Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 136 III 123



Urteilskopf

136 III 123

18. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit civil dans la cause Association
X. contre A. (recours en matière civile)
5A_795/2009 du 10 mars 2010

Regeste

Art. 598 ff. ZGB; Feststellungsklage verbunden mit einer Erbschaftsklage;
Passivlegitimation.
Die von einem Verein erhobene Klage, seine Einsetzung als Erbe der Erblasserin
festzustellen und ihn als Eigentümer mehrerer Parzellen im Grundbuch
einzutragen, ist als Feststellungsklage verbunden mit einer Erbschaftsklage zu
qualifizieren (E. 4.3). Diese Klage muss sich gegen die zwei gesetzlichen
Erbinnen der Erblasserin als notwendige materielle Streitgenossinnen richten.
Sollte allerdings eine förmlich erklären, sich im Voraus dem Ergebnis des
Prozesses zu unterwerfen, oder die Klage ohne weiteres förmlich anerkennen, ist
ihre Teilnahme am Prozess nicht erforderlich (E. 4.4).

Sachverhalt ab Seite 125

BGE 136 III 123 S. 125

A.

A.a B., née le 20 novembre 1918, est décédée le 12 février 2006. Elle avait
deux soeurs, A. et C., ainsi qu'un cousin, D.
B. était propriétaire de plusieurs biens-fonds dans la commune de Y., dont la
valeur vénale totale a été estimée en 2006 à 5'136'400 fr., à savoir les
parcelles n^os 5 sise en zone bois et forêts, 41 et 123 sises en zone agricole,
58 et 174 sises en zone 4B protégée, 177 sise principalement en zone 4B
protégée et 178 sise à raison de 8/9 en zone 4B protégée et 1/9 en zone
agricole. Elle était en outre propriétaire de biens mobiliers d'une valeur
totale de 616'925 fr.

A.b B. a rédigé un testament olographe le 10 août 1990, dont la teneur est la
suivante:
"Je lègue
à Madame C. de Y.
et Madame A. de Y.
La maison de famille et terrains agricoles
Monsieur D. aura la jouissance d'un appartement et terrains agricoles ceci
jusqu'à sa mort.
Je lègue également

Hôpital de E.[TAB-1]deux cent mille francs[TAB-2]200'000.-[TAB-3]

Communauté de F.[TAB-1]cent mille francs[TAB-2]100'000.-[TAB-3]

Paroisse de G.[TAB-1]cent mille francs[TAB-2]100'000.-[TAB-3]

Paroisse de H.[TAB-1]cinquante mille francs[TAB-2]50'000.-[TAB-3]

Paroisse de I.[TAB-1]cinquante mille francs[TAB-2]50'000.-[TAB-3]

Le reste de mes biens au foyer X.
Le présent testament annule l'ancien déjà déposé".
Un litige est né entre l'Association X. et A. au sujet de l'interprétation de
ce testament, chacune d'elles soutenant avoir été instituée héritière de la
défunte.

A.c Par acte du 22 mai 2007, l'Association X. a assigné A. devant le Tribunal
de première instance de Genève, concluant à la constatation qu'elle est
instituée unique héritière des biens de la succession de B. et à son
inscription au Registre foncier en qualité de propriétaire des parcelles n^os
41, 58, 174, 177 et 178 de la commune de Y. A. a conclu au déboutement de
l'Association de toutes ses conclusions; pour le cas où il serait admis que
celle-ci est héritière instituée, elle a conclu à la constatation de sa qualité
de co-légataire avec C. des parcelles n^os 5, 41, 58, 123, 174, 177 et 178 de
la commune de Y., ainsi que de la totalité du matériel d'exploitation agricole
dépendant de la succession de ce domaine.

B.

B.a Par jugement du 29 janvier 2009, le Tribunal de première instance de Genève
a débouté l'Association X. de ses conclusions, après avoir procédé à
l'interprétation du testament de la défunte.

B.b Statuant sur appel de la demanderesse, la Cour de justice du canton de
Genève a confirmé cette décision par arrêt du 16 octobre 2009, pour défaut de
légitimation passive, opérant ainsi une substitution de motifs.

C. L'Association X. interjette le 23 novembre 2009 un recours en matière civile
au Tribunal fédéral contre cet arrêt, concluant à son annulation et au renvoi
de la cause à la cour cantonale pour qu'elle statue sur le fond. Elle fait
grief aux juges précédents d'avoir considéré que A. n'avait pas la légitimation
passive, dans la mesure où sa soeur C. avait la qualité de consort nécessaire,
et se plaint également d'une violation de son droit d'être entendue.
L'intimée n'a pas été invitée à se déterminer.
Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.
BGE 136 III 123 S. 126

Auszug aus den Erwägungen:

Extrait des considérants:
-:-
-:-

4.

4.3 Il convient de qualifier l'action de la recourante afin de déterminer qui a
la légitimation passive.

4.3.1 Selon la jurisprudence, l'objet du litige est déterminé par les
conclusions de la demande et par les faits invoqués à l'appui de celle-ci, à
savoir par le complexe de faits sur lequel les conclusions se fondent (ATF 116
II 738 consid. 2 p. 743; ATF 105 II 268 consid. 2 p. 270; ATF 97 II 390 consid.
4 p. 396). En l'espèce, la demanderesse a conclu à la constatation de sa
qualité d'héritière instituée unique de la défunte - le testament n'attribuant,
selon elle, aux soeurs de celle-ci que les parcelles sises en zone agricole
ainsi que le bâtiment sis sur la parcelle n° 177 - et requis son inscription au
registre foncier en qualité de propriétaire des parcelles n^os 41, 58, 174, 177
et 178, à savoir celles sises en zone protégée. Elle invoque la teneur du
testament, soutenant que, puisqu'elle se voit attribuer le reste des biens de
la défunte, elle serait héritière instituée, alors que les soeurs ne seraient
que légataires. Pour sa part, la défenderesse conteste que la demanderesse soit
héritière instituée aux termes du testament et invoque que sa soeur et
elle-même sont les héritières instituées de la défunte, la demanderesse n'étant
que légataire; à titre subsidiaire, pour le cas où la demanderesse serait
reconnue héritière, elle conclut à sa qualité de co-légataire avec sa soeur des
parcelles n^os 5, 41, 58, 123, 174, 177 et 178 de la commune de Y.
Dans ces circonstances, sur la base des conclusions de la demanderesse,
l'action doit être qualifiée d'action en constatation de droit assortie d'une
action en pétition d'hérédité. Tout d'abord, son action tend à la constatation
de sa qualité d'héritière unique aux termes mêmes du testament, tel qu'il est
rédigé et doit être, selon elle, compris et interprété. Ainsi, elle n'a pas
pour objet l'annulation d'une disposition pour cause de mort au sens de l'art.
519 CC, laquelle n'a pas à être introduite contre tous les héritiers en qualité
de consorts nécessaires, ni à l'inefficacité d'une telle disposition. Ensuite,
l'action tend à ce que, pour une partie des biens, à savoir les parcelles non
agricoles, elle soit inscrite comme propriétaire au registre foncier.

4.3.2 L'action en constatation de droit est recevable, puisque la constatation
de la qualité d'héritière unique a une portée propre (ATF 131 III 319 consid.
3.5 p. 324 s.; ATF 123 III 414 consid. 7b p. 429; ATF 120 II 20 consid. 3a p.
22; ATF 110 II 352 consid. 2 p. 357). En effet, au- delà de l'inscription au
registre foncier en tant que propriétaire des immeubles, la recourante a un
intérêt à ce que soit constatée sa qualité d'héritière en relation avec le
solde des biens meubles, dont elle ne demande pas la mise en possession dans le
cadre de la présente procédure.
Quant à l'inscription en qualité de propriétaire des immeubles en cause, c'est
à tort que la recourante soutient qu'il ne s'agit pas d'une action en pétition
d'hérédité. En effet, dans la mesure où elle se prétend seule héritière
instituée, son action n'est pas ouverte contre un ou des co-héritiers comme
elle le prétend; elle n'agit pas non plus en partage, mais elle veut obtenir
que soit jugée une prétention qui exclut l'intimée et sa soeur de la succession
(ATF 91 II 264 consid. 2 p. 268). Or, les héritiers légaux étant possesseurs
provisoires des biens de la succession (STEINAUER, Le droit des successions,
2006, n° 885 p. 434), la recourante doit nécessairement agir contre eux pour
obtenir son inscription au registre foncier comme propriétaire.

4.4 Il y a donc lieu d'examiner si la recourante a valablement ouvert son
action en constatation de droit et en pétition d'hérédité en la dirigeant
contre l'intimée seule ou si elle devait agir contre les deux soeurs de la
défunte, en qualité de consorts nécessaires.

4.4.1 Il y a consorité matérielle nécessaire en vertu du droit fédéral lorsque
plusieurs personnes sont ensemble le titulaire (consorité active) ou le sujet
passif (consorité passive) d'un seul droit, de sorte que chaque co-titulaire ne
peut pas l'exercer seul ou être actionné seul en justice (ATF 118 II 168
consid. 2b p. 169/170). Il y a également consorité matérielle nécessaire
lorsque l'action est formatrice et tend à la suppression d'un rapport de droit
qui touche plusieurs personnes; ainsi, l'action en partage contre un héritier
doit être en principe ouverte par tous les autres héritiers, comme consorts
nécessaires (ATF 86 II 451 consid. 3 p. 455; ATF 100 II 440 consid. 1 p. 441).
Fait exception l'action (formatrice) en nullité du testament des art. 519 ss
CC; la jurisprudence admet que le jugement rendu dans une telle procédure n'a
d'effets qu'entre les parties au procès, car elle ne met en jeu aucun intérêt
public pouvant exiger que le jugement qui la déclare fondée produise ses effets
envers chacun. Il est, en effet, loisible aux intéressés de décider si et, le
cas échéant, dans quelle mesure, ils entendent admettre la validité d'une
disposition de dernière volonté (ATF 81 II 33 consid. 3 p. 36 et les autres
arrêts cités).
BGE 136 III 123 S. 128
Les consorts matériels nécessaires doivent donc agir ensemble ou être mis en
cause ensemble. Toutefois, selon la jurisprudence, si un membre de la
communauté déclare autoriser les autres à agir ou déclare formellement se
soumettre par avance à l'issue du procès, ou encore reconnaît d'emblée
formellement la demande, sa participation au procès n'est pas nécessaire (ATF
116 Ib 447 consid. 2a p. 449; ATF 86 II 451 consid. 3 p. 455).

4.4.2 En l'espèce, la recourante a allégué que, puisque la soeur de l'intimée
n'avait pas contesté son interprétation du testament, elle ne dirigeait son
action que contre l'intimée. Or, la disposition testamentaire par laquelle la
défunte a attribué à ses deux soeurs la maison de famille et les terrains
agricoles - dont l'interprétation est litigieuse - est indivisible entre elles.
Elles sont co-titulaires (propriété commune) des droits de propriété sur ces
biens; la clause ne peut pas valoir pour l'une et pas pour l'autre. La
recourante ne le conteste d'ailleurs pas; elle prétend seulement qu'elle
n'avait pas à ouvrir action contre la soeur de l'intimée car celle-ci n'aurait
pas contesté son interprétation du testament. Ce n'est toutefois que si le
co-titulaire du droit déclare formellement se soumettre par avance à l'issue du
procès ou reconnaît d'emblée la demande que sa participation au procès n'est
pas nécessaire. Or, ces conditions ne sont pas remplies dans le cas d'espèce,
comme l'a constaté la cour cantonale. La recourante ne démontre pas
l'arbitraire de cette constatation; elle se borne à affirmer que la soeur de
l'intimée "se désintéressait du sort de ce litige et s'en remettait à un accord
des intéressés ou à une décision de justice", mais ne prétend pas avoir prouvé
ceci devant les instances cantonales. Quant à l'argument tiré du fait que
l'intimée n'aurait pas contesté que sa soeur était d'accord avec
l'interprétation du testament, il est sans pertinence. En effet, l'admission de
ce fait ne saurait pallier à l'absence de déclaration formelle de la soeur de
l'intimée.

4.4.3 Enfin, la pièce nouvelle produite par la recourante, à savoir une
déclaration légalisée de la soeur de l'intimée, datée du 7 novembre 2009, aux
termes de laquelle celle-ci déclare se soumettre par avance au jugement
définitif qui sera rendu dans l'affaire opposant les parties au sujet de
l'interprétation du testament de la défunte, est irrecevable.
Selon l'art. 99 al. 1 LTF, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut, en
effet, être présenté devant le Tribunal fédéral, à moins de
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résulter de la décision de l'autorité précédente. Sont visés par cette
exception les faits qui sont rendus pertinents pour la première fois par la
décision attaquée. C'est ainsi que les critiques relatives à la régularité de
la procédure devant l'instance précédente (par exemple une violation du droit
d'être entendu lors de mesures probatoires) doivent pouvoir être soutenues par
des faits qui n'ont pas été invoqués devant cette instance. De même, lorsque la
décision de l'instance précédente a été fondée sur un nouvel argument juridique
auquel les parties n'avaient pas été confrontées précédemment, les recourants
peuvent avancer devant le Tribunal fédéral les faits nouveaux qui démontrent
que l'argumentation de l'instance précédente est contraire au droit. S'y
ajoutent encore les faits qui ne pouvaient pas être invoqués devant l'autorité
précédente, à savoir, par exemple, le respect du délai pour recourir au
Tribunal fédéral (Message du 28 février 2001 concernant la révision totale de
l'organisation judiciaire fédérale, FF 2001 4000 ss, 4137).
En revanche, ne peuvent être allégués devant le Tribunal fédéral les faits que
le recourant a négligé de présenter devant les autorités cantonales et qui, par
conséquent, n'ont pas pu être examinés par les instances inférieures. Le
recourant ne peut ainsi démontrer, par de nouvelles allégations de faits qu'il
aurait pu invoquer auparavant, que les faits retenus par l'autorité inférieure
sont manifestement erronés ou procèdent d'une appréciation arbitraire des
preuves (arrêt 4A_36/2008 du 18 février 2008 consid. 4.1 et les références
citées). Il en va ainsi, en l'espèce, de la nouvelle pièce produite par la
recourante, laquelle ne peut réparer de cette façon la négligence qu'elle a
commise en omettant d'alléguer et de prouver la déclaration de la soeur de
l'intimée, consort nécessaire, de se soumettre au jugement à intervenir.