Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 135 III 378



Urteilskopf

135 III 378

56. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause X. contre Y.
(recours en matière civile)
4A_548/2008 du 11 mars 2009

Regeste

Feststellungsklage; Feststellungsinteresse.
Ausnahmsweise ist ein Feststellungsinteresse selbst dann gegeben, wenn eine
Leistungs-, Gestaltungs- oder Unterlassungsklage zur Verfügung steht.
Ausnahmesituation vorliegend verneint, da die blosse Feststellung eines
Pfandrechts weder den Streit beendet noch die künftige Betreibung auf
Pfandverwertung erleichtert (E. 2).

Sachverhalt ab Seite 378

BGE 135 III 378 S. 378

A. Durant l'automne 2002, X., qui souhaitait diffuser dans le Valais
francophone un journal politique, a pris contact, en vue de faire imprimer ce
bulletin, avec Y., gérant de la société Imprimerie W. Sàrl. (...)
Le 5 mars 2003, le notaire B. a instrumenté une obligation hypothécaire. Ce
titre, émis au porteur, fait apparaître une dette de 200'000 fr. et indique que
le débiteur est X. La dette est garantie par une hypothèque sur un immeuble
propriété de A., qui a comparu comme donneur de gage.
BGE 135 III 378 S. 379
L'hypothèque a été inscrite au registre foncier, où Y. a été mentionné comme
premier porteur de l'obligation. Le notaire a envoyé l'obligation hypothécaire
à Y. (...)
Le 2 juin 2003, X. a signé un décompte établi par l'imprimerie, faisant
apparaître, pour diverses prestations, un solde dû de 96'498 fr. 90.
La société Imprimerie W. Sàrl a poursuivi en paiement X. par la voie de la
poursuite ordinaire et a obtenu un acte de défaut de biens portant sur la somme
totale de 99'219 fr. 45.
Par acte du 2 juin 2005, la société Imprimerie W. Sàrl a cédé à Y. tous ses
droits à l'encontre de X.

B. Par demande du 13 janvier 2006, Y. a ouvert action contre X. devant le
Tribunal cantonal valaisan, concluant en dernier lieu à ce qu'il soit constaté
qu'il avait un droit de gage mobilier sur l'obligation hypothécaire au porteur
instrumentée le 5 mars 2003.
Admettant la recevabilité de l'action en constatation de droit (qui était
contestée), la cour cantonale, par jugement du 21 octobre 2008, a constaté que
l'obligation hypothécaire au porteur instrumentée le 5 mars 2003 a été remise
en nantissement à Y. pour garantir une créance de celui-ci envers X. d'un
montant de 91'498 fr. 90 en capital (...).

C. X. a déposé un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral contre
le jugement du 21 octobre 2008. (...)
(extrait)

Auszug aus den Erwägungen:

Extrait des considérants:

2.

2.1 L'intimé a introduit une action en constatation de droit, demandant qu'il
soit constaté qu'il est titulaire d'un droit de gage mobilier sur l'obligation
hypothécaire au porteur.
La recourante soutient que l'action en constatation de droit n'était pas
ouverte, parce que l'intimé pouvait agir en exécution pour faire valoir son
droit.

2.2 Il n'existe actuellement aucune disposition de droit fédéral régissant de
manière générale l'action en constatation de droit. Certes, l'art. 88 du Code
de procédure civile suisse du 19 décembre 2008 (FF 2009 40) prévoit cette
action, mais cette disposition n'est actuellement pas en vigueur. La
jurisprudence a cependant admis que le droit fédéral régissait les conditions
dans lesquelles il est possible
BGE 135 III 378 S. 380
de demander au juge la constatation de l'existence ou de l'inexistence d'un
droit relevant de la législation fédérale (ATF 131 III 319 consid. 3.5 p. 324;
ATF 129 III 295 consid. 2.2 p. 299; ATF 110 II 352 consid. 1 p. 353). La
question soulevée ne relève donc pas de la procédure cantonale et peut être
examinée ici (art. 95 let. a LTF).
Selon la jurisprudence, l'action en constatation de droit est ouverte si la
partie demanderesse a un intérêt important et digne de protection à la
constatation immédiate de la situation de droit; il n'est pas nécessaire que
cet intérêt soit de nature juridique, il peut s'agir d'un pur intérêt de fait;
la condition est remplie notamment lorsque les relations juridiques entre les
parties sont incertaines et que cette incertitude peut être levée par la
constatation judiciaire; pour cela, n'importe quelle incertitude ne suffit pas;
il faut au contraire que l'on ne puisse pas exiger de la partie demanderesse
qu'elle tolère plus longtemps le maintien de cette incertitude, parce que
celle-ci l'entrave dans sa liberté de décision (ATF 131 III 319 consid. 3.5 p.
324 s.; ATF 123 III 414 consid. 7b p. 429; ATF 120 II 20 consid. 3a p. 22; ATF
110 II 352 consid. 2 p. 357). Dans le domaine du recouvrement des créances, le
cas typique est celui du débiteur qui veut faire constater l'inexistence de la
dette sans attendre davantage que le prétendu créancier se décide ou non à
l'attaquer. On peut aussi songer à l'hypothèse d'un créancier, dont la créance
est contestée et non encore exigible, qui souhaite sans attendre en faire
constater l'existence en vue de la remettre en nantissement.
L'intérêt pratique à une constatation de droit fait normalement défaut pour le
titulaire du droit lorsque celui-ci dispose d'une action en exécution, en
interdiction ou d'une action formatrice, immédiatement ouverte, qui lui
permettrait d'obtenir directement le respect de son droit ou l'exécution de
l'obligation (ATF 123 III 49 consid. 1a p. 51; arrêt 4C.138/2003 du 25 août
2003 consid. 2.1, non publié in ATF 129 III 715). Dans ce sens, l'action en
constatation de droit est subsidiaire par rapport à une action condamnatoire ou
une action formatrice (cf. ATF 119 II 368 consid. 2a p. 370). Seules des
circonstances exceptionnelles pourraient conduire à admettre l'existence d'un
intérêt à la constatation de droit bien qu'une voie d'exécution soit ouverte (
ATF 123 III 49 consid. 1a p. 51; arrêt 4C.138/2003 déjà cité consid. 2.1). Un
litige doit en principe être soumis au juge dans son ensemble par la voie de
droit prévue à cet effet; le créancier qui dispose d'une action en exécution ne
peut en tout cas pas
BGE 135 III 378 S. 381
choisir d'isoler des questions juridiques pour les soumettre séparément au juge
par la voie d'une action en constatation, comme s'il sollicitait un avis de
droit.

2.3 En l'espèce, l'intimé, agissant en tant que cessionnaire des droits de la
société d'imprimerie, fait valoir à l'encontre du recourant la créance
découlant du décompte du 2 juin 2003, approuvé par le débiteur. Cette créance,
correspondant pour l'essentiel aux frais d'impression du journal, est
immédiatement exigible. L'intimé, en tant que créancier cessionnaire, dispose
donc, sans devoir attendre, des voies de l'exécution forcée à l'encontre du
recourant, qui est le débiteur.
L'intimé expose que le recourant, pour garantir le paiement des sommes qui
seraient dues en relation avec le journal, lui a remis en nantissement une
obligation hypothécaire au porteur émise pour l'occasion (sur ce cas de figure:
ATF 105 II 183 consid. 4 p. 186 ss). Une obligation hypothécaire est un
papier-valeur qui incorpore la dette reconnue, mais non pas l'hypothèque
(PAUL-HENRI STEINAUER, Les droits réels, vol. III, 3^e éd. 2003, n° 2631 p.
141). Dès lors que le papier-valeur incorpore une créance, il faut en déduire
que l'intimé, en parlant du nantissement, invoque un gage sur une créance au
sens des art. 899 CC et 37 al. 2 LP. La remise en gage d'une obligation
hypothécaire au porteur ne requiert aucune forme spéciale (ATF 93 II 82 consid.
4 p. 86 s.). L'intimé peut ainsi introduire à l'encontre du recourant une
poursuite en réalisation du gage conformément aux art. 151 ss LP. Comme
l'intimé admet qu'il n'a reçu l'obligation qu'à titre pignoratif, il faut en
déduire que l'émetteur est resté titulaire de la créance incorporée dans le
titre (ATF 130 III 417 consid. 3.3 p. 425). Que le recourant soit ainsi à la
fois le créancier et le débiteur s'explique par le fait qu'il n'y avait, au
moment de l'émission du titre, aucune créance de 200'000 fr. Selon l'état de
fait retenu par la cour cantonale, il s'agissait, en s'inspirant des règles en
matière hypothécaire (art. 824 al. 1 CC), de garantir une dette future
(résultant de la publication du journal) et d'articuler, selon le principe de
l'art. 794 al. 2 CC, une somme maximale garantie par l'hypothèque. Comme la
cour cantonale a constaté que le recourant a cédé la propriété de l'obligation
(sans remise du titre) à un tiers, il conviendra d'indiquer le nom de ce tiers
en application de l'art. 151 al. 1 let. a LP.
BGE 135 III 378 S. 382
Par la voie de l'opposition, il sera possible de contester aussi bien
l'existence et l'étendue de la créance en poursuite que l'existence et
l'étendue du gage lui-même (ATF 119 III 100 consid. 2 p. 102; BÉNÉDICT FOEX,
Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite
[...], 2005, n° 32 ad art. 153 LP). Dans la mesure où le créancier poursuivant
n'obtient pas la mainlevée, il pourra agir en reconnaissance de dette et/ou en
constatation du gage (cf. FOEX, op. cit., n° 13 ad art. 153a LP). Ainsi, la
voie de l'exécution permet manifestement de traiter l'ensemble du litige.
S'il surmonte ces écueils et si, au stade de la réalisation forcée du gage, il
obtient que la créance incorporée dans le titre lui soit donnée en paiement à
concurrence de la créance en poursuite (art. 131 al. 1 LP, applicable par le
renvoi de l'art. 156 al. 1 LP), l'intimé sera alors le titulaire, à due
concurrence, de la créance incorporée dans le titre et il pourra faire valoir
l'hypothèque qui en est la garantie accessoire (art. 170 al. 1 CO) par la voie
d'une poursuite subséquente en réalisation du gage immobilier. Il est vrai que
la nécessité d'une double poursuite (poursuite en réalisation du gage mobilier,
puis poursuite en réalisation du gage immobilier) a été critiquée en doctrine,
mais cette critique ne vise que l'hypothèse - non réalisée en l'espèce - où le
débiteur et le propriétaire de l'immeuble seraient une seule et même personne
(ALEXANDRE BONNARD, L'obligation hypothécaire au porteur, 1955, p. 97 ss).
Il résulte de ce bref survol que des voies d'exécution sont ouvertes à l'intimé
pour lui permettre de faire valoir ses droits et de faire trancher l'ensemble
des questions litigieuses. Il ne pouvait donc pas choisir, plutôt que de
s'engager dans la procédure prévue, d'isoler la question de son droit de gage
sur l'obligation hypothécaire pour la faire trancher séparément et
préalablement par la voie d'une action en constatation de droit.

2.4 La cour cantonale a néanmoins considéré qu'elle pouvait entrer en matière
sur l'action en constatation de droit, en se fondant principalement sur un avis
de doctrine selon lequel l'action est admissible lorsque l'exécution de la
prestation est garantie après la constatation de droit (FABIENNE HOHL,
Procédure civile, vol. I, 2001, n° 143 p. 46).
Cet avis se réfère manifestement à un cas de jurisprudence (ATF 97 II 371
consid. 2 p. 375 s.), encore récemment rappelé (arrêt
BGE 135 III 378 S. 383
4C.341/2004 déjà cité consid. 2.1). Il a été admis qu'une action en
constatation de droit était exceptionnellement admissible lorsqu'il s'agissait
de trancher la seule question contestée et qu'il était certain, parce que le
débiteur était une collectivité publique, que la prestation serait ensuite
exécutée sans aucune autre forme de procédure.
Les quelques exceptions admises par la jurisprudence doivent être interprétées
de manière restrictive, sous peine de créer une incertitude sur la voie de
droit à suivre. Il faut souligner encore une fois le principe que l'action en
constatation de droit est subsidiaire par rapport à la voie de l'exécution et
qu'elle n'est pas ouverte lorsqu'il est possible d'agir immédiatement en
exécution et de faire régler ainsi l'ensemble des points litigieux. Seules des
circonstances tout à fait exceptionnelles pourraient faire apparaître un
intérêt suffisant à entrer en matière sur l'action en constatation de droit. Le
cas d'espèce ne remplit nullement les conditions du précédent cité, puisqu'il
n'y avait d'emblée aucune certitude que le recourant se soumette après la
décision sur la constatation du droit.
En l'espèce, cette conclusion est d'autant plus évidente que le recourant ne
conteste pas seulement le droit de gage sur le titre, mais aussi, et peut-être
principalement, l'existence de la dette abstraite incorporée dans le
papier-valeur. L'intimé étant le premier porteur, des exceptions peuvent en
principe lui être opposées au sujet de l'existence de la dette abstraite (art.
979 al. 1 CO). Or, le recourant soutient que la dette de 200'000 fr. devait se
rapporter à un prêt qui n'est pas venu à chef et qu'elle n'existe pas. Sans
doute dans l'espoir de faire avancer le litige, la cour cantonale s'est certes
exprimée sur le but poursuivi par l'émission de l'obligation hypothécaire. Elle
n'avait cependant pas à le faire dans le cadre de la question qui lui était
posée et qui ne portait que sur l'existence d'un droit de gage sur l'obligation
hypothécaire. Le dispositif de l'arrêt rendu, qui ne porte que sur l'existence
du droit de gage, ne peut trancher avec autorité de chose jugée la question de
l'existence de la créance abstraite incorporée dans le titre. Il est dès lors
évident que cette procédure ne permettait pas de liquider l'ensemble du litige,
ce qui exclut que l'on déroge à la règle selon laquelle la voie de l'exécution,
lorsqu'elle est ouverte, doit être suivie.

2.5 Il reste à examiner l'argument plus délicat selon lequel l'intimé aurait
validé par avance la poursuite en réalisation du gage, en
BGE 135 III 378 S. 384
exerçant par anticipation l'action en constatation de gage. Cet argument ne
convainc pas. Après une poursuite infructueuse, l'intimé entendait
manifestement faire valoir le droit de gage sur l'obligation. La voie prévue à
cet effet, immédiatement ouverte, est la poursuite en réalisation du gage. Elle
présente plusieurs avantages: le tiers devenu propriétaire du titre par cession
civile peut également faire opposition; il est possible, après opposition, de
soumettre au juge (que ce soit par une action en reconnaissance ou, après
mainlevée, une action en libération) l'ensemble des questions litigieuses
(l'existence de la créance en poursuite, l'existence du droit de gage,
l'existence de l'objet du gage); elle conduit à la réalisation forcée du gage.
On ne voit pas quelle simplification serait apportée en faisant d'abord
trancher par le juge, entre l'intimé et le recourant, la question de
l'existence du nantissement, ce d'autant plus que l'intimé ne peut espérer, en
ce qui concerne la créance en poursuite, qu'une mainlevée provisoire et n'est
donc de toute manière pas à l'abri d'une procédure judiciaire ultérieure
(l'action en libération de dette). Sous cet angle également, la présente action
en constatation de droit ne répond pas à un intérêt pratique digne de
protection.
Les conditions d'une action en constatation de droit n'étant pas remplies,
cette action doit être déclarée irrecevable, et non pas rejetée (ATF 123 III 49
consid. 1a p. 51).
Le recours doit donc être admis, l'arrêt attaqué annulé et l'action en
constatation de droit doit être déclarée irrecevable.