Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 137 II 23



Urteilskopf

137 II 23

4. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public dans la cause Commune de
St-Sulpice contre époux A. et B., C. ainsi que Département de l'économie du
canton de Vaud (recours en matière de droit public)
1C_365/2010 du 18 janvier 2011

Regeste

Art. 1 Abs. 1 und Abs. 2 lit. b, Art. 15 RPG; Verdichtung der Bauzone.
Die kommunale Planung, welche den Schutz der Uferlandschaft des Sees betont,
entspricht den Grundsätzen der Raumplanung. Der kantonale Entscheid, welcher
das im kantonalen Richtplan enthaltene Gebot der Verdichtung schematisch und
ohne Rücksicht auf die Eigenheiten des Gemeindeterritoriums anwendet, verletzt
die Gemeindeautonomie (E. 3 und 4).

Sachverhalt ab Seite 24

BGE 137 II 23 S. 24

A. C. est propriétaire de la parcelle n° 108 de la commune de St-Sulpice. (...)
A. et B. sont propriétaires de la parcelle n° 110, contiguë à l'est de la
précédente. (...) Selon le plan général d'affectation communal de 1992, les
deux parcelles se trouvaient en zone résidentielle B (moyenne densité),
permettant une surface bâtie sur 1/10^e de la surface du terrain, avec trois
niveaux et combles éventuelles, soit un coefficient d'utilisation du sol de 0,3
voire 0,375.
Aux mois d'avril et mai 2007, la commune a mis à l'enquête un projet de
révision de son plan général d'affectation (PGA), prévoyant notamment une
extension vers le nord de la zone à faible densité située sur presque toute la
longueur du territoire communal en bordure du lac Léman. Selon le projet de
règlement général sur l'aménagement du territoire et les constructions
(ci-après: le règlement), la zone de faible densité est destinée à l'habitation
ou aux activités compatibles avec celle-ci. L'ordre des constructions est non
contigu, la hauteur de 10 m au faîte et l'indice d'utilisation du sol (IUS,
surface brute de planche habitable) de 0,3. La zone de moyenne densité permet
une hauteur de 13 m au faîte et un IUS de 0,45. Selon la nouvelle
réglementation, la parcelle n° 108 se voyait colloquée dans sa partie nord en
zone de moyenne densité et dans sa partie sud en zone de faible densité. La
parcelle n° 110 se trouvait entièrement en zone de faible densité. Leurs
propriétaires respectifs ont fait opposition. Par décision du 16 avril 2008, le
Conseil communal de St-Sulpice (...) a levé les oppositions. (...) La version
définitive du PGA et du règlement a été adoptée le 25 février 2009, et
approuvée préalablement par le chef du Département cantonal de l'économie le 25
mai 2009.

B. Par arrêt du 30 juin 2010, la Cour de droit administratif et public du
Tribunal cantonal vaudois (ci-après: la CDAP) a admis le recours formé par C.,
A. et B., et annulé les décisions communale et cantonale des 25 février et 25
mai 2009 en ce qui concerne les parcelles n^os 108 et 110. Le plan directeur
cantonal (PDCn) prévoyait (...) une densification de la zone à bâtir. Le projet
d'agglomération Lausanne-Morges (PALM), adopté sur cette base, ainsi que le
Schéma directeur Ouest lausannois reprenaient cet objectif en fixant une
densité moyenne de 100 habitants et emplois par hectare, soit un IUS de 0,625.
La commune devait donc clairement densifier sa zone à bâtir. Or, la nouvelle
planification augmentait globalement les capacités constructibles, mais avait
limité la densification afin de
BGE 137 II 23 S. 25
préserver le caractère du domaine bâti existant et de protéger le site de la
rive du lac. Plus d'une trentaine de parcelles avait ainsi été déclassée
totalement ou partiellement en zone de faible densité. Une telle planification
n'était pas compatible avec les objectifs du développement territorial. Le
dossier a dès lors été renvoyé à la commune afin de que les deux parcelles des
recourants soient entièrement colloquées en zone de moyenne densité, ce qui
permettait encore de respecter le caractère du coteau. (...)

C. Par acte du 31 août 2010, la Commune de St-Sulpice forme un recours en
matière de droit public pour violation de son autonomie. Elle demande la
réforme de l'arrêt cantonal en ce sens que les décisions communale et cantonale
sont maintenues en ce qui concerne les parcelles n^os 108 et 110. (...)
Le Tribunal fédéral a admis le recours.
(extrait)

Erwägungen

Extrait des considérants:

3. Invoquant notamment les art. 1, 2, 4 et 17 LAT (RS 700), la recourante
estime que la cour cantonale se serait livrée à une mauvaise pesée des intérêts
en présence. Elle relève que si la densification du milieu bâti répond à un
souci majeur de l'aménagement du territoire, elle doit avoir lieu dans le
respect des autres objectifs poursuivis, notamment le maintien du cadre de vie
de la commune et la protection des sites sensibles. La recourante relève que le
territoire communal est dépourvu de zone agricole et déjà largement bâti. La
nouvelle planification permettrait de passer de 3'000 à environ 5'000
habitants. La zone mixte a été étendue tout le long de la route cantonale, y
compris dans le périmètre du nouveau plan de quartier "En Champagny-Sud". La
commune aurait ainsi donné suite aux exigences du service cantonal de
l'aménagement du territoire (actuellement le service du développement
territorial), à l'exception d'un IUS de 0,4 pour la zone de faible densité, qui
n'est imposé par le PDCn que depuis le mois d'août 2008. La recourante invoque
l'intérêt public à la préservation du paysage des rives du lac, qui imposerait
de maintenir la prédominance de la végétation jusqu'au niveau de la rupture de
pente où se trouve le village. Pour la parcelle n° 110, la limite de la zone de
faible densité a été fixée afin d'éviter une construction au niveau de la
rupture de pente et de faciliter la fixation de la limite sur les parcelles
situées à l'est. Du point de vue
BGE 137 II 23 S. 26
des propriétaires intimés, la restriction des droits à bâtir serait faible,
voire inexistante puisque l'IUS passe à 0,45 pour la zone de moyenne densité,
et que l'art. 3.6 du règlement prévoit à certaines conditions un "bonus" de 10
%. Pour les deux parcelles, il en résulterait une augmentation de 145 m^2 des
droits à bâtir. L'arrêt cantonal n'aurait pour effet qu'une augmentation
dérisoire de la densité du territoire communal (0,46 %) et provoquerait un
découpage incohérent des zones. Une redéfinition de celles-ci se heurterait à
la volonté des propriétaires voisins concernés, qui ont expressément consenti à
la nouvelle planification.

4. Entré en vigueur le 1^er août 2008, le plan directeur cantonal s'attache
notamment à combattre le phénomène d'étalement urbain par un développement
judicieux des centres, soit des quartiers disposant d'équipements, services et
transports publics. Pour compenser cette densification, ce développement doit
s'accompagner d'une exigence marquée pour l'intégration du bâti et la création
de nouveaux espaces (volet stratégique, p. 37).

4.1 Le périmètre compact de l'agglomération Lausanne-Morges fait l'objet de la
fiche régionale R 01 qui définit plusieurs objectifs. Il s'agit notamment de
développer l'agglomération vers l'intérieur, en réunissant les conditions pour
l'accueil de 70'000 habitants et emplois dans le périmètre de l'agglomération
compacte entre 2005 et 2020; d'attribuer aux 4 principaux centres-villes de
l'agglomération, à 10 sites stratégiques et à 4 sites d'exception le rôle de
moteurs du développement; de favoriser une urbanisation alliant densité et
qualité et de développer une offre de transports publics attractive et durable
en lien avec l'urbanisation. Pour atteindre ces objectifs, le canton, les
communes et les associations régionales partenaires ont signé le 22 février
2007 une Convention pour la mise en oeuvre du projet d'agglomération
Lausanne-Morges dans laquelle ils s'engagent en particulier à soutenir les
orientations stratégiques du PALM et à adapter dans les meilleurs délais leurs
planifications territoriales de façon à faciliter la mise en oeuvre des
objectifs du PALM.
Ce dernier constitue ainsi un instrument d'urbanisme de niveau directeur
résultant d'une concertation entre les communes concernées et le canton. Il
tend à réagir contre le développement non durable de l'agglomération
Lausanne-Morges (étalement urbain, trafic automobile, pollution et nuisances
sonores notamment) en concentrant le développement dans les espaces qui sont
déjà largement
BGE 137 II 23 S. 27
urbanisés. L'objectif est d'atteindre 100 habitants et emplois à l'hectare dans
les secteurs ordinaires, et le double dans les sites stratégiques. Les densités
pourront être adaptées aux conditions locales, pour autant que les efforts de
densification restent significatifs. Rappelant que les concepts de densité et
de qualité ne sont pas incompatibles, le rapport relève qu'il y a lieu de ne
pas se limiter à des critères quantitatifs, mais qu'il faut tenir compte de la
valeur patrimoniale, de la morphologie des lieux, des conditions
d'accessibilité multimodale et des impacts environnementaux.

4.2 La recourante relève la nécessité de conserver les caractéristiques du
territoire communal, dont la partie située en bordure du lac est constituée
d'un coteau peu bâti et arboré faisant office de zone tampon entre les rives et
la partie amont de la commune, plus densément bâtie. Les zones de moyenne
densité sont situées dans le prolongement à l'est et à l'ouest du village. Le
rapport d'aménagement à l'appui du PGA souligne la nécessité de maintenir
l'état actuel avec une prédominance de végétation, raison pour laquelle la zone
de faible densité a été maintenue et légèrement étendue vers le nord en tenant
compte de la nature des constructions existantes.

4.3 La densification des zones à bâtir, telle qu'elle est voulue par le PDCn et
le PALM, répond certes à un intérêt public important, maintes fois rappelé par
la jurisprudence. Cela correspond au principe fondamental d'utilisation mesurée
du sol (art. 1 al. 1 LAT), qui impose une rationalisation de la zone à bâtir
plutôt que son extension (ATF 119 Ia 300 consid. 3c; ATF 113 Ia 266 consid. 2a
p. 269). Le rapport d'aménagement prévoit toutefois, pour la commune de
St-Sulpice, une population de 4'500 habitants en 2020 (contre 3'000 en 2010),
et considère que la légère augmentation de la densité permettrait d'accueillir
environ 5'020 habitants. Dès lors, si la densification opérée par la nouvelle
planification est certes très inférieure à la moyenne globale préconisée par le
PALM, la définition de la zone à bâtir n'en satisfait pas moins aux exigences
de l'art. 15 let. b LAT.

4.4 Le maintien d'un cadre de vie de qualité, en protégeant la typologie
caractéristique d'un village ou d'un quartier, correspond lui aussi à un
principe important de l'aménagement du territoire (art. 1 al. 2 let. b LAT),
dont les instruments tels que le PALM tiennent d'ailleurs également compte. La
cour cantonale ne nie pas que les abords de la rive du lac, sur quasiment toute
la longueur du territoire communal, constituent une entité paysagère homogène
qui
BGE 137 II 23 S. 28
mérite d'être conservée et qui peut être observée depuis le lac ainsi que
depuis le cheminement piétonnier aménagé le long de la rive. Le Plan directeur
cantonal des rives vaudoises du lac Léman, adopté en 2000 par le Grand Conseil
vaudois, pose comme principe d'aménagement essentiel le maintien, sur tout le
pourtour du lac, d'une faible densité des constructions. En particulier, dans
les secteurs pas ou peu bâtis, il s'agit de rechercher le statu quo (p. 42-43,
Mesure générale A1). De ce point de vue, le territoire de St-Sulpice présente
des caractéristiques tout à fait particulières, que la commune a décidé de
préserver en distinguant clairement la zone villageoise et résidentielle du
milieu arborisé et faiblement construit situé en aval. Outre l'indice
d'utilisation du sol, de 0,3, le règlement prévoit diverses mesures dans ce
sens, tels que l'ordre non contigu, la limitation à deux du nombre de
logements, l'implantation des bâtiments sur des parcelles de 800 m^2 au moins,
la limitation de la hauteur des bâtiments (6,5 m à la corniche et 10 m au
faîte) ainsi que l'obligation de planter un arbre majeur pour chaque tranche de
500 m^2 d'un bien-fonds bâti.
Le rapport d'aménagement explique que la limite entre les zones de faible et de
moyenne densité a été redéfinie jusqu'à la rupture de pente du coteau pour
tenir compte de l'état de l'urbanisation existante. S'agissant plus
particulièrement des parcelles des intimés, cette limite n'a pas été aisée à
fixer, compte tenu de la taille de la parcelle n° 108 qui s'étend en direction
de la rive. Colloquer celle-ci entièrement en zone de moyenne densité
impliquait une réduction sensible de la zone protégée, contrairement à ce qui a
été décidé pour l'ensemble du territoire de la commune. Cela permettait aussi
une augmentation du volume bâti ainsi que l'implantation d'un bâtiment à la
hauteur de la rupture de pente, incompatible avec l'environnement actuel. Telle
qu'elle a été fixée par l'autorité communale, la limite des zones, qui traverse
la parcelle n° 108 et longe au nord la parcelle n° 110, procède d'un choix
raisonnable et cohérent au regard de l'ensemble du plan.

4.5 Quant à l'atteinte aux intérêts privés des propriétaires intimés, elle
apparaît elle aussi admissible. La question de savoir dans quelle mesure la
nouvelle réglementation implique une réduction des droits à bâtir a fait
l'objet d'une controverse entre les parties et n'a pas été résolue en instance
cantonale, notamment en raison de l'utilisation de deux indices distincts, soit
le coefficient d'occupation du sol et le
BGE 137 II 23 S. 29
coefficient d'utilisation théorique selon l'ancienne planification, et l'IUS
selon la nouvelle. Pour ce qui concerne la parcelle n° 108, le passage en
faible densité pour la partie sud est compensé dans une certaine mesure par
l'augmentation de l'IUS (de 0,375 à 0,45) pour la zone de moyenne densité, de
sorte que la réduction des droits à bâtir ne serait que de 5 % environ. Quant à
la parcelle n° 110, déjà bâtie, la réduction serait de 7,5 % selon la commune
et de 18 % selon les intimés. La commune recourante relève qu'en application du
"bonus" de 10 % prévu à l'art. 3.6 du règlement, le PGA augmenterait de 145 m^2
les droits à bâtir pour l'ensemble des deux parcelles. Un tel bonus n'est
toutefois envisageable qu'à des conditions précises (équipement public, cession
de parcelles à la commune, économies d'énergie ou développement durable). Quoi
qu'il en soit, il n'est pas contestable que c'est essentiellement le caractère
peu bâti et le voisinage du lac qui confère son intérêt et sa valeur au secteur
sud de la commune, indépendamment de l'indice d'utilisation du sol. L'atteinte
subie par les intimés n'apparaît dès lors pas excessive au regard de l'intérêt
public tel que rappelé ci-dessus.

4.6 La planification communale résulte ainsi d'une pesée des intérêts au terme
de laquelle l'autorité a décidé de faire prévaloir la protection paysagère,
dans toute la partie aval de la commune, et d'opérer une certaine densification
dans les parties situées au centre et le long des voies principales d'accès,
notamment de la route cantonale. Une telle planification ne consacre aucune
violation des principes régissant l'aménagement du territoire, au sens de
l'art. 1^er al. 2 let. b LAT.
La cour cantonale a pour sa part appliqué un objectif de densification de
manière schématique, et sur un espace très restreint, sans tenir compte des
spécificités du territoire communal. Du point de vue de la densification, sa
décision n'a d'ailleurs qu'un effet très limité. En remettant ainsi en cause
l'ensemble de la planification dans le quartier concerné, la cour cantonale a
indument substitué son appréciation à celle de la commune et, partant, violé
son autonomie.