Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 131 II 361



131 II 361

28. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause
Balmelli contre Commission de recours de l'Université de Fribourg ainsi
que Tribunal administratif du canton de Fribourg (recours de droit
administratif)

    2A.279/2004 du 14 mars 2005

Regeste

    Art. 8 Abs. 3 BV, Art. 4 Abs. 2 aBV, Art. 3 und 5 Abs. 2 GlG;
Gleichberechtigung der Geschlechter; Verbot der Diskriminierung beim
Einstellen von Arbeitskräften; Frauenquoten betreffend den Zugang zu
universitären Lehrämtern; Legalität und Verhältnismässigkeit einer
solchen Massnahme.

    Zulässigkeit der Verwaltungsgerichtsbeschwerde: aktuelles und
praktisches Interesse, die Verfassungswidrigkeit eines Quotensystems, das
nicht mehr praktiziert wird, feststellen zu lassen (E. 1); trotz seines
überwiegend auf Feststellung gerichteten Charakters ist der Antrag auf
Bezahlung einer symbolischen Entschädigung zulässig (historische Auslegung
von Art. 5 Abs. 2 GlG; E. 4).

    Bedeutung des Verhältnismässigkeitsgrundsatzes und der Unterscheidung
zwischen starren und flexiblen Quoten bei der Beurteilung der
Verfassungsmässigkeit einer Quotenregelung (Zusammenfassung der bisherigen
Rechtsprechung; E. 5). Durch den Bund in seinem Förderungsprogramm für den
akademischen Nachwuchs vorgesehene starre Frauenquote: es ist fraglich,
ob diese Massnahme verhältnismässig ist (E. 6); sie beruht jedenfalls
nicht auf einer genügenden gesetzlichen Grundlage (E. 7).

Sachverhalt

    En octobre 2001, l'Université de Fribourg (ci-après: l'Université)
a fait paraître dans diverses publications l'annonce suivante:

    "Dans le cadre des mesures fédérales en faveur de l'encouragement de la

      relève universitaire, la Faculté de droit de l'Université met au

      concours un poste de professeure associée ou de maître-assistante

      en droit public (droit européen et droit international public).

      (...) En raison des critères fixés par le programme de relève

      universitaire, seules les candidatures féminines peuvent entrer en

      ligne de compte pour l'occupation de ce poste."

    Le 1er novembre 2001, Tiziano Balmelli s'est porté candidat pour le
poste mis au concours. Son dossier n'a pas été pris en considération par la
commission chargée d'évaluer les candidatures, car le poste était réservé
à une femme. Sur les trois autres candidatures, toutes féminines, reçues
par l'Université, deux n'étaient pas conformes aux exigences requises
pour le poste (les postulantes n'étaient pas titulaires d'un doctorat en
droit), si bien que la commission d'évaluation n'a finalement présenté
qu'un seul dossier de candidature au Conseil de Faculté. A 15 voix pour,
11 voix contre et une abstention, cette autorité a "élu" la candidate qui
lui était proposée par la commission; cette candidate a ensuite été nommée
comme professeure associée en droit public par la Conseillère d'Etat en
charge de l'instruction publique.

    Entre-temps, Tiziano Balmelli s'est inquiété du sort de sa
candidature dont il était "officiellement sans nouvelles". Le Doyen de
la Faculté lui a fait savoir (lettre du 4 janvier 2002) que son dossier
n'avait pas été retenu, car le poste mis au concours était réservé aux
candidatures féminines du fait des critères fixés par le programme fédéral
d'encouragement de la relève universitaire (ci-après également cité:
le programme ou le programme de relève).

    Tiziano Balmelli a porté l'affaire devant la Commission de recours de
l'Université de Fribourg (ci-après: la Commission). Il a demandé à cette
autorité de constater que les motifs donnés par le Décanat pour écarter sa
candidature consacraient une discrimination illicite à raison du sexe et
de lui octroyer une indemnité d'un franc symbolique à titre de réparation.

    Par décision du 20 mars 2002, le Président de la Commission a déclaré
irrecevable le recours dont il était saisi, au motif, notamment, que la
lettre précitée du Doyen du 4 janvier 2002 n'avait pas le caractère d'une
décision attaquable.

    Tiziano Balmelli a recouru contre cette décision au Tribunal
administratif du canton de Fribourg (ci-après: le Tribunal
administratif). Pour l'essentiel, il s'est plaint de déni de justice et
a soutenu que la procédure suivie par l'Université pour l'engagement des
nouveaux professeurs équivalait à l'instauration d'un système de quotas
féminins fixes contraire aux principes constitutionnels de la légalité,
de l'égalité et de la proportionnalité, ainsi qu'à la loi fédérale du 24
mars 1995 sur l'égalité entre femmes et hommes (Loi sur l'égalité, LEg;
RS 151.1).

    Le Conseil d'Etat a conclu au rejet du recours, après avoir expliqué
que l'engagement d'une femme au poste litigieux s'imposait pour maintenir
la part des femmes dans les postes de relève attribués à l'Université
au-dessus du seuil de 40 % prévu dans le programme; à défaut, la
Confédération n'accorderait pas les aides financières correspondantes.

    Par arrêt du 31 mars 2004, le Tribunal administratif a rejeté le
recours dans la mesure où il était recevable. En bref, les juges ont
estimé que la loi sur l'égalité ne permettait pas à la victime d'une
discrimination à l'embauche de demander le versement d'une indemnité d'un
franc symbolique, vu la nature constatatoire d'une telle conclusion. Au
surplus, ils ont considéré que les quotas féminins constituaient une
mesure de discrimination positive fondée sur une base légale suffisante
et conforme au principe de la proportionnalité.

    Tiziano Balmelli interjette recours de droit administratif contre
l'arrêt précité du Tribunal administratif dont il requiert implicitement
l'annulation, en concluant derechef au versement d'une indemnité d'un
franc symbolique pour la discrimination subie.

    Le Tribunal administratif et la Commission renoncent à formuler des
observations sur le recours, tandis que le Bureau fédéral de l'égalité
entre femmes et hommes (ci-après: le Bureau de l'égalité) conclut à son
rejet au terme d'une détermination circonstanciée.

    A la demande du juge délégué, l'Université de Fribourg a fait parvenir
au Tribunal fédéral les documents que la Conférence universitaire suisse
(ci-après également citée: CUS) lui avait remis dans le cadre du programme
de relève universitaire dont, en particulier, une lettre du 20 septembre
2000.

Auszug aus den Erwägungen:

                          Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.  Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité
des recours qui lui sont soumis.

    1.1  Selon l'art. 97 OJ en relation avec l'art. 5 PA, la voie du
recours de droit administratif est ouverte contre les décisions fondées sur
le droit public fédéral - ou qui auraient dû l'être -, à condition qu'elles
émanent des autorités énumérées à l'art. 98 OJ et pour autant qu'aucune
des exceptions prévues aux art. 99 à 102 OJ ou dans la législation spéciale
ne soit réalisée (cf. ATF 128 I 46 consid. 1b/aa p. 49).

    La loi sur l'égalité n'est pas seulement une loi-cadre ou une
loi limitée aux principes que le législateur cantonal devrait encore
concrétiser; elle pose au contraire des règles et des principes directement
déductibles en justice. Aussi bien, même lorsqu'elles concernent des
rapports de travail soumis au droit public cantonal, les décisions
de dernière instance cantonale (cf. art. 13 al. 1 LEg en relation avec
l'art. 98 let. g OJ) prises en application de la loi sur l'égalité peuvent
- comme en l'espèce - faire l'objet d'un recours de droit administratif
au Tribunal fédéral (cf. ATF 124 II 409 consid. 1 p. 411 ss).

    1.2  Aux termes de l'art. 103 let. a OJ, a qualité pour recourir
quiconque est atteint par la décision attaquée et a un intérêt digne de
protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée. Cet intérêt consiste en
l'utilité pratique que l'admission du recours apporterait au recourant
en lui évitant de subir un préjudice de nature économique, idéale ou
matérielle occasionné par la décision attaquée. L'intérêt doit être
direct et concret, ce qui implique notamment que la personne concernée
doit se trouver dans un rapport étroit avec la décision (cf. ATF 130 V
196 consid. 3 p. 202/203 et les arrêts cités). Par ailleurs, le droit de
recours suppose l'existence d'un intérêt actuel à obtenir l'annulation
ou la modification de la décision attaquée (cf. ATF 128 II 34 consid. 1b
p. 36, 156 consid. 1c p. 159 et les arrêts cités).

    Par la présente procédure, le recourant cherche essentiellement à
faire constater que la décision par laquelle l'Université a écarté sans
même l'examiner sa candidature constitue une discrimination à raison
du sexe prohibée par la loi sur l'égalité (sur l'admissibilité d'une
telle action constatatoire, cf. infra consid. 4). Comme l'Université
a justifié sa décision par le système de quotas féminins prévu dans le
programme fédéral de relève universitaire, le recours revient, en fin
de compte, à remettre en cause, sinon le système de quotas lui-même,
du moins la manière dont il a été appliqué au cas particulier. Se disant
encore intéressé par la perspective d'entamer une carrière académique, le
recourant souligne que, le concernant, l'utilité du recours tient surtout
dans la possibilité de pouvoir mettre fin au système qu'il dénonce afin,
le cas échéant, d'augmenter ses chances d'être engagé lors d'une éventuelle
future postulation pour une place dans l'enseignement universitaire.

    Dans la mesure où le programme de relève a été abandonné quelques
mois après le prononcé de l'arrêt attaqué, à fin septembre 2004 (cf. infra
consid. 6.2 in fine), on peut certes se demander si le recours n'est pas
devenu sans objet, faute d'intérêt pratique actuel pour le recourant à
faire constater l'invalidité d'un système qui n'a plus cours. La forte
sous-représentation des femmes dans l'enseignement universitaire est
toutefois toujours d'actualité, tout comme les moyens d'y remédier qui font
l'objet de constantes discussions, ainsi que l'attestent les diverses
mesures positives prises à différents échelons en vue de promouvoir
l'égalité entre femmes et hommes en matière de formation et d'accès
à l'enseignement supérieur (cf. PATRICIA SCHULZ, Droit de l'égalité en
Suisse, Point de la situation et perspectives, in L'égalité entre femmes et
hommes en Suisse et dans l'UE, Zurich 2004, p. 117 ss, 125/126). Au-delà
de la question ici litigieuse, le recourant a donc un intérêt (actuel) à
voir tracer un cadre à la constitutionnalité de telles mesures positives
qui sont susceptibles de le toucher à nouveau à l'avenir. Au demeurant,
on peut admettre qu'un intérêt à faire constater une discrimination
à raison du sexe subsiste même si l'atteinte à la personnalité qui en
découle a cessé et si le risque qu'une nouvelle atteinte se produise est
quasi inexistant (cf. KATHRIN ARIOLI/FELICITAS FURRER ISELI, L'application
de la loi sur l'égalité aux rapports de droit public, Bâle 2000, n. 119).

    Par conséquent, Tiziano Balmelli, qui est directement touché par
la décision attaquée, a la qualité pour recourir au sens de l'art. 103
let. a OJ.

    1.3  Pour le surplus, déposé en temps utile et dans les formes
requises, le recours de droit administratif est recevable à l'encontre de
l'arrêt attaqué dans la mesure où, comme on l'a vu (supra consid. 1.1),
celui-ci porte sur l'application de la loi sur l'égalité.

Erwägung 2

    2.  Conformément à l'art. 104 let. a OJ, le recours de droit
administratif peut être formé pour violation du droit fédéral, y compris
l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation. Le Tribunal fédéral revoit
d'office l'application du droit fédéral qui englobe notamment les droits
constitutionnels du citoyen (ATF 129 II 183 consid. 3.4 p. 188; 128 II
56 consid. 2b p. 60 et les arrêts cités). Comme il n'est pas lié par les
motifs que les parties invoquent, il peut admettre le recours pour d'autres
raisons que celles avancées par le recourant ou, au contraire, confirmer
l'arrêt attaqué pour d'autres motifs que ceux retenus par l'autorité
intimée (art. 114 al. 1 in fine OJ; ATF 129 II 183 consid. 3.4 p. 188;
127 II 8 consid. 1b p. 12 et les arrêts cités).

    En revanche, lorsque le recours est dirigé, comme en l'occurrence,
contre la décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié
par les faits constatés dans la décision, sauf s'ils sont manifestement
inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles
essentielles de procédure (art. 104 let. b et 105 al. 2 OJ; ATF 130 II
149 consid. 1.2 p. 154; 128 II 145 consid. 1.2.1 p. 150 et les arrêts
cités). En outre, le Tribunal fédéral ne peut pas revoir l'opportunité de
la décision entreprise, le droit fédéral ne prévoyant pas un tel examen
en la matière (art. 104 let. c ch. 3 OJ).

Erwägung 3

    3.  La loi sur l'égalité a pour but de promouvoir dans les faits
l'égalité entre femmes et hommes (art. 1er LEg). S'appliquant aux rapports
de travail régis par le code des obligations et par le droit public
fédéral, cantonal ou communal (art. 2 LEg), elle interdit de discriminer
les travailleurs à raison du sexe, soit directement, soit indirectement,
notamment à l'embauche (art. 3 al. 1 et 2 LEg). Ne constituent pas une
discrimination les mesures appropriées visant à promouvoir dans les faits
l'égalité entre femmes et hommes (art. 3 al. 3 LEg).

    Aux termes de l'art. 5 al. 1 LEg, quiconque subit ou risque de subir
une discrimination au sens des art. 3 et 4 LEg peut requérir du tribunal
compétent d'interdire la discrimination ou d'y renoncer si elle est
imminente (let. a), de la faire cesser si elle persiste (let. b), d'en
constater l'existence si le trouble qu'elle a créé subsiste (let. c), ou
d'ordonner le paiement du salaire dû (let. d). Lorsque la discrimination
porte sur un refus d'embauche, la personne lésée ne peut prétendre qu'au
versement d'une indemnité par l'employeur. Celle-ci est fixée compte tenu
de toutes les circonstances et calculée sur la base du salaire auquel la
personne discriminée aurait vraisemblablement eu droit (art. 5 al. 2 LEg).
Elle n'excédera pas le montant correspondant à trois mois de salaire.
Lorsque plusieurs personnes prétendent au versement d'une indemnité pour
refus d'embauche à un même poste, la somme totale des indemnités versées
n'excédera pas non plus ce montant (art. 5 al. 4 LEg). Sont réservés les
droits en dommages-intérêts et en réparation du tort moral, de même que
les prétentions découlant de dispositions contractuelles plus favorables
aux travailleurs (art. 5 al. 5 Leg).

Erwägung 4

    4.

    4.1  Après avoir relevé que la Commission de recours aurait dû
transmettre l'affaire aux "autorités d'engagement du corps professoral",
le Tribunal administratif a néanmoins admis sa compétence pour des
motifs d'économie de procédure (il connaissait la position des autorités
en question) et afin de tenir compte du "flou juridique" qui régnait à
l'époque des faits. Il a cependant déclaré irrecevable le recours dont il
était saisi, au motif que, selon la volonté du législateur, la victime
d'une discrimination à l'embauche ne pourrait prétendre qu'au versement
d'une indemnité "punitive", par opposition à une indemnité d'un franc à
titre symbolique qui ne revêtirait qu'un caractère constatatoire.

    Le recourant considère que les premiers juges ont appliqué et
interprété de manière arbitraire et "excessivement formaliste" la loi
sur l'égalité et commis un déni de justice formel au sens des art. 29
Cst. et 6 CEDH.

    4.2  Selon la jurisprudence, la loi s'interprète en premier lieu selon
sa lettre (interprétation littérale). Si le texte n'est pas absolument
clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, il convient
de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant
de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires
(interprétation historique), du but de la règle, de son esprit, ainsi que
des valeurs sur lesquelles elle repose, singulièrement de l'intérêt protégé
(interprétation téléologique) ou encore de sa relation avec d'autres
dispositions légales (interprétation systématique). Le sens que prend
la disposition dans son contexte est également important (ATF 130 II 65
consid. 4.2 p. 71; 129 II 114 consid. 3.1 p. 118; 129 III 55 consid. 3.1.1
p. 56/57; 128 II 56 consid. 4 p. 62 et la jurisprudence citée).

    4.3  D'après le Tribunal administratif, la formulation de l'art. 5
al. 2 LEg ("la personne lésée ne peut prétendre qu'au versement d'une
indemnité"; "die betroffene Person hat lediglich Anspruch auf eine
Entschädigung"; "la persona lesa può pretendere soltanto un'indennità")
vise à exclure toute prétention autre que celle tendant au versement
d'une indemnité et, en particulier, à fermer au lésé les autres droits
énumérés à l'art. 5 al. 1 LEg. Or, en requérant l'octroi d'une indemnité
d'un franc symbolique, le recourant chercherait, en réalité, seulement à
faire constater, au sens de l'art. 5 al. 1 let. c LEg, la discrimination
dont il s'estime victime; toujours selon le Tribunal administratif, qui
se réfère sur ce point à la volonté du législateur, l'indemnité prévue
à l'art. 5 al. 2 LEg doit être de nature "punitive".

    4.4  Il ressort des travaux préparatoires et, en particulier, du
Message du 24 février 1993 concernant la loi fédérale sur l'égalité
entre femmes et hommes (FF 1993 I 1163) que l'indemnité de l'art. 5
al. 2 LEg n'est pas subordonnée à la condition que le candidat à l'emploi
discriminé ait subi un dommage ou que l'employeur ait commis une faute:
elle se justifie dès que le refus d'embauche est discriminatoire; elle
n'a donc le caractère ni de dommage-intérêts, ni d'une sanction pénale
(message précité, p. 1214; MARGRITH BIGLER-EGGENBERGER, Commentaire
de la loi sur l'égalité, Lausanne 2000, n. 24 ad art. 5 LEg; MONIQUE
COSSALI SAUVAIN, La loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes,
in Journée 1995 du droit du travail et de la sécurité sociale, Zurich
1999, p. 57 ss, 72/ 73; KATHRIN ARIOLI/FELICITAS FURRER ISELI, op. cit.,
n. 138). Il s'agit plutôt d'une indemnité sui generis, proche d'une peine
conventionnelle ou d'une "amende civile", qui revêt une double fonction,
à la fois punitive et réparatrice (cf. ATF 123 III 391 consid. 3c p. 394;
COSSALI SAUVAIN, ibidem).

    4.5  Lors des débats aux Chambres fédérales, le principe d'une
indemnité en cas de discrimination à l'embauche a été fortement
contesté. En première lecture, le Conseil national l'a même carrément
refusé, en estimant que la lutte contre les discriminations devait
se limiter aux situations dans lesquelles les parties étaient déjà
liées par un contrat de travail; il fallait en effet éviter d'imposer
aux employeurs, lors du recrutement de nouveaux collaborateurs, des
contraintes dont l'efficacité n'était pas démontrée ou, du moins, n'était
pas en rapport avec l'importance des possibles désagréments (tracasseries
administratives, limitation de la liberté de choix des employeurs, risque
de procès onéreux, ...) (cf. BO 1994 CN p. 257 ss, Ducret). En dépit de ces
critiques, le Conseil des Etats a néanmoins estimé nécessaire d'interdire
les discriminations à l'embauche, sous peine de vider la loi d'une bonne
partie de son efficacité. En réponse aux craintes exprimées par le Conseil
national, il a notamment souligné que l'interdiction de la discrimination
à l'embauche n'enlevait rien à la liberté contractuelle des employeurs, en
ce sens qu'un juge ne pouvait en aucun cas ordonner ou imposer l'engagement
d'un employé contre la volonté d'un employeur. En revanche, contrairement
au projet du Conseil fédéral, le Conseil des Etats a jugé que pareille
interdiction ne devait pas s'appliquer aux offres d'emploi et qu'il
fallait limiter à six mois de salaire le montant maximal de l'indemnité
due par l'employeur en cas de discrimination à l'embauche, y compris
lorsque plusieurs personnes faisaient valoir simultanément leurs droits
dans le cadre d'une même procédure d'embauche (cf. BO 1994 CE p. 817 ss,
823). En seconde lecture, le Conseil national s'est finalement rallié,
non sans hésitation, à cette proposition, après avoir cependant ramené
la limite maximale de l'indemnité de six à trois mois de salaire (BO 1995
CN p. 185 ss), concession que le Conseil des Etats a jugée politiquement
acceptable (BO 1995 CE p. 317 ss; cf. CLAUDIA KAUFMANN, Commentaire de
la loi sur l'égalité, Lausanne 2000, Genèse de la loi, n. 55 ss, 97).

    Par rapport au projet qui leur était soumis, les Chambres fédérales
ont donc réduit à double titre l'importance de l'indemnité due en cas
de discrimination à l'embauche: d'une part, en plafonnant son montant à
trois mois de salaire (contre six mois dans le projet du Conseil fédéral)
et, d'autre part, en prévoyant que ce plafond vaut également en cas de
pluralité de demandes d'indemnisation. Indépendamment de ses conclusions,
une victime peut ainsi, selon les circonstances, n'être indemnisée
que d'un montant relativement faible, notamment en cas de pluralité
de demandes d'indemnisation et/ou lorsque le poste mis au concours
porte sur une activité peu rémunérée (par exemple une place de stage);
sur ce point, il est d'ailleurs douteux que le système d'indemnisation
voulu par le législateur suisse soit compatible avec la jurisprudence
communautaire, comme la doctrine n'a pas manqué de le souligner (cf. FRANZ
WERRO/MARJOLAINE VIRET, Egalité entre femmes et hommes: la responsabilité
civile de l'employeur, in Egalité entre femmes et hommes en Suisse et
dans l'UE, Zurich 2004, p. 89 ss, 113-115; BIGLER-EGGENBERGER, op. cit.,
n. 31 ad art. 5 LEg et n. 17 ss ad art. 8 LEg; PATRICIA SCHULZ, Die
Anstellung, insbesondere Schutz vor Diskriminierung, in Das Bundesgesetz
über die Gleichstellung von Frau und Mann, Saint-Gall 1996, p. 45 ss,
52/53; LUZIUS MADER, Das Gleichstellungsgesetz - Entstehung, Ziele und
Instrumente, in Das Bundesgesetz über die Gleichstellung von Frau und Mann,
Saint-Gall 1996, p. 9 ss, 29).

    Cela étant, les discussions aux Chambres fédérales ont clairement
mis en évidence que le législateur était davantage animé par le volonté
de fixer un plafond au montant de l'indemnité en cas de discrimination
à l'embauche que par le souci de lui assurer une certaine importance
comme gage d'efficacité. Il ressort également de ces débats que c'est
principalement en vue d'éviter qu'une victime ne puisse demander d'être
engagée par la voie judiciaire et de préserver ainsi intacte la liberté
contractuelle de l'employeur que le législateur a limité au versement d'une
indemnité les prétentions du lésé en cas de discrimination à l'embauche
(cf. aussi le Message concernant la loi fédérale sur l'égalité entre
femmes et hommes, op. cit., p. 1214; PATRICIA SCHULZ, Die Anstellung,
insbesondere Schutz vor Diskriminierung, in Das Bundesgesetz über
die Gleichstellung von Frau und Mann, Saint-Gall 1996, p. 45 ss, 51;
ARIOLI/FURRER ISELI, op. cit., n. 138). Contrairement à l'opinion du
Tribunal administratif, l'interprétation historique de l'art. 5 LEg
ne s'oppose donc pas à ce qu'une indemnité symbolique soit demandée en
cas de discrimination à l'embauche, nonobstant le caractère davantage
constatatoire que condamnatoire d'une telle prétention.

    4.6  L'interprétation téléologique de la norme en cause ne vient pas
davantage accréditer la thèse des premiers juges.

    Conformément à l'art. 1er LEg, les droits des travailleurs énumérés
à l'art. 5 LEg visent, d'une manière générale, à promouvoir dans les
faits l'égalité entre femmes et hommes. L'indemnité prévue à l'art. 5
al. 2 LEg a plus spécifiquement pour but de prévenir les discriminations
entre femmes et hommes à l'embauche, aussi bien par l'effet dissuasif
qu'elle est censée exercer sur les employeurs qui seraient tentés de
se livrer à des pratiques discriminatoires, que par l'effet éducatif
qu'elle doit avoir sur ceux qui useraient de telles pratiques, en les
dissuadant de recommencer (fonction punitive et préventive). Elle tend
également à apporter une certaine forme de compensation aux victimes
d'une discrimination à l'embauche (fonction réparatrice; cf. supra
consid. 4.4). Afin de présenter quelque efficacité, l'indemnité doit donc,
en principe, pouvoir aller au-delà d'un montant purement symbolique,
suivant le voeu - dont on a cependant vu qu'il avait été mis à mal par
le Parlement (supra consid. 4.5) - exprimé par le Conseil fédéral en
prenant l'exemple du droit communautaire (cf. Message concernant la la
loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes, op. cit., p. 1214).
Pour autant, l'octroi d'une indemnité symbolique dans un cas particulier
n'est pas forcément incompatible avec la ratio legis de l'art. 5 al. 2 LEg.

    D'une part, l'effet dissuasif de l'indemnité doit s'apprécier
ex ante, c'est-à-dire avant que l'employeur ne se rende responsable
d'une pratique discriminatoire: ce qui va dicter ou influencer son
comportement, c'est en effet le montant maximal (ou abstrait) de
l'indemnité qu'il s'expose à payer en cas d'infraction, étant entendu
qu'il ne peut pas connaître par avance et qu'il n'a pas de prise sur le
montant effectif (ou concret) qu'il pourrait être tenu de payer en cas
de condamnation. L'effet dissuasif de la sanction dépend donc davantage
de sa gravité abstraite que concrète. D'autre part, même symbolique,
une éventuelle sanction n'est pas dépourvue d'effet éducatif: la seule
constatation d'une discrimination est, en effet, de nature à amener un
employeur raisonnable à prendre conscience du manquement et à changer de
comportement à l'avenir, ne serait-ce que dans le but de préserver son
image et sa réputation. Dans le cas particulier, l'effet dissuasif d'une
éventuelle sanction tient d'ailleurs moins, comme le souligne justement
le recourant, dans le montant de l'indemnité qui pourrait être mis à la
charge de l'Université en cas de condamnation, que dans la constatation de
la discrimination alléguée: en effet, quel qu'il puisse être, le montant
alloué sera forcément relativement modeste par rapport à la taille et
aux moyens de l'Université; en revanche, on peut partir de l'idée que,
comme employeur public, cette institution est attachée au respect des
règles communes et qu'une simple condamnation à payer une indemnité -
fût-elle symbolique - aurait, le cas échéant, l'effet éducatif escompté.

    Quant à la fonction réparatrice de l'indemnité, on peut concéder au
recourant que la simple constatation d'une discrimination constitue pour
lui une forme de réparation appropriée (cf. ATF 129 V 411 consid. 3.4
p. 421). En effet, bien que le système qu'il dénonce, appliqué à
l'échelle de l'ensemble des universités suisses jusqu'au 30 septembre
2004 (cf. infra consid. 6.2 in fine), ait depuis lors été abandonné,
d'autres mesures positives destinées à augmenter la part des femmes
dans l'enseignement universitaire ont été et doivent encore être prises
(cf. SCHULZ, Droit de l'égalité en Suisse, op. cit., p. 125/126; pour
des exemples de mesures, cf. infra consid. 6.5 in fine); or, de telles
mesures requièrent elles aussi un cadre constitutionnel dont la définition
représente davantage d'intérêt et d'utilité pratique pour l'intéressé,
qui n'exclut pas une carrière académique, que l'éventuelle compensation
financière de quelques milliers de francs à laquelle il pourrait prétendre
(cf. supra consid. 1.2). Au demeurant, il serait contraire au bon sens
voire choquant de refuser à la victime d'une discrimination à l'embauche
l'accès à la justice au motif qu'elle ne réclame pas assez d'argent à
l'employeur mis en cause.

    Par conséquent, l'interprétation téléologique de la norme en cause
incline plutôt à considérer comme admissible la possibilité de limiter les
conclusions à une indemnité symbolique, du moins dans des circonstances
telles qu'en l'espèce.

    4.7  Enfin, comme l'ont relevé les auteurs qui ont examiné le
problème, une interprétation systématique (ou logique) de l'art. 5 al. 2
LEg postule également d'admettre, dans son principe, la voie de l'action en
constatation de droit en cas de discrimination à l'embauche. En effet, quel
qu'en soit le montant, une indemnité fondée sur cette disposition suppose
logiquement que l'on puisse constater l'existence d'une discrimination,
du moins à titre préjudiciel (cf. BIGLER-EGGENBERGER, op. cit., n. 15 et
16 ad art. 8 LEg; PIERRE DECOPPET, Indications concernant l'application et
l'interprétation de la loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes,
éd. par l'Union syndicale suisse, 1996, n. 66 ad p. 26). De plus, il est
possible que, dans certaines situations particulières, seule une action en
constatation de droit soit envisageable, par exemple si le montant maximal
de l'indemnité pouvant être mis à la charge de l'employeur est atteint
après qu'un grand nombre de lésés ont demandé et obtenu une indemnisation
(cf. THOMAS GEISER, Die Regeln über die Anstellungsdiskriminierung und
die Beförderungsdiskriminierung im Gleichstellungsgesetz, in RJB 132/1996
p. 555 ss, 565/567).

    4.8  En résumé, aucune des différentes méthodes d'interprétation
ne vient confirmer la thèse du Tribunal administratif. Au contraire, le
but et la systématique de la loi conduisent à reconnaître à la victime
d'une discrimination à l'embauche le droit de demander une indemnisation
symbolique dans certaines circonstances, notamment lorsque la constatation
de l'infraction représente en elle-même déjà une sanction appropriée pour
l'employeur et un mode de réparation adéquat pour le lésé. Or, tel est
bien le cas en l'espèce, compte tenu du contexte particulier de l'affaire
(utilité pratique de la question à trancher pour le recourant en raison du
risque qu'une discrimination du genre de celle qu'il dénonce se reproduise;
mise en cause d'une institution publique, ...).

    Par conséquent, l'arrêt attaqué se révèle mal fondé dans la mesure où
les premiers juges ont déclaré irrecevable le recours dont ils étaient
saisis. Comme ils sont néanmoins entrés en matière sur le fond de la
cause, il convient d'examiner la pertinence des motifs ayant conduit au
rejet du recours.

Erwägung 5

    5.

    5.1  Le litige pose le délicat problème de la constitutionnalité
des mesures positives qui peuvent être prises en vue d'augmenter la part
des femmes dans le domaine de l'enseignement universitaire. Il s'agit
plus précisément de déterminer si, et à quelles conditions, des règles
de quotas sont admissibles à cette fin.

    5.2  Jusqu'ici, le Tribunal fédéral n'a pas été confronté à la question
des quotas féminins en matière d'accès à l'emploi. En revanche, il a dû
se pencher, il y a quelques années, sur la constitutionnalité de deux
initiatives cantonales, l'une soleuroise (ATF 123 I 152), l'autre uranaise
(ATF 125 I 21), qui visaient à introduire des quotas destinés à garantir
une meilleure représentation des femmes au sein des autorités cantonales. A
ces occasions, il a rappelé que la première phrase de l'art. 4 al. 2
aCst. ("l'homme et la femme sont égaux en droit") consacrait un droit
constitutionnel subjectif directement applicable, interdisant toute
différenciation juridique à raison du sexe, sous réserve de distinctions
justifiées par des différences biologiques ou fonctionnelles excluant de
manière absolue un traitement identique (égalité de droit ou formelle). Il
a également réaffirmé que la deuxième phrase de la disposition en cause
("la loi pourvoit à l'égalité, en particulier dans les domaines de la
famille, de l'instruction et du travail") donnait simplement mandat au
législateur de concrétiser dans la réalité sociale le principe d'égalité
(égalité de fait ou matérielle), sans toutefois conférer des droits,
comme tels, aux particuliers.

    Ces arrêts confirmaient la distinction établie depuis plusieurs
années déjà par la jurisprudence (cf. ATF 116 Ib 270 consid. 7 p. 282
ss) entre, d'une part, l'interdiction de discriminer en raison du sexe
("Diskriminierungsverbot"), conçue comme un droit constitutionnel subjectif
à l'égalité juridique et, d'autre part, le mandat donné au législateur
de traduire dans les faits le principe d'égalité ("Egalisierungsgebot"),
non seulement dans les domaines explicitement énumérés (famille, formation
et travail), mais dans tous les domaines de l'existence et à tous les
échelons de l'Etat, le cas échéant par des mesures positives en faveur
des femmes (ATF 123 I 152 consid. 3 p. 155 ss).

    5.3  Dans l'arrêt uranais, le Tribunal fédéral a précisé que,
conformément à l'avis de la doctrine majoritaire, les mesures positives
pouvant être prises par le législateur en vertu de l'art. 4 al. 2 2e phrase
aCst. (art. 8 al. 3 2e phrase Cst.) ne concernent pas seulement celles qui
visent à créer les conditions de base nécessaires à l'égalité des chances
entre les sexes ("Gleichheit der Startbedingungen"), mais aussi celles
qui tendent à obtenir une égalité de résultat ("Ergebnisgleichheit") (ATF
125 I 21 consid. 3d/aa p. 29 s.). Ainsi, cet arrêt n'excluait pas a priori
des règles de quotas, comme mesure de promotion des femmes, même si elles
pouvaient entrer en collision avec l'interdiction, en principe absolue,
de discriminer à raison du critère du sexe. La tension ("Spannungsfeld")
pouvant naître entre, d'une part, l'exigence d'égalité formelle et, d'autre
part, les mesures législatives destinées à concrétiser l'égalité matérielle
entre les sexes, devait être résolue selon le principe de la concordance
pratique, qui implique de conférer à ces deux aspects du principe d'égalité
la même valeur constitutionnelle, et de les départager, dans une situation
donnée, au moyen d'une pesée des intérêts tenant compte de toutes les
circonstances concrètes du cas (situation des femmes et des hommes dans
le domaine considéré; intérêt et urgence à prendre des mesures; nature,
intensité, efficacité, durée des mesures envisagées; possibilité de les
remplacer par d'autres mesures moins incisives et tout aussi efficaces;
...). Ainsi envisagée, la constitutionnalité de mesures positives était
étroitement liée à l'examen du principe de la proportionnalité considéré
sous ses trois volets (aptitude, nécessité, et proportionnalité au sens
étroit de la mesure en cause) (cf. ATF 125 I 21 consid. 3d/cc p. 32). Le
Tribunal fédéral a également précisé que la pesée des intérêts opérée dans
ce cadre ne devait pas se limiter au rapport existant entre la première
et la deuxième phrase de l'art. 4 al. 2 aCst., mais qu'il fallait aussi
tenir compte, si nécessaire, des autres droits fondamentaux susceptibles
d'être lésés par la mesure envisagée, comme par exemple, en matière de
quotas politiques, les garanties attachées au droit de vote des citoyens
(cf. ATF 125 I 21 consid. 3d/dd p. 32 ss).

    Dans l'examen de la proportionnalité qu'il a été amené à effectuer
dans les affaires soleuroises et uranaises, le Tribunal fédéral a pris
soin de distinguer les quotas flexibles ou souples, qui donnent la
préférence aux femmes à qualifications égales ou équivalentes à celles
des hommes, des quotas fixes ou rigides, qui accordent la préférence
aux femmes indépendamment de leurs qualifications, en raison du seul
critère du sexe (cf. ATF 123 I 152 consid. 4b p. 160 ss). L'initiative
populaire mise en cause dans l'arrêt soleurois visait à assurer une
représentation des femmes au sein des pouvoirs législatif, exécutif et
judiciaire correspondant à leur proportion dans la population; elle
établissait donc des quotas rigides qui ont été jugés contraires au
principe de la proportionnalité (au sens étroit), notamment parce que
les postes concernés requéraient des capacités et des qualifications
importantes, soit des exigences qu'un système de quotas rigides tel que
celui envisagé ne prenait, par définition, pas en compte (cf. ATF 123 I
152 consid. 7b p. 169/ 170). Dans l'arrêt uranais, le Tribunal fédéral
a admis la constitutionnalité de l'initiative populaire attaquée dans
la mesure où elle imposait aux partis politiques de présenter autant
de femmes que d'hommes sur les listes soumises au suffrage direct du
peuple, en particulier parce qu'un tel quota ne portait pas gravement
atteinte à la liberté de vote des citoyens et qu'il n'empêchait pas de
tenir compte des qualités des candidats. L'initiative a également été
jugée constitutionnelle s'agissant de l'obligation de réserver, dans les
différentes autorités cantonales élues au suffrage indirect, au moins un
tiers des sièges au sexe le moins bien représenté; le Tribunal fédéral
a en effet notamment estimé qu'un tel quota n'était fixe que dans une
mesure moindre et qu'il n'excluait pas de prendre en considération, au
moins dans une certaine mesure, les compétences des candidats présentés
(cf. ATF 125 I 21 consid. 5b-c p. 37 ss).

    5.4  La distinction entre quotas fixes et quotas souples est donc
décisive, selon la jurisprudence, pour apprécier la proportionnalité de
telles mesures (cf. SAMANTHA BESSON, L'égalité horizontale: l'égalité de
traitement entre particuliers, thèse Fribourg 1999, n. 1717). Des règles
de quotas fondées sur le critère du sexe sont admissibles, comme mesures
de promotion des femmes au sens de l'art. 8 al. 3 2e phrase, pour autant
qu'elles soient de nature à atteindre le but qu'elles visent, soit traduire
dans les faits le principe d'égalité (règle d'adéquation ou d'aptitude),
qu'elles constituent le moyen le moins incisif pour atteindre ce but, en
particulier par rapport à la situation des hommes ou d'autres personnes
également touchées dans leurs droits fondamentaux (règle de nécessité), et
qu'elles se présentent comme un moyen raisonnable d'atteindre le but visé
au vu des intérêts en jeu (proportionnalité au sens étroit) (cf. ATF 130
II 425 consid. 5.2 p. 438/439). Des règles de quotas fixes apparaissent
difficilement admissibles, vu la gravité de l'atteinte qu'elles causent
au regard de l'interdiction formelle de discriminer à raison du sexe.

Erwägung 6

    6.

    6.1  Dans le cas d'espèce, l'Université a justifié sa décision de ne
pas entrer en matière sur l'offre de services du recourant par le système
de quotas mis en place par le programme fédéral d'encouragement de la
relève. Elle a en effet expliqué que, pour obtenir une aide financière
de la Confédération, elle devait attribuer au moins 40 % des postes mis
au concours dans le cadre du programme à des femmes; or, elle ne pouvait
atteindre ce taux qu'en nommant une femme au poste de relève à repourvoir
(professeur assistant ou maître associé en droit public).

    6.2  Prévu dans l'ordonnance du Département fédéral de l'intérieur
du 12 avril 2000 sur les contributions liées à des projets visant à
encourager la relève dans les universités cantonales pendant les années
2001/02 à 2003/04 (ordonnance sur le programme d'encouragement de la
relève, 3e phase, ci-après: ordonnance réglant la 3e phase du programme;
RO 2000 p. 2097), le programme de relève permet à la Confédération de
financer des postes temporaires supplémentaires dans le corps intermédiaire
supérieur des universités (maîtres assistants et professeurs assistants)
au titre des contributions liées à des projets au sens des art. 13 al. 1
let. c de la loi fédérale du 8 octobre 1999 sur l'aide aux universités
et la coopération dans le domaine des hautes écoles (Loi sur l'aide aux
universités, LAU; RS 414.20) et 45 à 47 de l'ordonnance du 13 mars 2000
relative à la loi sur l'aide aux universités (OAU; RS 414.201). Il vise à
encourager la relève académique dans les universités suisses, à augmenter
durablement la part des femmes dans le corps enseignant universitaire et à
améliorer l'encadrement des étudiants (cf. art. 1er al. 1 de l'ordonnance
réglant la 3e phase du programme).

    Sous le titre de la promotion de l'égalité des chances entre les femmes
et les hommes, l'art. 7 de l'ordonnance réglant la 3e phase du programme
prévoit que chaque université doit, en principe, attribuer au moins 40 %
des postes relevant du programme à des femmes (al. 1) et que la Conférence
universitaire suisse veille à ce que la proportion soit atteinte en tout
cas au niveau national (al. 2).

    D'abord initié en 1992 avec l'objectif d'attribuer au moins 33 % des
postes de relève à des femmes (RO 1992 p. 1182, 1184), puis reconduit
en 1995 avec le même objectif (RO 1995 p. 2610, 4316), le programme a
été reconduit une seconde fois en 2000 avec l'objectif d'attribuer 40
% des postes de relève à des femmes (RO 2000 p. 2097); il devait être
poursuivi en 2004 avec ce même objectif jusqu'en 2007 (cf. Message relatif
à l'encouragement de la formation, de la recherche et de la technologie
pendant les années 2004 à 2007, du 29 novembre 2002, in FF 2003 p. 2067,
2205; ci- après cité: Message 2002 relatif à l'encouragement de la
formation); il a cependant été abandonné au 30 septembre 2004 (cf. RO
2005 p. 1041) avec l'adoption du programme d'allégement budgétaire 2003
et du programme d'abandon des tâches mis au point conjointement par
la Confédération et le Comité de la Conférence suisse des directeurs
cantonaux de l'instruction publique (Masterplan 2003; cf. rapport annuel
de la CUS 2003, p. 16).

    6.3  Selon le Message 2002 relatif à l'encouragement de la formation
(op. cit., p. 2112/2113 et 2205) et les directives remises par la
Conférence universitaire suisse aux établissements concernés, le programme
de relève consacrait, sous couvert de l'art. 7 précité de l'ordonnance en
réglant la 3e phase, un système impartissant aux universités d'attribuer
un quota de 40 % des postes de relève à des femmes (33 % jusqu'en
2000), sous peine d'un refus des aides financières correspondantes. Les
établissements qui, de manière provisoire, n'atteignaient pas ce taux,
pouvaient néanmoins continuer à bénéficier des aides en cours si le
quota de 40 % était atteint en moyenne nationale, c'est-à-dire sur
l'ensemble des universités concernées; à défaut, ils devaient prendre
à leur charge les postes de relève attribués à des hommes sur le quota
réservé aux femmes, et ils ne pouvaient plus solliciter de financement
pour de nouveaux postes de relève pour des hommes aussi longtemps que
le quota de femmes prescrit n'était pas atteint (cf. lettre de la CUS à
l'Université de Fribourg du 20 septembre 2000). L'application de cette
règle a été stricte (cf. SCHULZ, Droit de l'égalité en Suisse, op. cit.,
p. 125). A fin 2003, 78 % des postes de relève mis à disposition par la
Confédération avaient été attribués, à raison de 38 postes de professeurs
assistants et de 100 postes de maîtres assistants; ils étaient occupés
dans une proportion de 52 % par des femmes en équivalents plein-temps,
contre 53 % une année plus tôt (rapport annuel de la CUS 2003, p. 15).

    6.4  Destiné à augmenter la part des femmes dans le corps enseignant
universitaire, le système de quotas prévu dans le programme de relève
ne trouve pas de justification dans des différences biologiques ou
fonctionnelles; il relève typiquement de la catégorie des mesures positives
que peut prendre le législateur en vertu du mandat, autrefois déduit de
l'art. 4 al. 2 2e phrase aCst. et aujourd'hui repris à l'art. 8 al. 3 2e
phrase Cst., que lui confie la Constitution.

    La manière dont les quotas ont été appliqués par la Conférence
universitaire suisse et par l'Université équivaut à l'instauration d'un
système de quotas fixes ou rigides. La candidature du recourant a en effet
été d'emblée écartée, sans être examinée, en raison de la prise en compte
du seul critère du sexe. Que la candidate choisie remplît les conditions
requises pour le poste ne change rien à la qualification de la mesure,
contrairement à l'opinion du Tribunal administratif; seul est décisif à
cet égard le fait que le dossier du recourant n'ait à aucun moment été
examiné et comparé à celui de sa rivale.

    6.5  Afin de pouvoir porter un jugement sur la proportionnalité du
système de quotas mis en place, il est utile de prendre connaissance de
certaines conclusions d'un rapport d'évaluation du programme de relève
(THOMAS MEYER/BETTINA NYFFELER, L'encouragement de la relève universitaire:
entre la vocation et la chaire, rapport sur l'enquête qualitative 2000,
Office fédéral de l'éducation et de la science, Berne 2001). Ce rapport
a été effectué en 2000 sur la base notamment de réponses fournies par
différents acteurs du programme, à savoir: les universités qui y ont
pris part, 13 professeurs qui étaient responsables de l'encadrement
des participants, et un échantillon composé de 24 personnes (12 femmes
et 12 hommes) qui ont bénéficié du programme entre 1993 et 1998. Il
ressort de cette évaluation que les objectifs visés par le programme de
relève semblent n'avoir joué qu'un rôle secondaire dans les demandes de
postes adressées par les universités, au moins dans la phase initiale du
programme. Les établissements sondés ont en effet indiqué qu'ils avaient
prioritairement recouru à ces postes pour compenser des manques de moyens
et de ressources en personnel. Ainsi, entre 1993 et 1998, seul un poste
de relève a été demandé par une université en vue d'assurer la succession
d'un professeur proche de la retraite. Quant à la promotion des femmes,
en tant que justification prioritaire pour les demandes de postes, elle
n'a qu'à peine été mentionnée de manière explicite par les universités
(rapport précité, p. 21/22).

    Il apparaît également qu'entre 1993 et 2000, environ 20 % des
bénéficiaires du programme - ou plutôt des personnes interrogées - ont
été nommés à une chaire de professeur en Suisse ou à l'étranger. Les
autres bénéficiaires se répartissaient comme suit: un tiers des personnes
conservaient des chances de nomination intactes, un autre tiers avaient
abandonné la carrière académique, tandis que le dernier tiers continuaient
à occuper des postes "de corps intermédiaire à durée déterminée avec des
perspectives de carrière peu claires" (rapport précité, p. 37).

    Par ailleurs, l'évaluation a révélé que la politique des quotas
avait été appréciée de manière diverse, autant par les bénéficiaires du
programme - hommes et femmes confondus - que par les professeurs chargés de
l'appliquer (rapport précité, p. 24/27). Selon les auteurs de l'évaluation,
même si la règle des quotas a favorisé l'engagement d'un "pourcentage
de femmes beaucoup plus élevé que leur proportion dans les catégories
correspondantes du personnel universitaire n'ayant pas bénéficié de mesures
spéciales", elle a aussi montré des limites, en ce sens qu'elle n'a pas
permis d'éliminer certaines "barrières structurelles liées à l'appartenance
au sexe (dans certains cas accompagnées de discrimination objective)"
(rapport précité, p. 48). Il semble que les rapporteurs fassent ici
référence aux difficultés que les femmes doivent surmonter pour concilier
leur carrière professionnelle et leur vie familiale, faute notamment de
pouvoir disposer de structures adéquates dans les universités, telles
des crèches (rapport précité, p. 16 ss et 24 ss). Sur ce dernier point,
les auteurs du rapport sont d'avis qu'un autre programme fédéral mis en
place au titre des contributions liées à des projets, baptisé "Egalité des
chances", devrait être plus prometteur que le programme de relève s'il
pouvait être renforcé d'un certain nombre de mesures d'accompagnements,
comme par exemple la création de plus de postes à temps partiel pour
augmenter la compatibilité entre la carrière universitaire et la fondation
d'une famille (rapport précité, p. 48). Lancé en 2000, le programme
"Egalité des chances" était doté d'une enveloppe budgétaire de 16 millions
de francs pour la période 2000-2003 qui a été renouvelée pour la période
2004-2007. Il s'articule autour de trois axes: un système incitatif (module
1), qui consiste à répartir un crédit annuel de 1,35 million de francs
entre les différentes universités parties au programme en proportion du
nombre de femmes engagées par chacun des établissements; une action de
"mentoring" (module 2), qui comprend la mise en place d'une structure
destinée à soutenir et à mettre en réseau les femmes préparant un diplôme,
un doctorat ou une habilitation (service de conseils; offre de possibilités
de formation; dispense d'une partie des obligations d'enseignement;
...); et, enfin, des structures d'encadrement pour les enfants (module 3)
qui sont destinées à aider les enseignants et les étudiants à concilier
vie professionnelle et obligations familiales (pour des détails sur ce
programme, cf. les informations disponibles sur le site internet de la
CUS [www.cus.ch]; pour une approche critique de la constitutionnalité
de ce programme, cf. les différents auteurs qui se sont exprimés in
Kopfprämien für Professorinnen? Über Verfassungsmässigkeit, Opportunität
und Nützlichkeit von Anreizsystem, éd. par Barbara Lischetti/Maya Widmer,
Zurich 2004 [ci-après cité: Kopfprämien für Professorinnen?]).

    6.6  Comme on l'a vu, plus de 50 % des postes de relève ont été
attribués à des femmes, tandis qu'environ 20 % des bénéficiaires du
programme de relève ont pu accéder à une chaire de professeur. Dans
la mesure où l'on ignore quelle est la part des femmes dans ce dernier
chiffre, il est difficile de se prononcer sur l'adéquation de la mesure. De
durée limitée et faisant partie du "corps intermédiaire supérieur" des
universités, les postes de relève ne répondent en effet à l'objectif
visé, soit l'augmentation "durable" de la part des femmes dans le
corps enseignant universitaire, que s'ils débouchent réellement sur un
engagement définitif. De plus, il semble que le programme de relève n'a
pas permis de lever les obstacles "structurels" qui freinent l'accession
des femmes à l'enseignement universitaire. Sur ce point également, on peut
donc s'interroger sur l'efficacité du système de quotas mis en place au
vu de l'objectif visé.

    Par ailleurs, les auteurs du rapport d'évaluation ont souligné que le
programme "Egalité des chances" leur apparaissait plus "prometteur" que le
programme de relève pour augmenter la part des femmes dans l'enseignement
universitaire. Or, il ne fait pas de doute que les mesures mises en place
dans le cadre de cet autre programme sont beaucoup moins incisives que
le système de quotas litigieux, puisqu'elles ne portent qu'une atteinte
limitée au principe d'égalité formelle: les structures d'encadrement
pour les enfants bénéficient en effet indistinctement aux femmes et aux
hommes (module 3), tandis que les actions de mentoring (module 2), bien
que réservées aux femmes, ne les avantagent que très indirectement dans
la perspective d'accéder à une chaire de professeur; quant aux primes
d'incitation (module 1), à supposer que leur efficacité soit démontrée,
elles sont en toute hypothèse moins discriminatoires à l'égard des hommes
qu'un système de quotas fixes, dans la mesure où, en particulier, elles
n'ont pas pour effet de les exclure d'emblée d'un poste mis au concours,
sans tenir compte de leurs qualifications et de leurs compétences. La
nécessité de la mesure attaquée prête donc à discussion.

    Mais c'est assurément sous l'angle de la proportionnalité au
sens étroit que le système de quotas rigides mis en place pèche le
plus. Certes, le Bureau de l'égalité objecte que la mesure était limitée
dans le temps. Cet élément est assurément important pour juger de la
proportionnalité d'une mesure positive, notamment si l'on veut pouvoir en
tester l'aptitude ou l'adéquation par rapport au but visé. L'argument ne
tient toutefois pas dans le cas d'espèce: introduit en 1992, le programme
de relève a été régulièrement reconduit et devait être poursuivi jusqu'en
2007. On ne saurait donc sérieusement soutenir qu'il était de courte
durée. Par ailleurs, même si le programme ne concernait pas des postes
de professeur ordinaire, mais simplement des postes "temporaires dans le
corps intermédiaire supérieur", il n'en reste pas moins que de tels postes
représentaient un avantage comparatif non négligeable dans la perspective
d'une carrière académique, puisque 20 % des bénéficiaires du programme
ont pu accéder à une chaire de professeur. Enfin, il n'est pas non plus
décisif, pour apprécier la gravité de l'atteinte, que 60 % des postes
disponibles fussent laissés à des hommes (70 % jusqu'en 2000). Il est en
effet inhérent à tout système de quotas fixes qu'une part significative -
souvent proche de la parité - reste acquise au groupe dont on veut faire
diminuer la représentation. Quoi qu'il en soit, cette proportion de 40 %
n'a de sens que si elle peut être rapportée aux nombres respectifs des
femmes et des hommes intéressés par la carrière académique et disposant des
qualifications nécessaires pour les postes de relève proposés. A défaut,
c'est-à-dire si, au moment où le quota est appliqué, un nombre bien
plus important d'hommes que de femmes aspirent à la carrière académique
et sont en position de se porter candidats aux postes de relève, la
mesure leur cause alors une atteinte certaine. L'atteinte est d'autant
plus grande en l'espèce que les postes disponibles dans l'enseignement
universitaire sont relativement limités et que, selon la faculté ou la
spécialisation considérées, il n'est pas rare de devoir attendre plusieurs
années avant qu'une chaire ne se libère. Enfin et surtout, il n'est guère
défendable, sous l'angle du simple bon sens et de l'intérêt public, de
faire abstraction des compétences et des qualifications des candidats pour
des postes aussi qualifiés que ceux de l'enseignement universitaire. En
l'occurrence, une seule femme bénéficiant des compétences requises s'est
portée candidate pour le poste litigieux.

    6.7  Dans ces conditions, il est pour le moins douteux que le
système de quotas fixes litigieux soit conforme au principe de la
proportionnalité. Les arrêts les plus récents de la Cour de justice des
communautés européennes ne semblent pas conduire à une autre solution
(cf., pour une comparaison des droits suisse et communautaire, ASTRID
EPINEY, Das Recht der Gleichstellung von Mann und Frau im europäischen
Gemeinschaftsrecht und schweizerischem Recht - Konvergenzen und
Divergenzen, in SZS 2005 p. 37 ss). La question peut néanmoins rester
ouverte, car le recours doit de toute façon être admis pour un autre motif.

Erwägung 7

    7.

    7.1  Dans les affaires précitées soleuroise et uranaise, le Tribunal
fédéral a examiné la constitutionnalité des quotas féminins uniquement
sous l'angle du principe de la proportionnalité ainsi qu'au regard de leur
compatibilité avec les garanties attachées aux droits politiques. Saisi,
dans les deux cas, d'un recours de droit public portant sur le contrôle
abstrait des initiatives cantonales mises en cause - la première de rang
législatif, la seconde de rang constitutionnel -, il n'avait en effet pas
à s'exprimer spécifiquement sur les exigences requises en matière de base
légale pour instaurer les quotas litigieux (cf. VINCENT MARTENET, Géométrie
de l'égalité, Zurich/Bâle/Genève 2003, n. 773 et 776). Il n'en demeure pas
moins que des mesures positives - empiétant sur le principe de l'égalité,
au sens formel - doivent être prévues dans une loi; cette exigence est en
effet une conséquence directe du rattachement constitutionnel de telles
mesures à la deuxième phrase de l'art. 8 al. 3 Cst. (cf. ANDREAS AUER,
"Combien de chameaux pour une professeure?": La constitutionnalité plus
que douteuse du système des primes à la nomination, in Kopfprämien für
Professorinnen?, op. cit., p. 13 ss, 17).

    7.2  Le Bureau de l'égalité conteste cette interprétation, en renvoyant
à l'opinion de CHRISTA TOBLER (notamment exposée à l'ATF 125 I 21 consid.
3d/bb p. 30/31). Selon cet auteur, un traitement juridique différencié des
femmes et des hommes peut également tirer sa justification de la première
phrase de l'art. 4 al. 2 aCst. (art. 8 al. 3 première phrase Cst.),
non seulement pour les motifs, admis par le Tribunal fédéral, tirés des
différences biologiques ou fonctionnelles entre les sexes, mais encore en
présence d'autres disparités - par exemple d'ordre structurel - qui ont
notamment pour effet de discriminer les femmes dans la vie professionnelle,
en particulier en matière d'accès à l'emploi (allant sensiblement dans
le même sens, en plaidant pour une interprétation large des différences
fonctionnelles, cf. MARGRITH BIGLER-EGGENBERGER, Et si la justice
ôtait son bandeau?, La jurisprudence du Tribunal fédéral sur l'égalité
entre femmes et hommes, Bâle 2003, n. 674 ss). Dans le cas présent, la
forte sous-représentation des femmes dans l'enseignement universitaire
suffirait, selon le Bureau de l'égalité, à attester l'existence de telles
discriminations à leur égard en ce domaine et, partant, à justifier
le traitement juridique différencié que leur assure la règle de quotas
litigieuse: comprise comme une mesure qui traite de manière différente
ce qui est dissemblable, une telle règle ne constituerait en effet pas
une violation du principe de l'égalité formelle garanti à l'art. 8 al. 3
première phrase Cst., mais en serait au contraire la concrétisation; elle
ne saurait donc être soumise à des conditions spécifiques, notamment en
ce qui concerne l'exigence de la base légale.

    Dans l'affaire précitée uranaise, le Tribunal fédéral a déjà précisé
que cette argumentation achoppait à la volonté du constituant, selon
laquelle le principe d'égalité formelle, ancré à l'art. 4 al. 2 première
phrase aCst., ne souffrait pas d'autres exceptions que celles tirées des
causes biologiques ou fonctionnelles (cf. ATF 125 I 21 consid. 3d/bb
p. 30/31 et les renvois aux travaux préparatoires relatifs à l'art. 4
al. 2 aCst. ainsi qu'à l'ATF 108 Ia 22 consid. 5a p. 29). Or, la nouvelle
Constitution fédérale ne remet pas en cause cette conception, comme
la jurisprudence a déjà - du moins implicitement - eu l'occasion de le
préciser (cf. 126 II 217 consid. 4a p. 219). L'art. 8 al. 3 Cst. reprend
en effet pratiquement mot pour mot le texte de l'art. 4 al. 2 aCst., si
ce n'est qu'il précise que la loi pourvoit à l'égalité "de droit et de
fait". Cette précision apparaît toutefois comme une simple formalisation
de la conception dominante qui prévalait déjà au sujet de l'art. 4 al. 2
aCst. dans la jurisprudence et la doctrine (cf. Message du 20 novembre 1996
relatif à une nouvelle Constitution fédérale, tiré à part, p. 144/145;
BEATRICE WEBER-DÜRLER, in Droit constitutionnel suisse, Zurich 2001,
éd. par Thürer/Aubert/Müller, n. 31 ad § 41; JULIANNE KOKOTT/PATRICIA
EGLI, Rechtsfragen zu positiven Massnahmen in Staat und Unternehmen, in
PJA 2000 p. 1485 ss, 1487; ETIENNE GRISEL, Egalité, les garanties de la
Constitution fédérale du 18 avril 1999, Berne 2000, n. 237), même si elle
a donné lieu à des débats nourris et passionnés aux Chambres fédérales
(cf. PASCAL MAHON, Petit commentaire de la Constitution fédérale de la
Confédération suisse du 18 avril 1999, Zurich 2003, n. 18 ad art. 8 Cst.;
GRISEL, op. cit., n. 236). La jurisprudence rendue à propos de l'art. 4
al. 2 aCst. garde donc toute sa valeur sous l'empire de l'art. 8 al. 3
Cst. (cf. ATF 126 II 217 consid. 4a p. 219) et les quotas litigieux,
comme toute mesure positive, ne peuvent tirer leur fondement que de la
deuxième phrase de la disposition constitutionnelle précitée (cf. ELISABETH
FREIVOGEL, Commentaire de la loi sur l'égalité, Lausanne 2000, n. 9 et
10 ad art. 2 LEg).

    7.3  Pour l'essentiel, le Tribunal administratif a considéré que le
système de quotas litigieux reposait sur une base légale suffisante, car
il était prévu dans une loi et une ordonnance fédérales (la loi sur l'aide
aux universités et l'ordonnance réglant la 3e phase du programme). Il a
également laissé entendre que des mesures positives pouvaient de toute
façon être prises sur la base de l'art. 3 al. 3 LEg.

    Le recourant reproche au Tribunal administratif d'avoir méconnu la
portée de l'art. 3 al. 3 LEg, en ce sens que le législateur a exclu la
possibilité de fonder des mesures positives sur cette disposition.

    Pour sa part, le Bureau de l'égalité soutient qu'en adoptant la loi
sur l'aide aux universités, l'Assemblée fédérale a donné son aval au
système de quotas litigieux, car le message relatif à cette loi y fait
référence de manière explicite. Au demeurant, cet office estime qu'il ne
faut pas poser "des exigences démesurées" concernant la base légale pour
de telles mesures, limitées dans le temps, qui sont destinées à réaliser
l'égalité matérielle entre femmes et hommes.

    7.4  La doctrine s'accorde à reconnaître que les mesures positives
nécessitent une base légale formelle lorsqu'elles revêtent une certaine
intensité et qu'elles se traduisent par l'octroi d'avantages à un certain
groupe de personnes, éventuellement au détriment d'un autre groupe (cf.
MARTENET, op. cit., n. 702 et les références citées). D'une manière
générale, cette exigence est d'autant plus élevée que les mesures
sont contraignantes, qu'elles sont susceptibles d'affecter de manière
importante les droits fondamentaux de tiers (cf. KATHARINA SIMONE
ARIOLI, Frauenförderungsmassnahmen im Erwerbsleben, thèse Zurich 2002,
p. 240/241; YVO HANGARTNER, Geschlechtergleichheit und Frauenquoten in der
öffentlichen Verwaltung, in PJA 1992 p. 835 ss, 838; JACQUELINE ZWICKER,
Geschlechterquoten, in Personalrecht des öffentlichen Dienstes, éd. par
Peter Helbling/Thomas Poldena, Berne 1999, p. 308) et qu'elles sont
controversées dans l'opinion publique; en ce dernier cas, leur adoption
ne peut en effet que procéder d'un choix politique clair émanant du
législateur formel, au risque de violer le principe de la séparation des
pouvoirs (cf. AUER, op. cit., p. 17/18; GEORG MÜLLER, Quotenregelungen,
Rechtssetzung im Spannungsfeld von Gleichheit und Verhältnismässigkeit,
in ZBl 91/1990 p. 306 ss, 309).

    Etant certainement, parmi les différentes mesures positives
envisageables, le moyen le plus direct et le plus radical pour établir
une égalité de résultat entre les sexes, les quotas, surtout lorsqu'ils
sont fixes, suscitent des débats de société souvent passionnés; ils
n'ont jusqu'ici pas trouvé grâce en Suisse, les différents textes et
initiatives proposant leur introduction dans des domaines aussi variés
que la politique, la formation ou l'emploi, ayant tous été rejetés de
manière assez nette par les urnes, que ce soit à l'occasion de scrutins
fédéraux ou cantonaux (cf. AUER, op. cit., p. 17; REGULA MADER, Die
Verfassungsmässigkeit von Quoten in der Politik anhand konkreter Modelle,
in Frauenförderung durch Quoten, éd. par Kathrin Arioli, Bâle 1997, p. 279
ss, 290 ss). Certes, en matière d'accès à l'emploi dans le secteur public,
des quotas souples ou flexibles peuvent être mis en place par une simple
voie réglementaire ou administrative; ils mettent en effet en premier lieu
l'accent sur les compétences des candidats et n'écartent pas d'entrée
de jeu et de manière automatique les candidatures masculines (dans ce
sens, cf. SIMONE ARIOLI et ZWICKER, loc. cit.; ARIOLI/FURRER ISELI,
op. cit., n. 134; CLAUDIA KAUFMANN, Das Anreizsystem im Bundesprogramm
Chancengleichheit, in Kopfprämien für Professorinnen?, op. cit., p. 31
ss, 39). C'est d'ailleurs cette voie qu'a notamment choisie le Conseil
fédéral pour réaliser dans les faits l'égalité des chances et l'égalité
de traitement entre les femmes et les hommes au sein du personnel de
l'administration fédérale (cf. art. 6 de l'ordonnance du 3 juillet 2001 sur
le personnel de la Confédération [OPers; RS 172.220.111.3]; voir aussi les
instructions du Conseil fédéral du 22 janvier 2003 pour la réalisation de
l'égalité des chances entre femmes et hommes dans l'administration fédérale
[FF 2003 p. 1332]). Mais il en va tout autrement lorsque des procédures
d'engagement du personnel sont soumises, dans le secteur public, à des
quotas fixes ou rigides; vu l'importance de l'atteinte que de telles
mesures sont susceptibles de causer aux candidats à l'emploi de l'autre
sexe, elles apparaissent en effet difficilement concevables hors le
cadre d'une loi formelle (cf. HANGARTNER, loc. cit.; MARTENET, op. cit.,
n. 776; SIMONE ARIOLI, op. cit., p. 243; REGULA MADER, op. cit., p. 306),
si c'est n'est dans tous leurs détails, au moins quant à leur principe
(cf. MARIANNE SCHWANDER CLAUS, Verfassungsmässigkeit von Frauenquoten,
thèse Berne 1995, p. 174/ 175).

    7.5  Comme on l'a vu (supra consid. 3), l'art. 3 al. 3 LEg prévoit que
les mesures appropriées visant à promouvoir dans les faits l'égalité entre
les femmes et les hommes ne constituent pas une discrimination. Selon le
Message concernant la loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes
(op. cit.), cette disposition doit se comprendre comme une réserve; elle
ne préjuge pas de la constitutionnalité d'éventuelles mesures adoptées
par voie législative, ni ne constitue une base légale permettant d'adopter
de telles mesures; elle tend surtout à éviter que les mesures prises par
un employeur en vue d'améliorer la représentation des femmes dans son
entreprise ne soient qualifiées de discriminatoires (message précité,
p. 1212). Lors des débats aux Chambres fédérales, des députés se sont
inquiétés de la portée de l'art. 3 al. 3 LEg; ils craignaient en effet
que cette disposition ne soit la porte ouverte à une politique des quotas
(cf. BO 1994 CN p. 258, Eggli; BO 1994 CE p. 819, Danioth). Le conseiller
fédéral en charge du dossier a répondu à cette préoccupation en indiquant
que la disposition en cause ne s'appliquait pas aux rapports de travail
soumis au droit public, mais visait uniquement à rendre licites des
mesures de promotion des femmes décidées par des employeurs privés
(BO 1994 CN p. 261, Koller; BO 1994 CE p. 821, Koller). Au vu du champ
d'application de la loi sur l'égalité (cf. art. 2 LEg), il est douteux
que cette réponse soit exacte (cf. KOKOTT/EGLI, op. cit., p. 1488;
KAUFMANN, Das Anreizsystem im Bundesprogramm Chancengleichheit, op. cit.,
n. 19, p. 37). Peu importe cependant. Les députés ont en effet clairement
manifesté que l'art. 3 al. 3 LEg ne devait en aucun cas constituer une
base légale pour la mise en oeuvre de mesures positives, telles des règles
de quotas fixes (cf. BO 1994 CN p. 259 s., Bär, Nabholz, Comby, Stamm;
BO 1994 CE p. 818, Meier). Il s'ensuit que, conformément à la volonté
du législateur, de telles mesures requièrent une base légale spécifique
(cf. BESSON, op. cit., n. 1702; ZWICKER, op. cit., p. 310; LUZIUS MADER,
op. cit., p. 26; FREIVOGEL, op. cit., n. 154 ad art. 3 LEg; KATHRIN ARIOLI,
Sind Quoten wirksame Mittel zur Frauenförderung?, in Frauen im Recht,
Berne 2000, p. 61 ss, 69).

    7.6  L'art. 7 précité de l'ordonnance réglant la 3e phase du programme
ne prévoit pas de manière claire l'instauration d'un système de quotas:
la part de 40 % des postes devant revenir à des femmes y est davantage
présentée comme un objectif à atteindre que comme une règle de quotas,
dans la mesure, notamment, où il n'est pas fait mention de sanction en cas
de défaillance; de surcroît, rien ne permet d'interpréter la disposition en
cause comme autorisant un système de quotas fixes ou rigides; la précision
que les universités doivent "en principe" attribuer 40 % des postes de
relève à des femmes incite même plutôt à penser le contraire; enfin,
fût-il prévu avec suffisamment de précision dans l'ordonnance précitée,
un tel système de quotas ne trouve de toute façon pas d'appui dans une
loi formelle.

    Certes, la loi sur l'aide aux universités indique, au titre des
objectifs particuliers de la Confédération, que celle-ci encourage des
mesures propres à réaliser l'égalité entre femmes et hommes à tous les
échelons universitaires (art. 2 al. 1 let. b LAU); un objectif aussi vague
ne saurait toutefois constituer une base légale suffisante pour déléguer à
l'exécutif ou à une autorité administrative la compétence d'instaurer des
quotas fixes. Pour comparaison, le quota de 33 % de femmes appliqué dans
le cadre du programme de relève jusqu'en 2000 découlait d'un texte approuvé
par l'Assemblée fédérale (cf. art. 3 de l'arrêté fédéral instituant des
mesures spéciales visant à encourager la relève universitaire durant les
années 1992 à 1995; RO 1992 p. 1182) que certains auteurs ont considéré
comme pouvant constituer une base légale suffisante pour des quotas,
sans toutefois que l'on sache s'ils étaient pleinement conscients du
fait qu'il s'agissait de quotas fixes (cf. ZWICKER, op. cit., p. 312; YVO
HANGARTNER, Gleicher Zugang von Männern und Frauen zu öffentlichen Ämtern:
Bemerkungen zum Urteil des Gerichtshofs der Europäischen Gemeinschaften
im Fall Kalanke, PJA 1995 p. 1554 ss, 1558).

    Quant aux indications concernant le programme de relève contenues
dans le Message du Conseil fédéral accompagnant la révision totale de la
loi sur l'aide aux université (FF 1999 p. 271, 303), elles ne sauraient
non plus pallier l'absence de base légale formelle: d'une part, c'est
d'abord le texte de la loi qui fait foi quand il s'agit d'en déterminer
le contenu; or, comme on l'a vu, la loi ne prévoit pas de mesure aussi
incisive qu'un système de quotas fixes; d'autre part, le message lui-même
n'est pas suffisamment précis, en ce sens que, s'il évoque la politique de
quotas suivie, il n'indique pas que l'on a affaire, en réalité, au système
de quotas fixes tel qu'il a été appliqué par les autorités compétentes
(soit la Conférence universitaire suisse et l'Université).

    7.7  Dans ces conditions, force est d'admettre que, telle que comprise
et appliquée, la règle de quotas prévue dans le programme de relève ne
repose pas sur une base légale suffisante; elle ne saurait dès lors être
admise au titre d'une "mesure appropriée" visant à promouvoir dans les
faits l'égalité entre femmes et hommes au sens de l'art. 3 al. 3 LEg. La
décision de l'Université de ne pas entrer en matière sur la candidature
du recourant doit donc être considérée comme contraire à l'interdiction
de discriminer prévue à l'art. 3 al. 1 et 2 LEg.