Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 135 III 551



Urteilskopf

135 III 551

79. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit civil dans la cause Banque X.
contre Office des poursuites de Genève (recours en matière civile)
5A_197/2009 du 26 juin 2009

Regeste

Art. 98 BGG und Art. 279 Abs. 4 SchKG; Arrestprosequierung.
Zulässige Rügen (E. 1.2).
Der Arrestgläubiger, welcher die Anerkennungsklage ohne vorgängige Betreibung
eingeleitet hat, ist befugt, die Betreibung vor der Mitteilung des Urteils
einzuleiten (E. 2).

Sachverhalt ab Seite 551

BGE 135 III 551 S. 551

A.

A.a La Banque X. (ci-après: la Banque) prétend être créancière de Y. en raison
d'agissements pénaux commis par celui-ci entre 1997 et 2005; elle ajoute que le
Tribunal civil de Lodi (Italie) a ordonné le séquestre des biens de son
débiteur et qu'elle a déposé une action au fond en Italie le 15 février 2007.

A.b Donnant suite le 13 novembre 2007 à la réquisition de la Banque, le
Tribunal de première instance de Genève a ordonné le séquestre de tous avoirs
au nom du prénommé, ou dont il est l'ayant droit économique, à hauteur de
173'105'779 fr. 90 auprès de la Banque Z. à Genève. Cette ordonnance a été
transmise à l'Office des
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poursuites de Genève (ci-après: l'Office), qui l'a immédiatement exécutée (sous
n° x); le procès-verbal de séquestre a été communiqué à la créancière le 18
décembre suivant.

A.c Le 5 juin 2008, la Banque a déposé une réquisition de poursuite, en
indiquant sous la rubrique "Autres observations": "Réquisition de poursuite
ensuite du séquestre n° x du 13 novembre 2007, en vue de l'exequatur du
jugement italien qui sera rendu à l'encontre de M. Y.".
Le 11 juin suivant, l'Office a informé l'avocat de la Banque que, aussi
longtemps qu'une action au fond est en cours, celle-ci vaut validation du
séquestre, et l'a invité à lui transmettre le jugement étranger afin de
vérifier le respect du délai de 10 jours de l'art. 279 al. 4 LP. Le 23 juin
2008, l'avocat a répondu que la procédure était toujours pendante en Italie,
indiquant que sa réquisition du 5 juin 2008 était destinée à être notifiée en
Italie au débiteur avec les autres actes relatifs au séquestre; il a précisé
que, en cas d'opposition au commandement de payer, la mainlevée de l'opposition
serait requise simultanément à l'exequatur du jugement italien.
Par décision du 18 novembre 2008, l'Office a refusé de donner suite à la
réquisition de poursuite parce qu'elle était prématurée et devait être
présentée dans les dix jours à compter de la notification du jugement italien;
il a maintenu sa position le 25 novembre 2008.

B. Le 28 novembre 2008, la Banque a déposé plainte contre le refus de donner
suite à sa réquisition de poursuite; en outre, elle a dénoncé un retard
injustifié de l'Office, le procès-verbal de séquestre n'ayant pas encore été
notifié au débiteur conformément à l'art. 276 al. 2 LP.
Statuant le 12 mars 2009, la Commission de surveillance des offices des
poursuites et des faillites du canton de Genève a partiellement admis la
plainte, en ce sens qu'elle a ordonné à l'Office de procéder sans délai à la
communication du procès-verbal de séquestre au domicile du débiteur en Italie,
dès que la créancière aura effectué l'avance de frais arrêtée par l'Office en
vertu de l'art. 68 LP ou que son mandataire se sera porté fort de ces frais; en
revanche, elle a confirmé le refus de l'Office de donner suite à la réquisition
de poursuite.

C. Le Tribunal fédéral a admis le recours de la Banque et invité l'Office à
donner suite à la réquisition de poursuite.
(résumé)

Auszug aus den Erwägungen:

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Extrait des considérants:

1.

1.2 La décision contestée - rejet d'une réquisition de poursuite tendant à
valider un séquestre - n'a pas pour objet une mesure provisionnelle au sens de
l'art. 98 LTF, c'est-à-dire le séquestre lui-même (ATF 133 III 589 consid. 1 p.
590/591) ou son exécution (BRACONI, Le recours en matière de poursuite pour
dettes selon la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral: compendium des
premiers cas d'application, JdT 2009 II p. 78 ss, 88 ch. 3 et les arrêts [non
publiés] cités), mais le refus de l'office de procéder à un acte matériel
(PHILIPPIN, La nouvelle loi sur le Tribunal fédéral: effets sur le droit des
poursuites et faillites, in Le droit du bail et le droit des poursuites et des
faillites - La loi sur le Tribunal fédéral, 2007, p. 130 ss, 139). Les moyens
de la recourante ne sont donc pas restreints à la violation de ses droits
constitutionnels, avec les exigences de motivation qui s'y rapportent (art. 106
al. 2 LTF; cf. à ce sujet: ATF 135 III 232 consid. 1.2 p. 234 et les arrêts
cités).

2.

2.1 L'autorité cantonale de surveillance est partie du principe que, pour qu'un
"délai commence à courir, il faut qu'il y ait communication d'un acte de
poursuite au sens large, dès sa réception effective, fictive ou présumée"; a
contrario, si - comme en l'espèce - le délai ne court pas, parce que le procès
est toujours pendant, la "réquisition de poursuite doit être considérée comme
prématurée, avant qu'un jugement ne soit rendu dans la procédure au fond en
Italie".

2.2 Dans ses déterminations en instance fédérale, l'Office expose, en
substance, qu'il n'est pas possible de modifier la "chronologie" prévue par
l'art. 279 LP: si le séquestre est ordonné avant le dépôt de l'action au fond,
le créancier doit respecter la procédure et les délais des alienas 1 à 3; si
l'action est déjà introduite, il doit se conformer à la procédure et au délai
de l'alinea 4; une combinaison des deux modes de validation est exclue, même
sous prétexte d'accélérer la perfection du séquestre. En l'occurrence, la
recourante a déclaré, après l'obtention du séquestre, qu'une action en justice
était pendante en Italie; elle s'est donc placée implicitement dans l'hypothèse
réglée par l'art. 279 al. 4 LP, ce qu'elle a confirmé en déposant une
réquisition de poursuite le 5 juin 2008. Or, en formant une réquisition de
poursuite alors même que, de son propre aveu, le jugement étranger n'avait pas
encore été rendu, l'intéressée
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entendait recourir à un mode de validation non envisagé par la loi et qui, s'il
était consacré, aboutirait à faire fi de la vérification du délai de validation
de dix jours. Le délai n'ayant ainsi pas commencé à courir, la réquisition de
poursuite était prématurée, en sorte qu'elle devait être rejetée.

2.3 A teneur de l'art. 279 LP, le créancier qui a fait opérer un séquestre sans
poursuite ou action préalable doit requérir la poursuite ou intenter action
dans les dix jours à compter de la réception du procès-verbal (al. 1); s'il a
intenté l'action en reconnaissance de dette sans poursuite préalable, il doit
requérir la poursuite dans les dix jours à compter de la notification du
jugement (al. 4). Seule cette dernière situation entre en ligne de compte dans
le cas présent.
En tant que mesure conservatoire destinée à éviter que le débiteur ne dispose
de ses biens pour les soustraire à l'action future de son créancier (cf. ATF
116 III 111 consid. 3a p. 115/116), le séquestre doit être rapidement validé,
d'où les brefs délais institués à cette fin (FF 1991 III 200/201 ch. 208.7; ATF
129 III 599 consid. 2.3 p. 603). Toutefois, l'art. 279 LP se limite à fixer les
termes jusqu'auxquels le créancier doit accomplir les actes propres à prévenir
la caducité de sa sûreté (art. 280 ch. 1 LP). Le séquestrant peut dès lors
requérir une poursuite immédiatement après l'autorisation de séquestre, alors
même que la loi lui prescrit de le faire "dans les dix jours à compter de la
réception du procès-verbal" (art. 279 al. 1 LP; BONNARD, Le séquestre, thèse
Lausanne 1914, p. 251). Il peut aussi ouvrir action en reconnaissance de dette
simultanément à l'introduction de la poursuite, à savoir avant l'expiration du
délai pour former opposition (art. 279 al. 2 LP; arrêt de l'Obergericht du
canton de Zurich du 8 novembre 1922, in ZR 22/1923 n° 159; JAEGER/DAENIKER,
Schuldbetreibungs- und Konkurs-Praxis der Jahre 1911-1945, 1947, vol. I, n° 11
ad art. 278 ancien LP; ARDINAY, Die Arrestprosequierung nach schweizerischem
Recht, 1954, p. 59). Le Tribunal fédéral a d'ailleurs admis, de façon générale,
que l'action en reconnaissance de dette de l'art. 79 LP pouvait être introduite
"déjà concurremment avec le commandement de payer" (ATF 113 III 120 consid. 3
p. 122 et l'auteur cité); or, l'action en validation de séquestre n'est rien
d'autre que ladite action (GILLIÉRON, Poursuite pour dettes, faillite et
concordat, 4^e éd., 2005, n° 2836).
Il découle des principes qui précèdent que l'art. 279 al. 4 LP proscrit
uniquement l'introduction d'une poursuite après l'expiration d'un
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délai de dix jours à compter de la notification du jugement, en l'occurrence
étranger (cf. GILLIÉRON, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour
dettes et la faillite, vol. IV, 2003, n° 53 ad art. 279 LP ["au plus tard"]);
mais le créancier peut néanmoins engager une poursuite sans attendre la
communication de cette décision (implicitement, dans ce sens: MEIER-DIETERLE,
Formelles Arrestrecht - eine Checkliste, AJP 2002 p. 1224 ss, 1230 n. 65). Dans
un ancien arrêt, le Tribunal fédéral a jugé que la seule obligation imposée au
créancier est le dépôt d'une réquisition de poursuite dans les dix jours dès la
communication du jugement au fond; partant de ce constat, il n'a pas remis en
cause la validation d'un séquestre (exécuté après l'introduction de l'action en
reconnaissance de dette) par une poursuite ouverte le 29 avril 1908, tandis que
le jugement au fond avait été rendu le 24 avril 1909 ; à ce propos, il a
observé que les créanciers avaient agi "beaucoup plus tôt qu'ils n'étaient
obligés de le faire" (ATF 35 I 827 consid. 2 p. 830). Un tel procédé apparaît
non seulement compatible avec la célérité exigée en matière de validation, mais
il n'entraîne de surcroît aucun préjudice pour le débiteur; comme le souligne
la recourante, celui-ci conserve en toute hypothèse la possibilité de former
opposition au commandement de payer.
L'arrêt mentionné plus haut affirme que le créancier n'a pas à requérir la
mainlevée de l'opposition dans les dix jours de la communication du jugement,
car "le jugement qui prononce l'existence de la dette constitue [...] une
main-levée de l'opposition" (consid. 1 in fine et consid. 2 in fine p. 830).
Pareille solution ne peut cependant plus être maintenue au regard de la
jurisprudence selon laquelle le créancier n'est habilité à requérir la
continuation de la poursuite sans passer par la procédure de mainlevée que si
le dispositif du jugement se réfère avec précision à la poursuite en cours et
lève formellement l'opposition, totalement ou à concurrence d'un montant
déterminé (voir notamment: ATF 107 III 60 consid. 3 p. 64 ss). Conformément à
l'art. 279 al. 2 LP, si le débiteur a formé opposition, le créancier doit
requérir la mainlevée de celle-ci ou introduire l'action en reconnaissance de
la dette dans les dix jours à compter de la date à laquelle l'opposition lui a
été communiquée; pour maintenir le séquestre en force, le créancier est alors
tenu de requérir au surplus la mainlevée définitive dans l'action en
reconnaissance de dette (MEIER-DIETERLE, op. cit.), chef de conclusions qui est
BGE 135 III 551 S. 556
admissible sous l'angle de l'art. 79 al. 1 LP (ATF 128 III 39 consid. 2 p. 41
et les références). Certes, cette solution n'est pas valable lorsque l'action
en reconnaissance de la dette est - comme ici - pendante à l'étranger, puisque
le juge suisse est exclusivement compétent pour prononcer la mainlevée
définitive (notamment: LEUCH/MARBACH/ KELLERHALS/STERCHI, Die
Zivilprozessordnung für den Kanton Bern, 5^e éd., 2000, n° 5b/bb et 5c/cc ad
art. 32 ZPO); dans cette hypothèse, il incombe au créancier de requérir
celle-ci (cf. art. 81 al. 3 LP) dans les dix jours à partir de la communication
de la décision étrangère, par application combinée des al. 2 et 4 de l'art. 279
LP.