Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 134 III 218



Urteilskopf

134 III 218

38. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause X. contre
Mercedes-Benz Suisse SA et Daimler AG (recours en matière civile)
4A_432/2007 du 8 février 2008

Regeste

Örtliche Zuständigkeit; mit Verbrauchern abgeschlossene Verträge (Art. 13 ff.
LugÜ); Garantie des Herstellers. Die Garantie des Herstellers führt nicht zum
Entstehen gegenseitiger Verpflichtungen zwischen dem Hersteller und irgendeinem
Erwerber des Fahrzeuges. Sie begründet daher keinen Dienstleistungsvertrag im
Sinne von Art. 13 Abs. 1 Ziff. 3 LugÜ, wonach der Verbraucher gemäss Art. 14
Abs. 1 LugÜ an seinem Wohnort Klage einreichen könnte (E. 3).

Sachverhalt ab Seite 219

BGE 134 III 218 S. 219
A. Le 8 décembre 2004, A. SA, à Genève, a vendu à X. une voiture de marque
Mercedes-Benz, modèle CL 600, mise en circulation le 10 novembre 2003 et dont
le compteur affichait un peu plus de 20'000 kilomètres. Le prix a été fixé à
191'300 fr. Le contrat excluait toute garantie de la part du vendeur. Un
"carnet de maintenance avec MobiloLife Mercedes-Benz", délivré par
DaimlerChrysler AG, à Stuttgart (Allemagne), accompagnait le véhicule
d'occasion; le service "MobiloLife" offre notamment une assistance en cas de
panne ou de problème de démarrage, le remorquage jusqu'à l'atelier
Mercedes-Benz le plus proche et une voiture de remplacement pendant une durée
de réparation de cinq jours au maximum. Par ailleurs, la voiture était
garantie, sous l'appellation Mercedes-Swiss- Integral MSI, jusqu'à 100'000
kilomètres ou durant trois ans par DaimlerChrysler Schweiz AG, à Schlieren,
importateur pour la Suisse des véhicules de marque Mercedes-Benz.
Assez rapidement, X. s'est plaint de défauts, en particulier de vibrations,
auprès du concessionnaire Mercedes-Benz, à Genève. En juillet 2005, il s'est
adressé au service après-vente de DaimlerChrysler Schweiz AG qui, après avoir
testé la voiture, a contesté tout problème technique.

B. Le 9 juin 2006, X. a introduit devant le Tribunal de première instance du
canton de Genève, lieu de son domicile, une action en garantie contre
DaimlerChrysler Schweiz AG et contre DaimlerChrysler AG, ainsi qu'une action en
paiement dirigée uniquement contre la première citée. D'une part, ses
conclusions tendaient à ce que les défenderesses soient condamnées à réparer
les défauts du véhicule, plus précisément le problème de vibration, le bruit
d'air du côté conducteur et le défaut de la pompe de direction ou, pour le cas
où les défauts ne seraient pas réparables, à ce qu'elles soient condamnées à
lui livrer un véhicule de remplacement du même modèle ou, en cas
d'impossibilité, d'un modèle équivalent. D'autre part, le demandeur concluait à
ce que DaimlerChrysler Schweiz AG soit condamnée à lui verser les sommes de 736
fr. et de 6'548 fr. 25 à titre de dommages-intérêts, ainsi qu'à procéder à un
nettoyage complet du véhicule et à réparer les jantes.
DaimlerChrysler Schweiz AG et DaimlerChrysler AG ont soulevé une exception
d'incompétence à raison du lieu.
Par jugement du 21 décembre 2006, le tribunal a fait droit à l'exception et
déclaré la demande irrecevable.
BGE 134 III 218 S. 220
Statuant le 14 septembre 2007 sur appel de X., la Chambre civile de la Cour de
justice du canton de Genève a confirmé le jugement de première instance.

C. X. interjette un recours en matière civile. Il conclut à l'annulation de
l'arrêt cantonal et à ce que les tribunaux genevois soient déclarés "compétents
pour recevoir la demande en paiement dirigée (...) contre DaimlerChrysler
Schweiz AG et DaimlerChrysler AG".
Le 19 octobre 2007, DaimlerChrysler AG a changé sa raison sociale en Daimler
AG. Le 21 décembre 2007, DaimlerChrysler Schweiz AG a changé la sienne en
Mercedes-Benz Suisse SA.
Mercedes-Benz Suisse SA (l'intimée 1) et Daimler AG (l'intimée 2) proposent le
rejet du recours.
Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

Extrait des considérants:

3. Le recourant se plaint d'une violation de la Convention de Lugano du 16
septembre 1988 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions
en matière civile et commerciale (Convention de Lugano ou CL; RS 0.275.11). Il
fait valoir que les tribunaux genevois sont compétents pour connaître de son
action contre l'intimée 2 sur la base de l'art. 14 al. 1 CL en liaison avec
l'art. 13 al. 1 ch. 3 CL, qu'il interprète à la lumière de la jurisprudence
rendue à propos de l'art. 5 ch. 1 CL.

3.1 La Convention de Lugano est entrée en vigueur le 1 ^er janvier 1992 pour la
Suisse et le 1 ^er mars 1995 pour l'Allemagne. Aux termes de l'art. 2 al. 1 CL,
les personnes domiciliées ou ayant leur siège sur le territoire d'un Etat
contractant sont en principe attraites devant les juridictions de cet Etat. Il
y a toutefois des exceptions à la règle.
La section 2 de la Convention de Lugano (art. 5 ss) prévoit des compétences
spéciales. Dans certains cas, le défendeur domicilié sur le territoire d'un
Etat contractant peut être attrait dans un autre Etat contractant; c'est
notamment le cas en matière contractuelle (art. 5 ch. 1 CL).
La section 4 de la Convention de Lugano (art. 13 ss) règle la compétence en
matière de contrats conclus par les consommateurs. Le contrat conclu par un
consommateur est celui passé par une
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personne pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité
professionnelle (art. 13 al. 1 CL). Lorsqu'un litige survient en rapport avec
l'un des contrats énumérés à l'art. 13 al. 1 ch. 1, 2 ou 3 CL, la compétence
est déterminée par la section 4, sans préjudice des art. 4 et 5 ch. 5 CL, ce
qui donne en particulier au consommateur la possibilité d'ouvrir action devant
les tribunaux de l'Etat contractant sur le territoire duquel il est domicilié
(art. 14 al. 1 CL). L'un des contrats concernés est celui ayant pour objet une
fourniture de services ou d'objets mobiliers corporels si sa conclusion a été
précédée dans l'Etat du domicile du consommateur d'une proposition spécialement
faite ou d'une publicité et que le consommateur a accompli dans cet Etat les
actes nécessaires à la conclusion du contrat (art. 13 al. 1 ch. 3 let. a et b
CL).

3.2 En l'espèce, la Chambre civile a constaté que cinq contrats étaient en jeu,
passés respectivement entre le fabricant et l'importateur suisse de la voiture,
entre l'importateur et le vendeur initial du véhicule, entre ce vendeur et le
premier acheteur, entre ce dernier et A. SA, enfin entre le recourant et A. SA,
qui a vendu le véhicule d'occasion sans cession de garantie et dont il n'est
pas allégué qu'elle est une agence Mercedes-Benz. Pour la cour cantonale, il
n'y a ainsi pas de lien contractuel direct entre le recourant et l'intimée 2,
mais une "chaîne" de contrats, qui ne donne pas lieu à l'application des art.
13 ss CL.
Le recourant objecte pour l'essentiel que la garantie d'usine ou
garantie-clients donnée par l'intimée 2, par laquelle elle s'oblige à réparer
les véhicules défectueux, est un contrat sui generis unilatéral, passé avec
tout acquéreur d'un véhicule fabriqué par elle. En communiquant la garantie
rattachée à la voiture, l'intimée 2 se serait librement engagée, à l'égard de
tout acquéreur, à respecter les obligations découlant de ladite garantie. Le
recourant en déduit qu'il s'agit d'un litige en matière de contrat au sens de
l'art. 13 CL.

3.3 Afin de garantir une jurisprudence cohérente, l'art. 1 du Protocole n^o 2
sur l'interprétation uniforme de la Convention de Lugano (RS 0.275.11) prévoit
que les tribunaux de chaque Etat contractant tiennent compte des principes
définis par toute décision pertinente rendue par les tribunaux des autres Etats
contractants concernant des dispositions de la convention. En raison de
l'étroite parenté existant entre la Convention de Lugano et la Convention de
Bruxelles du 27 septembre 1968, l'art. 2 du Protocole n° 2 institue par
BGE 134 III 218 S. 222
ailleurs un système d'échange d'informations portant également sur les
décisions rendues par la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) en
application de la Convention de Bruxelles. Du reste, dans une déclaration des
représentants des Gouvernements de l'Association Européenne de Libre-Echange
(AELE) signataires de la Convention de Lugano, ces Etats ont considéré
approprié que leurs tribunaux, en interprétant la Convention de Lugano,
tiennent compte des principes contenus dans la jurisprudence de la CJCE et des
tribunaux des Etats membres des Communautés européennes relative à la
Convention de Bruxelles (ATF 131 III 398 consid. 4; ATF 129 III 626 consid.
5.2.1 p. 631; ATF 124 III 382 consid. 6c p. 394/395; cf. KATHRIN KLETT, Die
bundesgerichtliche Rechtsprechung zum Lugano-Übereinkommen, in La Convenzione
di Lugano nella pratica forense e nel suo divenire, Bâle 2004, p. 160).

3.4 La réglementation des art. 13 ss CL est exclusive pour les litiges se
rapportant aux contrats conclus par les consommateurs. En particulier, les art.
2 et 5 CL ne s'appliquent pas, à l'exception des dispositions auxquelles il est
renvoyé expressément (Jan Kropholler, Europäisches Zivilprozessrecht, 8 ^e éd.,
Francfort 2005, n. 1 ad remarques préliminaires ad art. 8;Geimer/Schütze,
Europäisches Zivilverfahrensrecht, 2 ^e éd., Munich 2004, n. 3 ad art. 15;
HÉLÈNE GAUDEMET-TALLON, Compétence et exécution des jugements en Europe, 3 ^e
éd., Paris 2002, n. 264, p. 214).
En l'espèce, il n'est pas contesté que le recourant est un consommateur au sens
de l'art. 13 CL.

3.5 L'art. 13 CL comprend la formule "en matière de contrat". Pour sa part,
l'art. 5 ch. 1 CL contient les termes "en matière contractuelle". Selon la
jurisprudence de la CJCE, ces notions doivent être interprétées de façon
autonome, en se référant principalement au système et aux objectifs de la
convention, en vue d'assurer l'application uniforme de celle-ci dans tous les
Etats contractants (arrêt du 20 janvier 2005, Petra Engler contre Janus Versand
GmbH, C-27/02, Rec. 2005, p. I-481, point 33 et les arrêts cités; cf. également
ATF 122 III 298 consid. 3a). La "matière contractuelle" réservée par l'art. 5
ch. 1 CL suppose un engagement librement assumé d'une partie envers une autre,
même s'il n'y a pas conclusion d'un contrat (arrêt Engler précité, points 45 et
50); elle est interprétée de manière large (même arrêt, point 48; Yves
Donzallaz, La Convention de Lugano, vol. III, n. 4420 ss, 4531). En revanche,
l'action de nature contractuelle au sens de l'art. 13 CL s'interprète de
manière
BGE 134 III 218 S. 223
restrictive afin de limiter les procès au for du demandeur (forum actoris; art.
14 CL), qui constitue une exception au principe général du for du défendeur
posé à l'art. 2 al. 1 CL; selon les termes mêmes de la CJCE, "les règles de
compétence spécifiques prévues aux articles 13 à 15 [CL] doivent donner lieu à
une interprétation stricte, qui ne saurait aller au-delà des hypothèses
expressément envisagées par ladite convention" (arrêt Engler précité, points 42
et 43 et les arrêts cités; cf. également ATF 133 III 295 consid. 7.2 p. 300;
Kropholler, op. cit., n. 3 ad art. 15 et n. 6 ad art. 5; Geimer/ SCHÜTZE, op.
cit., n. 5 ad art. 15). Contrairement à ce que le recourant soutient, la notion
de contrat au sens de l'art. 13 CL ne coïncide pas avec celle de "matière
contractuelle" de l'art. 5 ch. 1 CL. Selon la jurisprudence de la CJCE, l'art.
13 al. 1 ch. 3 CL invoqué par le recourant s'applique aux conditions suivantes:
le demandeur doit avoir qualité de consommateur final privé, non engagé dans
des activités commerciales ou professionnelles; un contrat a été conclu entre
ce consommateur et le vendeur professionnel, qui a pour objet une fourniture
d'objets mobiliers corporels ou de services; ce contrat a donné naissance à des
obligations réciproques et interdépendantes entre les deux parties; les deux
conditions spécifiques énumérées à l'art. 13 al. 1 ch. 3 let. a et b CL sont
remplies (arrêt Engler précité, point 34).

3.6 En l'espèce, il n'y a pas eu conclusion d'un contrat de vente entre le
recourant et l'intimée 2. Le seul contrat qui peut être envisagé entre ces deux
parties est un contrat sui generis par lequel le fabricant se serait engagé
envers tout acquéreur de la voiture de marque Mercedes-Benz à réparer le
véhicule gratuitement à certaines conditions; l'acheteur aurait accepté cette
offre tacitement (art. 6 CO), dès lors qu'elle ne présentait que des avantages
pour lui. Un tel contrat de garantie serait unilatéral puisqu'une seule partie
s'oblige, l'autre partie se bornant à accepter (ENGEL, Traité des obligations
en droit suisse, 2 ^e éd., p. 160). Il n'en découlerait donc manifestement pas
des obligations réciproques et interdépendantes. Faute d'engagements
synallagmatiques des deux parties, un tel acte juridique ne constitue pas, en
tout état de cause, un contrat au sens de l'art. 13 al. 1 ch. 3 CL, tel que
défini par la jurisprudence de la CJCE.
Comme la cour cantonale l'a admis à bon droit, le recourant ne peut invoquer
les art. 13 ss CL pour ouvrir action contre l'intimée 2, dont le siège social
est en Allemagne, devant les tribunaux de son domicile en Suisse.