Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 133 III 37



Urteilskopf

133 III 37

  3. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile dans la cause X. contre Banque
Y. (recours en réforme)
  4C.277/2006 du 4 décembre 2006

Regeste

  Endentscheid; anwendbares Recht; Guthabenkonto; Verjährung.

  Ein Entscheid, mit dem die Einrede der Verjährung gutgeheissen wird, ist
ein Endentscheid im Sinne von Art. 48 Abs. 1 OG (E. 1).

  Bei Fehlen einer Rechtswahl unterstehen die Beziehungen aus einem
Konto-/Depotvertrag zwischen einer Bank mit Sitz in der Schweiz und einem
Kunden mit Wohnsitz im Ausland dem schweizerischen Recht (Art. 117 IPRG; E.
2).

  Die Verjährung des Rechts auf Rückerstattung der in einem Konto/Depot
hinterlegten Guthaben beginnt erst im Zeitpunkt zu laufen, in dem die
vertraglichen Beziehungen zwischen den Parteien beendigt sind (Bestätigung
der Rechtsprechung; E. 3).

Sachverhalt ab Seite 37

  Les époux X., domiciliés en France, entretenaient des liens d'amitié avec
A., le responsable de l'acquisition de la clientèle auprès de la Banque Y.
(ci-après: la Banque). Celui-ci avait les pouvoirs de conclure au nom de la
Banque des contrats divers avec de nouveaux clients.

  En août 1981, les époux X. ont demandé à A. d'ouvrir un compte/dépôt joint
auprès de la Banque. La convention d'ouverture de compte

prévoyait que, par mesure de discrétion, la correspondance de la Banque
devait être adressée aux clients sous dossier et que cet établissement était
autorisé à gérer librement les avoirs déposés sur le compte.

  En 1987, X. a souhaité encaisser sur son compte auprès de la Banque deux
créances de 500'000 FF chacune. Afin que la transaction demeure secrète, A.
lui a conseillé de faire verser les avoirs sur un compte de transit, qui
était prétendument utilisé comme compte interne de la Banque. A. avait
ensuite pour instruction de faire virer immédiatement l'argent sur le
compte/dépôt des époux X.

  Le compte de transit en question avait été ouvert au nom d'une société
panaméenne. A. s'était notamment attribué un droit de signature individuelle
sur ce compte, sans en informer les organes de la société.

  En juin 1987, les créanciers de X., sur ordre de ce dernier, ont fait
transférer deux fois 500'000 FF sur un compte interne de la Banque, à
l'attention de A. Ces avoirs ont transité sur différents comptes pour
aboutir sur le compte dont était titulaire la société panaméenne. Il n'a
ensuite plus été possible de suivre la destination du million de FF.

  Persuadés que l'argent avait été crédité sur leur compte, les époux X.
n'ont pas donné d'autres instructions à A. quant à la gestion du million de
FF et, jusqu'en 1996, ils n'ont pas relevé le courrier émanant de la Banque.
Ce n'est que cette année-là qu'ils ont découvert qu'ils possédaient
seulement un petit actif sur leur compte. Ils ont demandé des explications à
A., qui ne travaillait plus pour la Banque depuis 1989.

  De 1997 à 1998, X. a vainement cherché à obtenir de la Banque des
renseignements sur le sort des deux versements de 500'000 FF. Celle-ci s'est
retranchée derrière le secret bancaire, arguant que les époux X. n'avaient
aucun pouvoir de disposition sur le compte dont la société panaméenne était
titulaire.

  Le 8 novembre 2000, X. a déposé une plainte pénale à l'encontre de A., à
laquelle il n'a pas été donné suite en raison de la prescription.

  Le 3 septembre 2002, X. a fait notifier à la Banque un commandement de
payer de 250'000 fr. auquel il a été formé opposition.

  Le 25 septembre 2003, X. a ouvert action en justice à l'encontre notamment
de la Banque, en concluant au paiement du montant de 252'000 fr. avec
intérêt à 5 % dès le 1er septembre 1997.

  Le Tribunal cantonal valaisan a rejeté la demande, donnant suite à
l'exception de prescription soulevée par la Banque.

  Contre ce jugement, X. (le demandeur) interjette un recours en réforme au
Tribunal fédéral.

Auszug aus den Erwägungen:

                        Extrait des considérants:

Erwägung 1

  1.  La décision qui admet l'exception de prescription et rejette la
demande au fond est une décision finale au sens de l'art. 48 al. 1 OJ (ATF
121 III 270 consid. 1; 118 II 447 consid. 1b p. 450). Interjeté par la
partie demanderesse qui a succombé dans ses conclusions en paiement et
dirigé contre un jugement rendu en dernière instance cantonale par un
tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ; art. 23 CPC/VS) sur une contestation
civile dont la valeur litigieuse dépasse le seuil de 8'000 fr. (art. 46 OJ),
le recours en réforme paraît en principe recevable, puisqu'il a été déposé
en temps utile compte tenu des féries (art. 34 al. 1 let. b et art. 54 al. 1
OJ) et dans les formes requises (art. 55 OJ).

Erwägung 2

  2.  La cause revêt des aspects internationaux, de sorte que le Tribunal
fédéral, saisi d'un recours en réforme, doit vérifier d'office et avec un
plein pouvoir d'examen le droit applicable (ATF 131 III 153 consid. 3), sur
la base du droit international privé suisse, en tant que lex fori (cf. ATF
130 III 417 consid. 2, 462 consid. 4.1).

  L'action du demandeur est de nature contractuelle. En vertu de l'art. 117
al. 1 LDIP, le droit applicable est, en l'absence d'une élection de droit,
celui de l'Etat avec lequel le contrat présente les liens les plus étroits.

  Il ressort des faits retenus que le demandeur et son épouse ont ouvert en
août 1981 un compte/dépôt joint auprès de la Banque, qui était autorisée à
gérer librement les avoirs déposés sur ce compte. En 1987, ils ont chargé le
responsable de l'acquisition de la clientèle de créditer ce compte d'un
montant de 1 million de FF d'une manière discrète. Il n'est pas contesté que
deux débiteurs du demandeur ont viré ce montant, qui a été porté au crédit
d'un compte interne de la Banque, mais les avoirs ne sont jamais parvenus
sur le compte/dépôt détenu par le demandeur et son épouse, qui ne s'en sont
aperçus qu'en 1996. Contrairement à l'analyse à laquelle a procédé la cour
cantonale, il n'est pas déterminant de décortiquer ni de qualifier
juridiquement les différentes opérations de transfert opérées en 1987, dès
lors que le million de FF a bien été viré auprès de

la Banque. L'obligation de cet établissement de conserver, de gérer, puis
surtout de restituer cette somme à ses clients s'insère dans le cadre des
relations contractuelles nouées en 1981 lors de l'ouverture du compte/dépôt.
Or, que l'on envisage la Banque en qualité de dépositaire ou de prestataire
de service (cf. art. 117 al. 3 let. c et d LDIP), la prestation
caractéristique renvoie dans les deux cas à la défenderesse. Celle-ci ayant
son siège en Suisse, c'est donc bien le droit suisse qui est applicable, ce
qui correspond du reste au droit sur lequel les parties se fondent.

Erwägung 3

  3.  Tout en admettant le principe de la responsabilité de la Banque, la
cour cantonale a rejeté la demande, au motif que les prétentions réclamées à
la défenderesse étaient prescrites. Les juges ont estimé en substance que la
créance en restitution des fonds versés était exigible en 1987, de sorte
que, le 3 septembre 2002, soit au moment où le demandeur a fait notifier à
la défenderesse un commandement de payer, le délai décennal de prescription
était échu. Le demandeur reproche à la cour cantonale d'avoir perdu de vue
que l'action en restitution du mandant ou du déposant ne court en principe
que dès la fin du contrat.

  3.1  L'action du demandeur est soumise au délai de prescription de dix ans
prévu à l'art. 127 CO, ce qui n'est pas contesté. La question litigieuse
suppose de s'interroger sur l'exigibilité de la créance invoquée, qui permet
de fixer le point de départ de la prescription (cf. art. 130 CO). La cour
cantonale a raisonné en analysant uniquement l'opération de transfert
ordonnée en 1987, la qualifiant de mandat/contrat de fiducie. Elle a estimé
que ce contrat avait pris fin en 1987, de sorte que les prétentions du
demandeur en découlant étaient exigibles dès cette année-là.

  Une telle position ne peut être suivie. Comme déjà indiqué (cf. supra
consid. 2), le fondement de l'action du demandeur repose sur l'existence du
compte/dépôt qu'il détenait conjointement avec son épouse depuis 1981 auprès
de la défenderesse, la Banque étant également autorisée à gérer les avoirs
déposés sur ce compte. Sur le plan juridique, les relations nouées par le
demandeur et la Banque relèvent donc du contrat de dépôt et du mandat (cf.
ATF 101 II 117 consid. 5; GUGGENHEIM, Les contrats de la pratique bancaire
suisse, 4e éd., Genève 2000, p. 148; LOMBARDINI, Droit bancaire suisse,
Zurich 2002, p. 435). Ce type de contrat se caractérise par le fait que les
valeurs déposées doivent être restituées au client ou utilisées

conformément aux instructions de ce dernier (cf. GUGGENHEIM, op. cit., p.
149).

  3.2  Dans une jurisprudence de 1965, le Tribunal fédéral s'est demandé à
quel moment prenait naissance l'obligation de restituer en cas de gestion de
fortune et de garde de valeurs déposées. Il est parvenu à la conclusion que
cette obligation ne prenait naissance qu'à la fin du rapport contractuel.
Aussi longtemps que le contrat dure, le mandataire ou le dépositaire a
l'obligation contractuelle de gérer ou de garder les biens, de sorte que
celle de restituer n'existe pas encore, car l'exécution de ces obligations
et la restitution des valeurs s'excluent mutuellement (ATF 91 II 442 consid.
5b p. 451). Par conséquent, le droit du mandant ou du déposant de réclamer
la restitution ne peut pas commencer à se prescrire avant d'avoir pris
naissance, soit avant que prenne fin le rapport contractuel en raison d'un
accord bilatéral, de l'expiration de la durée prévue, de la révocation ou de
la répudiation (ATF 91 II 442 consid. 5b p. 451). Dans cet arrêt, le
Tribunal fédéral a expressément écarté la thèse selon laquelle le droit du
mandant ou du déposant de réclamer la restitution des valeurs confiées
prendrait naissance et commencerait à se prescrire déjà au moment de la
remise des valeurs, en raison de ses conséquences choquantes, notamment
parce que, si la prescription courait dès ce moment, le mandataire ou le
dépositaire pourrait, une fois le délai de dix ans écoulé, conserver par
devers lui ces valeurs au mépris des obligations contractuelles assumées
pour une plus longue période (cf. ATF 91 II 442 consid. 5b p. 452). Il a en
outre précisé que le fait que le mandataire ou le dépositaire détourne à son
profit les valeurs confiées ou qu'il s'en dessaisisse n'entraînait pas sans
autre la fin du contrat (cf. ATF 91 II 442 consid. 5c p. 452).

  Cette jurisprudence est approuvée par la majorité de la doctrine (cf. en
particulier HONSELL, Schweizerisches Obligationenrecht, Besonderer Teil, 8e
éd., Berne 2006, p. 385; BARBEY, Commentaire romand, n. 17 ad art. 475-476
CO; BERTI, Commentaire zurichois, n. 56 s. ad art. 130 CO; GUHL, Das
Schweizerische Obligationenrecht, 8e éd., Zurich 1995, p. 295 s., la 9e éd.
de cet ouvrage p. 321 considérant à tort l'ATF 91 II 442 comme dépassé;
BAERLOCHER, Schweizerisches Privatrecht VII/1, p. 704; BUCHER,
Schweizerisches Obligationenrecht, Allg. Teil, 2e éd., Zurich 1988, p. 459
s. note 75; MERZ, Die privatrechtliche Rechtsprechung des Bundesgerichtes im
Jahre 1965, in RJB 103/1967 p. 16 ss, 46 ss), alors qu'une partie des
auteurs la tient pour acquise sans commentaire (cf. notamment GUGGENHEIM,

op. cit., p. 150; ENGEL, Contrats de droit suisse, Berne 2000, p. 604;
PICHONNAZ, Commentaire romand, n. 3 ad art. 130 CO; WERRO, Commentaire
romand, n. 21 ad art. 400 CO; VON TUHR/ESCHER, Allgemeiner Teil des
Schweizerischen Obligationenrechts, vol. II, Zurich 1974, p. 218 et 220
notes 59a et 75a). Certes, des critiques ont été émises à l'encontre de
cette jurisprudence (cf. KOLLER, Commentaire bâlois, n. 11 ss ad art. 475
CO; TERCIER, Les contrats spéciaux, 3e éd., Zurich 2003, n. 5822; SPIRO, Die
Begrenzung privater Rechte durch Verjährungs-, Verwirkungs- und
Fatalfristen, vol. I, Berne 1975, p. 55 ss n. 17), mais elles n'ont pas
empêché le Tribunal fédéral de confirmer celle-ci à plusieurs reprises (cf.
arrêts 4C.177/1994 du 3 mars 1995, consid. 3; 4C.163/1992 du 9 novembre
1993, consid. 3; 4C.122/1988 du 28 octobre 1988, publié in SJ 1989 p. 232,
consid. 2a). Enfin, contrairement à ce qui est indiqué in GUHL, op. cit., p.
321, on ne peut tirer de l'ATF 122 III 10 que la jurisprudence de 1965 est
dépassée, dès lors qu'au consid. 5a et b de cette décision, le Tribunal
fédéral a expressément relevé que la situation juridique était sans rapport
avec celle tranchée à l'ATF 91 II 442. En l'occurrence, rien ne justifie de
s'écarter de ce dernier arrêt, la solution prévue s'avérant particulièrement
justifiée en matière de dépôt bancaire, où il n'est pas rare qu'un déposant
ne se manifeste pas pendant une longue période (cf. BARBEY, op. cit., n. 17
ad art. 475-476 CO).

  3.3  Il en découle que, contrairement à ce qui a été retenu dans le
jugement attaqué, la prescription de l'action en restitution du demandeur
n'a pas commencé à courir en 1987. Comme le relève la défenderesse, le
jugement entrepris n'indique pas si et, le cas échéant, quand les relations
contractuelles entre les parties auraient pris fin, de sorte que la Cour de
céans n'est pas en mesure de déterminer précisément le début du délai de
prescription. Toutefois, il a été constaté que le demandeur et son épouse ne
se sont pas préoccupés de leur compte auprès de la défenderesse avant 1996,
année où ils ont découvert qu'ils ne disposaient plus que d'un petit actif
sur celui-ci. On peut donc en déduire que, jusqu'à ce moment, leur
compte/dépôt n'avait pas été bouclé. Partant, le 3 septembre 2002, date à
laquelle le demandeur a notifié un commandement de payer à la Banque, la
prescription décennale de l'art. 127 CO n'était pas encore acquise.

  Le recours doit donc être admis et le jugement attaqué annulé, dans la
mesure où il rejette les prétentions du demandeur au motif que celles-ci
étaient prescrites.