Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 138 II 557



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Urteilskopf

138 II 557

39. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause Fondation
de prévoyance X. contre Administration cantonale des impôts du canton de Vaud
(recours en matière de droit public)
2C_199/2012 du 23 novembre 2012

Regeste

Art. 103 FusG, Art. 24 Abs. 3 und 3^quater StHG; Handänderungssteuer bei
Umstrukturierungen.
Art. 103 FusG ist eine direkt anwendbare Norm des Bundesrechts; sie bedarf
keiner Konkretisierung durch das kantonale Recht und dieses kann nicht von ihr
abweichen (E. 4.2).
Lediglich der Begriff der "Umstrukturierung" ist im Handänderungssteuerrecht zu
verwenden, unter Ausschluss der übrigen Kriterien, welche das StHG für die
Befreiung von den direkten Steuern aufstellt (E. 5.2).
Der Begriff der Umstrukturierung im Sinn von Art. 24 Abs. 3 StHG umfasst die
Fusion, die Spaltung und die Umwandlung, nicht aber die Vermögensübertragung;
diese ist in Art. 24 Abs. 3^quater StHG geregelt (E. 6.1 und 7.3).
Die im Wortlaut von Art. 24 Abs. 3quater StHG enthaltene Beschränkung auf
gewisse Gesellschaftsformen (E. 7.2) steht dem grundlegenden Ziel des FusG
entgegen, die Flexibilität der Unternehmen bei der Wahl ihrer Rechtsform zu
erhöhen (E. 7.5).
Der Begriff des Konzerns gemäss Art. 663e OR gebietet nicht, Art. 24 Abs. 3^
quater StHG einzig auf Konzerne anzuwenden, die aus Kapitalgesellschaften oder
Genossenschaften bestehen (E. 7.4). Eine Vermögensübertragung zwischen zwei
Gesellschaften des gleichen Konzerns ist auch von der Handänderungssteuer
befreit, wenn die übernehmende Gesellschaft eine Vorsorgestiftung ist (E. 7.5).

Sachverhalt ab Seite 558

BGE 138 II 557 S. 558

A. La fondation de prévoyance X. (ci-après: la Fondation) détenait l'ensemble
des actions de la société immobilière B. SA (ci-après: la Société immobilière),
propriétaire de cinq parcelles sises à C. Par acte notarié du 6 mai 2010, la
Société immobilière a transféré à la Fondation des actifs comprenant les cinq
parcelles précitées pour 17'451'842 fr. et des passifs, à savoir une dette
hypothécaire de 16'091'354 fr. 60, soit un transfert net d'actifs de 1'360'487
fr. 40. Il ressort du registre du commerce que la Société immobilière a
fusionné avec effet au 31 décembre 2011 avec la société D. SA et lui a
transféré ses actifs et passifs restants.

B. Par décision de taxation du 15 juillet 2010, l'Administration cantonale des
impôts du canton de Vaud (ci-après: l'Administration cantonale) a fixé le
montant du droit de mutation en matière cantonale
BGE 138 II 557 S. 559
et communale découlant du transfert du 6 mai 2010 à 574'000 fr., sur la base
d'éléments imposables arrêtés à 17'400'000 fr.
Par arrêt du 27 janvier 2012, le Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après:
le Tribunal cantonal) a rejeté le recours déposé par la Fondation contre cette
taxation.

C. Par acte du 28 février 2012, la Fondation dépose un recours en matière de
droit public au Tribunal fédéral à l'encontre de l'arrêt du 27 janvier 2012.
Elle conclut, principalement, à l'annulation de cet arrêt et à ce qu'il soit
déclaré qu'elle est exonérée du droit de mutation fixé par décision de
l'Administration cantonale du 15 juillet 2010, le tout sous suite de frais et
dépens. Subsidiairement, elle requiert le renvoi de l'affaire à l'autorité de
taxation pour qu'elle procède au dégrèvement des droits de mutation fixés dans
la décision de taxation du 15 juillet 2010.
Le Tribunal fédéral admet le recours, annule l'arrêt attaqué et exonère la
recourante du droit de mutation litigieux.
(résumé)

Erwägungen

Extrait des considérants:

4.

4.1 Les droits de mutation sont des impôts perçus par les cantons sur les
transferts de propriété immobilière. Il s'agit d'impôts indirects qui n'entrent
pas dans le mandat d'harmonisation fiscale de la Confédération de l'art. 129
Cst. et qui relèvent exclusivement du droit cantonal (cf. ATF 127 II 1 consid.
2b/aa p. 4; arrêts 2C_713/2010 du 11 février 2011 consid. 1.3; 2C_753/2010 du
23 mars 2011 consid. 1.2). Le Parlement a adopté l'art. 103 de la loi du 3
octobre 2003 sur la fusion, la scission, la transformation et le transfert de
patrimoine (loi sur la fusion, LFus; RS 221.301) en se fondant sur l'art. 122
Cst., qui donne à la Confédération la compétence de légiférer en matière de
droit civil et qui l'autorise à opérer sur cette base lorsque l'application du
droit civil devient impossible ou excessivement compliquée (cf. BO 2003 CN 248
ss).

4.2 L'art. 103 LFus se distingue des normes de la législation sur
l'harmonisation fiscale, qui ne sont directement applicables que si les
dispositions du droit fiscal cantonal s'en écartent (cf. art. 72 al. 2 de la
loi du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et
des communes [LHID; RS 642.14]; STEFAN OESTERHELT, in Basler Kommentar,
Fusionsgesetz, Watter/Vogt/Tschäni/Daeniker [éd.], 2005 [ci-après: BK], n° 32
ad art. 103 LFus). L'art. 103 LFus
BGE 138 II 557 S. 560
est en effet une norme fédérale d'application directe, qui ne nécessite aucune
concrétisation par le droit cantonal (cf. STEFAN OESTERHELT, Umsetzung von Art.
103 FusG durch die kantonalen Gesetzgeber, RF 65/2010 p. 522; ERWIN R.
GRIESSHAMMER, in Zürcher Kommentar zum Fusionsgesetz, Frank Vischer [éd.], 2^e
éd. 2012, n° 12 ad art. 103 LFus). Les cantons restent cependant libres de
prévoir un allégement supplémentaire dès lors que les droits de mutation
reposent en principe sur le droit cantonal. Lorsque les normes cantonales vont
au-delà de l'art. 103 LFus, le contribuable peut ainsi se prévaloir tant du
droit fédéral que du droit cantonal (cf. OESTERHELT, in BK, n° 32 ad art. 103
LFus).
En revanche, tant que les dispositions cantonales se contentent de reprendre la
teneur de l'art. 103 LFus, cela n'en fait pas du droit cantonal distinct. En
effet, lorsqu'un canton, en dehors de sa compétence, reproduit dans sa
législation, en termes identiques, une règle qui figure dans la législation
fédérale, la règle cantonale n'a pas d'effet juridique propre, puisque cet
effet est produit par la règle fédérale (cf. AUBERT/MAHON, Petit commentaire de
la Constitution fédérale de la Confédération suisse, 2003, n° 6 ad art. 49
Cst.).

4.3 L'art. 103 LFus est entré en vigueur le 1^er juillet 2009 et, depuis cette
date, il fait obstacle à l'application de règles cantonales plus restrictives.
Selon l'art. 3 al. 1 let. i de la loi vaudoise du 27 février 1963 concernant le
droit de mutation sur les transferts immobiliers et l'impôt sur les successions
et donations (LMSD/VD; RSV 648.11), le droit de mutation n'est pas perçu sur
les transferts d'immeubles lors de restructurations au sens des art. 22 al. 1
et 3 et 97 al. 1 et 3 de la loi vaudoise du 4 juillet 2000 sur les impôts
directs cantonaux (LI/VD; RSV 642.11). Cette dernière disposition, ainsi que le
Tribunal cantonal l'a relevé à juste titre, reprend textuellement la teneur de
l'art. 24 al. 3 et 3^quater LHID. De son côté, l'art. 103 LFus prévoit que la
perception de droits de mutation cantonaux ou communaux est exclue en cas de
restructuration au sens des art. 8 al. 3 et 24 al. 3 et 3^quater LHID. La
teneur de l'art. 3 al. 1 let. i LMSD/VD est par conséquent identique à celle de
l'art. 103 LFus. Dans ces conditions, la présente affaire doit être examinée
exclusivement sous l'angle de l'art. 103 LFus et des dispositions de la LHID
auxquelles il renvoie. Les art. 3 al. 1 let. i LMSD/VD et 97 al. 1 et 3 LI/VD,
qui reprennent la teneur des dispositions fédérales, n'ont, dans ce contexte,
aucune portée propre.
BGE 138 II 557 S. 561

5.

5.1 Aux termes de l'art. 103 LFus, la perception de droits de mutation
cantonaux ou communaux est exclue en cas de restructuration au sens, notamment,
de l'art. 24 al. 3 et 3^quater LHID. Celui-ci a la teneur suivante:
^3 Les réserves latentes d'une personne morale ne sont pas imposées lors de
restructurations, notamment lors d'une fusion, d'une scission ou d'une
transformation, pour autant que la personne morale reste assujettie à l'impôt
en Suisse et que les éléments commerciaux soient repris à leur dernière valeur
déterminante pour l'impôt sur le bénéfice:
a. en cas de transformation en une société de personnes ou en une autre
personne morale;
b. en cas de division ou séparation d'une personne morale à condition que ce
transfert ait pour objet une ou plusieurs exploitations ou parties distinctes
d'exploitation et pour autant que les personnes morales existantes après la
scission poursuivent une exploitation ou partie distincte d'exploitation;
c. en cas d'échange de droits de participation ou de droits de sociétariat
suite à une restructuration ou à une concentration équivalant économiquement à
une fusion;
d. en cas de transfert à une société fille suisse d'exploitations ou de parties
distinctes d'exploitations ainsi que d'éléments qui font partie des biens
immobilisés de l'exploitation; on entend par société fille une société de
capitaux ou une société coopérative dont la société de capitaux ou la société
coopérative qui la transfère possède au moins 20 % du capital-actions ou du
capital social.
^3quater Des participations directes ou indirectes de 20 % au moins du
capital-actions ou du capital social d'une autre société de capitaux ou d'une
société coopérative, mais aussi des exploitations ou des parties distinctes
d'exploitation ainsi que des éléments qui font partie des biens immobilisés de
l'exploitation, peuvent être transférées, à leur dernière valeur déterminante
pour l'impôt sur le bénéfice, entre des sociétés de capitaux ou des sociétés
coopératives suisses qui, à la lumière des circonstances et du cas d'espèce et
grâce à la détention de la majorité des voix ou d'une autre manière, sont
réunies sous la direction unique d'une société de capitaux ou d'une société
coopérative. Sont réservés:
a. le transfert à une société fille selon l'art. 24, al. 3, let. d;
b. le transfert d'éléments qui font partie des biens immobilisés de
l'exploitation à une société qui est imposée selon l'art. 28, al. 2 à 4.

5.2 L'application de l'art. 103 LFus suppose que l'on soit en présence d'une
restructuration. Le Tribunal cantonal a laissé ouverte la question de savoir si
tel était le cas en l'espèce au motif que les autres conditions posées par
l'art. 24 al. 3 et 3^quater LHID, en particulier
BGE 138 II 557 S. 562
le maintien de l'assujettissement en Suisse et la forme juridique des sociétés
concernées, n'étaient de toute manière pas remplies. La recourante conteste
cette appréciation.
L'art. 103 LFus renvoie à la notion de restructuration au sens de l'art. 24 al.
3 et 3^quater LHID - qui a par ailleurs la même teneur que l'art. 61 al. 1 et 3
LIFD (RS 642.11). Ce renvoi vise à réaliser un parallélisme des conséquences
fiscales des restructurations (cf. OESTERHELT, in BK, n° 16 ad art. 103 LFus)
et à harmoniser les concepts de restructuration en droit fiscal avec ceux de la
LFus (cf. AMSTUTZ/MABILLARD, Fusionsgesetz, 2008, n° 3 ad art. 103 LFus). Ainsi
que la doctrine le relève avec pertinence, en ce qui concerne le droit de
mutation, ce renvoi est cependant maladroit (cf. OESTERHELT, in BK, n^os 16 ss
ad art. 103 LFus; AMSTUTZ/MABILLARD, loc. cit.). En effet, le droit de mutation
est un impôt indirect qui frappe les transactions juridiques et non un impôt
sur le revenu ou le bénéfice. En outre, la base de calcul du droit de mutation
est en règle générale le prix de vente intégral et non la plus-value réalisée
comme en matière d'impôts directs. La condition de la reprise des éléments
commerciaux à leur dernière valeur déterminante pour l'impôt sur le bénéfice,
telle que prévue à l'art. 24 al. 3 LHID, ne saurait ainsi constituer une
condition pour l'exonération du droit de mutation (cf. OESTERHELT, in BK, n° 17
ad art. 103 LFus). De même, l'exonération du droit de mutation ne saurait
dépendre du maintien de l'assujettissement de la société concernée à l'impôt en
Suisse, comme le précise l'art. 24 al. 3 LHID. En ce qui concerne le droit de
mutation, impôt sur les transactions juridiques perçu sur le prix de vente d'un
immeuble, le substrat fiscal dépend en effet de l'immeuble et reste par
conséquent toujours lié à celui-ci (cf. OESTERHELT, in BK, n° 18 ad art. 103
LFus), situé en Suisse. Enfin, la question de savoir si la personne morale qui
se prévaut de l'exonération du droit de mutation est assujettie à l'impôt sur
le bénéfice ne saurait, pour les mêmes raisons, être déterminante non plus,
quand bien même l'art. 24 LHID se trouve dans le chapitre consacré à cet impôt.
Une institution exonérée des impôts directs peut donc également se prévaloir de
l'exonération du droit de mutation (cf. OESTERHELT, in BK, n° 19 ad art. 103
LFus). Le renvoi à l'art. 24 al. 3 et 3^quater LHID contenu à l'art. 103 LFus
doit par conséquent être interprété de telle manière à ce que seul le concept
de "restructuration" doit être utilisé en matière de droit de mutation, à
l'exclusion des autres conditions établies par la LHID pour permettre
l'exonération des impôts directs (cf. AMSTUTZ/MABILLARD, loc. cit.), en
particulier celle du maintien de l'assujettissement de la société concernée à
l'impôt en Suisse.
BGE 138 II 557 S. 563

5.3 Le Tribunal cantonal a retenu que les immeubles ayant été transférés à une
fondation qui bénéficie de l'exonération fiscale, la condition du maintien de
l'assujettissement en Suisse n'était pas réalisée, de sorte que le transfert de
patrimoine ne pouvait bénéficier de l'exonération du droit de mutation. A la
lumière de ce qui vient d'être exposé, cette opinion ne saurait être suivie.
Cela ne signifie pas encore que le recours doive forcément être admis, si
d'autres motifs permettent de justifier la solution retenue dans l'arrêt
attaqué.

6. Au vu de ce qui précède, il s'avère nécessaire d'examiner si l'opération
intervenue entre la Fondation et la Société immobilière constitue une
restructuration au sens de l'art. 103 LFus en relation avec l'art. 24 al. 3
LHID.

6.1 Au regard de l'art. 24 al. 3 LHID, la notion de restructuration recouvre en
principe la fusion, la scission et la transformation (cf. OESTERHELT, in BK, n°
15 ad art. 103 LFus). La notion de restructuration selon l'art. 24 al. 3 LHID
ne comprend en revanche pas le transfert de patrimoine, raison pour laquelle un
tel transfert ne peut être effectué en neutralité fiscale en application de
cette disposition (cf. RIEDWEG/GRÜNBLATT, in Basler Kommentar, Fusionsgesetz,
Watter/Vogt/Tschäni/Daeniker [éd.], 2005,n^os 158 et 71 ad Teil 1 vor art. 69
LFus), à moins qu'il ne réalise simultanément l'état de fait de la fusion, de
la transformation ou de la scission (cf. OESTERHELT, in BK, n° 21 ad art. 103
LFus). Il convient d'examiner ces notions.

6.2 Le terme de fusion de la clause générale de l'art. 24 al. 3 LHID comprend
les fusions proprement dites effectuées selon les modalités des art. 3 ss LFus
ainsi que les fusions improprement dites, à savoir les opérations
économiquement équivalentes à des fusions, réalisées par le biais de
l'institution du transfert de patrimoine. Elles impliquent en tous les cas le
transfert de l'intégralité des actifs et passifs et la dissolution de l'entité
transférante (cf. GLAUSER/OBERSON, in Commentaire romand, Impôt fédéral direct,
Yersin/Noël [éd.], 2008, n° 18 adart. 61 LIFD; RICHNER/FREI/KAUFMANN/MEUTER,
Handkommentar zum DBG, 2^e éd. 2009, n° 42 ad art. 61 LIFD; MARKUS REICH, in
Bundesgesetz über die direkte Bundessteuer [DBG],in Kommentar zum
schweizerischen Steuerrecht, Zweifel/Athanas [éd.], 2^e éd. 2008, n° 23 ad art.
61 LIFD; LUDWIG/TAROLLI SCHMIDT, in Zürcher Kommentar zum Fusionsgesetz, Frank
Vischer [éd.], 2^e éd. 2012, n° 2 ad Steuern [Fusion]).
En l'espèce, par acte notarié du 6 mai 2010, la Fondation a repris une partie
du patrimoine de la Société immobilière, à savoir des actifs
BGE 138 II 557 S. 564
pour 17'451'842 fr. et des passifs pour 16'091'354 fr. Selon les indications
figurant au registre du commerce, accessibles par internet - qui sont des faits
notoires que le Tribunal fédéral peut librement prendre en compte (cf. ATF 135
III 88 consid. 4.1 p. 89 s.; arrêt 4A_645/2011 du 27 janvier 2012 consid.
3.4.2) -, les actifs et passifs restants ont été repris ultérieurement par une
autre société, ce qui a entraîné la radiation de la Société immobilière au 31
décembre 2011 par suite de fusion avec cette dernière. Dès lors que l'opération
de transfert de patrimoine à l'origine de la présente affaire ne portait pas
sur l'intégralité des actifs et passifs de la Société immobilière et qu'elle
n'a pas entraîné la dissolution de celle-ci, elle ne saurait être assimilée à
une fusion au sens de l'art. 24 al. 3 LHID.

6.3 Lors de la transformation envisagée par l'art. 24 al. 3 let. a LHID, qui se
réfère aux art. 53 ss LFus, l'élément caractéristique réside dans le fait
qu'une personne morale change de forme juridique tout en maintenant son
activité (cf. GLAUSER/OBERSON, op. cit., n° 35 ad art. 61 LIFD; REICH, op.
cit., n° 72 ad art. 61 LIFD; SAUPPER/MÜLLER, in Basler Kommentar,
Fusionsgesetz, Watter/Vogt/Tschäni/Daeniker [éd.],2005, n° 1 ad vor art. 53
LFus; LUDWIG/NIEDERER, in Zürcher Kommentar zum Fusionsgesetz, Frank Vischer
[éd.], 2^e éd. 2012, n° 2 ad Steuern [Umwandlung]).
Ce n'est pas une opération de ce type qui a eu lieu en l'espèce puisque le
transfert de patrimoine concernait deux personnes morales qui ont conservé leur
forme juridique respective. Dans ces conditions, on n'est pas en présence d'une
restructuration au sens de l'art. 24 al. 3 let. a LHID.

6.4 En ce qui concerne la scission, elle est régie par l'art. 24 al. 3 let. b
LHID en relation avec les art. 29 ss LFus. Une scission peut ainsi s'effectuer
en neutralité fiscale pour autant qu'après l'opération les deux parties issues
de la scission poursuivent une exploitation ou une partie d'exploitation (cf.
arrêt 2C_784/2008 du 7 juillet 2009 consid. 3.5; GLAUSER/OBERSON, op. cit., n°
41 ad art. 61 LIFD; REICH, op. cit., n° 101 ad art. 61 LIFD; RIEDWEG/GRÜNBLATT,
op. cit., n° 41 ad vor art. 29 LFus; GRIESSHAMMER, op. cit., n° 3 ad Steuern
[Spaltung]). Cettecondition du maintien d'une double exploitation s'explique en
particulier par le souci d'éviter des abus, notamment le transfert de toute une
exploitation avec, chez le sujet transférant, seuls quelques actifs isolés qui
resteraient et pourraient ensuite être vendus avec la société scindée (cf.
GLAUSER/OBERSON, loc. cit.; RIEDWEG/GRÜNBLATT, op. cit., n° 44 ad vor art. 29
LFus). L'exploitation se caractérise par un
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degré élevé d'autonomie et constitue une organisation capable de subsister par
elle-même (cf. OLIVER KÜNZLER, Konzernübertragung im Privat- und Steuerrecht,
2006, p. 155; REICH, op. cit., n^os 103 ad art. 61 et 60 ad art. 19 LIFD;
RIEDWEG/GRÜNBLATT, op. cit., n° 48 ad vor art. 29 LFus). La partie
d'exploitation représente quant à elle la plus petite entité capable de
subsister de manière autonome (cf. RIEDWEG/GRÜNBLATT, op. cit., n° 49 ad vor
art. 29 LFus; KÜNZLER, op. cit., p. 156).
En l'espèce, après la cession des immeubles et des dettes hypothécaires qui y
étaient liées, la Société immobilière ne disposait plus que de quelques actifs
circulants ainsi que de ses fonds propres. En effet, ainsi que cela ressort de
l'extrait du registre du commerce relatif à la société qui a ultérieurement
repris ses actifs et passifs restants, ceux-ci se montaient à respectivement
519'921 fr. 84 et 0 fr. 00. Dans ces conditions, on ne saurait admettre qu'elle
représentait encore une exploitation ou partie d'exploitation au sens précité.
On n'est par conséquent pas en présence d'une scission au sens de l'art. 24 al.
3 let. b LHID.

6.5 Le transfert de patrimoine intervenu entre la Fondation et la Société
immobilière ne constitue par conséquent ni une fusion, ni une transformation,
ni une scission, de sorte qu'on n'a pas affaire à une restructuration au sens
de l'art. 24 al. 3 LHID. La recourante ne peut ainsi prétendre à être exonérée
du droit de mutation conformément à l'art. 103 LFus en relation avec l'art. 24
al. 3 LHID.

7. La recourante estime qu'en dépit de son statut juridique de fondation, elle
peut néanmoins se prévaloir de l'art. 24 al. 3^quater LHID bien que le texte de
cette disposition restreigne la neutralité fiscale du transfert de patrimoine
entre des sociétés d'un même groupe aux transferts intervenant entre sociétés
de capitaux et sociétés coopératives. Il convient d'examiner si tel est le cas.

7.1 Selon la jurisprudence, la loi s'interprète en premier lieu d'après sa
lettre. Si le texte légal n'est pas absolument clair, si plusieurs
interprétations de celui-ci sont possibles, il faut rechercher la véritable
portée de la norme, en la dégageant de sa relation avec d'autres dispositions
légales, de son contexte, du but poursuivi, de son esprit ainsi que de la
volonté du législateur, telle qu'elle résulte notamment des travaux
préparatoires (cf. ATF 137 II 164 consid. 4.1 p. 170 s.). Lorsque le texte
légal est clair, l'autorité qui applique le droit ne peut s'en écarter que s'il
existe des motifs sérieux de penser que ce texte ne correspond pas en tous
points au sens véritable de la disposition visée et
BGE 138 II 557 S. 566
conduit à des résultats que le législateur ne peut avoir voulus et qui heurtent
le sentiment de la justice ou le principe de l'égalité de traitement. De tels
motifs peuvent résulter des travaux préparatoires, du fondement et du but de la
prescription en cause, ainsi que de sa relation avec d'autres dispositions (cf.
ATF 137 II 246 consid. 6 p. 250 s.; ATF 131 I 394 consid. 3.2 p. 396). L'art.
190 Cst., qui contraint le Tribunal fédéral à appliquer les lois fédérales, ne
fait pas obstacle à une interprétation qui irait à l'encontre du texte de la
disposition légale. S'il existe de bonnes raisons d'admettre que le texte de la
disposition ne reproduit pas son vrai sens - la ratio legis - il est possible
de s'en écarter afin d'interpréter la disposition selon son sens véritable,
surtout si celui-ci apparaît plus conforme à la Constitution que son texte (cf.
ATF 131 II 217 consid. 2.3 p. 221).

7.2 L'application de l'art. 24 al. 3 LHID n'est pas limitée aux seules sociétés
de capitaux et sociétés coopératives, de sorte que toutes les personnes morales
peuvent en bénéficier (cf. OBERSON/GLAUSER, in Commentaire LFus, Peter/Trigo
Trindade [éd.], 2005, n° 4 ad art. 61LIFD). Le texte de l'art. 24 al. 3^quater
LHID prévoit en revanche que des éléments de patrimoine ne peuvent être
transférés - en neutralité fiscale - qu'entre des sociétés de capitaux ou des
sociétés coopératives qui sont réunies sous la direction unique d'une société
de capitaux ou d'une société coopérative. Selon une interprétation littérale,
le transfert d'éléments patrimoniaux au sein d'un groupe en faveur d'une
fondation n'est par conséquent pas possible en neutralité fiscale puisqu'il ne
s'agit pas d'une société de capitaux ou d'une société coopérative (cf. RICHNER/
FREI/KAUFMANN/MEUTER, op. cit., n° 297 ad art. 61 LIFD; REICH, op. cit., n° 181
ad art. 61 LIFD). De même, le transfert de patrimoine au sein d'un groupe
dominé par une fondation n'est pas possible pour les mêmes raisons (cf. RIEDWEG
/HEUBERGER, in Basler Kommentar, Fusionsgesetz, Watter/Vogt/Tschäni/Daeniker
[éd.], 2005, n° 20 ad Teil 2 vor art. 69 LFus; REICH, loc. cit.; GRÜNINGER/
HEUBERGER, in Basler Kommentar, Fusionsgesetz, Watter/Vogt/Tschäni/Daeniker
[éd.], 2005, n° 22 ad vor art. 78 LFus). Le texte de ladisposition étant clair,
il convient d'examiner si, comme l'allègue la recourante, il existe des motifs
sérieux de penser que ce texte ne correspond pas en tous points au sens
véritable de la disposition visée.

7.3 Le transfert de patrimoine constitue un institut juridique complémentaire
aux états de fait spécifiques de la fusion, de la scission et de la
transformation (cf. RALPH MALACRIDA, in Basler Kommentar, Fusionsgesetz, Watter
/Vogt/Tschäni/Daeniker [éd.], 2005, n° 3 ad art. 69
BGE 138 II 557 S. 567
LFus). Il représente un succédané pour les opérations de fusion et de
transformation qui ne sont pas prévues par la LFus; il permet de réaliser de
manière adéquate des opérations de modification des structures juridiques,
notamment de transférer l'ensemble du patrimoine d'une société de capitaux à
une société de personnes ou à une fondation, opérations qui ne sont pas prévues
par la LFus en raison de l'incompatibilité des formes juridiques en cause (cf.
Message du 13 juin 2000 concernant la loi fédérale sur la fusion, la scission,
la transformation et le transfert de patrimoine, FF 2000 3995, spéc. 4018 ch.
1.3.2.4.4). S'agissant d'un simple instrument de transfert des droits qui peut
être utilisé pour atteindre différents objectifs économiques, le transfert de
patrimoine ne peut être assimilé d'une manière générale à une fusion, une
scission ou encore une transformation. Les restructurations qui s'appuient sur
un transfert de patrimoine peuvent cependant être effectuées sans conséquences
fiscales, pour autant que le procédé soit analogue, au plan économique, à une
fusion, une scission ou une transformation (cf. Message précité, 4016 s. ch.
1.3.2.4.2; RIEDWEG/GRÜNBLATT, op. cit., n° 6 ad Teil 1 vor art. 69 LFus; LUDWIG
/NIEDERER, op. cit., n° 3 ad Steuern [Vemögensübertragung]). L'utilisation
dutransfert de patrimoine n'est ainsi pas nécessaire pour opérer une
restructuration en neutralité fiscale et, inversement, il n'entraîne pas ipso
facto la neutralité fiscale (cf. GLAUSER/OBERSON, op. cit., n° 16 ad art. 61
LIFD). Il convient par conséquent d'examiner dans chaque cas de transfert de
patrimoine si on est en présence d'une restructuration qui peut s'effectuer de
manière neutre au plan fiscal (cf. LUDWIG/NIEDERER, op. cit., n° 4 ad Steuern
[Vemögensübertragung]; LOCHER/AMONN, Vermögensübertragungen im Recht der
direkten Steuern, ASA 71 p. 763 ss, spéc. 768 s.). Lorsqu'une restructuration
s'effectue par le biais d'un transfert de patrimoine, et qu'elle n'est pas
analogue à une fusion, une scission ou une transformation, l'art. 24 al. 3 LHID
n'est pas applicable et il est donc nécessaire d'examiner si on est en présence
d'un groupe au sens de l'art. 24 al. 3^quater LHID.

7.4 Selon le Message du Conseil fédéral, il convient de se fonder sur l'art.
663 e al. 1 CO pour la notion de groupe (cf. Message précité, 4161 ch. 2.2.7).
Selon cette disposition, l'obligation d'établir des états financiers consolidés
concerne en premier lieu les groupes qui sont dominés par une société anonyme,
mais également ceux dominés par une société ayant une autre forme juridique,
dans la mesure où les règles comptables qui lui sont applicables sont celles de
la société anonyme, soit la société en commandite par actions, la société à
BGE 138 II 557 S. 568
responsabilité limitée, les sociétés de crédit et les sociétés d'assurance
concessionnaires (cf. HENRI TORRIONE, in Commentaire romand du Code des
obligations, vol. II, Tercier/Amstutz [éd.], 2008, n° 10 adart. 663e CO;
NEUHAUS/BLÄTTLER, in Basler Kommentar, Obligationenrecht, vol. II, Honsell/Vogt
/Watter [éd.], 4^e éd. 2012, n° 5 ad art. 663e CO). Il n'y a en revanche pas
d'exigences particulières concernant la forme juridique des filiales (cf.
TORRIONE, op. cit., n° 12 ad art. 663e CO; NEUHAUS/BLÄTTLER, op. cit., n° 6 ad
art. 663e CO). La notion de groupe selon l'art. 663e CO n'impose par conséquent
pas l'application de l'art. 24 al. 3^quater LHID aux seuls groupes composés de
sociétés de capitaux ou de sociétés coopératives.
Différents auteurs critiquent la restriction de l'art. 24 al. 3^quater LHID aux
groupes dominés par une société de capitaux ou une société coopérative (cf.
OBERSON/GLAUSER, op. cit., n° 42 ad art. 61 LIFD; GLAUSER/OBERSON, op. cit., n°
82 ad art. 61 LIFD; KÜNZLER, op. cit., p. 141 s.; RIEDWEG/HEUBERGER, loc. cit.;
LUDWIG/NIEDERER, op. cit., n° 3 ad Steuern[Vemögensübertragung]). Selon ces
auteurs, la référence à l'art. 663 e CO renvoie en effet à la notion de groupe,
soit à la définition de la direction unique, et non à l'obligation comptable
contenue dans cette disposition. On saisit mal par conséquent pour quelle
raison le groupe au sens de l'art. 24 al. 3^quater LHID dépendrait de
l'obligation de tenir des comptes consolidés (cf. GLAUSER/OBERSON, loc. cit.).

7.5 Des groupes qui sont dominés par une personne physique ou une personne
morale d'un type autre qu'une société de capitaux ou une société coopérative
peuvent avoir les mêmes raisons pertinentes d'effectuer une restructuration par
le biais d'un transfert de patrimoine au sein du groupe. Le Message du Conseil
fédéral ne précise pas pour quelle raison cette limitation à certaines formes
juridiques a été introduite (cf. Message précité, 4161 ch. 2.2.7; KÜNZLER, loc.
cit.). Cette restriction favorise les sociétés de capitaux et les sociétés
coopératives et contrevient ainsi à un objectif fondamental de la LFus, à
savoir l'augmentation de la flexibilité des entreprises dans le choix de leur
forme juridique (cf. KÜNZLER, loc. cit.). Cette situation s'avère
particulièrement problématique en lien avec l'art. 103 LFus. Ainsi, on ne voit
pas pour quelle raison objective un droit de mutation serait dû lorsque, dans
le contexte d'une restructuration au sein d'un groupe de sociétés, la société
reprenante est une fondation, mais sa perception serait interdite lorsque les
biens sont repris par une société de capitaux ou une société coopérative. Cette
distinction apparaît difficile à saisir si on la met en lien avec la loi
fédérale du 25 juin
BGE 138 II 557 S. 569
1982 sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité
(LPP; RS 831.40), qui prévoit que les institutions de prévoyance de droit privé
doivent revêtir la forme d'une fondation ou d'une société coopérative (cf. art.
48 al. 2 LPP). Par le jeu de l'art. 103 LFus en relation avec l'art. 24 al. 3^
quater LHID, l'institution de prévoyance sous la forme de la société
coopérative se verrait privilégiée sans raison par rapport à celle constituée
en fondation, alors qu'elles poursuivent le même but, la prévoyance
professionnelle. Le Conseil fédéral a par ailleurs souhaité que, de manière
générale, la possibilité de transférer des réserves latentes en franchise
d'impôt, suite à une restructuration, ne soit pas seulement accordée aux
sociétés de capitaux et aux sociétés coopératives, mais à toute personne
morale, et donc aussi aux fondations (cf. Message précité, 4025 ch. 1.3.9.3).
En outre, l'art. 103 LFus a été adopté par le Parlement après une discussion
nourrie (cf. BO 2003 CN 248 ss, interventions Baumann, Maître, Leuthard, Pelli
et Baader, d'un côté, et Leutenegger Oberholzer et Gross, de l'autre) et contre
l'avis du Conseil fédéral qui doutait de la compétence de la Confédération pour
légiférer dans ce domaine (cf. Message précité, 4035 s. ch. 1.3.9.7), et les
conséquences pratiques de la formulation choisie n'ont pas fait l'objet d'un
examen approfondi. Enfin, le texte de l'art. 103 LFus lui-même laisse une
certaine marge d'interprétation lorsqu'il interdit la perception de droits de
mutation en cas de restructuration au sens des art. 8 al. 3 et 24 al. 3 et 3^
quater LHID, sans limiter l'injonction aux restructurations telles que
précisément définies par ces dispositions.
En lien avec l'art. 103 LFus, le texte de l'art. 24 al. 3^quater LHID conduit
ainsi à un résultat que le législateur ne peut avoir voulu et qui heurte le
principe de l'égalité de traitement. Dès lors que, d'une manière générale, le
système mis en place par la LFus est conçu de manière à éviter que les
possibilités offertes par le droit civil ne soient contrecarrées par le droit
fiscal (cf. Message précité, 4024 ch. 1.3.9.2), force est de constater qu'il
est nécessaire de s'écarter du texte de l'art. 24 al. 3^quater LHID en ce qui
concerne l'interdiction de la perception de droits de mutation prévue à l'art.
103 LFus. Dans ces conditions, un transfert de patrimoine qui intervient entre
deux entreprises d'un même groupe doit également être exempté de droits de
mutation lorsque la partie reprenante revêt la forme d'une fondation.