Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 133 V 239



Urteilskopf

133 V 239

  32. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit social dans la cause
Société M. de pharmacie, Association des Pharmacies du canton Y. et C.
contre Office fédéral de la santé publique ainsi que Commission fédérale de
recours en matière de liste des spécialités (recours de droit administratif)
  K 45/05 du 24 janvier 2007

Regeste

  Art. 48 lit. a VwVG, Art. 103 lit. a OG, Art. 52 KVG;
Verwaltungsgerichtsbeschwerde, Beschwerdeberechtigung der Apotheker,
Festsetzung der Medikamentenpreise, Spezialitätenliste.

  Sind die Apotheker durch die Festsetzung der Medikamentenpreise in
direkter und konkreter Weise in ihren eigenen wirtschaftlichen Aktivitäten
betroffen? Frage offengelassen (E. 8.3).

  In casu sind der Apothekerverband M. und der Apothekerverein des Kantons
Y. nicht berechtigt, Beschwerde gegen die Festsetzung der Medikamentenpreise
zu führen, da die Beschwerde nicht darlegt, inwiefern die Mehrheit oder eine
Grosszahl der Mitglieder vom angefochtenen Entscheid betroffen seien (E.
9.1-9.6).

  Aus denselben Gründen ist auch die beschwerdeführende Apothekerin nicht
beschwerdeberechtigt (E. 9.7).

Sachverhalt

  A.- Le 18 août 2004, l'Office fédéral de la santé publique (ci-après:
OFSP) a pris une série de décisions par lesquelles il a modifié le prix de
73 préparations figurant sur la liste des spécialités (ci-après: LS). La
modification devait entrer en vigueur le 1er septembre 2004.

  B.- La Société M. de pharmacie, l'Association des pharmacies du canton Y.
et C., pharmacienne, ont recouru contre ces décisions devant la Commission
fédérale de recours en matière de liste des spécialités, en requérant leur
annulation ainsi que le renvoi de la cause à l'OFSP afin que celui-ci fixe à
nouveau le prix des préparations concernées en tenant mieux compte des frais
de distribution incombant aux pharmaciens.

  Statuant le 28 février 2005, la commission a déclaré le recours
irrecevable, faute d'intérêt digne de protection des recourantes.

  Par un mémoire commun, la Société M. de pharmacie, l'Association des
pharmacies du canton Y. et C. ont formé un recours de droit administratif
contre ce jugement dont elles requièrent l'annulation, en concluant, sous
suite de frais et dépens, au renvoi de la cause aux premiers juges afin
qu'ils entrent en matière et se prononcent sur le fond du litige. L'OFSP
conclut au rejet du recours. Le recours a été rejeté.

Auszug aus den Erwägungen:

                        Extrait des considérants:

Erwägung 1

  1.  La loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est
entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 p. 1205, 1242). L'acte
attaqué ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ
(art. 132 al. 1 LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395).

Erwägung 2

  2.  Les décisions concernant l'admission sur la LS (art. 52 al. 1 let. b
LAMal) peuvent faire l'objet d'un recours devant la Commission fédérale de
recours en matière de liste des spécialités (art. 90 LAMal dans sa version
en vigueur jusqu'au 31 décembre 2006). Selon l'art. 91 LAMal, les jugements
rendus par la Commission fédérale de recours en matière de liste des
spécialités peuvent être attaquées devant le Tribunal fédéral des
assurances.

Erwägung 3

  3.  Le litige ne concerne pas des prestations d'assurances (art. 132 OJ
dans sa version en vigueur jusqu'au 30 juin 2006). Lorsque le recours est
dirigé, comme en l'occurrence, contre la décision d'une autorité judiciaire,
le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans la décision, sauf
s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis au
mépris de règles essentielles de procédure (art. 104 let. b et 105 al. 2 OJ;
ATF 128 II 145 consid. 1.2.1 p. 150; 126 II 196 consid. 1 p. 198). En outre,
le Tribunal fédéral ne peut pas revoir l'opportunité de la décision
entreprise, le droit fédéral ne prévoyant pas un tel examen en la matière
(art. 104 let. c ch. 3 OJ). Par contre, il n'est pas lié par les motifs que
les parties invoquent et peut admettre le recours pour d'autres raisons que
celles avancées par le recourant ou, au contraire, confirmer la décision
attaquée pour d'autres motifs que ceux retenus par l'autorité intimée (art.
114 al. 1 in fine OJ; ATF 127 II 264 consid. 1b p. 268; 125 II 497 consid.
1b/aa p. 500).

Erwägung 4

  4.  Par ailleurs, les recourantes ont un intérêt digne de protection, au
sens de l'art. 103 let. a OJ, à demander l'annulation de la décision
attaquée afin d'obtenir qu'il soit statué sur le fond de la cause

(cf. ATF 124 II 499 consid. 1b et les arrêts cités p. 502), et cela
indépendamment et sans préjudice du motif d'irrecevabilité retenu en
procédure de première instance qui constitue l'objet de la contestation
devant le Tribunal fédéral, à l'exclusion du fond de l'affaire.

Erwägung 5

  5.  La question est de savoir si la commission a ou non correctement
appliqué le droit en refusant d'entrer en matière sur le recours.

Erwägung 6

  6.

  6.1  La question de la qualité pour recourir auprès de la Commission
fédérale de recours en matière de liste des spécialités doit être tranchée
en regard des dispositions prévues en la matière par la loi fédérale sur la
procédure administrative (PA; 172.021), en particulier l'art. 48 PA (dans sa
version en vigueur jusqu'au 31 décembre 2006). Selon cette disposition, a
qualité pour recourir quiconque est touché par la décision et a un intérêt
digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée (let. a); toute
autre personne, organisation ou autorité que le droit fédéral autorise à
recourir (let. b). En l'espèce, aucune norme spéciale du droit fédéral ne
contient une autorisation de ce genre pour ce qui est de la Commission
fédérale de recours en matière de liste des spécialités, de sorte que la
qualité pour recourir doit être examinée au regard de l'art. 48 let. a PA.

  6.2  La teneur de cette disposition étant à peu près identique à celle de
l'art. 103 let. a OJ, qui détermine la qualité pour recourir devant le
Tribunal fédéral par la voie du recours de droit administratif, ces deux
dispositions légales s'interprètent de la même manière (ATF 127 II 32
consid. 2d p. 38; 124 II 499 consid. 3b p. 504; 123 II 376 consid. 2 et les
arrêts cités p. 378). La jurisprudence considère comme intérêt digne de
protection, au sens de cette disposition, tout intérêt pratique ou juridique
à demander la modification ou l'annulation de la décision attaquée que peut
faire valoir une personne atteinte par cette dernière. L'intérêt digne de
protection consiste ainsi en l'utilité pratique que l'admission du recours
apporterait au recourant en lui évitant de subir un préjudice de nature
économique, idéale, matérielle ou autre que la décision attaquée lui
occasionnerait. L'intérêt doit être direct et concret; en particulier, la
personne doit se trouver dans un rapport suffisamment étroit avec la
décision; tel n'est pas le cas de celui qui n'est atteint que de manière
indirecte ou médiate (ATF 131 II 361 consid. 1.2 p. 365, 587 consid. 2.1 p.
588, 649 consid. 3.1 p. 651; 131 V 298 consid. 3 p. 300; 130 V 196 consid. 3
p. 202, 514 consid. 3.1 p. 515, 560 consid. 3.3 p. 563; 127 V 1 consid. 1b
p. 3, 80 consid. 3a/aa p. 82).

  6.3  Le recours d'un particulier formé dans l'intérêt général ou dans
l'intérêt d'un tiers est exclu. Cette exigence a été posée de manière à
empêcher l'action populaire au niveau de la juridiction administrative
fédérale, notamment quand un particulier conteste une autorisation donnée à
un autre particulier (cf. ATF 131 II 649 consid. 3.1 et les références p.
651). D'une manière générale, la jurisprudence et la doctrine n'admettent
que de manière relativement stricte la présence d'un intérêt propre et
direct lorsqu'un tiers désire recourir contre une décision dont il n'est pas
le destinataire (ATF 131 II 649 consid. 3.1 p. 652; 124 II 499 consid. 3b et
les références citées p. 504; 131 V 298 consid. 3 p. 300).

  6.4  Une association n'a qualité pour recourir à titre personnel que
lorsqu'elle remplit les conditions posées par les art. 48 let. a PA ou 103
let. a OJ. Toutefois, conformément à la jurisprudence, sans être elle-même
touchée par la décision entreprise, une association peut être admise à agir
par la voie du recours de droit administratif (nommé alors recours
corporatif ou égoïste) pour autant, a) qu'elle ait pour but statutaire la
défense des intérêts dignes de protection de ses membres, b) que ces
intérêts soient communs à la majorité ou au moins à un grand nombre d'entre
eux et, enfin, c) que chacun de ceux-ci ait qualité pour s'en prévaloir à
titre individuel (ATF 121 II 39 consid. 2d/aa p. 46; 120 Ib 59 consid. 1a et
les arrêts cités p. 61). En revanche, elle ne peut prendre fait et cause
pour un de ses membres ou pour une minorité d'entre eux (PIERRE MOOR, Droit
administratif, 2e éd., Berne 2002, vol. II, p. 643 s.).

Erwägung 7

  7.

  7.1  Les premiers juges dénient aux recourantes la qualité pour recourir,
au motif que les décisions litigieuses ne les touchent pas plus que les
autres intermédiaires pratiquant l'assurance-maladie sociale. Ils exposent
qu'il existe un intérêt public à restreindre les droits des administrés dans
les procédures d'admission des médicaments à la LS - y compris lors de
l'adaptation de leur prix -, sous peine d'ouvrir accès à l'action populaire.
Ils considèrent que les différents groupes d'intérêts opérant dans le
domaine de la santé publique - au nombre desquels figurent précisément les
pharmaciens - sont représentés au sein de la Commission fédérale des
médicaments et que leur avis est pris en considération lors de l'élaboration
des décisions de l'OFSP, de sorte qu'il serait superflu d'accorder en sus à
leurs membres la qualité pour recourir contre ces dernières.

  7.2  Contestant ce point de vue, les recourantes sont d'avis que les
pharmaciens, s'agissant des frais de distribution, sont concernés par la
détermination du prix des médicaments de la même manière que les fabricants
en regard du prix de fabrique. Aussi et dès lors que la qualité pour
recourir auprès de la commission est reconnue à ces derniers s'agissant du
prix "ex factori", elle doit l'être également aux pharmaciens en regard de
la part du prix afférente aux "frais de distribution". Dans cette stricte
mesure, les pharmaciens sont touchés plus que quiconque par les décisions
litigieuses, de sorte qu'il convient de leur reconnaître la qualité pour
recourir contre celles-ci. En juger autrement priverait les pharmaciens de
l'accès à un tribunal impartial et indépendant en violation de l'art. 6
CEDH.

Erwägung 8

  8.

  8.1  Selon l'art. 25 al. 1 LAMal, l'assurance obligatoire des soins prend
en charge les coûts des prestations qui servent à diagnostiquer ou à traiter
une maladie et ses séquelles. Celles-là doivent être efficaces, appropriées
et économiques; l'efficacité doit être démontrée selon des méthodes
scientifiques (art. 32 al. 1 LAMal). Les fournisseurs de prestations
établissent leurs factures sur la base de tarifs ou de prix (art. 43 al. 1
LAMal). Les tarifs et les prix sont fixés par convention entre les assureurs
et les fournisseurs de prestations (convention tarifaire) ou, dans les cas
prévus par la loi, par l'autorité compétente (art. 43 al. 4 LAMal). Les
parties à la convention et les autorités compétentes veillent à ce que les
soins soient appropriés et leur qualité de haut niveau, tout en étant le
plus avantageux possible (art. 43 al. 6 LAMal).

  Une liste avec prix des préparations pharmaceutiques et des médicaments
confectionnés (liste des spécialités) est établie par l'OFSP après
consultation de la Commission fédérale des médicaments et conformément aux
principes des art. 32 al. 1 et 43 al. 6 LAMal (art. 52 al. 1 let. b 1re
phrase LAMal en corrélation avec les art. 34 et 37e OAMal). Les fournisseurs
de prestations doivent respecter les tarifs et les prix fixés par l'autorité
compétente; ils ne peuvent exiger de rémunération plus élevée pour des
prestations fournies en application de la présente loi (protection
tarifaire; art. 44 al. 1 1re phrase LAMal).

  8.2  La liste des spécialités contient les prix maximums déterminants pour
la remise des médicaments par les pharmaciens, les médecins, les hôpitaux et
les établissements médico-sociaux (art. 67 al. 1 OAMal). Le prix maximum se
compose du prix de fabrique et

de la part relative à la distribution (art. 67 al. 1bis OAMal). Le prix de
fabrique rémunère les prestations, redevances comprises, du fabricant et du
distributeur jusqu'à la sortie de l'entrepôt, en Suisse (art. 67 al. 1ter
OAMal). La part relative à la distribution rémunère les prestations
logistiques, en particulier les coûts d'exploitation et d'investissement
liés au transport, au stockage, à la remise et à l'encaissement (art. 67 al.
1quater OAMal). La part relative à la distribution pour les médicaments qui
ne sont remis que sur prescription, selon la classification de Swissmedic,
se compose d'une prime fixée en fonction du prix de fabrique (prime relative
au prix) et d'une prime par emballage (art. 35a al. 1 OPAS). La prime
relative au prix selon l'al. 1 prend notamment en compte les coûts en
capitaux résultant de la gestion des stocks et des avoirs non recouvrés
(art. 35a al. 2 OPAS). La prime par emballage prend notamment en compte les
frais de transport, d'infrastructure et de personnel. Elle peut être
échelonnée selon le prix de fabrique (art. 35a al. 3 OPAS). La part relative
à la distribution pour les médicaments qui sont remis sans prescription,
selon la classification de Swissmedic, se compose d'une prime fixée en
fonction du prix de fabrique (prime relative au prix); celle-ci prend en
compte tous les coûts rémunérés par la part relative à la distribution (art.
35a al. 4 OPAS). L'OFSP peut fixer la part relative à la distribution selon
les fournisseurs de prestations et les catégories de remise; il peut en
outre tenir compte de situations de distribution particulières; il entend
les associations concernées avant de fixer la part relative à la
distribution (art. 35a al. 5 OPAS).

  8.3  Il ressort de ces dispositions que le prix des médicaments est
fonction de deux éléments principaux qui forment au final un ensemble
composite. Comme le relève la commission de recours, le prix des médicaments
touche nombre d'acteurs du droit de l'assurance-maladie, qui peuvent avoir
un intérêt économique à sa fixation. Il en va ainsi des assureurs, des
hôpitaux, des établissements médico-sociaux. De même, les assurés peuvent
avoir un intérêt de cette nature. Pour autant, à la différence de ces
acteurs ou des patients, le pharmacien est touché de manière directe et
concrète, en tant que distributeur, dans son activité économique propre,
s'agissant de la part relative à la distribution. Cette part fait partie
intégrante de la marge du pharmacien (différence entre le prix du médicament
selon la liste des spécialités et le prix d'achat facturé par le grossiste
ou le fabricant). La part relative à la distribution a une incidence directe
sur la rémunération du pharmacien, selon la manière

dont elle est fixée. On ne saurait donc nier d'emblée la qualité pour
recourir à un pharmacien ou à une association de pharmaciens au seul motif
qu'ils ne sont pas plus touchés que d'autres personnes ou d'intervenants et
que la reconnaissance de cette qualité ouvrirait la voie à une action
populaire.

  Quoi qu'il en soit, la question soulevée ici peut demeurer ouverte, car la
qualité pour recourir devait de toute façon être niée pour les motifs
ci-après exposés.

Erwägung 9

  9.

  9.1  Les statuts de la Société M. de pharmacie et de l'Association des
pharmacies du canton Y. ont notamment pour but la défense des intérêts de la
pharmacie. En tant qu'associations, elles ne sont elles-mêmes pas
directement intéressées à l'issue du litige. Il s'agit donc de savoir si les
conditions énumérées sous let. b et c (supra consid. 6.4) ci-dessus sont
remplies.

  9.2  Dans un recours de droit administratif où seule est en jeu la qualité
pour agir, une association recourante doit présenter une argumentation
topique (art. 108 al. 2 OJ). Il lui appartient de donner des indications
précises sur le nombre de ses membres et expliquer en quoi la majorité ou un
grand nombre d'entre eux seraient touchés par la décision litigieuse. Il
incombe en effet à l'association d'alléguer les faits qu'elle considère
comme propres à fonder sa qualité pour recourir lorsqu'ils ne ressortent pas
à l'évidence de la décision attaquée ou du dossier (arrêt 1A.47/2002 du 16
avril 2002, consid. 3.4, Comité de citoyennes et citoyens pour un choix
démocratique et raisonnable de stade).

  9.3  Les associations recourantes contestent de manière générale les prix
fixés dans la liste des spécialités. S'agissant de la part de distribution,
elles allèguent que si les prix sont mal fixés, ils sont de nature à
favoriser indûment certains pharmaciens, car cette part vient s'ajouter à
leur rémunération proprement dite selon l'art. 25 al. 2 let. h LAMal ou, à
l'inverse à obliger d'autres pharmaciens à prélever sur cette rémunération
pour couvrir leurs frais de distribution. Cela dépend de la composition de
la clientèle du pharmacien et de ses incidences sur les ventes. Les
recourantes invoquent une étude de février 2003 de l'institut CREA de
l'Ecole des hautes études commerciales de l'Université de Lausanne qui
établit que le système adopté par l'OFSP ne permet pas de couvrir dans
certains cas les frais de distribution dès la sortie de fabrique, ou les
couvre à l'excès. La part du grossiste est pratiquement toujours couverte,

alors que la part du pharmacien nécessaire pour payer les frais de
distribution peut être largement couverte ou au contraire ne pas l'être,
selon que l'on a affaire à un distributeur de proximité ou à un distributeur
servant une clientèle de passage, le prix des médicaments vendus jouant un
rôle primordial sur la part de distribution revenant effectivement aux
fournisseurs. Il serait contraire à l'intention du législateur de couvrir
plus largement les frais de distribution dans certains cas et de ne pas le
faire dans d'autres cas. Il existe ainsi d'importantes disparités entre les
pharmaciens selon leurs structures de vente. En outre, ces derniers sont
tributaires de la part que se réservent les grossistes.

  9.4  Il ressort de ces allégués que les pharmaciens ne sont pas touchés de
la même manière dans leur activité commerciale, certains étant plutôt
favorisés tandis que d'autres ne seraient pas en mesure de couvrir leurs
frais de distribution, cela en fonction de la structure de leur clientèle
habituelle. Il n'est pas allégué et il ne ressort pas non plus du dossier
qu'une majorité ou même qu'un nombre important des membres de l'association
et de la société recourantes font partie de cette seconde catégorie. Ce que
contestent en réalité les recourantes, c'est le système général de fixation
des prix qui génère selon eux des disparités, voire des inégalités entre
pharmaciens. On cherche d'ailleurs vainement dans les écritures des
recourantes une argumentation topique en ce qui concerne plus précisément
les médicaments visés par les décisions litigieuses. On ne saurait donc
admettre, sur la base de considérations générales et abstraites, que les
membres aient des intérêts majoritairement - ou du moins en grande partie -
communs à défendre, que ce soit dans la fixation des prix en général ou
relativement au prix des médicaments faisant l'objet des décisions en cause.
Un intérêt qui serait purement virtuel n'est pas suffisant au regard de
l'art. 103 let. a OJ et de l'art. 48 let. a PA.

  9.5  Certes, il résulte de l'étude précitée que le système de fixation des
prix conduit à des marges qui ne sont pas suffisantes dans une majorité des
cas examinés. Toutefois, cette étude se base sur un échantillon de 28
pharmacies des cantons M. et Y., membres de la Société M. de pharmacie et de
l'Association des pharmacies du canton Y., qui ont accepté de répondre aux
questions des auteurs. Ceux-ci reconnaissent que l'échantillon "est un peu
faible du point de vue statistique, bien (qu'il) semble tenir compte de
divers types de pharmacies". Ils admettent que les résultats chiffrés "sont
sujets à caution". Ils notent aussi que les calculs montrent une forte
inégalité

entre les pharmacies, puisque le taux de couverture des charges totales
(pondérées) par la marge se situe dans une fourchette allant de 58 % à 132
%, ce qui conduit à une différence de 74 points en pour cent.

  9.6  Dans ces conditions - et dans la mesure où l'association et la
société recourantes n'ont pas non plus démontré ni même rendu plausible, en
première instance, qu'une partie importante au moins de leurs membres était
objectivement lésée par les décisions litigieuses - le jugement
d'irrecevabilité à leur encontre n'est pas critiquable.

  9.7  Pour les mêmes motifs, le refus d'entrer en matière sur le recours de
C. n'est pas non plus contestable. Celle-ci exploite une pharmacie à A. et
est par ailleurs présidente de la Société M. de pharmacie. Elle n'a pas
déposé de mémoire séparé et le mémoire commun des recourantes ne contient
aucune motivation spécifique à sa situation. Ses motifs se confondent donc
avec ceux de l'association et la société recourantes. A l'instar de ces
dernières, elle s'en prend de manière générale et abstraite au système de
fixation des prix des médicaments, sans indiquer concrètement en quoi elle
est personnellement lésée en tant que distributrice. Elle ne l'a pas
davantage fait en première instance. Les premiers juges n'ont ainsi pas
violé le droit fédéral en lui déniant, à elle aussi, un intérêt digne de
protection à recourir.

Erwägung 10

  10.  Les recourantes se prévalent par ailleurs en vain de l'art. 6 par. 1
CEDH.

  En faisant dépendre la recevabilité du recours d'une association de ce
qu'elle ait pour but statutaire la défense des intérêts dignes de protection
de ses membres, de ce que ces intérêts soient communs à la majorité ou au
moins à un grand nombre d'entre eux et, enfin, de ce que chacun de ceux-ci
ait qualité pour s'en prévaloir à titre individuel, le droit suisse ne
limite pas l'accès à un tribunal à un point tel que le droit s'en trouve
atteint dans sa substance même. Cette limitation est d'autant moins
restrictive qu'elle n'exige pas la démonstration d'un intérêt juridiquement
protégé, mais uniquement d'un intérêt digne de protection. Il en va de même
en ce qui concerne l'exigence d'un intérêt digne de protection du recours
d'un particulier (cf. arrêt 2A.359/2005 du 14 novembre 2005, Association de
la Transformation Laitière Française, avec les références à la jurisprudence
de la Cour européenne des droits de l'homme; cf. également ATF 132 V 299).