Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 133 I 308



Urteilskopf

133 I 308

  31. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause A.A.
et B.A. contre Service cantonal des contributions du canton de Fribourg et
Administration fiscale cantonale genevoise (recours de droit public)
  2P.63/2007 du 21 septembre 2007

Regeste

  Art. 86 Abs. 1 lit. d, 100 Abs. 5 und 132 Abs. 1 BGG; Beschwerdeverfahren
vor dem Bundesgericht in einer Angelegenheit der interkantonalen
Doppelbesteuerung.

  Doppelbesteuerungsbeschwerde, die sich gleichzeitig gegen nach dem 1.
Januar 2007 ergangene Veranlagungen des Kantons Genf und gegen solche des
Kantons Freiburg aus den Jahren 2004 und 2005 richtet. Vergleich zwischen
den Regeln des Bundesrechtspflegegesetzes und des Bundesgerichtsgesetzes
betreffend die Voraussetzung der Ausschöpfung des kantonalen Instanzenzugs
und die Möglichkeit, rechtskräftige Veranlagungsentscheide eines anderen
Kantons mitanzufechten (E. 2). Anwendbares Übergangsrecht (E. 1 und 3) sowie
Auswirkungen auf den konkreten Fall (E. 4).

Sachverhalt

  Les époux A.A. et B.A. sont domiciliés à C. (GE).

  En 1993, A.A. a fait inscrire au registre du commerce du canton de
Fribourg une entreprise individuelle sise à D.

  En 1995, le prénommé a fondé la société anonyme X. SA, dont le siège était
à D. En 1997, cette société a fait inscrire au registre du commerce du
canton de Genève une succursale située à E.

  Selon ses dires, A.A. a exercé jusqu'au 31 décembre 2005 une activité
lucrative indépendante: ses prestations étaient facturées par l'entreprise
individuelle précitée à la société X. SA.

  En 2006, la société X. SA a transféré son siège à E. (GE), tandis que la
succursale était radiée.

  Par décision du 19 décembre 2002, le Service cantonal des contributions du
canton de Fribourg a déterminé les éléments imposables des époux A. et
procédé à leur répartition intercantonale, pour l'impôt cantonal et communal
de la période fiscale 2001. Le revenu de l'activité lucrative de A.A. était
soumis à l'impôt dans le canton de Fribourg.

  Le 25 novembre 2003, l'Administration fiscale cantonale du canton de
Genève a émis un bordereau d'impôt cantonal et communal pour la période
fiscale 2001, où le revenu de l'activité lucrative de A.A. était soumis à
l'impôt dans le canton de Genève. Les époux A. ont formé une réclamation à
l'encontre de cette taxation, en demandant au canton de Genève de tenir
compte de la répartition intercantonale opérée par le canton de Fribourg.

  Par décision du 22 janvier 2004 relative à la période fiscale 2002, le
Service cantonal des contributions du canton de Fribourg a arrêté les
éléments imposables des époux A. et procédé à leur répartition
intercantonale, en soumettant le revenu de l'activité lucrative de A.A. à
l'impôt dans le canton de Fribourg. Cette taxation a fait l'objet d'une
réclamation de la part des époux A., pour le motif que le canton de Genève
n'avait pas admis la répartition intercantonale s'agissant de l'impôt de la
période fiscale 2001.

  Par décision du 20 janvier 2005 relative à la période fiscale 2003, le
Service cantonal des contributions du canton de Fribourg a déterminé les
éléments imposables des époux A. et procédé à leur répartition

intercantonale. Le revenu de l'activité lucrative de A.A. était soumis à
l'impôt dans le canton de Fribourg.

  Au terme d'un échange de vues avec les autorités fiscales genevoises, le
Service des contributions du canton de Fribourg a fait savoir que, dans
l'attente d'une éventuelle requête du contribuable destinée à éviter une
double imposition, il maintenait ses taxations pour les périodes fiscales
2001B, 2002 et 2003.

  Dans un courrier du 30 mars 2007, l'Administration fiscale cantonale du
canton de Genève a fait savoir aux époux A. que l'activité lucrative
indépendante de A.A. était imposable dans le canton de Genève. Elle a joint
les bordereaux de taxation afférents à l'impôt cantonal et communal des
périodes 2002 à 2005, en ajoutant qu'elle statuerait ultérieurement sur la
réclamation relative à la période 2001B.

  Agissant par la voie du recours de droit public, les époux A. demandent au
Tribunal fédéral, principalement, d'annuler les décisions de taxation du
Service cantonal des contributions du canton de Fribourg du 22 janvier 2004
et du 20 janvier 2005 (impôt cantonal et communal des périodes fiscales 2002
et 2003), de dire que l'activité lucrative de A.A. est exclusivement
imposable dans le canton de Genève et d'ordonner que le surplus d'impôt payé
leur soit restitué. A titre subsidiaire, ils demandent d'annuler les
décisions de taxation de l'Administration fiscale cantonale du canton de
Genève du 30 mars 2007 (impôt cantonal et communal des périodes fiscales
2002 et 2003), le tout sous suite de frais et dépens.

  En parallèle, les époux A. ont formé une réclamation à l'encontre des
décisions précitées de l'Administration fiscale cantonale du canton de
Genève (celle-ci étant invitée à surseoir à statuer jusqu'à droit connu dans
la présente procédure de recours), ainsi qu'une réclamation et demande de
reconsidération portant sur celles du Service cantonal des contributions du
canton de Fribourg.

  Il n'a pas été requis d'observations.

  Le Tribunal fédéral a déclaré le recours irrecevable.

Auszug aus den Erwägungen:

                        Extrait des considérants:

Erwägung 1

  1.  Aux termes de l'art. 132 al. 1 de la loi du 17 juin 2005 sur le
Tribunal fédéral (LTF; RS 173.110), cette loi s'applique aux procédures
introduites après son entrée en vigueur, le 1er janvier 2007

(RO 2006 p. 1242); elle ne s'applique aux procédures de recours que si
l'acte attaqué a été rendu après son entrée en vigueur.

  Dans une procédure de recours, pour que le nouveau droit soit applicable,
il ne suffit donc pas que le recours ait été interjeté après le 1er janvier
2007, il faut encore que la décision attaquée ait été rendue après cette
date. Cette condition supplémentaire doit éviter qu'un délai de recours qui
aurait commencé à courir sous l'ancien droit ne soit écourté du fait de
l'entrée en vigueur de la nouvelle loi (PETER KARLEN, Das neue
Bundesgerichtsgesetz, Bâle 2006, p. 75). Le nouveau droit a, par exemple,
réduit le délai de recours contre les décisions d'un gouvernement cantonal
sur le droit de vote en matière fédérale de cinq à trois jours (cf. art. 106
al. 1, 2e phrase OJ et art. 100 al. 4 LTF). La condition que la décision
attaquée ait été rendue après le 1er janvier 2007 a toutefois une portée
générale et vaut aussi dans les cas où les délais de recours sont demeurés
inchangés.

Erwägung 2

  2.

  2.1  Le principe de l'interdiction de la double imposition déduit de la
Constitution fédérale (cf. art. 46 al. 2 aCst. et art. 127 al. 3, 1re phrase
Cst.) s'oppose à ce qu'un contribuable soit concrètement soumis, par deux ou
plusieurs cantons, sur le même objet, pendant la même période, à des impôts
analogues (double imposition effective) ou à ce qu'un canton excède les
limites de sa souveraineté fiscale et, violant des règles de conflit
jurisprudentielles, prétende prélever un impôt dont la perception est de la
seule compétence d'un autre canton (double imposition virtuelle). En outre,
le Tribunal fédéral a déduit des dispositions précitées le principe selon
lequel un canton ne peut pas imposer plus lourdement un contribuable du fait
qu'il est assujetti aux impôts dans un autre canton (ATF 132 I 29 consid.
2.1 p. 31/32; 130 I 205 consid. 4.1 p. 210 et les références).

  2.2  Sous le régime de la loi fédérale d'organisation judiciaire du 16
décembre 1943 (OJ; RO 3 p. 521), la décision préjudicielle sur
l'assujettissement ou la décision de taxation de l'administration fiscale
cantonale pouvait directement faire l'objet d'un recours de droit public
(art. 84 ss OJ) au Tribunal fédéral. L'art. 86 al. 2 OJ instituait, en
effet, une exception au principe de l'épuisement des instances cantonales
prévu - pour le recours de droit public - à l'art. 86 al. 1 OJ. En outre, en
vertu de l'art. 89 al. 3 OJ, disposition applicable

de manière générale aux procédures pour conflit de compétence entre cantons
et ainsi notamment en cas de conflit d'assujettissement à l'impôt, le délai
de recours de trente jours ne courait qu'après que les deux cantons aient
pris des décisions pouvant faire l'objet d'un recours de droit public. Il
était ainsi possible de s'en prendre à la décision du premier canton à avoir
procédé à la taxation, même si celle-ci était déjà entrée en force (ATF 131
I 145 consid. 2.1 et les références).

  2.3  Depuis l'entrée en vigueur de la loi sur le Tribunal fédéral, le
contribuable qui se plaint de double imposition intercantonale doit procéder
par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF): il
s'agit d'une cause de droit public au sens de l'art. 82 let. a LTF, qui ne
tombe sous le coup d'aucune des exceptions énumérées à l'art. 83 LTF. Le
législateur n'a toutefois prévu aucune dérogation à la règle de l'épuisement
des voies de droit cantonales, cela afin d'éviter que le Tribunal fédéral ne
statue comme première instance judiciaire (Message du Conseil fédéral du 28
février 2001 concernant la révision totale de l'organisation judiciaire
fédérale, FF 2001 p. 4000 ss, 4123 s.). Selon le Message, la personne
touchée par une double imposition intercantonale pourra déférer l'affaire au
Tribunal fédéral dès qu'un canton aura rendu une décision en dernière
instance, sans qu'il soit nécessaire d'épuiser les instances dans les autres
cantons concernés (loc. cit., p. 4124).

  Au demeurant, la règle de l'art. 89 al. 3 OJ a été reprise à l'art. 100
al. 5 LTF, sous réserve d'une modification d'ordre rédactionnel: alors que
l'ancienne disposition prévoyait que le délai de recours commençait à courir
seulement après que les deux cantons aient statué, la nouvelle norme dispose
que le délai commence à courir "au plus tard" le jour où chaque canton a
rendu une décision. La nouvelle formulation tient mieux compte du fait qu'il
est possible soit de contester tout de suite la décision rendue par le
canton qui statue le premier, soit d'attendre la décision d'un autre canton
et, en recourant contre cette dernière, de remettre en cause du même coup
celle du premier.

  2.4  La doctrine déplore que le nouveau droit ne prévoie plus d'exception,
en matière de double imposition intercantonale, à la règle de l'épuisement
des instances cantonales. Outre que cela allonge la procédure - avec les
conséquences financières qui en découlent -,

il serait peu judicieux d'obliger les contribuables à parcourir les
instances cantonales dans les conflits d'assujettissement, où la position
des cantons est proche de celle de parties (ALFRED MEIER/DIEGO
CLAVADETSCHER, Prozessuale Klippen bei der Durchsetzung des interkantonalen
Doppelbesteuerungsverbots, IFF Forum für Steuerrecht 2007, p. 135 ss, 139,
141).

  En se référant au passage précité du Message, la doctrine souligne
toutefois que l'art. 86 al. 1 let. d LTF oblige le contribuable à épuiser
les instances cantonales seulement dans l'un des cantons en cause (MICHAEL
BEUSCH, Die Einheitsbeschwerde im Steuerrecht, IFF Forum für Steuerrecht
2006, p. 249 ss, 258; MEIER/CLAVADETSCHER, op. cit., p. 137 s., 141; XAVIER
OBERSON, Droit fiscal suisse, 3e éd., Bâle 2007, § 23 n. 78 ss; URS R.
BEHNISCH, Die steuerrechtliche Rechtsprechung des Bundesgerichts im Jahre
2005, RJB 143/2007 p. 405 ss, 428). A bon droit.

  Si l'on devait exiger que les instances cantonales soient épuisées dans
tous les cantons en cause, le contribuable se verrait contraint de
systématiquement contester la décision d'un canton, chaque fois qu'il
existerait le moindre risque qu'un autre prétende l'assujettir à l'impôt.
Cela ne saurait correspondre à l'intention du législateur. Il ressort en
effet clairement du Message que le contribuable doit épuiser les instances
seulement dans l'un des cantons concernés. En formant un recours en matière
de droit public contre la décision rendue par ce canton, il peut s'en
prendre aux décisions des autres cantons rendues auparavant, quand bien même
elles n'auraient pas été prises en dernière instance cantonale.

Erwägung 3

  3.

  3.1  En l'occurrence, les recourants font valoir que les décisions du
Service cantonal des contributions du canton de Fribourg du 22 janvier 2004
et du 20 janvier 2005, qu'ils contestent à titre principal, ont été rendues
avant le 1er janvier 2007. Dès lors, la loi fédérale d'organisation
judiciaire demeurerait applicable à la présente procédure.

  3.2  La présente procédure a été introduite devant le Tribunal fédéral par
acte du 2 mai 2007, soit après l'entrée en vigueur du nouveau droit. De
plus, même si le recours est dirigé d'abord contre les décisions du Service
cantonal des contributions du canton de Fribourg du 22 janvier 2004 et du 20
janvier 2005 (conclusions

principales) et seulement subsidiairement contre celles de l'Administration
fiscale cantonale du canton de Genève du 30 mars 2007, ce sont ces dernières
qui sont attaquées d'un point de vue procédural. C'est, en particulier, par
rapport à elles que le respect du délai de recours doit être apprécié (cf.
art. 100 al. 5 LTF, art. 89 al. 3 OJ). A l'égard des décisions des autorités
fiscales fribourgeoises, le recours serait tardif.

  Il y a ainsi lieu d'admettre que la condition supplémentaire dont l'art.
132 al. 1 LTF fait dépendre l'application du nouveau droit, à savoir que
l'acte attaqué ait été rendu après le 1er janvier 2007, est également
remplie en l'espèce. Au demeurant, appliquer l'ancien droit, comme le
voudraient les recourants, pour le motif que les décisions rendues par le
"premier" canton, contre lesquelles le recours est aussi et même
principalement dirigé, sont antérieures à cette date, conduirait à étendre,
sans nécessité, la période transitoire durant laquelle la loi fédérale
d'organisation judiciaire demeure applicable concurremment à la loi sur le
Tribunal fédéral, ce qu'il convient d'éviter (cf. arrêt 6F_1/2007 du 9 mai
2007, consid. 1.2 non publié à l'ATF 133 IV 142).

  La loi sur le Tribunal fédéral est donc applicable en l'espèce.

Erwägung 4

  4.

  4.1  En partant de l'idée que la présente cause était encore régie par la
loi fédérale d'organisation judiciaire, les recourants ont formé un recours
de droit public. Cet intitulé du mémoire de recours ne saurait toutefois
préjuger de la voie ouverte, ni porter préjudice aux recourants, pour autant
que leur écriture remplisse les conditions formelles de la voie de droit en
cause (ATF 126 II 506 consid. 1b p. 509; 124 I 223 consid. 1a p. 224; 122 I
351 consid. 1a p. 353), à savoir le recours en matière de droit public (art.
82 ss LTF).

  4.2  Les décisions de l'Administration fiscale cantonale du canton de
Genève du 30 mars 2007 n'ont pas été rendues en dernière instance cantonale,
de sorte que le recours est irrecevable comme recours en matière de droit
public. Cela vaut aussi bien pour les conclusions dirigées contre les
décisions des autorités fiscales genevoises qu'à l'égard de celles qui se
rapportent aux prononcés des autorités fiscales fribourgeoises, car la
faculté de s'en prendre aux précédentes décisions d'un premier canton,
nonobstant leur entrée en force éventuelle, suppose que le recours soit
valablement interjeté

à l'encontre de celles de l'autre canton, qui, d'un point de vue procédural,
constituent l'objet de la contestation.