Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 132 II 178



Urteilskopf

132 II 178

  16. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public dans la cause
société A. contre Office fédéral de la justice, Office central USA (recours
de droit administratif)
  1A.326/2005 du 1er mars 2006

Regeste

  Art. 1 Abs. 3 und Art. 63 IRSG.

  Das US-amerikanische zivilrechtliche Verfahren zur Einziehung deliktisch
erlangter Vermögenswerte kann einem Strafverfahren gleichgesetzt werden,
sofern die mit dem Einziehungsfall befassten Behörden befugt sind, eine
strafrechtliche Beurteilung vorzunehmen (E. 3-5).

Sachverhalt ab Seite 178

  Le 19 juillet 2004, le Ministère de la Justice des Etats-Unis d'Amérique a
adressé à la Suisse une demande d'entraide judiciaire, dans le cadre d'une
procédure ouverte par le Procureur fédéral pour l'arrondissement central de
la Californie. Les faits sont en résumé les

suivants. B., citoyen américain, aurait détourné plusieurs dizaines de
millions de dollars au préjudice de la société de placement C. (Séoul),
qu'il dirigeait. Simultanément, il aurait pris le contrôle de la société
coréenne D., par le biais de sociétés du Nevada. Il aurait ensuite fait
intervenir des sociétés d'investissement fictives et ouvert à leurs noms de
nombreux comptes en Corée du Sud. Ces sociétés auraient investi dans D. une
partie des sommes détournées. Les bénéfices de ces opérations, transférés
aux Etats-Unis, auraient permis de faire croire à des investissements
étrangers pour attirer de nouveaux investisseurs. Ainsi, 24 millions de
dollars seraient parvenus sur des comptes en Californie, investis dans des
biens immobiliers et des produits de luxe, ou répartis sur différents
comptes bancaires. Parmi ceux-ci figure un compte ouvert en Suisse au nom de
la société A. (ci-après: A.). Arrêté en décembre 2001 en Corée du Sud pour
les détournements au préjudice de C., B. avait été libéré et s'était enfui
aux Etats-Unis. Il y avait été arrêté le 27 mai 2004 à la demande des
autorités coréennes, pour les faits relatifs à D. La procédure d'extradition
était toujours en cours. La demande d'entraide américaine tend à l'obtention
de renseignements sur le compte précité, ainsi que sur tout autre compte lié
aux personnes impliquées.

  Le 30 août 2004, l'Office central USA est entré en matière. Le blocage du
compte de A., ordonné le 18 mai 2004 à titre de mesure provisoire, a été
confirmé.

  A. a formé opposition contre les mesures provisoires et contre la décision
d'entrée en matière.

  A l'invitation de l'Office central, l'autorité requérante a précisé que
l'entraide judiciaire était exclusivement requise pour les besoins de la
procédure civile de confiscation (Civil Forfeiture). Cette procédure visait
l'instrument ou le produit d'actes illicites, indépendamment d'une
accusation ou d'une condamnation de l'auteur. En l'occurrence, trois actions
de ce genre étaient pendantes devant un tribunal du District central de
Californie, visant tous les avoirs de B. et de son épouse, aux Etats-Unis ou
en Suisse. Les victimes, notamment en Corée du Sud, pourraient prétendre à
la restitution des biens confisqués.

  Par décision du 11 novembre 2005, l'Office central a rejeté les
oppositions. L'entraide requise n'entrait pas dans le cadre du TEJUS. Elle
pouvait toutefois être accordée sur la base de l'EIMP. La procédure

américaine de confiscation présentait de nombreuses analogies avec celle
prévue aux art. 58 et 59 CP. Elle pouvait donc être assimilée à une "affaire
pénale" au sens de l'EIMP. La possibilité de confisquer en l'absence de
condamnation était également prévue en droit suisse, même si les exigences
en matière de preuve paraissaient plus élevées. La compétence de l'Etat
requérant n'était pas contestable. La condition de la double incrimination
était satisfaite, s'agissant d'actes de gestion déloyale et de blanchiment.

  Agissant par la voie du recours de droit administratif, A. demande au
Tribunal fédéral d'annuler les décisions de l'Office central.

  Le Tribunal fédéral a admis le recours au sens des considérants et renvoyé
la cause à l'Office central afin qu'il obtienne de l'autorité requérante les
précisions nécessaires quant à la compétence pénale des autorités
américaines.

Auszug aus den Erwägungen:

                        Extrait des considérants:

Erwägung 2

  2.  Invoquant les art. 1 al. 3 et 63 in fine EIMP (RS 351.1), la
recourante conteste que la procédure américaine de confiscation civile
(Civil Forfeiture) puisse donner lieu à l'entraide judiciaire pénale de la
part de la Suisse. Le large recours à cette procédure, de préférence à la
confiscation pénale également connue du droit américain, s'expliquerait par
ses avantages procéduraux, en particulier sous l'angle de la preuve. La
confiscation civile serait totalement indépendante de toute procédure
pénale, et ne saurait être comparée à la confiscation prévue aux art. 58 et
59 CP: la présomption d'innocence ne s'appliquerait pas et le fardeau de la
preuve serait renversé. Pour les mêmes raisons, la mesure de blocage du
compte serait disproportionnée.

  2.1  L'Office central a considéré que le Traité du 25 mai 1973 entre la
Confédération Suisse et les Etats-Unis d'Amérique sur l'entraide judiciaire
en matière pénale (TEJUS; RS 0.351.933.6) n'était pas applicable à la
présente cause. En effet, l'entraide judiciaire n'est pas requise pour les
besoins d'une procédure pénale proprement dite, mais pour une procédure de
confiscation. Or, les procédures de restitution pour lesquelles l'entraide
judiciaire peut être accordée en vertu du Traité sont limitées aux objets ou
valeurs appartenant à l'Etat requérant lui-même (art. 1 al. 1 let. b TEJUS).
L'art. 5 al. 3 let. a TEJUS prévoit certes l'utilisation des renseignements
pour une procédure en paiement de dommages-intérêts, mais cela suppose

que l'entraide judiciaire a préalablement été accordée sur la base du Traité
(cf. également l'art. 1 al. 1 let. c TEJUS).

  Si le droit conventionnel ne prévoit pas expressément un certain mode de
collaboration, cela n'empêche pas la Suisse de l'accorder en vertu des
dispositions de son droit interne, soit de l'EIMP. La jurisprudence
constante permet en effet l'application du droit interne lorsque celui-ci
apparaît plus favorable à la coopération que le droit conventionnel (ATF 123
II 134 consid. 1a p. 136; 122 II 140 consid. 2 p. 142; 120 Ib 120 consid. 1a
p. 122/123, 189 consid. 2a p. 191/ 192; 118 Ib 269 consid. 1a p. 271, et les
arrêts cités). L'Office central a ainsi estimé que la procédure de
confiscation pouvait, en elle-même, être considérée comme une "affaire
pénale" au sens de l'art. 1 al. 3 EIMP, de sorte qu'il n'était pas
nécessaire de rechercher s'il existait une poursuite pénale ouverte à
l'encontre de B. dans l'Etat requérant. Cette question doit être examinée en
premier lieu.

  2.2  La coopération judiciaire internationale en matière pénale ne peut
être accordée, par définition, que pour la poursuite d'infractions pénales
dont la répression relève de la compétence des autorités judiciaires de
l'Etat requérant (art. 1 al. 3 EIMP; cf. aussi l'art. 1 al. 1 let. a TEJUS;
ZIMMERMANN, La coopération judiciaire internationale en matière pénale,
Berne 2004, p. 373). Il faut, en d'autres termes, qu'une action pénale soit
ouverte dans l'Etat requérant (arrêt 1A.32/2000 du 19 juin 2000, consid. 7
non publié à l'ATF 126 II 258). Cela n'implique pas nécessairement une
inculpation ou une mise en accusation formelle; une enquête préliminaire
suffit, pour autant qu'elle puisse aboutir au renvoi d'accusés devant un
tribunal compétent pour réprimer les infractions à raison desquelles
l'entraide est demandée (ATF 123 II 161 consid. 3a p. 165; 118 Ib 457
consid. 4b p. 460; 116 Ib 452 consid. 3a p. 460/461, et les arrêts cités).

  La collaboration judiciaire de la Suisse a ainsi pu être accordée pour des
enquêtes menées par des autorités administratives, dans la mesure où
celles-ci constituaient le préalable à la saisine des autorités judiciaires
compétentes pour procéder à une mise en accusation (ATF 109 Ib 50 consid. 3
concernant la Securities and Exchange Commission) et pouvaient aboutir au
renvoi devant un juge pénal (ATF 121 II 153). L'entraide est aussi accordée
pour des procédures préliminaires, lorsque l'Etat requérant déclare d'emblée
et clairement qu'il a la volonté d'ouvrir une procédure pénale (ATF 113 Ib
257 consid. 5 p. 271).

  Les renseignements transmis par la Suisse peuvent également servir à des
procédures connexes à la procédure pénale, par exemple une procédure civile
destinée à indemniser la victime de l'infraction (ATF 122 II 134 consid. 7
p. 136), une enquête menée par une commission parlementaire (ATF 126 II 316
consid. 4 p. 322), voire une procédure administrative destinée à résoudre
une question préjudicielle décisive pour le procès pénal (ATF 128 II 305).
Il s'agit dans ces cas d'une exception à la règle de la spécialité, soumise
à l'approbation de l'office fédéral (art. 67 al. 2 EIMP), qui nécessite un
rapport de connexité avec la procédure pénale. Ce mode d'entraide est dit
"secondaire", puisqu'il présuppose toujours l'existence d'une entraide
"primaire" - strictement pénale - pour laquelle les renseignements ont été
transmis.

  En revanche, le droit suisse de l'entraide judiciaire pénale ne saurait
servir de base à la collaboration de la Suisse pour des procédures
strictement administratives ou à des procédures civiles conduites à
l'étranger (ATF 113 Ib 257 consid. 5 p. 270). Une requête d'entraide pénale
formée aux seules fins de détourner les règles de l'entraide civile devrait
être considérée comme abusive (ATF 122 II 134 consid. 7b p. 137).

  2.3  En l'occurrence, l'autorité requérante expose que les renseignements
bancaires sont destinés exclusivement à la procédure de confiscation des
biens obtenus frauduleusement, procédure fondée sur les art. 1355 du titre
28 et 981 du titre 18 du code des Etats-Unis. Il s'agit d'une procédure de
caractère civil, indépendante de toute poursuite ou de toute condamnation de
l'auteur des infractions. Bien que citoyen américain, B. se trouve en
détention extraditionnelle aux Etats-Unis, à la demande de la Corée du Sud.
Il semble ainsi que l'Etat requérant n'ait pas l'intention, du moins dans
l'immédiat, d'ouvrir une procédure pénale à raison des faits qui motivent sa
demande d'entraide.

  A défaut d'une procédure pénale proprement dite, il y a lieu de rechercher
si la procédure de confiscation pourrait, en tant que telle, être assimilée
à une cause de nature pénale.

Erwägung 3

  3.  La question de savoir si la procédure étrangère a un caractère pénal
au sens des art. 1 al. 3 et 63 EIMP, doit être résolue selon les conceptions
du droit suisse. A cet égard, la dénomination de la procédure étrangère
n'est pas déterminante, pas plus en principe que les spécificités
procédurales que peuvent présenter les systèmes juridiques

anglo-américains, notamment en ce qui concerne le tribunal appelé à statuer
sur la contestation et les règles relatives à la preuve (arrêt 1A.86/1990 du
8 octobre 1990).

  3.1  Selon les explications fournies par l'autorité requérante, la
procédure de confiscation civile est dirigée non pas contre l'auteur de
l'infraction, mais contre un bien ayant servi à commettre un délit, ou
constituant le produit d'une infraction. Il s'agit d'une action "in rem",
indépendante de toute poursuite à l'encontre de l'auteur, dans laquelle le
ministère public doit apporter la preuve "prépondérante" d'un lien entre les
valeurs à confisquer et les infractions. Les dispositions applicables à
cette procédure figurent dans la section 981, chapitre 46 du titre 18 du
code des Etats-Unis, intitulé "Crimes and Criminal Procedures".

  La procédure pénale américaine connaît également une confiscation pénale,
mais celle-ci, considérée comme une sanction, nécessite la poursuite et la
condamnation de l'auteur de l'infraction (DAAMS, Criminal Assets Forfeiture,
Nijmegen 2003, p. 35). La confiscation civile permet ainsi de pallier cette
conception restrictive et autorise une confiscation dans les autres cas où
elle serait également ordonnée selon le droit suisse.

  3.2  L'Office central a considéré que cette procédure de confiscation
civile avait un caractère pénal, notamment parce qu'elle s'apparente aux
mesures prévues aux art. 58 et 59 CP.

  La recourante relève quant à elle que l'usage extensif de la procédure de
Criminal Forfeiture, facilitée par l'application des règles de la procédure
civile, ferait l'objet de critiques aux Etats-Unis. En droit suisse, une
confiscation ne serait pas possible lorsque l'autorité pénale refuse
délibérément d'exercer une poursuite.

Erwägung 4

  4.  En droit suisse, la confiscation fait partie des "autres mesures"
prévues aux art. 57 ss CP. Selon l'art. 59 CP, le juge prononcera la
confiscation des valeurs patrimoniales qui sont le résultat d'une infraction
ou qui étaient destinées à décider ou à récompenser l'auteur d'une
infraction, si elles ne doivent pas être restituées au lésé en
rétablissement de ses droits (ch. 1 al. 1). A l'instar de la confiscation
d'objets dangereux (art. 58 CP), la confiscation de valeurs patrimoniales
est possible "alors même qu'aucune personne déterminée n'est punissable",
c'est-à-dire lorsque l'auteur de l'infraction ne peut être identifié, qu'il
est décédé ou irresponsable ou qu'il ne peut être poursuivi en Suisse pour
d'autres raisons, par exemple parce qu'il

s'est enfui à l'étranger et qu'il n'a pas été extradé (ATF 128 IV 145
consid. 2c). Dans tous les cas, la confiscation suppose réunis les éléments
constitutifs objectifs et subjectifs d'une infraction - même si la
culpabilité de son auteur n'est pas examinée - et un lien entre celle-ci et
les objets à confisquer. La confiscation ne constitue pas une sanction in
personam, mais une mesure "in rem". Elle possède également un caractère
répressif, puisqu'elle tend à empêcher l'auteur de bénéficier du produit de
l'infraction (VOUILLOZ, La confiscation en droit pénal - art. 58 ss CP, PJA
2001 p. 1387, 1388). Dans le cas visé à l'art. 59 ch. 3 CP (confiscation des
avoirs d'une organisation criminelle), la confiscation a également un but
préventif (ATF 131 II 169 consid. 9).

  La procédure de confiscation peut être menée de manière accessoire, dans
le cadre d'une procédure pénale ouverte en Suisse; elle fait alors partie du
jugement pénal. Lorsqu'aucune procédure pénale n'est ouverte (par exemple en
cas d'absence de plainte, pour des infractions poursuivies sur plainte - ATF
129 IV 305 -, ou en cas de renonciation à la poursuite pénale pour des
motifs d'opportunité) ou lorsqu'elle n'a pas abouti à un jugement, une
procédure indépendante peut être ouverte par l'autorité du lieu de situation
de l'objet à confisquer.

  4.1  Les mesures de confiscation, tant en droit suisse qu'américain,
constituent un instrument de la lutte contre la criminalité, visant à la
suppression de l'avantage illicite, afin que "le crime ne paie pas". Il
s'agit dans les deux cas de procédures de caractère réel, dans le cadre
desquelles la culpabilité de l'auteur de l'infraction n'est pas examinée.
Contrairement à ce que soutient la recourante, les deux procédures peuvent
être menées indépendamment de la poursuite de l'infraction (cf. SJ 1997 p.
189).

  La recourante estime que la présomption d'innocence ne serait pas
applicable à la confiscation civile du droit américain. Elle n'est pas non
plus directement applicable à la procédure prévue aux art. 58 et 59 CP: le
juge de la confiscation recherche uniquement si les biens ont un lien avec
une infraction, mais ne s'interroge pas sur la culpabilité de son auteur.
Ainsi, lorsque la mesure de confiscation est menée indépendamment de la
procédure pénale proprement dite, ou lorsqu'elle frappe une personne qui
n'est pas accusée, la présomption d'innocence n'est pas opposable (ATF 117
IV 233 consid. 2 p. 236; arrêts de la CourEDH dans les causes Butler contre

Royaume-Uni du 27 juin 2002, Recueil CourEDH 2002-VI p. 369; Phillips contre
Royaume-Uni du 5 juillet 2001, Recueil CourEDH 2001-VII p. 55). Au
demeurant, certains allégements du fardeau de la preuve sont aussi prévus en
droit suisse de la confiscation, notamment s'agissant des fonds en relation
avec une organisation criminelle, présumés soumis à son pouvoir de
disposition (art. 59 ch. 3 CP). Enfin, depuis la réforme de l'institution
par le "Civil Asset Forfeiture Reform Act", la charge de la preuve incombe
en premier lieu à l'autorité qui entend confisquer. S'il y a un allégement
du fardeau de la preuve, il n'y a pas en revanche renversement de celui-ci.

  4.2  La Suisse a déjà tenu compte des conceptions particulières du droit
anglo-saxon, d'une part en ratifiant la Convention du 8 novembre 1990
relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des
produits du crime (CBl; RS 0.311.53). Dans leur rapport explicatif, les
experts expliquent avoir tenu compte des écarts considérables en ce qui
concerne les différents types de procédures suivies pour la prise des
décisions de confiscation, en particulier les procédures indépendantes de
l'accusation, et les procédures "in rem". Ils relèvent qu'un instrument
efficace de coopération doit prendre en compte ces différences entre les
législations internes. A propos de l'art. 13 CBl, le rapport relève que
toute procédure pouvant déboucher sur une décision de confiscation,
indépendamment de ses liens avec les procédures pénales ou des règles de
procédure applicables, peut remplir les conditions requises pourvu qu'elle
soit menée par des autorités judiciaires et qu'elle ait un caractère pénal,
autrement dit qu'elle concerne les instruments d'une infraction pénale ou
ses produits. Ces procédures (qui englobent par exemple les procédures dites
in rem) sont désignées dans le texte de la convention, sous le nom de
"procédures aux fins de confiscation". Même si l'Etat requérant n'a pas
ratifié la CBl, celle-ci permet d'interpréter de manière large la notion de
procédure pouvant donner lieu à confiscation.

  Par ailleurs, selon l'art. 2 de la loi fédérale du 19 mars 2004 sur le
partage des valeurs patrimoniales confisquées (LVPC; RS 312.4), la loi
prévoit, en cas d'entraide judiciaire internationale en matière pénale, le
partage entre la Suisse et les Etats étrangers des valeurs patrimoniales qui
sont confisquées en vertu du droit suisse ou qui font l'objet d'une mesure
de confiscation ou d'une mesure analogue en vertu du droit étranger. Cette
dernière notion recouvre les différentes formes que peut revêtir, selon le
droit étranger, la mainmise de

l'Etat sur les valeurs délictueuses. "Ainsi, aux Etats-Unis, la procédure de
confiscation in rem, qui est dirigée contre les seules valeurs délictueuses,
est de nature civile" (FF 2002 p. 442).

  4.3  La procédure étrangère présente ainsi une similitude suffisante avec
les procédures de confiscation prévues ou reconnues en droit suisse. Elle
suppose, d'une part, l'existence d'une infraction pénale et, d'autre part,
un lien entre cette infraction et les objets et valeurs à confisquer. Elle
peut par conséquent être en principe assimilée à une "cause pénale" au sens
des art. 1 al. 3 et 63 EIMP.

Erwägung 5

  5.  Pour cela, il faut toutefois qu'il existe dans l'Etat requérant à tout
le moins une compétence répressive, quand bien même les autorités
n'entendent pas effectivement l'exercer. L'entraide judiciaire
internationale en matière pénale ne peut en effet être accordée qu'à un Etat
susceptible de poursuivre les agissements décrits (ATF 126 II 212 consid.
6b; ZIMMERMANN, op. cit., n. 366 p. 377-378).

  5.1  L'application des art. 58 et 59 CP dépend elle aussi d'une telle
compétence. La jurisprudence relative à l'art. 59 ch. 1 et 2 CP exige en
effet que l'infraction d'où proviennent les valeurs ressortisse à la
compétence de la juridiction suisse (ATF 128 IV 145): les art. 3 à 7 CP
posent les règles d'application du code pénal, dont l'art. 59 CP fait
précisément partie; la confiscation en relation avec une infraction est donc
elle aussi soumise aux conditions de lieu dont dépend la juridiction suisse.
L'exception spécialement prévue à l'art. 24 LStup (RS 812.121) démontre que
le droit suisse ne reconnaît pas de manière générale la confiscation au
forum rei sitae (ATF 128 IV 145 consid. 2d in fine p. 152). L'exigence d'une
compétence pénale s'étend à la confiscation des biens d'une organisation
criminelle prévue à l'art. 59 ch. 3 CP (arrêt 6P.142/2004 du 7 janvier
2005). La procédure de confiscation ouverte dans l'Etat requérant ne saurait
ainsi être assimilée à une affaire pénale que dans la mesure où les
autorités pénales de l'Etat requérant sont compétentes pour la répression
des infractions décrites.

  5.2  Dès lors qu'elle s'examine au regard des règles de droit interne de
l'Etat requérant, la compétence des autorités répressives de cet Etat est en
général présumée. En l'occurrence toutefois, une telle compétence n'est pas
alléguée par l'autorité requérante, compte tenu de la nature de sa démarche.
Sur le vu du dossier, il n'est pas possible de résoudre cette question.

  Le 19 août 2005, l'Office fédéral de la justice (OFJ) a interpellé
l'autorité requérante afin de savoir, notamment, s'il existait une procédure

pénale ouverte contre B. ou d'autres participants aux infractions, et le cas
échéant pour quelles infractions. Dans sa réponse du 5 août 2005, le
Procureur californien explique qu'il existe une procédure pénale au sujet de
laquelle il n'est pas actuellement "en mesure de révéler ses détails ni de
répondre à ces questions spécifiques". Il précise que les renseignements
obtenus de la Suisse ne serviront qu'à la procédure de confiscation civile.
Cette réponse n'apporte rien à propos de la compétence pénale des
juridictions américaines, de sorte que l'autorité suisse en est réduite à
des suppositions.

  L'autorité requérante indique que B. se serait rendu coupable de fraude
postale et par télécommunication, ainsi que de blanchiment d'argent. Ces
délits paraissent avoir été, en partie tout au moins, commis sur le
territoire de l'Etat requérant, notamment en raison de la création et de
l'intervention de sociétés américaines et de par le fait que les bénéfices
illicites ont été transférés aux Etats-Unis, où ils auraient été réinvestis
dans des biens de luxe. Cela pourrait permettre d'admettre, en vertu du
principe de territorialité, une compétence des autorités pénales
américaines. Les principaux inculpés sont par ailleurs de nationalité
américaine et domiciliés en Californie, ce qui peut également constituer un
facteur de rattachement. Cela étant, l'Etat requérant est saisi d'une
demande d'extradition de la Corée du Sud, et semble vouloir y donner suite.
On ignore toutefois à raison de quels faits l'extradition est demandée, et
quel serait l'effet de l'extradition sur les compétences répressives de
l'Etat requérant.

  5.3  Il y aura lieu, par conséquent, d'interpeller l'autorité requérante
afin qu'elle indique si les autorités répressives américaines disposent
d'une compétence pour juger pénalement les infractions décrites dans la
demande. Le cas échéant, il conviendra qu'elle précise également à raison de
quelles infractions l'extradition de B. est requise, et quelles conséquences
l'octroi éventuel de l'extradition aurait sur les compétences répressives
des autorités judiciaires américaines. Enfin, il y aura lieu également
d'expliquer quelle sera la destination des biens faisant l'objet de la
procédure de confiscation. L'autorité requérante évoque en effet le
remboursement des victimes en Corée du Sud, tout en précisant que ces
dernières n'ont qu'un droit d'intervention. L'autorité américaine devra
préciser les conditions d'exercice de ce droit, ainsi que le sort des biens
en cas d'absence ou de rejet des prétentions des victimes.