Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 133 III 201



Urteilskopf

133 III 201

  24. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit civil dans la cause X. SA
contre Y. et Z. (recours en réforme)
  4C.374/2006 du 15 mars 2007

Regeste

  Art. 162 und 163 OR. Herabsetzung einer bereits geleisteten
Konventionalstrafe.

  Die nach dem Vertragsabschluss geleisteten Teilzahlungen, die kraft
Vereinbarung bei Nichterfüllung dem Empfänger verbleiben, fallen unter die
mit der Konventionalstrafe verbundenen Bestimmungen; sie können daher
gegebenenfalls der Partei, die sie entrichtet hat, aufgrund von Art. 163 OR,
auf den Art. 162 OR verweist, zurückerstattet werden (E. 3).

  Art. 66 OG. Tragweite der Erwägungen des Rückweisungsurteils des
Bundesgerichts.

  Die Parteien sind an die Erwägungen des Rückweisungsurteils des
Bundesgerichts gebunden. Sie können sich somit zur Begründung eines neuen
Bundesrechtsmittels gegen den infolge der Rückweisung ergangenen kantonalen
Entscheid nicht mehr auf Vorbringen berufen, die im Rückweisungsurteil vom
Bundesgericht abgewiesen worden sind (E. 4).

  Art. 163 Abs. 3 OR. Richterliche Herabsetzung übermässig hoher
Konventionalstrafen.

  Ausmass des Ermessensspielraums, über welchen der Richter im Rahmen der
Anwendung von Art. 163 Abs. 3 OR als zwingender Rechtsnorm verfügt (E. 5.2).

  Vorliegend Annahme der Übermässigkeit der versprochenen Konventionalstrafe
(E. 5.3).

  Herabsetzung der vereinbarten Konventionalstrafe auf 10 % des
Gesamtpreises des Verkaufsgegenstandes (E. 5.4 und 5.5).

Sachverhalt

  A.

  A.a X. SA (ci-après: X.) est une société de droit suisse active notamment
dans le domaine de l'achat et de la vente d'avions.

  C. Company Limited (ci-après: C.) est une société de droit maltais active
en matière de négoce de céréales, dont Y. et Z. étaient les ayants droit
économiques.

  Le 29 décembre 1992, X. et C. ont conclu un "contrat de vente d'aéronef"
portant sur l'acquisition par la seconde d'un avion de type Canadair
Challenger 601-3A-ER; la livraison de l'appareil était prévue le 31 mai 1993
à Montréal (Canada), aéroport de Dorval.

  A teneur de l'art. 2 du contrat, le prix et les conditions de paiement
étaient arrêtés de la manière suivante:

   "Prix de l'avion en configuration "Green" US$ 15'150'000.- payables comme
    suit:

    Acompte       US$    500'000.-    le 21 décembre 1992

    2ème Acompte  US$  2'500'000.-    le 4 janvier 1993

    Solde         US$ 12'150'000.-    le 31 mai 1993

    Le paiement du solde de US$ 12'150'000.- est garanti par une lettre de
    crédit irrévocable, ouverte par l'acheteur en faveur de X. SA au plus
    tard le 15 janvier 1993 et transférable uniquement en faveur du
    constructeur F.

    Prix de l'installation de l'aménagement intérieur et des équipements
    optionnels: US$ 2'445'000.- payables comme suit:

    US$   244'500.-    le 4 janvier 1993

    US$   489'000.-    le 15 mars 1993

    US$   489'000.-    le 30 avril 1993

    US$ 1'222'500.-    le 31 mai 1993

    Prix total de l'avion complètement aménagé et équipé: US$ 17'595'000.-."

  L'art. 3 du contrat prévoyait ce qui suit:

   "Les sommes versées par l'acheteur à titre d'acompte correspondent à des
    arrhes qui seront considérées comme un acompte en cas de bonne et fidèle
    exécution du contrat. En revanche, en cas d'inexécution par l'acheteur
    de l'une ou l'autre clause du contrat, les arrhes versées resteront
    irrévocablement acquises au vendeur."

  Quant à l'art. 4, il avait la teneur suivante:

   "Tout retard de plus de 10 jours dans le paiement par l'acheteur d'un
    acompte ou du solde du prix sera considéré comme une inexécution du
    contrat et le vendeur sera en droit de s'en départir immédiatement sans
    avis ni mise en demeure, et de conserver les arrhes versées conformément
    à l'article 3 du présent contrat."

  L'article 13 du même contrat instaurait la compétence exclusive des
tribunaux du canton de Genève et soumettait l'accord au droit suisse.

  A.b Les parties contractantes sont convenues d'un amendement le 15 janvier
1993, qui repoussait la date de livraison de l'avion au 11 juin 1993 et
modifiait l'art. 2 du contrat de la manière suivante:

   "Prix de l'avion en configuration "Green": US$ 15'150'000.- payables
    comme suit:

    Acompte       US$    500'000.-    le 21 décembre 1992

    2ème Acompte  US$  2'500'000.-    le 4 janvier 1993

    Solde         US$ 12'150'000.-    le 11 juin 1993

    Prix de l'installation de l'aménagement intérieur et des équipements
    optionnels: US$ 2'445'000.- payables comme suit:

    US$   244'500.-    le 4 janvier 1993

    US$   489'000.-    le 15 mars 1993

    US$   489'000.-    le 30 avril 1993

    US$ 1'222'500.-    le 11 juin1993."

  A.c C. s'est acquittée des montants dus selon la convention du 29 décembre
1992 en versant à X. différents acomptes se montant en tout à 3'733'500 US$,
soit 500'000 US$ le 21 décembre 1992, 2'500'000 US$ le 4 janvier 1993,
244'500 US$ le 4 janvier 1993 et 489'000 US$ le 15 mars 1993.

  A.d Par télécopie du 20 avril 1993, X. a informé C. qu'un délai au 10 mai
1993 pour le règlement de l'acompte de 489'000 US$ payable le 30 avril 1993
avait été accepté par le fournisseur. Tenant compte du délai de grâce de dix
jours stipulé à l'art. 4 de l'accord du 29 décembre 1992, cette somme devait
être versée le 20 mai 1993.

  Le 21 avril 1993, Y. et Z. ont été interpellés par les autorités
italiennes dans le cadre d'une enquête diligentée à leur encontre pour
fraudes fiscales. Ils ont indiqué avoir été détenus à titre préventif sous
le régime de l'isolement à la maison d'arrêt de Modène (Italie) jusqu'au 3
juillet 1993, date à partir de laquelle ils ont été assignés à résidence à
leur domicile, avec possibilité de communiquer uniquement avec leur famille.
Ils ont allégué que ladite mesure a été révoquée le 24 juillet 1993.

  Le 19 mai 1993, C. a informé par fax X. que le paiement de la somme de
489'000 US$ ne pourrait être effectué à la date convenue, car elle
rencontrait des "problèmes généraux en Italie"; C. confirmait toutefois sa
volonté d'acquérir l'aéronef. Par retour de fax et par courrier recommandé
du même jour, X. a refusé toute prolongation de délai, relevant qu'elle
s'était elle-même engagée envers son fournisseur canadien. Le même jour, C.
a encore insisté pour que lui soit accordé un report du délai de paiement,
en précisant que Z. était concerné par des enquêtes ouvertes à son encontre
en Italie, qui l'empêchaient de donner sa signature.

  Par fax et pli recommandé du 25 mai 1993, X. a informé C. que, faute pour
celle-ci de s'être acquittée du montant de 489'000 US$ payable au plus tard
le 20 mai 1993, elle se départissait du contrat immédiatement en application
de l'art. 4 de l'accord. X. a ajouté ce qui suit:

   "Dès lors, les art. 3 et 4 du Contrat stipulent que les versements
    partiels effectués par l'acheteur sont irrévocablement acquis au
    vendeur.

    A ce jour, vous avez effectué des versement (sic) pour un total de US$
    3'733'500.-. Ce montant est donc irrévocablement acquis à notre société.

    (...)."

  Le 24 août 1993, C. a contesté l'avis de résiliation précité et fait
valoir que X. n'était pas légitimée à conserver les paiements déjà
effectués.

  Il a été constaté que l'avion en question a été immatriculé au registre
suisse des aéronefs le 18 octobre 1993, avec l'indication comme propriétaire
de la société A. SA; à cette date, l'avion était grevé d'une hypothèque de
premier rang d'un montant de 13'000'000 US$ en faveur du fabricant.

  B.

  B.a Le 7 novembre 2002, C. a requis de X. la restitution des acomptes
qu'elle lui avait versés entre le 21 décembre 1992 et le 15 mars

1993; elle a également invité X. à lui remettre une déclaration de
renonciation à la prescription.

  Le 28 novembre 2002, X. a adressé à C. une renonciation à invoquer la
prescription datée du 20 novembre 2002 et valable jusqu'au 31 décembre 2003,
qui précisait en particulier qu'elle intervenait sans reconnaissance de
responsabilité.

  Par contrat de cession du 11 novembre 2003, C. a cédé ses droits à
l'encontre de X. à Y. et Z.

  Le 18 novembre 2003, Y. et Z. (les demandeurs) ont ouvert action contre X.
(la défenderesse) devant les tribunaux genevois et sollicité que ladite
société soit condamnée à payer à C. la somme de 3'733'500 US$ plus intérêts
à 5 % l'an dès le 6 août 1993.

  La défenderesse a notamment soulevé l'exception de prescription.

  Par jugement du 18 novembre 2004, le Tribunal de première instance a
débouté les demandeurs de leurs conclusions, admettant que la défenderesse
était fondée à résilier le contrat de vente et à conserver le montant des
acomptes payés.

  Saisie d'un appel des demandeurs, la Chambre civile de la Cour de justice
du canton de Genève, dans un arrêt du 24 juin 2005, a confirmé le jugement
précité par substitution de motifs. Les juges cantonaux ont retenu que la
déclaration de renonciation à soulever l'exception de prescription établie
le 20 novembre 2002 par la défenderesse en faveur de C. était nulle, de
sorte que l'action des demandeurs était bel et bien prescrite.

  Par arrêt du 13 février 2006, publié à l'ATF 132 III 226, le Tribunal
fédéral a admis dans la mesure de sa recevabilité le recours en réforme des
demandeurs, annulé l'arrêt précité et renvoyé la cause à l'autorité
cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. La
juridiction fédérale a retenu, en particulier sur la base d'une recherche
historique approfondie de la législation applicable, que la déclaration de
renonciation à la prescription signée le 20 novembre 2002 par la
défenderesse était valide, si bien que l'action ouverte par les demandeurs
le 18 novembre 2003 l'avait été en temps utile.

  B.b Statuant par un nouvel arrêt du 15 septembre 2006, la Cour de justice,
après avoir annulé le jugement du 18 novembre 2004, a condamné la
défenderesse à payer aux demandeurs le montant de 3'233'500 US$ avec
intérêts à 5 % l'an dès le 6 août 1993.

  L'autorité cantonale a notamment retenu que la défenderesse, sur la base
du contrat de vente, pouvait théoriquement conserver, à titre de peine
conventionnelle, 3'000'000 US$ sur les acomptes qui lui avaient été payés.
Eu égard à l'art. 162 CO, qui dispose que les dispositions concernant la
clause pénale sont applicables à la convention par laquelle les versements
partiels effectués restent, en cas de résiliation, acquis au créancier, les
magistrats genevois ont vérifié si la peine ainsi stipulée par les
cocontractants était excessive, au point qu'il faille la réduire. Prenant en
compte tout à la fois l'intérêt du vendeur à l'exécution de l'obligation, le
dommage qu'il a subi, la gravité objective de la violation contractuelle
dont répond C., le degré de la faute que celle-ci a commise ainsi que le
pourcentage de la sanction rapporté au prix de l'appareil, la cour cantonale
a ramené la peine conventionnelle convenue à la somme de 500'000 US$.

  C.- La défenderesse a recouru en réforme au Tribunal fédéral contre
l'arrêt du 15 septembre 2006.

  Le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours en réforme et réformé
l'arrêt attaqué en ce sens que la défenderesse a été condamnée à payer aux
demandeurs, avec solidarité entre eux, le montant de 1'974'000 US$ avec
intérêts à 5 % l'an dès le 6 août 1993.

Auszug aus den Erwägungen:

                        Extrait des considérants:

Erwägung 3

  3.

  3.1  La recourante se réfère ensuite à l'art. 162 CO, qui prescrit que les
dispositions concernant la clause pénale sont applicables à la convention
par laquelle les versements partiels effectués restent, en cas de
résiliation, acquis au créancier. Elle reconnaît - à bon droit - que cette
norme recouvre précisément la situation engendrée par le contrat du 29
décembre 1992, qui prévoyait, à son article 3, que les versements partiels
opérés par l'acheteur à titre d'acompte restaient acquis au vendeur en cas
de demeure du premier dans le paiement d'un acompte ou du solde du prix.
Elle allègue néanmoins que la réduction de la peine conventionnelle stipulée
n'est plus possible dès l'instant où elle a déjà été acquittée.

  3.2  Dans un arrêt récent (ATF 133 III 43 consid. 3.2 et 3.8), le Tribunal
fédéral a posé que les versements partiels ne revêtant pas l'attribut
d'arrhes, qui peuvent être conservés par celui qui les a encaissés si le
contrat n'est pas exécuté, tombent bel et bien sous le coup des dispositions
concernant la clause pénale dans le cadre de l'art. 162 CO. En d'autres
termes, l'art. 162 CO, par son renvoi à l'art. 163 CO,

permet, le cas échéant, la réduction (et donc la restitution) des paiements
partiels déjà effectués, cela sans que la partie lésée n'ait à respecter un
délai analogue à celui de l'art. 21 CO (ATF 133 III 43 consid. 3.5.3 in
fine).

  Cette jurisprudence est transposable en tous points aux versements
partiels opérés par C. entre le 21 décembre 1992 et le 15 mars 1993.

  In casu, les paiements partiels auxquels est en particulier applicable la
réduction judiciaire prévue par l'art. 163 al. 3 CO correspondent aux
acomptes versés par C. à la défenderesse avant la résiliation du contrat,
qui se montent en tout à 3'733'500 US$.

  Le moyen de la recourante est infondé.

Erwägung 4

  4.

  4.1  Pour la recourante, le droit des intimés de réclamer la restitution
de ce qu'ils auraient payé en trop est prescrit. La créance des demandeurs
se fonderait clairement sur l'enrichissement illégitime, qui soumet la
prescription à la réglementation de l'art. 67 al. 1 CO. En n'ouvrant action
qu'en 2003, soit dix ans après avoir appris leur droit à la réduction de la
peine conventionnelle, les intimés auraient laissé prescrire leur créance en
restitution.

  4.2  Dans son arrêt de renvoi publié au recueil officiel (ATF 132 III 226
consid. 3.3.9), le Tribunal fédéral a dit très clairement que l'action
déposée le 18 novembre 2003 contre la recourante par les demandeurs,
cessionnaires de C., n'était pas prescrite.

  Le tribunal auquel la cause est renvoyée voit sa cognition limitée par les
motifs de l'arrêt de renvoi, en ce sens qu'il est lié par ce qui a déjà été
jugé définitivement par le Tribunal fédéral (ATF 131 III 91 consid. 5.2).

  Les considérants de l'arrêt retournant la cause pour nouvelle décision à
l'autorité cantonale lient le Tribunal fédéral lui-même ainsi que les
parties, en ce sens que ces dernières ne peuvent plus faire valoir dans un
nouveau recours fédéral contre la nouvelle décision cantonale des moyens qui
avaient été rejetés dans l'arrêt de renvoi (ATF 125 III 421 consid 2a;
JEAN-FRANÇOIS POUDRET, Commentaire de la loi fédérale d'organisation
judiciaire, vol. II, n. 1.3.3 ad art. 66 OJ).

  Partant, la recourante n'est pas recevable à soutenir à nouveau que
l'action des demandeurs est prescrite, car cette question a été
définitivement tranchée par la juridiction suprême.

Erwägung 5

  5.

  5.1  La défenderesse soulève divers moyens pour s'opposer à devoir
restituer, par le jeu de l'art. 163 al. 3 CO, tout ou partie des acomptes
qu'elle a reçus avant la résiliation du contrat de vente.

  Elle allègue que le principe de la liberté contractuelle et celui de la
fidélité contractuelle feraient obstacle en l'occurrence à une réduction de
la peine prévue par le juge. Puis elle prétend que les intimés n'ont pas
allégué de faits propres à justifier une réduction. Elle invoque aussi le
fait que les cocontractants étaient des partenaires économiques égaux et
d'expérience comparable en affaires. Pour finir, la recourante soutient que
la réduction massive décidée par la cour cantonale repose sur une analyse
erronée et des critères déterminants et des faits économiques constatés. A
l'en croire, il n'y aurait aucune disproportion évidente entre le montant
convenu à titre de peine et l'intérêt de la recourante à conserver tous les
acomptes.

  5.2  Aux termes de l'art. 163 al. 3 CO, le juge doit réduire les peines
qu'il estime excessives. Il s'agit d'une norme d'ordre public, donc
impérative, que le juge doit appliquer même si le débiteur n'a pas demandé
expressément de réduction (MICHEL MOOSER, Commentaire romand, n. 5 et 6 ad
art. 163 CO; ANDREAS VON TUHR/ARNOLD ESCHER, Allgemeiner Teil des
Schweizerischen Obligationenrechts, 3e éd., t. II, § 87, p. 286 en haut;
FELIX R. EHRAT, Commentaire bâlois, 3e éd., n. 10 ad art. 163 CO).

  Il observera toutefois une certaine réserve, car les parties sont libres
de fixer le montant de la peine (art. 163 al. 1 CO) et les contrats doivent
en principe être respectés; une intervention du juge n'est nécessaire que si
le montant fixé est si élevé qu'il dépasse toute mesure raisonnable, au
point de n'être plus compatible avec le droit et l'équité (ATF 133 III 43
consid. 3.3.1; 114 II 264 consid. 1a).

  Une réduction de peine se justifie en particulier lorsqu'il existe une
disproportion crasse entre le montant convenu et l'intérêt du créancier à
maintenir la totalité de sa prétention, mesuré concrètement au moment où la
violation contractuelle est survenue. Pour juger du caractère excessif de la
peine conventionnelle, il ne faut pas raisonner abstraitement, mais, au
contraire, prendre en considération toutes les circonstances concrètes de
l'espèce. Il y a ainsi lieu de tenir compte notamment de la nature et de la
durée du contrat, de la gravité de la faute et de la violation
contractuelle, de la situation économique des parties, singulièrement de
celle du débiteur. Il convient

également de ne pas perdre de vue les éventuels liens de dépendance
résultant du contrat et l'expérience en affaires des parties. La protection
de la partie économiquement faible autorise davantage une réduction que si
sont concernés des partenaires économiquement égaux et habitués des affaires
(ATF 133 III 43 consid. 3.3.2 et 4.2 et les références).

  Il n'appartient pas au créancier de prouver que la peine stipulée est
appropriée, mais au débiteur d'alléguer et d'établir des faits qui
justifient une réduction (ATF 133 III 43 consid. 4.1; 114 II 264 consid.
1b).

  Le pouvoir d'appréciation du juge (art. 163 al. 3 CO; art. 4 CC) se
rapporte tant au caractère excessif de la peine qu'à la question de
l'étendue de la réduction (MOOSER, op. cit., n. 7 ad art. 163 CO).

  Si le juge reconnaît que la peine est excessive, il doit en principe
seulement la réduire pour qu'elle ne le soit plus (PETER GAUCH/WALTER R.
SCHLUEP/JÖRG SCHMID/HEINZ REY, Schweizerisches Obligationenrecht,
Allgemeiner Teil, 8e éd., vol. II, ch. 4052, p. 342). Autrement dit, il ne
doit pas la fixer au montant qu'il estimerait correct.

  5.3  Il sied en premier lieu de vérifier si la peine prévue dans le
contrat de vente était excessive ainsi que l'entend l'art. 163 al. 3 CO.

  Les acomptes payés par C. à la défenderesse avant la résiliation du
contrat par la venderesse pour inexécution imputable à l'acheteuse, dont la
recourante a gardé la totalité en application de l'art. 3 de l'accord,
atteignent la somme de 3'733'500 US$. Ce montant, très important par
lui-même, correspond à 21,21 % du prix de l'avion complètement aménagé et
équipé, lequel se montait à 17'595'000 US$.

  Certes, on doit admettre que les partenaires, deux sociétés actives dans
le commerce international, étaient égales sur le plan économique et
disposaient de la même expérience du monde des affaires.

  Il n'en demeure pas moins qu'une peine dépassant le 20 % du prix d'achat
fixé apparaît disproportionnée au vu des données de l'espèce. La recourante
n'avait en effet aucun intérêt exceptionnel à l'exécution du contrat passé
avec C., comme l'atteste le fait qu'elle a pu revendre l'avion à une société
tierce quelques mois après la caducité du contrat, soit le 18 octobre 1993
en tout cas, apparemment pour le même prix si l'on tient compte qu'à cette
dernière date l'avion était grevé d'une hypothèque de 13'000'000 US$ en
faveur du fabricant.

On voit donc que la rupture de l'accord litigieux n'a pas exposé en fin de
compte la défenderesse à un risque de dommage particulièrement important.

  En outre, la faute commise par C., consistant à n'avoir pas pu s'acquitter
d'un acompte en temps voulu, trouve sa source dans des circonstances très
spéciales tenant à la personne des ayants droit économiques de l'acheteuse,
lesquels avaient été arrêtés, puis assignés à résidence en Italie, sans
possibilité de communiquer avec des personnes non membres de leur famille,
dans le cadre d'enquêtes pour fraudes fiscales menées par les autorités
italiennes. Il n'apparaît pas que la faute contractuelle entrant en ligne de
compte soit d'une gravité particulière.

  En conclusion, il convient de retenir que les acomptes que la recourante a
pu conserver à la suite de la résiliation du contrat constituent pour les
demandeurs une peine conventionnelle manifestement déraisonnable, qu'il se
justifie de réduire. Le raisonnement de la Cour de justice est sur ce point
conforme au droit fédéral.

  5.4  La réduction d'une clause pénale excessive fait appel au pouvoir
d'appréciation du juge (arrêt 4C.172/2006 du 30 octobre 2006, consid. 4.5.1
non publié à l'ATF 133 III 43). Le Tribunal fédéral contrôle librement la
décision rendue dans l'exercice de ce pouvoir, mais il ne la revoit qu'avec
réserve. Il n'intervient que si l'autorité cantonale s'est écartée sans
raison des règles établies par la doctrine et la jurisprudence en matière de
libre appréciation ou lorsqu'elle s'est appuyée sur des faits qui, dans le
cas particulier, ne devaient jouer aucun rôle ou, à l'inverse, lorsqu'elle
n'a pas tenu compte d'éléments qui auraient absolument dû être pris en
considération (cf. arrêt 4C.172/2006, ibidem; ATF 130 III 504 consid. 4.1 p.
508).

  L'autorité cantonale a ramené la peine conventionnelle à la somme de
500'000 US$ au motif que la recourante n'avait pas allégué qu'elle aurait
subi un préjudice dépassant ce montant.

  Ce faisant, elle a déplacé le fardeau de la preuve, puisqu'il incombe au
débiteur (i.e. aux demandeurs) d'établir les conditions permettant une
réduction judiciaire de la peine convenue (ATF 133 III 43 consid. 4.1).

  Or, dans le cas présent, les intimés ne se sont pas prévalus de
circonstances particulières qui seraient susceptibles de faire admettre que
la clause pénale dût être réduite de manière draconienne ainsi

que l'ont admis les juges cantonaux, qui l'ont arrêtée à 500'000 US$, somme
qui ne représente qu'un peu plus du 13 % du montant convenu
contractuellement, qui, on le rappelle, était de 3'733'500 US$.

  Rien n'autorise cette réduction massive, laquelle porte atteinte, par son
ampleur, au principe même de la liberté contractuelle, dans la mesure où
sont concernées des parties contractantes se situant sur le même plan
économiquement parlant.

  Partant, la cour cantonale a violé le droit fédéral, et singulièrement les
art. 163 al. 3 CO et 4 CC, en abusant de son pouvoir d'appréciation.

  5.5  Reste toutefois à fixer la peine, en gardant à l'esprit que le juge
doit seulement la réduire pour qu'elle ne soit plus excessive (cf. consid.
5.2 ci-dessus in fine).

  Le législateur, à propos de la vente avec paiements préalables, a édicté
une norme, laquelle prévoit, en cas de demeure de l'acheteur n'ayant pas
encore demandé la livraison, que le vendeur, qui a résolu le contrat, ne
puisse notamment obtenir une peine conventionnelle dépassant le 10 % du prix
de la vente au comptant (cf. art. 227h al. 2, 2e phrase, CO). Dans la
législation sur la vente à tempérament, désormais abrogée, se trouvait une
disposition de contenu tout à fait analogue (cf. art. 226i al. 2, 2e phrase,
aCO).

  Dans deux précédents relativement anciens, le Tribunal fédéral a jugé
qu'une peine atteignant le 10 % du prix de vente arrêté n'était pas
excessive (arrêts 4C.96/1993 du 19 juillet 1993, consid. 3, 4C.178/1993 du
8 septembre 1993, consid. 3c).

  Tout bien considéré, le Tribunal fédéral, s'inspirant des solutions
précitées, décide de réduire la clause pénale convenue à 10 % du prix total
de l'avion, c'est-à-dire à la somme de 1'759'500 US$, laquelle représente
tout de même un peu plus du 47 % de la peine convenue conventionnellement.

  Il s'ensuit que la défenderesse, qui a conservé 3'733'500 US$ à titre
d'acomptes, devra restituer aux demandeurs, avec solidarité entre eux, le
montant de 1'974'000 US$ (3'733'500 US$ - 1'759'500 US$). Cette somme
portera intérêts à 5 % l'an dès le 6 août 1993, le dies a quo retenu par la
cour cantonale n'ayant fait l'objet d'aucune critique.