Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 134 III 446



Urteilskopf

134 III 446

73. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause X. contre A.
(recours en matière civile)
4A_181/2008 du 24 juin 2008

Regeste

Vorzeitige Kündigung eines Mietverhältnisses (Art. 257f Abs. 3 OR);
Untervermietung ohne Zustimmung des Vermieters (Art. 262 OR); Rechtsmissbrauch
(Art. 2 ZGB). Mieter, der das Mietobjekt ohne Zustimmung untervermietet und
einer schriftlichen Abmahnung nicht nachkommt. In diesem Fall kann der
Vermieter das Mietverhältnis vorzeitig kündigen, wenn er berechtigt gewesen
wäre, sich der Untervermietung zu widersetzen, da mit dieser ein Mieterwechsel
bezweckt wurde (E. 2).

Sachverhalt ab Seite 446

BGE 134 III 446 S. 446

A. Le 1^er avril 1998, A. a pris à bail un appartement de trois pièces dans un
immeuble sis à Genève. Conclu pour un an, le contrat se renouvelait ensuite
d'année en année, sauf résiliation signifiée trois
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mois avant l'échéance. Le loyer annuel, charges comprises, s'élevait à 8'232
fr.
En 2003, X. est devenue propriétaire de l'immeuble précité.
La locataire a vécu dans l'appartement avec son fils majeur, B., jusqu'au 1^er
avril 1999. A cette date, elle a quitté les lieux et sous-loué le logement à
son fils. Ce dernier a épousé C. en juillet 2003; le couple a occupé
l'appartement sous-loué jusqu'à sa séparation en décembre 2004. Par jugement du
27 mai 2005, le Tribunal de première instance de Genève a, dans le cadre de
mesures protectrices de l'union conjugale, attribué la jouissance exclusive du
logement susmentionné à C. L'avocat de celle-ci a communiqué la décision
judiciaire à la régie représentant la bailleresse.
Par lettre du 19 août 2005, la gérance s'est étonnée auprès de A. d'apprendre
qu'elle ne semblait plus occuper le logement loué; la locataire était mise en
demeure de fournir des explications, faute de quoi elle s'exposait à une
résiliation du bail.
Dans sa réponse du 28 août 2005, A. a confirmé avoir quitté l'appartement en
avril 1999, le laissant à son fils à partir de cette date; elle affirmait avoir
demandé alors à la régie si le bail pouvait être transféré à B.; il lui aurait
été répondu que cela n'était pas nécessaire dès lors qu'il avait le droit
d'habiter dans l'appartement en tant que fils de la locataire. A. précisait
que, lorsqu'elle avait appris l'attribution judiciaire du logement familial à
sa belle-fille, elle avait immédiatement demandé à la gérance, par téléphone,
si le bail pouvait être transféré à C., possibilité que la régie s'était
engagée à examiner.
Par pli recommandé du 7 octobre 2005, la gérance a mis A. en demeure de
réintégrer le logement sous-loué sans autorisation jusqu'au 15 novembre 2005,
l'avertissant qu'à défaut, le bail serait résilié pour justes motifs. La
locataire n'a pas donné suite à cette correspondance.
Par courrier recommandé et avis officiel du 23 mars 2006, X. a résilié le bail
de manière anticipée pour le 31 mai 2006.

B. Par requête déposée le 21 avril 2006, A. a contesté le congé.
Dans une décision du 23 octobre 2006, la Commission de conciliation en matière
de baux et loyers a déclaré valable le congé notifié pour le 31 mai 2006 et
accordé à la locataire une prolongation unique du bail jusqu'au 31 janvier
2007.
A. a porté la cause devant le Tribunal des baux et loyers du canton de Genève,
reprenant notamment ses conclusions en annulation du congé.
BGE 134 III 446 S. 448
Par jugement du 4 avril 2007, le Tribunal des baux et loyers a déclaré
inefficace le congé notifié le 23 mars 2006.
La bailleresse a interjeté appel; elle faisait valoir notamment que la
locataire n'avait aucunement l'intention de revenir vivre un jour dans
l'appartement loué. Statuant le 3 mars 2008, la Chambre d'appel en matière de
baux et loyers du canton de Genève a confirmé le jugement de première instance.
En substance, la cour cantonale a jugé que la sous-location incriminée était
admissible au regard de l'art. 262 al. 2 CO, dès lors qu'elle intervenait à des
conditions extrêmement proches de celles du bail principal et que la
bailleresse n'avait pas démontré son besoin d'attribuer le logement en cause à
une autre personne que "son occupant actuel"; la bailleresse ne pouvait ainsi
résilier le bail de manière anticipée sur la base de l'art. 257f al. 3 CO.

C. X. forme un recours en matière civile, demandant que l'arrêt cantonal soit
annulé et que le congé notifié le 23 mars 2006 soit déclaré valable.
Le Tribunal fédéral a admis le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

Extrait des considérants:

2. La recourante reproche aux juges cantonaux d'avoir violé les art. 257f al. 3
et 262 CO en ne reconnaissant pas son droit de résilier le bail de manière
anticipée en raison d'une sous-location non autorisée présentant des
inconvénients majeurs. A cet égard, elle fait valoir que la locataire n'a
manifestement pas l'intention de revenir vivre un jour dans l'appartement loué,
comme le démontre en particulier le fait qu'elle a demandé le transfert du bail
à sa belle-fille. La sous-location tendrait ainsi à une substitution détournée
de locataires. Il s'agirait là d'un inconvénient majeur au sens de l'art. 262
al. 2 let. c CO, qui aurait permis à la bailleresse de s'opposer à la
sous-location si son consentement avait été requis. La recourante relève
également que la locataire n'a pas répondu à l'avertissement adressé par la
régie lorsque celle-ci a eu connaissance de la sous-location. Cette absence de
réaction suffirait déjà à fonder une résiliation du bail sur la base de l'art.
257f al. 3 CO.

2.1 A titre liminaire, il convient de préciser que, si elle a bien sous-loué
l'appartement en cause à son fils, la locataire n'a pas, selon les
constatations cantonales, conclu par la suite un contrat de sous-location avec
sa belle-fille. C. occupe le logement litigieux en tant qu'épouse du
sous-locataire. Le jugement sur mesures protectrices
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de l'union conjugale a certes attribué le logement à la belle-fille de
l'intimée sur la base de l'art. 176 al. 1 ch. 2 CC, mais il n'a pas modifié la
relation contractuelle entre locataire et sous-locataire (cf. DESCHENAUX/
STEINAUER/BADDELEY, Les effets du mariage, n. 719 et 721, p. 300). Ce n'est
qu'en cas de divorce que le juge peut attribuer à l'un des conjoints les droits
et obligations résultant du (sous-)bail (cf. art. 121 al. 1 CC).
Par ailleurs, il n'est pas contesté que la sous-location litigieuse n'a pas été
autorisée, la locataire n'ayant pas informé la bailleresse à ce sujet. Cette
constatation du jugement de première instance n'est pas remise en cause dans
l'arrêt cantonal, qui part bien de la prémisse selon laquelle la sous-location
débutant le 1^er avril 1999 a été "effectuée sans autorisation préalable du
bailleur".

2.2 Le congé litigieux est fondé sur l'art. 257f al. 3 CO. Cette disposition
permet notamment au bailleur de résilier un bail d'habitation dans un délai de
trente jours pour la fin d'un mois lorsque le locataire, malgré un
avertissement écrit, persiste à enfreindre son devoir de diligence de manière à
rendre le maintien du bail insupportable pour son cocontractant ou les
habitants de l'immeuble.
Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a rappelé qu'une sous-location sans
le consentement du bailleur - notamment lorsque le locataire s'abstient de
demander l'autorisation de sous-louer - pouvait justifier une résiliation
anticipée du bail selon l'art. 257f al. 3 CO. Le seul fait de ne pas requérir
le consentement du bailleur ne suffit toutefois pas à justifier un congé
anticipé, sans avertissement préalable. Pour respecter la condition de la
protestation prescrite à l'art. 257f al. 3 CO, le bailleur qui apprend que
l'objet remis à bail est sous-loué sans son consentement, doit inviter le
locataire, par écrit, à se conformer aux exigences légales, en l'enjoignant à
mettre un terme à la sous-location ou en protestant contre l'absence de demande
d'autorisation. Si le bailleur choisit la première injonction, le preneur a
tout de même la possibilité de requérir le consentement de son cocontractant,
qui peut être donné après coup. Si le locataire ne réagit pas à l'avertissement
écrit du bailleur, un congé anticipé sera fondé, en tout cas, lorsqu'un examen
rétrospectif des faits permet de conclure que le bailleur aurait disposé d'un
motif valable au sens de l'art. 262 al. 2 CO pour s'opposer à la sous-location.
Dans ce cas, l'exigence du caractère insupportable du maintien du contrat pour
le bailleur posée à l'art. 257f al. 3 CO n'a pas de portée indépendante (ATF
134 III 300 consid. 3.1 et 3.2).
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2.3 En l'espèce, la bailleresse, représentée par la gérance, a protesté contre
la sous-location non autorisée une première fois dans sa lettre du 19 août
2005, puis par le pli recommandé du 7 octobre 2005 mettant en demeure la
locataire de réintégrer le logement loué. L'intimée n'a pas réagi à cette
dernière missive. Le 28 août 2005, elle avait répondu à la première mise en
demeure en admettant avoir sous-loué l'appartement à son fils à partir du 1^er
avril 1999 et en précisant avoir demandé à la régie le transfert du bail à sa
belle-fille lorsqu'elle avait pris connaissance du jugement sur mesures
protectrices de l'union conjugale. En revanche, la locataire n'a pas requis,
après coup, le consentement de la bailleresse pour la sous-location à son fils;
elle n'a pas non plus demandé l'autorisation préalable de sous-louer dorénavant
l'appartement à sa belle-fille. Il s'avère ainsi qu'au moment où la résiliation
anticipée a été signifiée, la recourante avait protesté valablement par écrit
contre la sous-location non autorisée et que la locataire n'avait pas mis fin à
cette sous-location, ni même demandé le consentement a posteriori de la
bailleresse.

2.4 Examinant si la recourante aurait été en droit de s'opposer à la
sous-location, la cour cantonale a nié l'existence d'inconvénients majeurs pour
la bailleresse au motif que celle-ci n'avait pas démontré un besoin d'attribuer
le logement en cause à une autre personne que le sous-locataire actuel. La
question n'est toutefois pas là, dès lors que la recourante faisait valoir, à
titre d'inconvénient majeur, l'absence de volonté de l'intimée de réintégrer un
jour le logement loué. Or, ce point est juridiquement pertinent. En effet, si
le locataire a perdu toute idée de reprendre un jour l'usage de la chose louée
et qu'il a procédé en réalité à une substitution de locataires par la voie
détournée de la sous-location, il y a abus de droit (art. 2 CC) et le preneur
ne saurait se prévaloir de son droit de sous-louer (cf. arrêts 4C.199/1994 du
11 octobre 1994, consid. 4c, publié in SJ 1995 p. 227; 4C.124/1999 du 6 octobre
1999, consid. 4a, b et c; 4C.155/2000 du 30 août 2000, consid. 2b et c, publié
in SJ 2001 I p. 17).

2.5 A l'époque de la résiliation, l'intimée sous-louait l'appartement à son
fils depuis près de sept ans. Dans sa réponse du 28 août 2005 à la régie, elle
déclare avoir demandé à celle-ci, au moment où elle a quitté le logement en
avril 1999, le transfert du bail à B. Dans la même lettre, elle précise que,
lorsqu'elle a appris l'attribution judiciaire du logement à sa belle-fille,
elle a tout de suite demandé à la gérance si le bail pouvait être transféré à
C.
BGE 134 III 446 S. 451
Le transfert de bail et la sous-location se distinguent notamment par une
intention différente du locataire. Par la sous-location, le locataire veut
toujours revendiquer l'usage de la chose et disposer de son droit d'usage alors
que, par le transfert, il veut au contraire remettre son droit d'usage à un
tiers et se libérer en même temps du bail (arrêt précité du 6 octobre 1999,
consid. 4a). Ainsi, lorsqu'elle prétend avoir demandé le transfert du bail à
son fils, puis à sa belle-fille, la locataire démontre que son intention
n'était pas de réintégrer un jour ou l'autre l'appartement en cause, mais bien
de se libérer définitivement des obligations résultant du bail. Comme aucun
transfert du bail, avec l'accord de la bailleresse, n'a eu lieu, la
sous-location à B., représenté ensuite par son épouse, consistait en réalité
pour la locataire à laisser indéfiniment l'usage de la chose louée à un membre
de sa famille. Ce faisant, l'intimée a utilisé la sous-location dans un but qui
lui est étranger, soit la substitution de locataires. Or, lorsqu'un preneur
voit son bail résilié de manière anticipée en raison d'une sous-location non
autorisée, il ne saurait contester le congé en se prévalant d'un droit de
sous-louer exercé en violation des règles de la bonne foi. En d'autres termes,
la bailleresse aurait pu, en l'espèce, s'opposer à une sous-location utilisée
dans un but - illégitime - de substitution de locataires. Il s'ensuit que la
résiliation anticipée signifiée le 23 mars 2006 pour le 31 mai 2006 est
valable.