Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 135 III 441



Urteilskopf

135 III 441

66. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause X. contre Y.
(recours en matière civile)
4A_89/2009 du 1er mai 2009

Regeste

Mietvertrag; vorzeitige Kündigung gestützt auf Art. 261 Abs. 2 lit. a OR;
Unwirksamkeit und Konversion.
Eine unwirksame vorzeitige Kündigung kann nicht in eine wirksame ordentliche
Kündigung konvertiert werden (E. 3).

Auszug aus den Erwägungen: ab Seite 441

BGE 135 III 441 S. 441
Extrait des considérants:

3. A titre de grief subsidiaire, le recourant affirme que la cour cantonale
aurait dû convertir le congé extraordinaire en congé ordinaire et reporter le
congé signifié pour le 30 janvier 2007 au 30 avril 2007, soit au prochain terme
pertinent, par application de l'art. 266a al. 2 CO - ce à quoi l'autorité
cantonale s'est expressément refusée.
Dès lors, la question qui se pose est celle de savoir si une résiliation
anticipée inefficace peut être convertie en une résiliation ordinaire valable.

3.1 Un congé, qui ne satisfait pas aux exigences légales ou contractuelles
auxquelles est subordonné son exercice, est un congé inefficace. Un tel congé
est dénué d'effet (ATF 121 III 156 consid. 1c/aa p. 161).
A chaque fois que le Tribunal fédéral a eu l'occasion de juger qu'un congé
extraordinaire était inefficace, faute de réaliser les conditions nécessaires,
aucune conversion du congé inefficace en un congé ordinaire n'a été opérée. Il
semble toutefois que la question d'une éventuelle conversion n'était pas
directement litigieuse.
BGE 135 III 441 S. 442
Dans l' ATF 123 III 124, il a été jugé qu'une résiliation fondée à tort sur
l'art. 257f al. 3 CO pouvait prendre effet à un autre titre comme résiliation
admissible, de caractère extraordinaire. Le Tribunal fédéral a rappelé que si
la notion de droit formateur exclut, en règle générale, une conversion de
l'acte, cette exclusion ne va pas plus loin que ce qu'exige le caractère
univoque, inconditionnel et irrévocable de l'exercice du droit formateur;
l'exclusion de toute conversion trouve ses limites dans le principe de
l'application d'office du droit par le juge et dans la dénomination inexacte de
l'acte sans préjudice pour les parties, par analogie avec l'art. 18 CO (consid.
3d p. 128 s.). Ainsi, celui qui, fondé sur un état de fait clairement délimité,
signifie à l'autre partie une résiliation extraordinaire du contrat, n'a pas à
pâtir de ce qu'il invoque, erronément en droit, une disposition légale inexacte
comme fondement juridique à sa déclaration.

3.2 Certains auteurs refusent d'envisager la conversion d'une résiliation
extraordinaire en une résiliation ordinaire pour le plus prochain terme. Ces
auteurs considèrent que, dès lors qu'une résiliation - qui ne remplit pas les
conditions auxquelles la loi subordonne son application - est inefficace, ses
effets ne peuvent pas être reportés à l'échéance ordinaire suivante (DAVID
LACHAT ET AL., Mietrecht für die Praxis, 2009, n° 26/4.7 p. 532, n° 27/1.4.1 p.
537 et n° 27/4.3.5 p. 560; DAVID LACHAT, Le bail à loyer, 2008, n° 4.2.7 p.
692; RAYMOND BISANG ET AL., Das schweizerische Mietrecht, Kommentar, 3^e éd.
2008, n° 53 ad art. 257f CO et n° 22 ad art. 266-266o CO; ROGER WEBER, in
Basler Kommentar, Obligationenrecht, vol. I, 4^e éd. 2007, n° 11 ad art. 257d
CO; PETER HIGI, Zürcher Kommentar, 3^e éd. 1994 et 4^e éd. 1995, n^os 72 et 86
ad art. 257f CO et n° 67 ad art. 266g CO; RICHARD PERMANN, Kommentar zum
Mietrecht, 2^e éd. 2007, n° 16 ad art. 257d CO; ANDREAS MAAG, Kündigung des
Vermieters gemäss Art. 257f OR, Mietrecht Aktuell [MRA] 5/2002 p. 198 ss, 204;
PETER HEINRICH, in Handkommentar zum Schweizer Privatrecht, 2007, n° 9 ad art.
266g CO).
D'autres auteurs considèrent qu'un congé matériellement infondé peut être
converti en un congé ordinaire. TERCIER/FAVRE sont d'avis que si le besoin
personnel urgent invoqué par le bailleur, au sens de l'art. 261 al. 2 let. a
CO, n'est pas suffisant, le congé vaudra en principe pour le prochain terme
contractuel, s'il s'agit d'un contrat de durée indéterminée (TERCIER/FAVRE, Les
contrats spéciaux, 2009, n° 2487 p. 360). Cet avis est partagé par les
commentateurs de
BGE 135 III 441 S. 443
l'Union suisse des professionnels de l'immobilier (USPI) (Droit suisse du bail
à loyer, Commentaire, 1992, n° 53 ad art. 257f CO), qui estiment que, si toutes
les conditions de la résiliation extraordinaire ne sont pas remplies, la
résiliation garde sa validité en tant que congé ordinaire. Pour PIERRE WESSNER,
une conversion est possible si l'auteur du congé est à même d'établir qu'il
avait la volonté de mettre fin au bail indépendamment des motifs qu'il a
invoqués (PIERRE WESSNER, La résiliation du bail à loyer pour justes motifs, in
10^e Séminaire sur le droit du bail, 1998, n° 70 p. 25). CLAUDE RAMONI
considère aussi, en lien avec un congé donné pour cause de demeure du locataire
au sens de l'art. 257d CO, que s'il apparaît clairement que le bailleur avait
de toute façon la volonté de mettre fin au contrat, un congé donné pour demeure
du locataire non valable peut être converti en résiliation ordinaire pour le
prochain terme, alors même que seul l'art. 257d CO est invoqué; cette solution
apparaît, aux yeux de l'auteur, conforme aux principes admis pour la conversion
des actes nuls en actes valables (CLAUDE RAMONI, Demeure du débiteur et
contrats de droit suisse, 2002, n° 329 p. 155; de même, GUILLAUME VIONNET,
L'exercice des droits formateurs, 2008, p. 413). Enfin, pour MARIE-NOËLLE
VENTURI-ZEN-RUFFINEN, la question de la conversion d'une résiliation
injustifiée en une résiliation ordinaire doit être résolue d'après les
principes applicables en matière d'interprétation des manifestations de
volonté; du point de vue de l'auteur, il y a lieu de déterminer selon le
principe de la confiance si la résiliation injustifiée pouvait ou devait être
comprise par son destinataire comme une résiliation ordinaire du contrat pour
le prochain terme (MARIE-NOËLLE VENTURI-ZEN-RUFFINEN, La résiliation pour
justes motifs des contrats de durée, 2004, n^os 1473 ss p. 414).
BERNARD CORBOZ adopte une position nuancée. Pour cet auteur, si les conditions
qui ouvrent la faculté de mettre fin au bail prématurément ne sont pas réunies,
la déclaration de volonté faite dans ce sens ne peut déployer aucun effet;
toutefois, cet auteur n'exclut pas la possibilité d'une conversion du congé
extraordinaire nul en un congé ordinaire valable lorsque l'échéance
contractuelle est proche de la date pour laquelle le congé anticipé a été
donné; si les dates sont éloignées, l'auteur observe que la sécurité du droit
commande de ne pas s'orienter dans le sens d'une conversion, l'interprétation
étant discutable et la situation incertaine pour l'autre partie (BERNARD
CORBOZ, Les congés affectés d'un vice, in 9^e Séminaire sur le droit du bail,
1996, p. 26).
BGE 135 III 441 S. 444

3.3 Lorsque les parties ont conclu un contrat qui se révèle nul ou inefficace,
il est communément admis que le juge, pour sauver autant que possible l'accord
intervenu, peut convertir l'acte juridique vicié en un autre acte juridique
valable s'il parvient à la conclusion, par voie d'interprétation, que cet acte
répond aux aspirations des parties et qu'il aurait été choisi par elles si
elles avaient eu conscience du motif de nullité ou d'inefficacité affectant le
contrat qu'elles ont passé en réalité (ATF 124 III 112 consid. 2b/bb p. 119 s.;
ATF 103 II 176 consid. 4 p. 185 s.).
La possibilité de convertir un acte juridique vicié en un acte juridique
valable n'est pas limitée aux actes bilatéraux. Ainsi, la jurisprudence admet
qu'un recours mal dénommé puisse être converti et traité comme le recours qu'il
aurait fallu interjeter, si les conditions en sont remplies (ATF 134 III 379
consid. 1.2 p. 382).
Cependant, celui qui résilie un contrat exerce un droit formateur
(Gestaltungsrecht, diritto formatore); en prévoyant la faculté de donner congé,
l'ordre juridique permet à un seul des cocontractants de modifier
unilatéralement, par sa seule manifestation de volonté, la situation juridique
de l'autre partie (ATF 133 III 360 consid. 8.1.1 p. 364).
Le droit formateur ne peut être exercé que par celui auquel il appartient. Le
juge ne peut en principe pas suppléer une volonté qui n'a pas été manifestée.
Surtout, l'exercice du droit formateur, en raison de ses effets pour le
cocontractant, doit reposer sur une manifestation de volonté claire et
dépourvue d'incertitudes. Ainsi, il a été jugé que l'exercice d'un droit
formateur doit être univoque, sans condition et revêtir un caractère
irrévocable (ATF 133 III 360 consid. 8.1.1 p. 364; ATF 128 III 129 consid. 2a
p. 135).
Il a donc été admis, pour assurer la sécurité du droit et protéger le
cocontractant contre une situation juridique incertaine, que la notion de droit
formateur exclut en principe la possibilité d'une conversion (ATF 123 III 124
consid. 3d p. 129 et les références citées).
Si, comme c'est le cas en l'espèce, le locataire reçoit un congé qu'il doit
interpréter, selon le principe de la confiance, comme une résiliation anticipée
fondée sur l'art. 261 al. 2 let. a CO, il n'a pas à compter avec l'éventualité
que le juge transforme le congé qui a été donné en un congé tel qu'il n'a pas
été donné. On ne se trouve pas
BGE 135 III 441 S. 445
ici dans l'hypothèse d'une erreur de dénomination ou de référence légale
(hypothèses visées à l' ATF 123 III 124 déjà cité): le congé, tel qu'il a été
donné, devait être compris comme un congé fondé sur l'art. 261 al. 2 let. a CO.
Dans une telle situation, le locataire, pour s'opposer à la résiliation, était
naturellement amené à faire valoir que les conditions d'application de cette
disposition n'étaient pas réunies et, par voie de conséquence, que le congé
était inefficace. Il n'avait pas à envisager un autre congé que celui qui lui a
été donné, c'est-à-dire un congé ordinaire qui impliquait pour lui d'autres
moyens de défense (une éventuelle annulation du congé sur la base des art. 271
et 271a CO, ainsi, subsidiairement, qu'une prolongation du bail selon les art.
272 ss CO). La conversion a pour but de remplacer ce qui a été dit (et qui
n'est pas valable) par ce qui a été voulu (et qui est valable); elle n'a pas
pour objet de rectifier l'erreur d'un cocontractant au détriment de l'autre, en
modifiant ainsi les fondements juridiques du litige.
On peut encore observer que le législateur a adopté une disposition spéciale,
l'art. 266a al. 2 CO, pour le cas où celui qui donne congé s'est trompé sur le
délai ou le terme de congé. Dans ce cas de figure, le congé mal donné produit
ses effets au prochain terme possible. Cette règle tend exclusivement à
corriger une erreur de date, et non pas une résiliation viciée dans ses
conditions de fond (VENTURI-ZEN-RUFFINEN, op. cit., n° 1472 p. 413 s.; LACHAT,
op. cit., n° 4.7 p. 655; HIGI, op. cit., n^os 25 et 36 ad art. 266a CO).
L'existence même de cette règle spéciale montre qu'un report des effets du
congé n'est possible que dans le cas d'une erreur sur la date d'échéance, et
non pas dans le cas d'espèce.
Au regard de ce qui précède, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral
en ne convertissant pas en une résiliation ordinaire le congé extraordinaire
fondé sur l'art. 261 al. 2 let. a CO.