Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 132 V 159



Urteilskopf

132 V 159

  17. Extrait de l'arrêt dans la cause S. contre Fondation collective LPP de
la Rentenanstalt et Tribunal des assurances du canton de Vaud
  B 124/04 du 2 février 2006

Regeste

  Art. 26 Abs. 1 und Art. 41 Abs. 1 BVG (in der bis 31. Dezember 2004 gültig
gewesenen Fassung); Art. 29 Abs. 1 und Art. 48 Abs. 2 IVG; Art. 127 und 131
Abs. 1 OR: Zeitpunkt des Beginns des Anspruchs auf Invalidenleistungen der
beruflichen Vorsorge, welcher für die Bestimmung des Tages massgebend ist,
ab dem die Verjährungsfrist läuft.

  Der Verweis in Art. 26 Abs. 1 BVG auf die "Bestimmungen des Bundesgesetzes
vom 19. Juni 1959 über die Invalidenversicherung (Art. 29 IVG)", welche für
die Festsetzung des Beginns des Anspruches auf eine Rente der Beruflichen
Vorsorge sinngemäss gelten, betrifft einzig Art. 29 IVG, unter Ausschluss
von Art. 48 Abs. 2 IVG. (Erw. 4.4.2)

Sachverhalt ab Seite 159

  A.- S., née en 1954, a travaillé en qualité de manutentionnaire au service
de la société X. SA du 1er avril 1988 au 30 avril 1990. A ce titre, elle
était affiliée à la Fondation collective LPP de la Rentenanstalt (ci-après:
la Fondation).

  Par décision du 4 décembre 1997, l'Office de l'assurance-invalidité pour
le canton de Vaud a rejeté une demande de rente présentée le 29 juin 1995
par l'assurée.

  Saisi d'un recours contre cette décision, le Tribunal des assurances du
canton de Vaud, par jugement du 4 janvier 2000, a reconnu le droit de
l'assurée à une rente entière d'invalidité à partir du 1er juin 1994. Il a
considéré que l'intéressée présentait une incapacité de travail de 100 %
depuis le mois de juin 1992. La demande de prestations ayant été présentée
plus de douze mois après la naissance du droit, la rente ne pouvait
toutefois être allouée qu'à partir du 1er juin 1994, soit pour les douze
mois précédant le dépôt de la requête (art. 48 al. 2 LAI).

  Le Tribunal fédéral des assurances a confirmé ce jugement par arrêt du 29
janvier 2001 (I 356/00).

  Le 23 août 2000, l'assurée a requis l'octroi d'une rente d'invalidité de
la Fondation. Celle-ci a rejeté cette demande par écriture du 1er septembre
suivant, motif pris que le droit à la rente de l'assurance-invalidité était
né bien après la dissolution des rapports de prévoyance. L'intéressée a
réitéré sa requête par lettre du 17 octobre 2000, ce qui a donné lieu à un
échange de correspondance entre les parties. Par des courriers des 30 avril
et 4 août 2003, la Fondation a précisé les motifs de son refus, en indiquant
qu'il n'existait pas de rapport de connexité temporelle entre l'incapacité
de travail survenue durant les rapports de prévoyance et celle qui avait
entraîné une perte de gain justifiant l'octroi d'une rente entière de
l'assurance-invalidité à partir du 1er juin 1994.

  B.- Par mémoire déposé le 1er décembre 2003, S. a saisi le Tribunal des
assurances du canton de Vaud, en concluant à l'octroi d'une rente entière
d'invalidité de la prévoyance professionnelle à partir du 1er juin 1994.
Dans sa réponse, la Fondation a conclu au rejet de la demande, en soulevant
notamment l'exception de prescription du droit à prestations.

  Par jugement du 2 août 2004, la juridiction cantonale a rejeté la demande
de l'assurée, motif pris que son droit à une rente d'invalidité était
prescrit.

  C.- S. interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dont
elle demande l'annulation, en concluant, sous suite de dépens, au renvoi de
la cause à la juridiction cantonale pour nouveau jugement, compte tenu du
fait que son droit à prestations n'est pas prescrit.

  La Fondation conclut au rejet du recours, sous suite de dépens. L'Office
fédéral des assurances sociales a renoncé à présenter des déterminations.

Auszug aus den Erwägungen:

                        Extrait des considérants:

Erwägung 2

  2.  La novelle du 3 octobre 2003 modifiant la LPP (première révision) est
entrée en vigueur le 1er janvier 2005 (sous réserve de certaines
dispositions dont l'entrée en vigueur a été fixée au 1er avril 2004 et au
1er janvier 2006 [RO 2004 1700]), entraînant la modification de nombreuses
dispositions légales dans le domaine de la prévoyance professionnelle (RO
2004 1677).

  L'art. 41 LPP, dans sa version en vigueur jusqu'au 31 décembre 2004, avait
la teneur suivante:

    1. Les actions en recouvrement de créances se prescrivent par cinq ans
       quand elles portent sur des cotisations ou des prestations
       périodiques, par dix ans dans les autres cas. Les art. 129 à 142 du
       code des obligations sont applicables.

    2. L'al. 1 s'applique aussi aux actions fondées sur les contrats conclus
       entre institutions de prévoyance et institutions d'assurance soumises
       à la surveillance des assurances.

  Depuis le 1er janvier 2005, l'art. 41 LPP règle la prescription du droit
aux prestations de la manière suivante:

    1. Le droit aux prestations ne se prescrit pas pour autant que les
       assurés n'aient pas quitté l'institution de prévoyance lors de la
       survenance du cas d'assurance.

    2. Les actions en recouvrement de créances se prescrivent par cinq ans
       quand elles portent sur des cotisations ou des prestations
       périodiques, par dix ans dans les autres cas. Les art. 129 à 142 du
       code des obligations sont applicables.

  Lorsque, comme en l'occurrence, la loi ne contient pas de disposition
transitoire en ce qui concerne le régime de prescription applicable, la
jurisprudence et la doctrine considèrent que la nouvelle réglementation est
applicable aux prétentions relevant de l'ancien droit, si celles-ci, bien
que nées et exigibles avant l'entrée en vigueur du nouveau droit, ne sont
pas encore prescrites ou périmées à ce moment-là (ATF 131 V 429 consid. 5.2,
111 II 193, 107 Ib 203 s. consid. 7b/aa, 102 V 207 consid. 2;
RHINOW/KRÄHENMANN, Schweizerische Verwaltungsrechtsprechung, Ergänzungsband,
no 15 B III d;

ATTILIO GADOLA, Verjährung und Verwirkung im öffentlichen Recht, in: PJA
1995 p. 58).

  Dans le cas particulier, il y a lieu d'examiner si le droit de la
recourante à une rente d'invalidité de la prévoyance professionnelle était
prescrit le 1er janvier 2005, date de l'entrée en vigueur de l'art. 41 LPP
modifié.

Erwägung 3

  3.  Selon la jurisprudence rendue sous l'empire de l'art. 41 aLPP, la
solution consacrée par cette disposition, qui s'inspire directement des art.
127 et 128 CO (lesquels sont applicables à la prévoyance plus étendue) a
pour résultat, dans le cas d'une rente d'invalidité, que chacun des
arrérages se prescrit par cinq ans dès l'exigibilité de la créance en
application de l'art. 130 al. 1 CO, alors que le droit de percevoir les
rentes comme tel, qui ne revêt pas de caractère périodique, se prescrit dans
le délai ordinaire de dix ans dès le jour de l'exigibilité du premier terme
demeuré impayé, conformément à l'art. 131 al. 1 CO (ATF 124 III 451 s.
consid. 3b, 117 V 332 consid. 4; arrêt Hoirs F. du 4 août 2000, B 9/99,
résumé dans RSAS 2003 p. 48 et SJ 2001 II p. 215 [consid. 2]).

  L'exigibilité d'une prestation de la prévoyance professionnelle se situe
lors de la naissance du droit à ladite prestation selon les dispositions
légales et réglementaires qui lui sont applicables (ATF 126 V 263 consid.
3a, 117 V 308 consid. 2c; cf. aussi ATF 124 V 276).

Erwägung 4

  4.

  4.1  Aux termes de l'art. 26 al. 1 LPP, les dispositions de la loi
fédérale du 19 juin 1959 sur l'assurance-invalidité (art. 29 LAI)
s'appliquent par analogie à la naissance du droit aux prestations
d'invalidité.

  Selon l'art. 15 al. 1 du règlement de l'intimée concernant l'oeuvre de
prévoyance de l'entreprise X. SA (ci-après: le règlement), la rente
d'invalidité est exigible dès l'expiration d'un délai d'attente de douze
mois, mais au plus tard à partir du même moment que celle de
l'assurance-invalidité.

  4.2  La juridiction cantonale a fixé le moment de la naissance du droit à
la rente d'invalidité sur la base de l'art. 26 al. 1 LPP, considérant que le
renvoi de cette norme aux dispositions de la LAI concerne uniquement l'art.
29 LAI (en l'occurrence l'art. 29 al. 1 let. b LAI) à l'exclusion de l'art.
48 al. 2 LAI. Aussi a-t-elle jugé que le droit à la rente d'invalidité de la
prévoyance professionnelle est né le 1er juin 1993, soit à l'expiration de
la période de carence

d'une année prévue à l'art. 29 al. 1 let. b LAI en ce qui concerne la rente
de l'assurance-invalidité, indépendamment du fait que celle-ci n'a été
allouée qu'à partir du 1er juin 1994 en raison de la tardiveté de la demande
(art. 48 al. 2 LAI). Aussi, le droit à une rente d'invalidité était-il
prescrit le 1er décembre 2003, date à laquelle la demande en justice a été
déposée.

  La recourante conteste ce jugement en faisant valoir que le droit à la
rente de l'assurance-invalidité n'était exigible qu'à partir du 1er juin
1994 en raison de la tardiveté de la demande, de sorte que la rente de la
prévoyance professionnelle est née à cette date-là et qu'elle n'était donc
pas prescrite au moment du dépôt de la demande en justice. En effet,
l'exigibilité de la rente de l'assurance-invalidité, même si elle est
reportée en raison de la tardiveté de la demande, est déterminante pour
fixer le moment de la naissance du droit à la rente de la prévoyance
professionnelle.

  De son côté, la fondation intimée réfute le point de vue de la recourante
en faisant valoir que l'art. 26 al. 1 LPP renvoie exclusivement à l'art. 29
LAI, de sorte que l'art. 48 al. 2 LAI est sans effet pour la fixation du
moment de la naissance du droit à la rente de la prévoyance professionnelle.

  4.3  La doctrine est partagée quant au point de savoir si le renvoi de
l'art. 26 al. 1 LPP aux "dispositions" de la LAI englobe ou non l'art. 48
al. 2 LAI.

  Selon MARKUS MOSER, l'institution de prévoyance n'est pas fondée à
invoquer le délai de péremption institué par l'art. 48 al. 2 LAI (sur la
nature de ce délai, cf. ATF 115 V 24 consid. 3a, 102 V 113 consid. 1a) pour
reporter la date de l'exigibilité de la rente de la prévoyance
professionnelle (MARKUS MOSER, Die Zweite Säule und ihre Tragfähigkeit,
thèse Bâle 1992, p. 283). Selon HANS-ULRICH STAUFFER, en revanche, l'art. 26
al. 1 LPP permet à l'institution de prévoyance de calquer le début du droit
aux prestations sur celui du droit à la rente de l'assurance-invalidité même
si celle-ci a été reportée en raison d'une demande tardive au sens de l'art.
48 al. 2 LAI (HANS-ULRICH STAUFFER, Berufliche Vorsorge, Zurich 2005, p. 287
§ 772).

  4.4
  4.4.1  La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre. Selon la
jurisprudence, il n'y a lieu de déroger au sens littéral d'un texte clair
par voie d'interprétation que lorsque des raisons objectives permettent

de penser que ce texte ne restitue pas le sens véritable de la disposition
en cause. De tels motifs peuvent découler des travaux préparatoires, du but
et du sens de la disposition, ainsi que de la systématique de la loi (ATF
131 V 93 consid. 4.1, 128 consid. 5.1, 130 V 232 consid. 2.2, 129 II 118
consid. 3.1, 125 II 196 consid. 3a et les références).

  Si le texte légal n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations
de celui-ci sont possibles, il convient de rechercher quelle est la
véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à
considérer (ATF 130 II 71 consid. 4.2, 130 V 50 consid. 3.2.1, 232 consid.
2.2 et les références). Si la prise en compte d'éléments historiques n'est
pas déterminante pour l'interprétation, cette dernière doit néanmoins
s'appuyer en principe sur la volonté du législateur et sur les jugements de
valeur qui la sous-tendent de manière reconnaissable, tant il est vrai que
l'interprétation des normes légales selon leur finalité ne peut se justifier
par elle-même, mais doit au contraire être déduite des intentions du
législateur qu'il s'agit d'établir à l'aide des méthodes d'interprétation
habituelles (ATF 131 III 35 consid. 2, 65 consid. 2.2, 128 I 40 consid. 3b).

  4.4.2  En matière de prévoyance professionnelle obligatoire, il existe une
relation étroite, voulue par le législateur, entre le droit à une rente
d'invalidité en vertu du premier pilier et celui à une rente du même genre
du deuxième pilier (Message du Conseil fédéral à l'appui d'un projet de loi
sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité, du
19 décembre 1975, FF 1976 I 142 et 200). Dans son commentaire de l'art. 24
al. 1 du projet de LPP, qui correspond à l'art. 26 al. 1 LPP, le Conseil
fédéral a indiqué que cette réglementation a pour but de coordonner le début
du droit aux prestations de la prévoyance professionnelle et le début du
droit à la rente de l'assurance-invalidité. On part de l'idée que durant la
période de carence prévue à l'art. 29 al. 1 (let. b) LAI, les indemnités
journalières de l'assurance-maladie ou de l'assurance-accidents remplacent
le salaire manquant, de sorte que l'octroi d'une rente de la prévoyance
professionnelle n'est pas non plus nécessaire aux invalides pour maintenir
leur niveau de vie antérieur de façon appropriée (message précité, FF 1976 I
125, 201).

  Selon la jurisprudence, la date à laquelle la demande est déposée (art. 67
RAI) détermine le début du versement de la rente de l'assurance-invalidité
mais non pas la naissance du droit qui peut fort

bien être antérieure (ATF 117 V 26, 108 V 75 consid. 2a; RCC 1966 p. 56
consid. 2). C'est pourquoi le moment de la naissance du droit à la rente de
l'assurance-invalidité ne se confond pas avec le début du versement de cette
prestation lorsque celui-ci est différé en raison de la tardiveté de la
demande, en application de l'art. 48 al. 2 LAI. Dans cette éventualité, la
période de carence déterminant le début du droit à la rente de
l'assurance-invalidité était déjà écoulée en tout ou en partie avant le
début du versement de cette prestation, de sorte que les motifs qui ont
présidé à l'adoption de l'art. 26 al. 1 LPP ne justifient pas de faire
coïncider la naissance du droit à la rente de la prévoyance professionnelle
avec le début du versement différé de la rente de l'assurance-invalidité.

  Cela étant, il y a lieu d'interpréter l'art. 26 al. 1 LPP en ce sens que
le renvoi aux "dispositions de la loi fédérale du 19 juin 1959 sur
l'assurance-invalidité (art. 29 LAI)" applicables par analogie pour fixer la
naissance du droit à la rente de la prévoyance professionnelle vise
uniquement l'art. 29 LAI, à l'exclusion de l'art. 48 al. 2 LAI. Du reste,
c'est bien ainsi que le Tribunal fédéral des assurances a interprété la
disposition en cause dans un arrêt D. du 1er septembre 1999, B 51/98 (RSAS
2001 p. 82 et PJA 2001 p. 445), dans lequel le début de l'incapacité de
travail déterminante pour la naissance du droit à la rente de la prévoyance
professionnelle a été fixé à la lumière de l'art. 29 al. 1 LAI, quand bien
même le versement de la rente de l'assurance-invalidité avait été différé
bien au-delà du terme de la période de carence, en raison de la tardiveté de
la demande.

  En l'occurrence, dans la mesure où il dispose que la rente d'invalidité
est exigible dès l'expiration d'un délai d'attente de douze mois, mais au
plus tard à partir du même moment que celle de l'assurance-invalidité,
l'art. 15 al. 1 du règlement de la Fondation ne déroge pas à l'art. 26 al. 1
LPP.

  4.4.3  En l'espèce, la naissance du droit à la rente de la prévoyance
professionnelle - et son exigibilité (cf. consid. 3) - doit être fixée au
1er juin 1993, soit à l'expiration de la période de carence prévue à l'art.
29 al. 1 let. b LAI en ce qui concerne la rente de l'assurance-invalidité
(arrêt du 29 janvier 2001 [I 356/00], consid. 3d). Par ailleurs, il est
constant qu'aucun acte interruptif de prescription au sens de l'art. 135 CO
n'a été effectué avant le dépôt de la demande en justice, le 1er décembre
2003. Aussi, en application de l'art. 41

LPP dans son ancienne teneur, le droit de percevoir la rente était-il
prescrit à cette date. Du moment que la prescription est survenue avant
l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2005, de l'art. 41 LPP modifié, celui-ci
n'est pas applicable dans le cas particulier (cf. consid. 2).

  Il suit de là que le jugement attaqué n'est pas critiquable et le recours
se révèle mal fondé.