Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 135 III 545



Urteilskopf

135 III 545

78. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit civil dans la cause X. contre Y.
SA (recours en matière civile)
5A_312/2009 du 30 juin 2009

Regeste

Zulässigkeit der Beschwerde in Zivilsachen (Art. 72 BGG); Anfechtung des
Kollokationsplans; Beginn des Fristenlaufs (Art. 250 SchKG).
Zulässigkeit einer Beschwerde in Zivilsachen gegen einen Entscheid über eine
Kollokationsklage (E. 1).
Der Gläubiger, dessen Konkurseingabe im Kollokationsplan abgewiesen worden ist,
welcher dagegen Beschwerde erhoben hat und beabsichtigt, sich der
Konkurseingabe eines Dritten zu widersetzen, muss, bevor endgültig über seine
eigene Gläubigereigenschaft entschieden wird, die Konkurseingabe des Dritten
innert 20 Tagen ab der öffentlichen Auflage gemäss Art. 249 Abs. 2 SchKG
bestreiten, ansonsten er seines Klagerechts verlustig geht (E. 2).

Sachverhalt ab Seite 546

BGE 135 III 545 S. 546
X., ancienne cliente de la société Y., a fait valoir une créance de 330'247 fr.
dans le cadre de l'inventaire de la succession de l'administrateur de ladite
société. Elle estimait avoir été lésée par les agissements de celui-ci. De son
côté, la société Y. a fait valoir une créance de 373'068 fr., pour le même
motif.
La succession en question ayant été répudiée, sa faillite a été prononcée.
L'office des faillites chargé de sa liquidation a, lors de la collocation des
créances en mars 2005, écarté celles des deux intervenantes. Ces dernières ont
alors agi en contestation de l'état de collocation pour faire admettre leur
qualité de créancières conformément à l'art. 250 al. 1 LP.
En décembre 2005, un accord est intervenu entre la masse en faillite et la
société Y., prévoyant que la créance de celle-ci serait inscrite en 3^e classe
de l'état de collocation à hauteur du montant produit. Une modification de
l'état de collocation en ce sens a fait l'objet d'une publication le 19
décembre 2007 avec la mention que la modification serait considérée comme
acceptée faute pour les créanciers de la contester dans les 20 jours.
A une date indéterminée, la masse en faillite et X. sont convenues que la
créance de celle-ci serait admise en 3^e classe de l'état de collocation, à
hauteur de 119'800 fr. 35. Cette modification a également fait l'objet d'une
publication le 9 avril 2008.
Le 19 avril 2008, X. a ouvert action en contestation de l'état de collocation
selon l'art. 250 al. 2 LP, concluant à ce que la créance de la société Y. en
soit écartée et à ce que l'acte en question soit rectifié en conséquence. Le
Tribunal de première instance a déclaré la contestation irrecevable pour cause
de tardiveté, parce que l'action
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n'avait pas été déposée dans le délai de 20 jours suivant la publication de
l'admission de la créance de la société Y. à l'état de collocation. La Cour de
justice du canton de Genève ayant confirmé cette décision, X. a saisi le
Tribunal fédéral d'un recours en matière civile, qui a été rejeté.
(résumé)

Auszug aus den Erwägungen:

Extrait des considérants:

1. Le recours est dirigé contre la décision d'une autorité cantonale de
dernière instance (art. 75 al. 1 LTF) qui statue sur une contestation de l'état
de collocation dans la faillite portant non pas sur le rang auquel, selon
l'art. 219 LP, doit être colloquée la créance litigieuse, mais sur l'existence
ou le montant de cette prétention de droit civil fédéral. Une telle décision
est sujette au recours en matière civile en vertu de l'art. 72 al. 1 LTF (arrêt
5A_802/2008 du 6 mars 2009 consid. 1.1 et les arrêts cités). Le recours a en
outre été interjeté dans le délai légal (art. 100 al. 1 en liaison avec 46 al.
1 let. a LTF) et dans la forme requise (art. 42 LTF) par la partie qui a
succombé dans ses conclusions devant l'autorité précédente (art. 76 al. 1 LTF).
Quant à la valeur litigieuse, équivalant selon la jurisprudence au dividende
probable qui serait attribué à la prétention qui fait l'objet du différend (ATF
135 III 127 consid. 1.2; ATF 87 II 190 p. 193; ATF 82 III 94 p. 95 et les
arrêts cités), elle s'élève en l'espèce à 111'920 fr. (30 % de 373'068 fr.). Le
seuil fixé par l'art. 74 al. 1 let. b LTF est donc atteint.
La cour cantonale a statué sur la recevabilité de l'action et confirmé que
celle-ci était irrecevable pour cause de tardiveté. En concluant à ce que la
cour cantonale "statue sur la recevabilité de l'action", la recourante entend
manifestement que la cour "admette" cette recevabilité.
Il y a donc lieu d'entrer en matière sur le recours.

2. Aux termes de l'art. 250 LP, le créancier qui conteste l'état de collocation
parce que sa production a été écartée en tout ou en partie ou parce qu'elle n'a
pas été colloquée au rang qu'il revendique intente action contre la masse dans
les 20 jours qui suivent la publication du dépôt de l'état de collocation (al.
1); s'il conteste une créance ou le rang auquel elle a été colloquée, il dirige
l'action contre le créancier concerné (al. 2). La question litigieuse est celle
de savoir si un créancier dont la production a été écartée de l'état de
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collocation, mais qui a recouru contre cette éviction (art. 250 al. 1 LP), doit
immédiatement contester, avant qu'il ne soit définitivement statué sur sa
propre qualité de créancier et sous peine de forclusion, la collocation d'une
autre créance (art. 250 al. 2 LP).
Cette question du dies a quo du délai pour agir en contestation de l'état de
collocation, telle qu'elle est posée en l'espèce, n'a pas encore été tranchée
par le Tribunal fédéral.

2.1 Ainsi qu'il ressort de l'abondante doctrine sur laquelle s'est fondée la
cour cantonale, la qualité pour contester un état de collocation est acquise à
l'intervenant dont le droit a été inscrit à cet état, indépendamment du fait de
savoir s'il a été admis ou écarté par l'administration. En effet, l'opposant ne
perd pas sa qualité pour agir du simple fait que son statut de créancier lui
est disputé. Aussi longtemps que la prétention d'un créancier n'a pas été
définitivement écartée, ce créancier doit être traité à l'égal des intervenants
dont les prétentions ont été admises au passif. Le créancier dont la
réclamation a été entièrement refusée, mais qui procède contre la masse en
faillite pour être colloqué, a ainsi qualité pour agir en élimination de la
créance d'un tiers; toutefois, le procès en élimination doit être suspendu
jus-qu'à droit connu sur l'issue du procès en collocation. Les deux actions
étant soumises au même dies a quo (la publication du dépôt de l'état de
collocation), le délai pour agir en élimination court dès la publication de
l'inscription à celui-ci de la créance litigieuse et non pas seulement dès que
l'action en collocation est admise. Il en va de même pour le créancier reconnu
qui voit sa créance contestée par un tiers: il doit, s'il veut lui-même
contester la production d'un autre créancier colloqué, agir immédiatement et ne
pas attendre que soit déterminée sa qualité de créancier à l'issue du premier
procès; le second procès devra être suspendu dans cette attente (A. DE GUMOENS,
De la procédure de collocation en cas de faillite et de saisie (...), thèse
Lausanne 1913, p. 120 s.; R. GÖSCHKE, Kollokationsplan und Kollokationsklage im
schweizerischen Betreibungsrecht, thèse Berne 1915, p. 185 ss; CARL JAEGER,
Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite,
vol. II, 1920, n° 1 ad art. 250 LP; JEAN-FRANÇOIS PIGUET, Les contestations de
droit matériel dans la poursuite pour dettes et la faillite, thèse Lausanne
1950, p. 152 n. 194 s.; ERNEST BRAND, For des actions en matière de poursuite
pour dettes et de faillite, V, FJS n° 1172 p. 7; DANIEL SPICHTY, Gegenstand,
Rechtsnatur und Rechtskraftwirkung des Kollokationsplanes im Konkurs, thèse
Bâle 1979, p. 85;
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VIKTOR URS FURRER, Die Kollokationsklagen nach schweizerischem Recht, 1979, p.
66; NICOLAS JEANDIN, Poursuite pour dettes et faillite: état de collocation,
FJS n° 990b p. 17; BRUNNER/REUTTER, Kollokations- und Widerspruchsklagen nach
SchKG, 2^e éd. 2002, p. 42 s.; PIERRE-ROBERT GILLIÉRON, Commentaire de la loi
fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, vol. III, 2001, n° 106 ad
art. 250 LP; ANDREA BRACONI, La collocation des créances en droit international
suisse de la faillite, 2005, p. 128 n. 1.2 s.; DIETER HIERHOLZER, in Kommentar
zum Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, vol. III, 1998, n^os 23 et
28 ad art. 250 LP; CHARLES JAQUES, in Commentaire romand, Poursuite et
faillite, 2005, n^os 39 s. ad art. 250 LP; AMONN/WALTHER, Grundriss des
Schuldbetreibungs- und Konkursrechts, 8^e éd. 2008, § 46 n. 52).

2.2 A l'instar de l'autorité précédente, le Tribunal fédéral peut se rallier à
la solution préconisée par les nombreux auteurs précités. Cette solution est
d'ailleurs parfaitement conforme au texte légal, l'art. 250 LP prévoyant pour
les deux actions un seul et même délai de 20 jours à compter de la publication
du dépôt de l'état de collocation (art. 249 LP). Elle répond en outre à
l'intérêt public d'une liquidation rapide de la faillite (cf. art. 270 LP),
étant rappelé à cet égard que le tableau définitif de distribution des deniers
ne pourra être dressé que lorsque tous les procès ayant trait à la fixation de
l'actif et du passif de la masse auront été terminés (art. 261 LP et 83 al. 1
de l'ordonnance sur l'administration des offices de faillite [OAOF; RS
281.32]). La recourante a tort lorsqu'elle soutient que le dépôt de son action
en élimination dans ledit délai n'aurait aucunement eu pour résultat une
accélération de la procédure du fait de la suspension de ladite action jusqu'à
droit connu sur l'action en collocation. Il y a de toute évidence gain de temps
si l'action en cause doit simplement être reprise sitôt après sa suspension,
plutôt que d'être alors seulement introduite dans les 20 jours. En outre, il
est dénué de pertinence que, comme le prétend la recourante, le retard de son
action n'ait pas causé d'inconvénients à l'intimée, dès lors que le délai
d'ouverture d'action est un délai de déchéance (ou forclusion) procédural
(BRACONI, op. cit., p. 122 n. 2.2 et les références citées aux notes 28 et 32)
qui doit être impérativement respecté dans l'intérêt général des créanciers du
failli.

2.3 La recourante conteste vainement la solution susmentionnée en faisant
valoir que la doctrine soit ne préconiserait pas l'introduction simultanée des
deux actions, ce qui serait le cas de JEANDIN, soit ne
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s'exprimerait pas clairement en ce sens, soit se baserait sur des réflexions
incomplètes.
Elle a tort, tout d'abord, parce que l'auteur précité, après avoir exposé que
le créancier dont la production a été écartée peut non seulement agir en
collocation de sa propre créance, mais encore remettre en cause la créance d'un
tiers, dit clairement que le procès en contestation de la collocation du tiers
"devra être introduit tout comme l'autre dans les 20 jours de la publication de
l'art. 249 II LP" et "sera suspendu en attendant droit définitivement jugé
quant à l'admission de la propre production du demandeur". C'est dire que
JEANDIN confirme la solution préconisée par le restant de la doctrine et
retenue par la décision attaquée.
Ensuite, même si elle ne s'exprime pas toujours clairement ou complètement sur
la question, voire suggère une simple possibilité et non une obligation
d'introduire les deux actions simultanément, la doctrine va généralement dans
le sens de la solution critiquée et, comme le retient l'autorité cantonale sans
être sérieusement démentie par la recourante, elle ne contient aucun avis
venant la battre en brèche.

2.4 C'est à raison que la décision attaquée mentionne également dans ce
contexte le principe de l'immutabilité de l'état de collocation. Dicté par
l'intérêt public (ATF 108 III 23), ce principe implique qu'une fois écoulé le
délai de contestation de 20 jours, les créances qui y sont admises ne peuvent
plus être remises en cause (cf. ATF 113 III 17 consid. 2 p. 18; ATF 102 III 155
consid. 3; arrêt 7B.94/2003 du 24 juin 2003 consid. 3). Le but de l'état de
collocation consistant à déterminer de manière rapide et durable le passif
d'une masse en faillite, les créanciers ont un intérêt manifeste à ne plus être
inquiétés au sujet de l'admission de leurs productions une fois écoulé le délai
légal de 20 jours suivant la publication du dépôt de l'état de collocation.
Admettre que chaque nouveau créancier puisse remettre en question les
collocations antérieures serait contraire à l'intérêt public. On doit donc
attendre d'un créancier dont la production a été écartée de l'état de
collocation, mais qui a agi contre cette éviction, qu'il conteste, avant qu'il
ne soit définitivement statué sur sa propre qualité de créancier et sous peine
de forclusion, la production d'un tiers créancier dans le délai de 20 jours.
En l'espèce, l'admission de la créance de l'intimée à l'état de collocation a
fait l'objet d'une publication le 19 décembre 2007. La
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recourante, qui avait contesté sa propre éviction de l'état de collocation en
avril 2005 et avait donc qualité pour agir en élimination de la créance de
l'intimée, devait agir contre celle-ci dans les 20 jours suivant la publication
du 19 décembre 2007. Le juge saisi aurait alors suspendu l'examen de cette
seconde action jusqu'à droit connu sur sa qualité de créancière. Déposée le 19
avril 2008 seulement, la demande de la recourante était donc tardive, partant
irrecevable.