MICHELI, op. cit., p. 159). Le grief du recourant tiré
de l'absence d'autorisation préalable par l'Office fédéral doit donc être
écarté.

4.6.6 C'est de plus à tort que le recourant conteste que l'arrêt querellé n'a
pas retenu le caractère disproportionné de la communication de son identité aux
autorités brésiliennes, qui aurait selon lui dû être anonymisée sur les
documents transmis.
Dans la mesure où, selon l'art. 67a EIMP et en tant qu'ils relèvent du domaine
secret, ces renseignements ne doivent ni ne peuvent constituer des moyens de
preuve, mais sont utiles à un Etat étranger en vue de déposer une éventuelle
demande d'entraide formelle, on ne voit pas que la mention des coordonnées du
recourant soit en l'occurrence disproportionnée. Au contraire, le concept même
de la transmission spontanée d'informations serait vidé de sens si l'Etat
fournissant ces informations devait systématiquement caviarder l'identité des
personnes impliquées.
BGE 139 IV 137 S. 149
En l'espèce, l'arrêt attaqué retient à raison qu'il existait un lien
suffisamment étroit entre A., suspecté notamment de corruption et de
blanchiment d'argent, et le recourant, lequel avait disposé d'une procuration
sur le compte de son collègue du fisc brésilien, pour faire apparaître celui-ci
comme "impliqué" (pour cette notion, cf. ATF 120 Ib 251 consid. 5b p. 254 s.)
dans la procédure pénale ouverte à l'encontre de différents prévenus.
Indépendamment de la commission d'une quelconque infraction pénale, dont il
incombe à l'Etat requérant de connaître, le recourant ne pouvait dès lors
passer pour totalement étranger ("tiers non impliqué") à la procédure
diligentée par les autorités suisses, puis brésiliennes, ni être qualifié de
tiers concerné fortuitement par une opération douteuse (cf. PETER, op. cit., p.
667 ss, 669 et 673). Dès lors, le Tribunal administratif fédéral pouvait, sans
abuser de son pouvoir d'appréciation, considérer que l'intérêt du Brésil à
connaître l'identité des personnes en lien avec l'un des principaux suspects
prévalait sur celui du recourant à demeurer dans l'anonymat (cf. MOREILLON ET
AL., op. cit., n° 16 ad art. 67a EIMP p. 331).
ii) La transmission spontanée d'informations du 12 février 2003

4.6.7 Le recourant dénonce un "acte d'entraide sauvage" en relation avec la
transmission d'informations, non suivie d'une ordonnance de clôture, concernant
la procédure dirigée contre B. Dans le cadre de la requête d'entraide
complémentaire diligentée le 12 février 2003, le Ministère public avait
mentionné l'identité du recourant en tant que fondé de procuration sur un
compte bancaire ouvert par le suspect B. et en tant qu'ayant droit économique
d'un autre compte ouvert le 22 mars 1995 sur lequel B. avait disposé d'une
procuration jusqu'au 19 octobre 1995. En outre, le Ministère public avait, en
mentionnant expressément le texte légal de l'art. 67a EIMP, transmis
spontanément aux autorités brésiliennes des informations de nature à leur
"permettre de présenter une demande d'entraide à la Suisse", à savoir un
tableau synoptique mis à jour rappelant que le recourant avait disposé d'une
procuration sur le compte de A. aux côtés de B.

4.6.8 Les griefs tirés de la transmission d'informations concernant le
recourant dans le cadre de la procédure pénale ouverte par la Suisse, puis par
le Brésil en relation avec B. tombent à faux. A ce titre, il y a lieu de se
référer aux considérants qui ont été développés au sujet des documents relatifs
au suspect A. (consid. 4.6.3 ss supra). En effet, les documents transmis ne
consistent pas en des pièces bancaires à proprement parler, mais en un tableau
synoptique à usage interne et dépourvu de sceau officiel mis à jour par le
Ministère public, ainsi
BGE 139 IV 137 S. 150
qu'en un résumé des résultats d'une enquête pénale suisse destiné à étayer la
demande d'entraide pénale complémentaire adressée au Brésil, étant précisé que
le Ministère public a, quelques mois seulement après le dépôt de la demande
d'entraide complémentaire, étendu sa propre enquête pour blanchiment à la
personne de X. En outre, les documents litigieux ont été transmis sous la
réserve de la finalité figurant à l'art. 67a al. 5 EIMP.
Si les tribunaux brésiliens avaient, comme le prétend le recourant, traité les
informations figurant dans la requête d'entraide complémentaire du Ministère
public comme des moyens de preuve suffisants pour condamner pénalement
celui-ci, il lui aurait le cas échéant incombé de se plaindre de l'utilisation
faite de ces renseignements devant les autorités brésiliennes (cf. arrêt 1A.262
/2005 du 26 janvier 2007 consid. 2.5). Le recourant ne saurait en tout état
reprocher au Ministère public d'avoir, dans l'optique d'obtenir de la part de
son homologue brésilien des informations complémentaires pour les besoins de sa
propre instruction pénale, fourni pour sa part des informations - sans
transmettre de moyens de preuve à l'appui - étayant les soupçons à la base de
sa demande d'entraide.

4.6.9 En outre, ces transmissions ne peuvent pas être considérées comme
disproportionnées dans la mesure où des relations (de pouvoirs) bancaires
croisées apparaissaient entre B., A. et le recourant, tous les trois
fonctionnaires du Trésor brésilien, en rapport avec des comptes ayant servi à
des transactions suspectes (cf. arrêt 1A.205/2001 du 21 mars 2002 consid. 4.2).
Compte tenu de ce qui précède et des explications incohérentes relevées au
sujet de l'origine des fonds transférés sur ces comptes, l'arrêt querellé
retient à bon droit que les renseignements que les autorités suisses ont
communiqués, spontanément ou pour étayer la demande d'entraide complémentaire
vis-à-vis des autorités brésiliennes, paraissaient utiles à la présentation
d'une demande d'entraide brésilienne à la Suisse. Partant, les griefs du
recourant en lien avec la transmission des informations concernant B. doivent
être écartés.
iii) Autres griefs liés à l'art. 67a EIMP

4.6.10 Invoquant l'art. 67a al. 6 EIMP, le recourant soutient, en mélangeant ce
grief avec celui traité auparavant (consid. 3.3.2 non publié) du prétendu
défaut d'autorisation préalable par l'Office fédéral, que les transmissions
spontanées sous examen n'auraient pas été correctement consignées dans un
procès-verbal.
BGE 139 IV 137 S. 151
Il ressort de la jurisprudence et des travaux préparatoires que le
procès-verbal mentionné à l'art. 67a al. 6 EIMP vise simplement à conserver une
"trace" de la transmission spontanée de données par l'autorité (BO 1995 CN 2638
s.). Ce document permet ainsi à l'Office fédéral d'exercer sa fonction de
surveillance des autorités d'exécution (cf. ATF 125 II 238 consid. 5d p. 247).
L'exigence d'une communication écrite s'impose en vue d'assurer la protection
optimale des droits des parties à la procédure étrangère, laquelle doit
respecter les principes de procédure fixés par la CEDH et le Pacte ONU II (RS
0.103.2) (art. 2 let. a EIMP). Ainsi, la personne accusée à l'étranger - ou
toute autre partie à cette procédure (cf., s'agissant du fondé de procuration,
arrêt 1A.87/2004 du 3 juin 2004 consid. 2; PAOLO BERNASCONI, Banche ed imprese
nel procedimento penale, 2011, p. 357) - pourra, en consultant le dossier pénal
contenant la relation écrite de la transmission spontanée, connaître l'origine
et le contenu des informations recueillies grâce à la collaboration des
autorités suisses. Elle pourra, le cas échéant et selon les formes du droit
étranger, s'opposer à l'utilisation de renseignements qui auraient été obtenus
de manière illégale. L'autorité suisse communiquant spontanément des
informations à l'étranger établira sur-le-champ le procès-verbal visé à l'art.
67a al. 6 EIMP, qu'elle transmettra dans tous les cas à l'Office fédéral avec
la copie de la note remise aux autorités étrangères, rendant ainsi visible la
mention de transmission spontanée (cf. ATF 125 II 238 consid. 6d p. 249; voir
aussi arrêt 1A.4/1998 du 24 février 1998 consid. 2a). Le Tribunal fédéral a
toutefois précisé que l'omission de porter la transmission spontanée à la
connaissance de l'Office fédéral ne constituait pas un défaut de nature à
remettre en cause le bien-fondé de la démarche de l'autorité suisse (cf. ATF
130 II 236 consid. 6.4 p. 246).
En l'occurrence, il ressort du dossier que le Ministère public a, par courrier
du 12 novembre 2002, informé l'Office fédéral au sujet de son déplacement au
Brésil et des informations découlant des procédures pénales suisses qu'il a
spontanément transmises à cette occasion, en y annexant le tableau querellé. Le
Ministère public a donc non seulement conservé une trace écrite de cette
transmission au dossier, mais également satisfait à son obligation vis-à-vis de
l'Office fédéral.
S'agissant des informations qui ont été spontanément transmises par le
Ministère public en date du 12 février 2003, elles l'ont été, de même que le
courrier d'accompagnement à l'attention des autorités
BGE 139 IV 137 S. 152
brésiliennes, via l'Office fédéral, de sorte que c'est à juste titre que les
premiers juges ont considéré comme remplie l'exigence découlant de l'art. 67a
al. 6 EIMP. Les griefs du recourant à cet égard sont par conséquent mal fondés.

4.6.11 Il découle de ce qui précède que, sous réserve de ce qui sera constaté
sous le consid. 5 infra, aucun acte illicite ne peut être reproché à la
Confédération en relation avec l'application de l'art. 67a EIMP ou des art. 14
et 320 CP.

5. Toujours en relation avec la transmission à l'Etat étranger des informations
le concernant, le recourant invoque la violation des principes de la
double-incrimination ainsi que de la spécialité, et se prévaut en sus d'une
violation de l'art. 3 al. 3 EIMP. Selon lui, le Tribunal administratif fédéral
a erré en retenant que la Suisse devait accorder l'entraide en matière de
blanchiment, alors que le recourant était en réalité exclusivement poursuivi
par le Brésil pour évasion fiscale sans escroquerie ou exportation de capitaux.
En outre, les premiers juges auraient dû tenir compte de la circonstance,
reconnue dans l'arrêt, que le Ministère public n'avait pas assorti les
renseignements et documents transmis d'une quelconque réserve concernant leur
utilisation, spécifiquement en matière fiscale.

5.1 Le principe de la double-incrimination

5.1.1 Le principe de la double-incrimination commande que les faits, tels
qu'ils sont exposés dans la demande d'extradition ou d'entraide, soient
punissables à la fois par la législation de l'Etat requérant et par celle de
l'Etat requis (cf. arrêt 1A.267/2004 du 4 février 2005 consid. 5.1 et les
références citées).

5.1.2 L'application du principe de la double-incrimination à la transmission
spontanée d'informations ne se laisse pas déduire de l'art. XVII du traité
d'extradition du 23 juillet 1932, applicable aux relations entre la Suisse et
le Brésil au moment des faits litigieux. Il est vrai que ce traité
conditionnait l'entraide pénale internationale à l'existence d'une "cause
pénale résultant d'un délit pouvant donner lieu à l'extradition suivant le
présent Traité", et renvoyait implicitement à l'art. II du traité, selon lequel
l'extradition aura lieu pour les faits énumérés, "lorsque d'après les lois du
pays requis, l'infraction est punie d'une peine d'une année d'emprisonnement ou
plus". Il résulte toutefois de la lettre de l'art. XVII du traité d'extradition
que celui-ci ne visait que les actes d'entraide ordinaires, notamment
l'exécution d'un acte d'instruction par voie de commission rogatoire,
BGE 139 IV 137 S. 153
ce que semble d'ailleurs confirmer l'époque au cours de laquelle le traité a
été adopté, où la coopération internationale se déroulait essentiellement selon
des procédures formelles.

5.1.3 En droit interne suisse, la condition de la double-incrimination n'est
pertinente qu'en relation avec les mesures d'entraide qui impliquent l'usage de
la contrainte (cf. art. 64 al. 1 EIMP), notamment en cas de saisie (cf. art. 63
al. 2 let. b EIMP), de blocage ou de gel d'avoirs ou d'objets (cf., en matière
d'extradition, art. 35 al. 1 let. a EIMP; ZIMMERMANN, op. cit., p. 536 s. n.
583). Or, la transmission spontanée d'informations qui, comme en l'espèce, se
trouvent d'ores et déjà en la possession des autorités suisses, n'entre pas
dans cette catégorie de mesures, de sorte que le recourant ne saurait se
prévaloir dudit principe ancré à l'art. 64 al. 1 EIMP (cf. ATF 126 II 462
consid. 4b p. 464).

5.1.4 Les précédents considérants conduisent au rejet du grief du recourant
tiré du principe de la double-incrimination, lequel ne s'applique pas en tant
que tel à la transmission spontanée d'informations. En revanche, l'art. 3 EIMP,
qui déclare d'emblée irrecevable une demande de coopération pénale
internationale visant certains types d'infractions (notamment de nature
politique ou fiscale), s'applique également à la transmission spontanée
d'informations. Cela résulte d'une part de sa consécration dans les
dispositions générales de la loi et, singulièrement parmi les motifs
aboutissant à l'irrecevabilité de toute demande de coopération pénale
internationale; d'autre part, les motifs d'exclusion figurant à l'art. 3 EIMP
visent à protéger les valeurs juridiques fondamentales de la Suisse, à savoir
son ordre public, de sorte à s'étendre à tous les actes d'entraide en matière
pénale (cf. art. 1a EIMP; ZIMMERMANN, op. cit., p. 565 n. 611). Le respect de
l'art. 3 al. 3 EIMP sera examiné en lien avec le principe de la spécialité (cf.
consid. 5.2 infra).

5.2 Le principe de la spécialité

5.2.1 Selon le principe de la spécialité, les renseignements transmis ne
peuvent, dans l'Etat requérant, ni être utilisés aux fins d'investigation, ni
être produits comme moyens de preuve dans une procédure pénale visant une
infraction pour laquelle l'entraide est exclue, soit notamment pour la
répression d'infractions politiques, militaires ou fiscales (art. 3 al. 3 et 67
al. 1 EIMP; cf. arrêts 1A.149/2003 du 27 octobre 2003 consid. 4.1, non publié
in ATF 129 II 544; 1A.4/1998 du 24 février 1998 consid. 4b; ATF 124 II 184
consid. 4b p. 187; ATF 115 Ib 373 consid. 8 p. 376 s.). Lorsque l'obligation de
respecter le
BGE 139 IV 137 S. 154
principe de la spécialité n'apparaît pas expressément dans le texte d'un traité
international, ou si un tel traité fait défaut ou ne vise pas le genre
d'entraide considéré, l'autorité suisse doit signaler à l'Etat requérant ce
principe pour le lui rendre opposable et doit lui rappeler les limites dans
lesquelles les informations communiquées pourront être utilisées (cf. ATF 115
Ib 373 consid. 8 p. 376 s.; ATF 112 Ib 576 consid. 11a p. 592; ZIMMERMANN, op.
cit., p. 684 n. 729).

5.2.2 D'après le Tribunal administratif fédéral, rien n'indiquait que les
renseignements spontanément transmis aux autorités brésiliennes auraient été
assortis d'une réserve d'utilisation par le Ministère public. La question de
savoir si le principe de la spécialité s'appliquait en matière de transmission
spontanée pouvait cependant rester indécise, car la teneur et la portée de
cette réserve avaient été expressément rappelées dans l'ordonnance de clôture
rendue en exécution de la demande d'entraide présentée par les autorités
brésiliennes relativement au même complexe de fait; de la sorte, le recourant
avait pu, en procédure d'appel pénal au Brésil, invoquer cette réserve pour que
certains documents ne soient pas utilisés en vue de le poursuivre pour des
infractions exclues de l'entraide. Il y aurait partant eu réparation de
l'omission initiale du Ministère public, le recourant ne démontrant du reste
pas avoir été poursuivi et condamné pour des délits fiscaux sur la base des
renseignements transmis par la Suisse.
Il convient donc de se demander si la transmission spontanée d'informations
relevant du domaine secret est soumise au principe de la spécialité, le cas
échéant, sous quelle forme et si, concrètement, les exigences en ont été
respectées en l'espèce.

5.2.3 Il résulte de son emplacement dans la troisième partie de l'EIMP relative
aux "autres actes d'entraide" que la transmission spontanée constitue une forme
d'entraide particulière (cf. MICHELI, op. cit., p. 156; MOREILLON ET AL., op.
cit., n° 1 ad art. 67a EIMP p. 328). Dans la mesure où l'art. 67a EIMP n'y
déroge pas en sa qualité de lex specialis, elle reste donc en principe
assujettie aux règles régissant l'entraide internationale en matière pénale
(cf. GLUTZ VON BLOTZHEIM, op. cit., p. 134 s.). N'étant toutefois pas, sous
réserve de l'art. 3 EIMP, soumise au principe de la double-incrimination (cf.
consid. 5.1 supra), la transmission spontanée ne l'est pas non plus aux
exigences ordinaires dérivant du principe de la spécialité.
Face aux craintes, exprimées notamment par plusieurs parlementaires, que l'Etat
étranger soit affranchi du respect de la spécialité du
BGE 139 IV 137 S. 155
fait que les autorités suisses lui transmettraient des documents et
informations sans aucune requête préalable de sa part ni engagement
international à se conformer audit principe (cf. BO 1995 CN 2637-2642 et 2651
s.; BO 1996 CE 229; MICHELI, op. cit., p. 156), le législateur fédéral a, pour
ce qui a trait au domaine secret, introduit des cautèles, qui reviennent à
appliquer à la transmission spontanée le principe de la spécialité sous une
forme différente: d'une part, il a interdit la fourniture de moyens de preuve
par le biais de la transmission spontanée; d'autre part, il a limité le
transfert des informations touchant au domaine secret aux seules données "de
nature à permettre de présenter une demande d'entraide à la Suisse" (art. 67a
al. 4 et 5 EIMP). Cette réglementation part de l'idée que les informations
ainsi transmises par la Suisse serviront uniquement à informer l'Etat étranger
au sujet de potentielles infractions susceptibles d'intéresser ses autorités de
poursuite pénale, lesquelles pourront, sur la base de ces informations, déposer
une demande d'entraide en bonne et due forme auprès des autorités suisses, dans
la perspective d'obtenir des éléments complémentaires et, le cas échéant, des
moyens de preuves leur permettant d'en faire un usage pénal (cf. art. 67a al. 5
EIMP).
En revanche, à défaut d'être suivies d'une demande formelle d'entraide, ces
informations ne peuvent ni ne doivent être utilisées par l'Etat étranger dans
le but d'accuser pénalement une personne (cf. interventions Sandoz et Koller,
BO 1995 CN 2638 et 2641), ce encore moins dans un domaine, notamment fiscal,
dans lequel une demande d'entraide serait a priori déclarée irrecevable par la
Suisse (cf. art. 3 al. 3 EIMP). Il appartient donc aux autorités, lorsqu'elles
transmettent de telles informations, d'en aviser l'Etat tiers. A défaut de
respecter ces exigences, la transmission spontanée d'informations secrètes
reviendrait en effet à contourner les règles et garanties de l'entraide
ordinaire en matière pénale. Elle priverait de plus de toute protection les
personnes dont les coordonnées seraient spontanément transmises à un Etat
étranger si, se satisfaisant de ces informations, ce dernier ne déposait pas de
demande d'entraide ultérieure; il en irait de même pour les tiers impliqués et
mentionnés dans un complexe de fait suspect qui, n'étant pas parties à la
procédure, n'auraient pas de moyen de recourir contre une future décision
formelle de clôture rendue par les autorités suisses à l'égard des seuls
prévenus.
Contrairement à ce que soutient l'arrêt entrepris, le principe de la spécialité
s'applique donc, mais dans une forme adaptée prévue par l'art. 67a al. 5 EIMP,
à la transmission spontanée d'informations
BGE 139 IV 137 S. 156
touchant au domaine secret. Cela a pour conséquence, premièrement, que,
lorsqu'elle examine si des informations recueillies sont de nature à permettre
d'ouvrir une poursuite pénale dans un Etat étranger (cf. art. 67a al. 1 let. a
EIMP), l'autorité suisse compétente devra d'office veiller à ce que l'enquête
pénale susceptible d'être diligentée à l'étranger porte sur une infraction qui
soit prima facie apte à justifier l'admission d'une éventuelle demande
d'entraide ultérieure. En d'autres termes, la transmission spontanée
d'informations qui concerneraient une infraction d'emblée exclue de la
coopération internationale (cf. art. 3 EIMP) ne serait pas licite, étant
précisé que, sous l'angle de la double-incrimination, le Tribunal fédéral a
jugé qu'il suffit pour respecter ce dernier principe que l'une au moins des
infractions invoquées au titre de la demande d'entraide pénale puisse donner
lieu à l'entraide (ATF 125 II 569 consid. 6 p. 575; arrêt 1A.4/2004 précité,
consid. 7.1 in fine). Secondement, l'application du principe de la spécialité
dans sa variante susmentionnée signifie qu'en l'absence de traité international
réglant la portée de la transmission spontanée, qui doit viser à mettre les
autorités étrangères en état de présenter une demande formelle d'entraide en
Suisse (cf. art. 67a al. 5 EIMP) et non d'éluder la procédure d'entraide, cette
finalité doit être expressément rappelée aux autorités de l'Etat étranger. Ce
rappel doit intervenir au plus tard au moment de la transmission spontanée des
informations, en application du principe de la bonne foi gouvernant les
relations entre Etats (arrêt 2C_36/2012 du 10 mai 2012 consid. 3.3: principe
dit de l'estoppel; cf., mutatis mutandis, art. 26 de la Convention de Vienne du
23 mai 1969 sur le droit des traités [CV; RS 0.111]; BERNASCONI, op. cit., p.
333 s. n. 1263).
Conformément à l'art. 67a al. 6 EIMP, une trace écrite de la transmission
spontanée et, par voie de conséquence, du rappel du but visé par ladite
transmission, doit en outre figurer dans la version finale au dossier suisse et
être transmise aux autorités étrangères (cf. ATF 125 II 238 consid. 6c et d p.
248 s.; ZIMMERMANN, op. cit., n. 415 p. 384). De cette manière, il sera
possible aux autorités suisses et, le cas échéant, aux parties à la procédure
étrangère d'en prévenir un usage non conforme au principe de la spécialité par
l'Etat étranger en tant que moyens de preuve ou à des fins, notamment fiscales,
qui seraient d'emblée exclues par l'entraide spontanée (cf., à ce titre, ATF
129 II 544 consid. 3.6 p. 549; ATF 125 II 238 consid. 6b p. 248).
Il sied encore d'ajouter que les tiers impliqués dont l'identité serait révélée
dans le cadre de la transmission d'un complexe de fait
BGE 139 IV 137 S. 157
suspect, en tant que l'Etat étranger engage subséquemment des poursuites
pénales à leur encontre, doivent également bénéficier de la protection accordée
par le principe de la spécialité en relation avec la transmission spontanée
d'informations touchant au domaine secret. Ces personnes sont en effet
susceptibles de subir les conséquences d'une violation de ce principe par
l'Etat étranger au même titre que des parties à une procédure d'entraide pénale
ordinaire (cf. arrêt 1A.184/2000 du 1^er septembre 2000 consid. 3a, rappelé
dans les arrêts 1A.167/2005 du 19 avril 2006 consid. 2.8 et 1A.5/2007 du 25
janvier 2008 consid. 2.4; ZIMMERMANN, op. cit., p. 683 n. 728).

5.2.4 En l'espèce, il ressort des constatations des premiers juges que tant les
prévenus A. et B., au sujet desquels les informations ont été acheminées aux
autorités brésiliennes, que - subséquemment - le recourant, dont le nom
apparaissait sur certains documents en relation avec ces derniers, ont fait
l'objet d'enquêtes pénales notamment pour délits de corruption et de
blanchiment d'argent, que la Suisse poursuit, à l'instar du Brésil, en tant que
délits, voire en tant que crimes (art. 10 cum 305^bis et 322^ter ss CP; cf.
MARC FORSTER, Internationale Rechtshilfe bei Geldwäschereiverdacht, RPS 124/
2006 p. 274 ss, 276 ss) et pour lesquels l'entraide n'est pas d'emblée exclue
par l'art. 3 EIMP. Or, au moment de transmettre spontanément les informations
litigieuses (cf., pour le moment déterminant, ATF 132 II 305 consid. 4.1 et 4.2
p. 317 ss), ce soupçon d'infractions suffisait pour en justifier la fourniture.
Le fait qu'ultérieurement, le recourant ait pu être poursuivi et condamné
pénalement au Brésil n'y change rien.
Encore faut-il que la Suisse ait attiré l'attention du Brésil sur la finalité
des informations spontanées communiquées. Les constatations du Tribunal
administratif fédéral indiquent à ce sujet que, lors de sa visite au Brésil du
17 octobre 2002, le Ministère public n'a pas, du moins de façon à en garder une
trace écrite, assorti les renseignements et documents transmis au Procureur
fédéral du Brésil d'une quelconque réserve de spécialité. Par cette omission,
dont l'Office fédéral s'est d'ailleurs à juste titre plaint dans son courrier
du 7 février 2003 adressé au Ministère public, le Ministère public a violé l'
art. 67a EIMP et le principe de la spécialité que cette disposition concrétise
dans le domaine en cause. Par là-même, le Ministère public a exposé le
recourant, ainsi que les personnes prévenues dans le cadre de l'enquête pénale
initiée en Suisse, au risque que les autorités brésiliennes fassent librement
usage des informations obtenues
BGE 139 IV 137 S. 158
à des fins étrangères à celle, la seule, que l'art. 67a al. 5 EIMP permet:
présenter une demande d'entraide internationale en matière pénale à la Suisse.
Toutefois, et tel que les juges du Tribunal administratif fédéral l'ont retenu
de manière convaincante, l'omission imputable au Ministère public en octobre
2002 a, en définitive, pu être réparée en relation avec la situation du
recourant. En effet, le 17 février 2003, les autorités brésiliennes ont requis
l'entraide de la Suisse, notamment dans le but d'obtenir la documentation
bancaire des huit personnes initialement visées par les enquêtes pénales
suisses, dont les comptes étaient mentionnés dans les tableaux que le Ministère
public avait spontanément remis au Procureur fédéral du Brésil. Or, dans ce
contexte, qui portait sur un seul et même complexe de fait qui incluait aussi
la situation du recourant, les autorités brésiliennes ont été avisées, de sorte
à les lier du point de vue du droit international public (cf. le principe
général de la bonne foi entre les Etats, inhérent aussi au traité d'extradition
passé entre le Brésil et la Suisse), des restrictions d'utilisation découlant
notamment du principe de la spécialité. Le recourant a ensuite pu s'en
prévaloir dans le cadre de son appel pénal formé au Brésil, étant rappelé que
la Suisse ne saurait répondre des éventuels actes illicites commis par les
autorités d'un autre Etat.
Même si, comme le prétend le recourant, la procuration bancaire mentionnée dans
le tableau du 14 octobre 2002, présenté par le Ministère public à son homologue
brésilien, n'avait pas été transmise dans le cadre de l'ordonnance de clôture
rendue en exécution de la demande d'entraide brésilienne, le renseignement
spontanément transmis au sujet de l'existence d'un tel document serait, dès
lors qu'il fait partie du même complexe de fait susmentionné, soumis au
principe de la spécialité. Il sera de plus précisé que les informations que le
Ministère public a fournies à son homologue brésilien en date du 12 février
2003 avaient pour leur part été accompagnées d'une fiche de transmission
officielle citant le texte légal de l'art. 67a EIMP.

5.2.5 Par conséquent, les griefs que le recourant tire du principe de la
spécialité, tel qu'adapté par l'art. 67a EIMP, ne conduisent pas non plus à
l'admission de son recours.