Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 133 II 361



Urteilskopf

133 II 361

  31. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public dans la cause
Département fédéral de justice et police contre A. et Instance LAVI ainsi
que Tribunal administratif de la République et canton de Genève (recours en
matière de droit public)
  1C_10/2007 du 12 juillet 2007

Regeste

  Art. 11 ff. OHG; Entschädigung des Opfers für Anwaltskosten, welche die
vom Strafrichter zugesprochene Parteientschädigung übersteigen; Präzisierung
der Rechtsprechung.

  Das Opfer, dem im Strafverfahren eine Parteientschädigung zugesprochen
wird, hat nach Art. 11 ff. OHG nicht ohne weiteres Anspruch auf
Entschädigung seiner Anwaltskosten, wie dies im Kanton Genf zutrifft. Die
Genfer Praxis, wonach das Opfer für die Entschädigung der die zugesprochene
Parteientschädigung übersteigenden Kosten an die OHG-Behörden verwiesen
wird, steht mit den Grundsätzen des OHG und mit Art. 97 der Genfer
Strafprozessordnung im Widerspruch (E. 3-5).

Sachverhalt

  Le Tribunal de police de la République et canton de Genève a astreint un
accusé, reconnu coupable notamment de lésions corporelles, au versement
d'une indemnité à titre de réparation du dommage matériel et du tort moral
subis par la victime A. Il l'a en sus condamné au paiement de 1'500 fr. à
titre de participation aux honoraires d'avocat de cette dernière. La victime
A. a saisi l'Instance d'indemnisation de la loi fédérale sur l'aide aux
victimes d'infractions de la République et canton de Genève (Instance LAVI)
d'une requête en indemnisation de ses frais d'avocat, soit plus de 20'000
fr., sous déduction des 1'500 fr. payés par le condamné. L'Instance LAVI a
rejeté la requête au motif que les dépens fixés par le Tribunal de police
avaient été versés. Sur recours de la victime A., le Tribunal administratif
de la République et canton de Genève lui a finalement alloué, en application
de la loi fédérale sur l'aide aux victimes d'infractions, une indemnité
d'environ 15'000 fr., sous déduction des 1'500 fr. déjà reçus.

  Le Département fédéral de justice et police (DFJP), auquel la loi sur le
Tribunal fédéral accorde la qualité pour recourir, a formé un recours en
matière de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif. Le
Tribunal fédéral a admis le recours, a annulé l'arrêt attaqué et a renvoyé
la cause au Tribunal administratif pour nouvelle décision dans le sens des
considérants.

Auszug aus den Erwägungen:

                        Extrait des considérants:

Erwägung 3

  3.  Le DFJP soutient qu'en jugeant que l'intimée avait droit à une
indemnisation en vertu des art. 11 ss de la loi fédérale du 4 octobre 1991
sur l'aide aux victimes d'infractions (LAVI; RS 312.5), alors

que l'auteur de l'infraction avait versé l'intégralité des sommes qu'il
devait selon le jugement du Tribunal de police, le Tribunal administratif a
violé les règles applicables en matière de LAVI.

  Il s'agit dès lors uniquement d'examiner en l'espèce si, lorsque les
dépens alloués à la victime par le juge pénal incluent la couverture des
frais d'avocat, cette dernière est encore légitimée à réclamer une
indemnisation LAVI pour les honoraires d'avocat qui vont au-delà de cette
somme.

Erwägung 4

  4.  En matière de LAVI, la notion de dommage correspond en principe à
celle du droit de la responsabilité civile (ATF 131 II 121 consid. 2.1 p.
125; FF 1990 II 909, p. 939; PETER GOMM/DOMINIK ZEHNTNER, Kommentar zum
Opferhilfegesetz, Berne 2005, p. 245; EVA WEISHAUPT, Finanzielle Ansprüche
nach Opferhilfegesetz, in SJZ 98/2002 p. 322, 327).

  4.1  En droit de la responsabilité civile, les frais engagés par la
victime pour la consultation d'un avocat avant l'ouverture du procès civil,
lorsque cette démarche était nécessaire et adéquate, peuvent constituer un
élément du dommage, pour autant que ces frais n'aient pas été inclus dans
les dépens. Il en va de même pour les frais engagés dans une autre
procédure, comme une procédure pénale par exemple. Si cette procédure permet
d'obtenir des dépens, même tarifés, il n'est alors plus possible de faire
valoir une prétention en remboursement des frais de défense par une action
ultérieure en responsabilité civile (arrêt 4C.51/2000 du 7 août 2000,
consid. 2, publié in SJ 2001 I p. 153; ATF 117 II 101 consid. 5 p. 106; 112
Ib 353 consid. 3a p. 356).

  Cette réglementation repose sur des considérations pratiques et la
recherche d'un équilibre entre des intérêts divergents; cet équilibre se
trouverait compromis si la décision sur les dépens ne liquidait pas les
prétentions des parties et laissait la porte ouverte à une action civile
ultérieure (ATF 112 Ib 353 consid. 3a p. 357).

  4.2  Dans le canton de Genève, l'art. 97 al. 1 du code de procédure pénale
du 29 septembre 1977 (CPP/GE; RSG E 4 20) met à la charge du condamné les
dépens de la partie civile devant les juridictions de jugement. Ces dépens
sont calculés conformément au tarif établi par le Conseil d'Etat (art. 104
al. 1 CPP/GE). Selon l'art. 12 al. 1 du règlement du 29 mars 1978 fixant le
tarif des frais et dépens en matière pénale (RSG E 4 20.03; ci-après: le
règlement), les dépens dus par le condamné comprennent les débours ainsi
qu'une participation

aux honoraires d'avocat allant en particulier de 50 à 1'000 fr. devant le
Tribunal de police (let. b). Aux termes de l'alinéa 2 de cette même
disposition, l'autorité de jugement peut accorder, à titre exceptionnel, une
participation d'un montant supérieur en raison de circonstances
particulières, notamment les difficultés du procès, la situation financière
des parties, la durée de la procédure ou encore l'ampleur des débats.

  4.3  Le Tribunal fédéral a jugé que, en droit cantonal genevois, l'usage
de l'expression "participation aux honoraires d'avocat" ne signifiait pas
que l'indemnité pour les dépens ne correspondait qu'à une quotité déterminée
des honoraires totaux de l'avocat. Les dépens permettaient le dédommagement
de tous les frais d'avocat rendus nécessaires par le procès (arrêt P.367/73
du 29 mars 1973, consid. 4a, publié in SJ 1973 p. 337; arrêt P.287/1981 du
17 juillet 1981, consid. 3a, publié in SJ 1982 p. 289; arrêt 4C.80/1995 du
28 août 1995, consid. 2, publié in SJ 1996 p. 299; arrêt 4C.51/2000 précité,
consid. 3). La partie civile ne dispose donc pas d'une prétention en
dommages-intérêts pour la part non couverte par les dépens (arrêt 4C.51/
2000 précité, consid. 3).

  4.4  Selon l'art. 6 du règlement, les parties, ou s'il est condamné, le
plaignant, peuvent faire opposition à la taxation de l'état de frais de
l'Etat ou à celle des dépens d'une partie auprès de la Cour de justice qui
statue en dernier ressort.

Erwägung 5

  5.

  5.1  Le législateur n'a certes pas choisi de reprendre en tous points,
dans le système des art. 11 ss LAVI, le régime du droit de la responsabilité
civile. Des solutions spécifiques sont donc possibles (ATF 131 II 121
consid. 2.2 p. 125 s.).

  En matière de détermination du dommage, des différences ne se justifient
cependant qu'exceptionnellement (cf. p. ex. art. 13 al. 2 LAVI). En effet,
la LAVI n'a pas à couvrir des dommages qui vont au-delà de la responsabilité
civile de l'auteur. Si une des conditions des art. 41 ss CO fait défaut, une
indemnisation LAVI n'entre dès lors pas en considération (EVA WEISHAUPT, op.
cit., p. 325).

  Le Tribunal fédéral a d'ailleurs lui-même souligné que la victime devait
être admise à faire valoir, dans le cadre des art. 11 ss LAVI, des
prétentions pour les différents postes du dommage qui entreraient en
considération selon l'art. 41 CO (ATF 131 II 121 consid. 2.4.4 p. 129). Il
n'y a dès lors pas de raison d'admettre que la victime LAVI

puisse être indemnisée pour un dommage dont elle ne pourrait pas obtenir
réparation selon les règles du droit de la responsabilité civile. De plus,
la victime a l'obligation de limiter le dommage qu'elle subit dans toute la
mesure du possible (arrêt 1A.169/2001 du 7 février 2002, consid. 3.2).

  5.2  Le Tribunal fédéral a, il est vrai, admis que les frais d'avocat
pouvaient constituer un poste du dommage indemnisé sur la base des art. 11
ss LAVI (ATF 131 II 121). Il n'a cependant fait qu'admettre le principe
d'une telle indemnisation (cf. ATF 131 II 121 consid. 2.4.4 dernier
paragraphe p. 129). En effet, seules étaient alors litigieuses les questions
concernant les rapports de subsidiarité entre l'assistance judiciaire,
l'art. 3 al. 4 LAVI et les art. 11 ss LAVI ainsi que le tarif à appliquer
aux honoraires d'avocat réclamés. Le Tribunal fédéral n'a donc pas été amené
à examiner dans ce cadre la question particulière du sort des dépens alloués
à la victime par le juge pénal.

  On ne saurait dès lors déduire de la jurisprudence un droit automatique à
une indemnisation des frais d'avocat fondée sur les art. 11 ss LAVI, même si
des dépens ont été accordés à la victime dans le cadre du procès pénal.

  5.3  La victime diligente, en cas de refus de l'assistance judiciaire,
doit en principe immédiatement s'adresser au centre de consultation pour
requérir l'aide juridique, afin que la question de l'application de l'art. 3
al. 4 LAVI soit résolue d'emblée. Cela permet à l'autorité d'exercer un
contrôle sur les frais d'avocat et de procédure engagés. Le Tribunal fédéral
a certes concédé que si la victime omettait d'emprunter la voie prévue par
l'art. 3 al. 4 LAVI, son droit au remboursement des frais d'avocat dans le
cadre des art. 11 ss LAVI ne se périmait pas. Il a cependant précisé que la
victime prenait ainsi néanmoins le risque d'engager des frais dont elle
n'obtiendrait peut-être pas le remboursement (ATF 131 II 121 consid. 2.4.1
p. 127 s.).

  5.4  La pratique genevoise qui consiste à renvoyer les victimes LAVI à
s'adresser à l'Instance LAVI pour obtenir le remboursement du montant qui
dépasse les dépens fixés dans le cadre de la procédure pénale ne se concilie
pas avec les principes de la LAVI (cf. consid. 5.2). Elle est également
contraire à l'art. 97 CPP/GE qui prévoit que les dépens de la partie civile
sont à la charge du condamné.

  Les victimes LAVI devraient obtenir dans le cadre de la procédure pénale
la condamnation de l'auteur au paiement de l'intégralité des honoraires
d'avocat, sous réserve de leur proportionnalité.

  En l'espèce, la victime n'a pas requis l'assistance judiciaire ordinaire,
elle n'a pas non plus sollicité l'aide juridique du Centre de consultation
LAVI et elle n'a pas contesté le montant des dépens qui lui ont été alloués
par le juge pénal. Ce comportement, ajouté à la pratique genevoise en
matière de dépens, a pour effet que, selon la jurisprudence rappelée plus
haut (consid. 4.1), l'auteur de l'infraction ne peut être recherché pour le
remboursement des frais de la victime, ce qui est contraire au principe de
subsidiarité qui est à la base du système LAVI (art. 14 LAVI et art. 4 de la
future nouvelle LAVI). Dans ces conditions, la victime doit se laisser
opposer un refus d'indemnisation.