Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 136 I 404



Urteilskopf

136 I 404

41. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public dans la cause Ville de
Genève et Groupement Ville de Genève contre X. et Conseil d'Etat du canton de
Genève (recours en matière de droit public)
1C_424/2009 du 6 septembre 2010

Regeste

Art. 89 Abs. 2 lit. c BGG; politische Rechte; Beschwerderecht der Gemeinden;
Gemeindeautonomie.
Das Beschwerderecht der Gemeinden ergibt sich mangels Stimmberechtigung nicht
aus Art. 89 Abs. 3 BGG. Es kann ihnen gestützt auf Art. 89 Abs. 2 lit. c BGG
zuerkannt werden (E. 1.1.1).
Gemeinden können keine Beschwerde wegen Verletzung politischer Rechte im Sinne
von Art. 82 lit. c BGG erheben, sondern nur wegen Verletzung von
verfassungsmässig gewährten Garantien nach Art. 89 Abs. 2 lit. c BGG (E.
1.1.2).
Diese Bestimmung ist insbesondere auf Gemeinden anwendbar, die sich auf ihre
Gemeindeautonomie berufen (E. 1.1.3).

Sachverhalt ab Seite 405

BGE 136 I 404 S. 405
Lors de la votation cantonale organisée le 27 septembre 2009 à Genève, les
citoyens étaient invités à se prononcer notamment sur l'objet cantonal intitulé
"Acceptez-vous la loi sur l'imposition des personnes physiques (LIPP), du 12
juin 2009 (D 3 08 - 10199)?". Selon la brochure explicative remise aux
électeurs, l'acceptation de cet objet induirait des baisses de l'impôt cantonal
estimées à 321 millions de francs en 2010 et 387 millions en 2011, ce qui
entraînerait également une baisse des rentrées fiscales des communes du canton.
Le 31 juillet 2009, un groupement dénommé "Ville de Genève" avait déposé auprès
du service compétent une prise de position au sens de l'art. 23 al. 1 de la loi
genevoise du 15 octobre 1982 sur l'exercice des droits politiques (LEDP; RSG A
5 05). Munie de cinquante-sept signatures de citoyens genevois, cette prise de
position appelait à rejeter l'objet susmentionné. Parmi les signataires
figuraient quatre des cinq membres du Conseil administratif de la Ville de
Genève. Par ailleurs, selon un article paru dans "la Tribune de Genève" en août
2009, le maire de la ville avait annoncé que le budget du numéro de septembre
du " tous-ménages" intitulé "Vivre à Genève" serait consacré à inciter les
habitants de la ville à rejeter l'objet précité. Dans un autre article, une
conseillère administrative précisait que la publication en question serait
réduite de quarante-cinq à huit pages et que l'argent ainsi économisé serait
consacré notamment à la confection de banderoles, d'affiches et d'autocollants,
ainsi qu'à la publication d'annonces dans les journaux. Elle estimait le coût
de cette campagne à moins de 70'000 francs.
Le 26 août 2009, un citoyen genevois a saisi le Tribunal administratif du
canton de Genève (ci-après: le Tribunal administratif) d'un recours en matière
de droits politiques dirigé contre la publication de la prise de position
intitulée "Ville de Genève" et contre la campagne annoncée par la Ville de
Genève. Par arrêt du 15 septembre 2009, le Tribunal administratif a admis le
recours dans la mesure où il était recevable. En substance, il a constaté que
la prise de position du groupement "Ville de Genève" violait les droits
politiques. Il a fait interdiction à la Ville de Genève d'intervenir dans la
campagne en cours
BGE 136 I 404 S. 406
et aux signataires de la prise de position "Ville de Genève" de s'en prévaloir
dans la campagne, sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP.
La Ville de Genève et le groupement "Ville de Genève" ont formé un recours en
matière de droit public contre cet arrêt, en demandant au Tribunal fédéral de
constater que la Ville de Genève avait le droit d'intervenir dans la campagne
et que le groupement "Ville de Genève" pouvait se prévaloir de cette
appellation. Le Tribunal fédéral a rejeté le recours dans la mesure de sa
recevabilité.
(résumé)

Auszug aus den Erwägungen:

Extrait des considérants:

1. (...)

1.1 Le recours est formé principalement par la Ville de Genève et la plupart
des arguments du recours la concernent directement. Il convient dès lors de
déterminer en premier lieu si cette commune a la qualité pour agir.

1.1.1 Selon la jurisprudence, les communes politiques n'ont pas la qualité pour
recourir sur la base de l'art. 89 al. 3 LTF, faute d'être titulaires des droits
politiques (ATF 134 I 172 consid. 1.3.1 et 1.3.2 p. 175 s. et les références
citées). Le Tribunal fédéral a estimé que la qualité pour recourir en matière
de droits politiques était définie de manière spécifique et exhaustive à l'art.
89 al. 3 LTF, de sorte que cette qualité ne saurait être étendue à toute
personne disposant d'un intérêt juridique au sens de l'art. 89 al. 1 LTF (ATF
134 I 172 consid. 1.3.3 p. 176). L'arrêt précité ne se prononce cependant pas
sur la qualité pour recourir reconnue spécifiquement aux communes et autres
collectivités de droit public par l'art. 89 al. 2 let. c LTF. Telle qu'elle est
définie à l'art. 89 al. 1 LTF, la qualité pour recourir présente un caractère
général et peut être reconnue à quiconque, ce qui justifie la solution
restrictive retenue dans l'arrêt susmentionné. Il en va différemment de la
qualité pour recourir définie à l'art. 89 al. 2 let. c LTF, qui ne peut être
reconnue qu'aux collectivités de droit public pouvant se prévaloir de la
violation de garanties constitutionnelles. A l'instar de l'art. 89 al. 3 LTF,
l'art. 89 al. 2 let. c LTF prévoit donc une qualité pour recourir spéciale, qui
ne saurait être exclue au seul motif que le recours concerne les droits
politiques.

1.1.2 Une collectivité de droit public peut donc se voir reconnaître la qualité
pour recourir en cette matière sur la base de l'art. 89 al. 2
BGE 136 I 404 S. 407
let. c LTF, si elle remplit les conditions posées par cette norme. Elle ne
pourra toutefois pas former un véritable recours pour violation des droits
politiques au sens de l'art. 82 let. c LTF, mais seulement un recours ordinaire
pour violation des garanties constitutionnelles mentionnées à l'art. 89 al. 2
let. c LTF. Cette solution trouve certains appuis en doctrine et correspond à
la pratique qui prévalait sous l'empire de l'OJ (cf. STÉPHANE GRODECKI,
L'initiative populaire cantonale et municipale à Genève, 2008, p. 411;
HANGARTNER/KLEY, Die demokratischen Rechte in Bund und Kantonen der
Schweizerischen Eidgenossenschaft, 2000, p. 116; WALTER KÄLIN, Das Verfahren
der staatsrechtlichen Beschwerde, 2^e éd. 1994, p. 281; arrêt P 81/82 du 9
février 1983 consid. 1a).

1.1.3 L'art. 89 al. 2 let. c LTF s'applique en particulier aux communes qui
invoquent la garantie de leur autonomie communale, ancrée au niveau fédéral à
l'art. 50 al. 1 Cst. (ATF 135 I 43 consid. 1.2 p. 45; ALAIN WURZBURGER, in
Commentaire de la LTF, 2009, n° 49 ad art. 89 LTF; BERNHARD WALDMANN, in Basler
Kommentar, Bundesgerichtsgesetz, 2008, n° 62 ad art. 89 LTF). Il n'est pas
nécessaire que la commune soit réellement autonome pour bénéficier de la
qualité pour recourir fondée sur l'art. 89 al. 2 let. c LTF. Il suffit pour
cela qu'elle allègue une violation de son autonomie communale et qu'elle soit
touchée par l'acte cantonal en tant que détentrice de la puissance publique.
Savoir si la commune est réellement autonome dans le domaine litigieux, et si
cette autonomie a été violée en l'espèce, sont des questions qui relèvent du
fond (ATF 135 I 43 consid. 1.2 p. 45; ATF 129 I 313 consid. 4.2 p. 319 et les
références). En l'occurrence, la Ville de Genève invoque une violation de
l'autonomie communale - en alléguant notamment que l'art. 83 LEDP lui
permettait de participer à la campagne dans une certaine mesure - et elle
apparaît touchée par l'arrêt attaqué en tant que détentrice de la puissance
publique. Elle a donc la qualité pour recourir sur la base de l'art. 89 al. 2
let. c LTF.