Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 132 IV 140



Urteilskopf

132 IV 140

  20. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale dans la cause X.
contre Ministère public du canton de Neuchâtel, Direction générale des
douanes et Ministère public de la Confédération (pourvoi en nullité)
  6S.331/2006 du 23 novembre 2006

Regeste

  Art. 74 und 75 Abs. 1 und 2 ZG; Art. 2 und 8 VStrR; Art. 48 Ziff. 2, Art.
63 und 333 Abs. 1 StGB; Zollwiderhandlung; Verwaltungsbusse; Bemessung des
Bussenbetrags.
  Art. 48 Ziff. 2 StGB ist auf Zollbussen über 5000 Franken uneingeschränkt
anwendbar (E. 6).

Sachverhalt ab Seite 140

  Entre le 1er avril 1993 et le 23 octobre 1995, X., citoyen italien né en
1954, chauffeur de poids lourds de profession, a importé en Suisse, sans les
déclarer à la douane, 614 tonnes de viandes diverses, d'une valeur totale
supérieure à neuf millions de francs. Il a par ce biais réalisé un gain
supérieur à un million. Le montant des droits de douane éludés représente
environ 490'000 francs, celui de la TVA soustraite environ 58'000 francs.

  La Direction générale des douanes (DGD) a rendu à l'encontre de X. une
décision d'assujettissement à la prestation fixant les redevances d'entrée
dues à 475'170 francs. Elle a en outre renvoyé la cause aux autorités
pénales du canton de Neuchâtel.

  Par jugement du 10 décembre 2003, le Tribunal correctionnel du district de
Boudry a condamné X. à douze mois d'emprisonnement sans sursis et à 300'000
francs d'amende, peine complémentaire à cinq condamnations précédentes.

  Le 27 août 2004, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal a
partiellement admis un recours de X., annulant le jugement attaqué et
renvoyant la cause au juge de première instance pour nouveau jugement dans
le sens des considérants.

  Par nouveau jugement du 3 février 2005, le Tribunal correctionnel du
district de Boudry a reconnu X. coupable de contraventions douanières
aggravées (art. 74, 75 al. 2 et art. 82 ch. 2 de la loi fédérale du 1er
octobre 1925 sur les douanes [LD; RS 631.0]), d'infractions à la loi
fédérale du 1er juillet 1966 sur les épizooties (art. 47 LFE [RS 916.40]) et
de soustraction aggravée de l'impôt sur les importations (art. 77 al. 2 de
l'ordonnance du 22 juin 1994 régissant la taxe à la valeur ajoutée [OTVA; RO
1994 p. 1464]). Il l'a condamné à une peine de six mois d'emprisonnement
assortie du sursis ainsi qu'à 250'000 francs d'amende, le tout à titre de
peine complémentaire à cinq condamnations antérieures.

  Le 13 juin 2006, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal a rejeté
un nouveau recours de X.

  X., agissant seul, a interjeté un pourvoi en nullité auprès du Tribunal
fédéral.

  Le Ministère public du canton de Neuchâtel, le Ministère public de la
Confédération et la Direction des douanes ont été invités à déposer des
observations. Les deux premiers y ont renoncé; la dernière a conclu au rejet
du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                        Extrait des considérants:

Erwägung 6

  II. Pourvoi en nullité

  6.  Le recourant invoque enfin une violation des art. 48 et 63 CP dans le
cadre de la fixation du montant de l'amende à 250'000 francs.

  6.1  Le maximum de l'amende en cas de contravention douanière aggravée
correspond à trente fois le droit éludé ou compromis (art. 75 al. 1 et 2
LD). L'amende fixée est donc largement en-dessous du maximum légal. Le
recourant ne le conteste pas, mais soutient en particulier qu'elle a été
fixée en violation des critères de l'art. 48 ch. 2 CP dès lors qu'il n'a pas
été tenu compte de sa situation financière obérée.

  A teneur de cette disposition, le juge fixera le montant de l'amende
d'après la situation du condamné, de façon que la perte à subir par ce
dernier constitue une peine correspondant à sa culpabilité. Pour apprécier
la situation du condamné, il tiendra compte notamment du revenu et du
capital, de l'état civil et des charges de famille, de la profession et du
gain professionnel, de l'âge et de l'état de santé.

  6.2  Dans un arrêt rendu en 1946, le Tribunal fédéral avait jugé que
l'art. 48 ch. 2 CP ne s'appliquait pas en matière d'amendes douanières.
Selon cet arrêt, le calcul de l'amende douanière obéit à des règles qui ne
se concilient pas avec les principes consacrés par cette disposition car
l'amende douanière ne tend pas à l'expiation et à l'amendement du condamné
comme en droit commun, mais, comme en droit fiscal, à réparer la perte
fiscale et à protéger la collectivité. La répression serait en outre rendue
presque illusoire si l'amende devait dépendre de la situation financière du
condamné, la contrebande étant souvent l'industrie d'insolvables. Le
Tribunal fédéral en a déduit que le législateur de 1937, en édictant l'art.
333 al. 1 CP, n'avait certainement pas songé à changer le régime antérieur
consistant à fixer la peine sans se soucier de sa fortune ni de ses revenus,
la loi sur les douanes contenant ainsi des dispositions implicites sur la
matière, l'art. 333 CP ne renvoyait pas à l'art. 48 CP (ATF 72 IV 188; cf.
ATF 74 IV 25).

  Le 22 mars 1974, le législateur a adopté la loi fédérale sur le droit
pénal administratif (DPA; RS 313.0). A l'origine du projet de loi, il y
avait une motion tendant à la révision de la procédure pénale douanière
(message du 21 avril 1971, FF 1971 I 1017). L'art. 2 DPA précise que les
dispositions du code pénal sont applicables aux actes réprimés par la
législation administrative fédérale, à moins que la DPA ou une loi
administrative spéciale n'en dispose autrement. Par ailleurs, l'art. 8 DPA
dit que les amendes n'excédant pas 5000 francs sont fixées selon la gravité
de l'infraction et de la faute, sans qu'il soit nécessaire de tenir compte
d'autres éléments d'appréciation. A ce sujet, le message relève que les
opinions sur la portée et sur le but de l'amende douanière ont changé depuis
le temps où a été rendu l'arrêt du Tribunal fédéral précité et que l'art. 48
ch. 2 CP sera applicable en droit pénal administratif, y compris en droit
pénal fiscal, pour les amendes dépassant 5000 francs (message, FF 1971 I
1030). La doctrine admet que l'art. 48 ch. 2 CP est depuis lors pleinement
applicable aux amendes administratives supérieures à 5000 francs (JEAN
GAUTHIER, Droit administratif et

droit pénal, RDS 90/1971 II p. 354; ERNST BLUMENSTEIN/PETER LOCHER, System
des Steuerrechts, 5e éd., Zurich 1995, p. 336 s.; cf. ATF 114 Ib 27 consid.
4A; 116 IV 262 consid. 3b/aa).

  Le Tribunal fédéral a par la suite jugé que l'art. 48 ch. 2 CP
s'appliquait en cas de contravention douanière (art. 74 LD) en vertu du
renvoi de l'art. 2 DPA et de l'art. 333 al. 1 CP. Le juge doit donc d'abord
déterminer, selon les critères de l'art. 63 CP, dans quelle mesure l'accusé
doit être frappé d'une sanction pénale. Il doit ensuite, en fonction de la
situation financière de l'accusé, fixer la quotité de l'amende de manière
qu'il soit frappé dans la mesure adéquate. L'amende doit être déterminée en
fonction de la situation financière au moment où elle est prononcée, afin
que la sanction soit adéquate au moment où elle doit être subie (ATF 119 IV
330 consid. 3).

  6.3  En l'espèce, la Cour de cassation cantonale, reprenant les motifs du
Tribunal correctionnel, a relevé que la situation financière du recourant
était difficile à cerner; ses constatations sont minces. Elle a cependant
tout de même retenu que le recourant n'avait probablement plus de fortune
mais des dettes assez importantes et qu'il réalisait avec son épouse un
revenu mensuel de 5000 à 6000 francs. L'amende de 250'000 francs correspond
ainsi à quatre ans de revenu au moins. A défaut de fortune, ce revenu
modeste, les dépenses nécessaires du couple une fois déduites, ne permet
simplement pas au recourant de payer une amende d'un tel montant avant la
cessation de son activité professionnelle pour raison d'âge. Il y a
violation de l'art. 48 ch. 2 CP.

  Le Tribunal correctionnel a, au demeurant, motivé le montant de l'amende
essentiellement par le fait, d'une part, que le recourant avait réalisé un
bénéfice de plus d'un million de francs et qu'il ne convenait pas, dans ces
circonstances, de prononcer une amende très réduite, au risque de faire
croire que le crime paie, et, d'autre part, que certains de ses clients dans
le trafic de viande avaient payé des amendes de plusieurs dizaines de
milliers de francs, voire de 175'000 et 255'000 francs. Ces motifs sont
étrangers à l'art. 48 ch. 2 CP. C'est en particulier la confiscation (art.
59 CP) et non la sanction pénale qui tend à empêcher le délinquant de tirer
profit de l'infraction. Quant à l'égalité de traitement avec des coaccusés,
elle implique aussi de tenir compte de la situation financière des diverses
personnes concernées.

  Le grief tiré d'une violation de l'art. 48 ch. 2 CP est, partant, fondé.
Il s'ensuit l'admission partielle du pourvoi. Les points autres que l'amende
restent acquis.