Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 131 II 265



131 II 265

22. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause X.
contre Service de la population ainsi que Tribunal adminis- tratif du
canton de Vaud (recours de droit administratif)

    2A.404/2004 du 18 février 2005

Regeste

    Art. 7 ANAG und Art. 8 EMRK; Verweigerung einer Aufenthaltsbewilligung.

    Ein Gesuch um Erteilung einer Aufenthaltsbewilligung zur Erleichterung
des Besuchs des Ehemannes im Freiheitsentzug kann sich nicht auf Art. 7
Abs. 1 ANAG stützen, weil dies nicht dem vom Gesetzgeber gewollten
Normzweck entspricht (E. 4).

    Befindet sich einer der Ehegatten im Freiheitsentzug, so besteht der
durch Art. 8 Ziff. 1 EMRK garantierte Schutz des Familienlebens darin,
durch geeignete Ausgestaltung der Strafvollzugsbedingungen oder durch
entsprechende Anwendung der Verwahrungsmassnahmen einen minimalen Kontakt
zwischen den Ehegatten sicherzustellen. Aus Art. 8 Ziff. 1 EMRK kann kein
Anspruch auf Daueraufenthalt abgeleitet werden, um der ausländischen
Ehegattin eines Schweizer Häftlings die Ausübung des Besuchsrechts zu
erleichtern (E. 5).

Sachverhalt

    Ressortissante polonaise, X. est arrivée en Suisse le 9 mars 2003
pour rendre visite à son fiancé, Y., détenu. X. a épousé Y. le 19 mai
2003 et a demandé, le 1er juin 2003, une autorisation de séjour au titre
du regroupement familial.

    Par décision du 25 mars 2004, le Service de la population du canton de
Vaud (ci-après: le Service cantonal) a refusé de délivrer une autorisation
de séjour à X. et ordonné à l'intéressée de quitter le territoire vaudois
dès la notification de cette décision.

    Par arrêt du 11 juin 2004, le Tribunal administratif du canton de Vaud
(ci-après: le Tribunal administratif) a rejeté le recours de X. contre la
décision du Service cantonal du 25 mars 2004 et confirmé ladite décision,
en précisant que l'intéressée était invitée à se conformer à l'ordre
de départ que comportait cette décision. Il a considéré en particulier
que les époux Y. avaient contracté un mariage fictif et que le fait de
solliciter une autorisation de séjour sur la base de l'art. 7 LSEE (RS
142.20) constituait en l'espèce un abus de droit. En outre, le mariage des
époux Y. ne remplissait pas les conditions pouvant justifier la protection
de l'art. 8 CEDH.

    Agissant par la voie du recours de droit administratif, X. demande
au Tribunal fédéral, principalement, d'annuler l'arrêt du Tribunal
administratif du 11 juin 2004 ainsi que de lui délivrer une autorisation
de séjour et, subsidiairement, d'annuler l'arrêt du Tribunal administratif
du 11 juin 2004 ainsi que de renvoyer le dossier de la cause à l'autorité
intimée pour nouvelle instruction. La recourante se plaint notamment de
violation des art. 7 al. 1 LSEE et 8 CEDH.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                          Extrait des considérants:

Erwägung 4

    4.

    4.1  Selon l'art. 7 al. 1 LSEE, le conjoint étranger d'un ressortissant
suisse a droit à l'octroi et à la prolongation de l'autorisation de
séjour; après un séjour régulier et ininterrompu de cinq ans, il a droit
à l'autorisation d'établissement; ce droit s'éteint lorsqu'il existe
un motif d'expulsion. Quant à l'art. 7 al. 2 LSEE, il prévoit que le
conjoint étranger d'un ressortissant suisse n'a pas droit à l'octroi
ou à la prolongation de l'autorisation de séjour lorsque le mariage a
été contracté dans le but d'éluder les dispositions sur le séjour et
l'établissement des étrangers et notamment celles sur la limitation
du nombre des étrangers. D'après la jurisprudence, le fait d'invoquer
l'art. 7 al. 1 LSEE peut être constitutif d'un abus de droit en l'absence
même d'un mariage contracté dans le but d'éluder les dispositions sur le
séjour et l'établissement des étrangers au sens de l'art. 7 al. 2 LSEE
(ATF 128 II 145 consid. 2.1 p. 151; 121 II 97 consid. 4a p. 103).

    4.2  Il y a abus de droit notamment lorsqu'une institution juridique
est utilisée à l'encontre de son but pour réaliser des intérêts que cette
institution juridique ne veut pas protéger (ATF 130 II 113 consid. 10.2 p.
135; 128 II 145 consid. 2.2 p. 151). L'existence d'un éventuel abus de
droit doit être appréciée dans chaque cas particulier et avec retenue,
seul l'abus de droit manifeste pouvant être pris en considération (ATF
121 II 97 consid. 4a p. 103).

    L'existence d'un abus de droit découlant du fait de se prévaloir
de l'art. 7 al. 1 LSEE ne peut en particulier être simplement déduite
de ce que les époux ne vivent plus ensemble, puisque le législateur a
volontairement renoncé à faire dépendre le droit à une autorisation de
séjour de la vie commune (cf. ATF 118 Ib 145 consid. 3 p. 149 ss). Il ne
suffit pas non plus qu'une procédure de divorce soit entamée ou que les
époux vivent séparés et n'envisagent pas le divorce. Toutefois, il y a abus
de droit lorsque le conjoint étranger invoque un mariage n'existant plus
que formellement dans le seul but d'obtenir une autorisation de séjour,
car ce but n'est pas protégé par l'art. 7 al. 1 LSEE (ATF 128 II 145
consid. 2.2 p. 151/ 152; 121 II 97 consid. 4a p. 103/104).

    4.3  Ainsi, il convient d'examiner si, en l'espèce, le fait d'invoquer
l'art. 7 al. 1 LSEE, qui tend à protéger une véritable communauté conjugale
(cf. ATF 121 II 97 consid. 4a p. 103/104), pour obtenir une autorisation
de séjour correspond au but poursuivi par le législateur lorsqu'il a
adopté cette disposition.

    Le 31 mars 2003, le Tribunal criminel de l'arrondissement de Lausanne
a condamné le mari de la recourante à une peine de réclusion de dix
ans et ordonné un traitement psychothérapeutique ambulatoire. Y. a
été reconnu coupable notamment de crime manqué d'assassinat, lésions
corporelles graves, viol qualifié, contrainte sexuelle, délit manqué de
lésions corporelles simples qualifiées et lésions corporelles simples
qualifiées. Sur recours, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal
vaudois a ordonné, le 29 septembre 2003, la suspension de l'exécution de la
peine et prononcé l'internement de Y. au sens de l'art. 43 ch. 1 al. 2 CP.
Dans un arrêt du 2 avril 2004 (6S.46/2004), la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral a annulé l'arrêt cantonal du 29 septembre 2003 et
renvoyé la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision, après
complément d'expertise.

    Par conséquent, le 1er juin 2003, lorsque la recourante a demandé
pour la première fois une autorisation de séjour au titre du regroupement
familial avec Y. - objet du présent litige -, elle savait que son mari
serait encore incarcéré pendant plusieurs années, même s'il pouvait
bénéficier de la libération conditionnelle, et qu'une véritable communauté
conjugale ne pourrait exister entre eux qu'après l'écoulement de ces
années (cf. arrêt 2A.77/2000 du 8 mai 2000, consid. 4c). La situation
de l'intéressée n'est d'ailleurs pas plus favorable à l'heure actuelle
où se pose la question de la suspension de l'exécution de la peine de
son mari au profit de l'internement de ce dernier. La recourante n'a pas
fait ménage commun avec Y. avant qu'il soit mis en détention. Même si elle
rend visite à son mari deux à trois fois par mois (vingt-cinq visites en
2003 et onze ou douze durant les quatre premiers mois de 2004), elle ne
peut pas se prévaloir, depuis son mariage, d'une véritable communauté
conjugale. En outre, une telle communauté ne pourra pas être réalisée
dans un avenir proche, en raison de la détention ou de l'internement
de Y., qui est mentalement malade comme cela ressort de l'ensemble de
son comportement dans la vie (cf. à ce sujet l'arrêt 6S.46/2004 du 2
avril 2004). Or, c'est une véritable communauté conjugale que l'art. 7
al. 1 LSEE a pour but de protéger, même si la cohabitation des époux
n'est pas exigée. Cette disposition tend en effet à permettre et assurer
juridiquement la vie commune en Suisse (ATF 128 II 145 consid. 3.3 p. 154),
soit la vie auprès de l'époux suisse en Suisse du conjoint étranger et non
pas le séjour en Suisse du conjoint étranger pour visiter son époux suisse
en détention ainsi que pour attendre sa sortie de prison et préparer sa
réinsertion sociale (arrêt 2A.77/2000 du 8 mai 2000, consid. 4c). Ce qui
vient d'être dit est valable dans le cas particulier où il s'agit d'une
première autorisation de séjour. En revanche, l'interruption de la vie
commune due à une condamnation pénale ne justifierait pas forcément le
refus de la prolongation d'une autorisation de séjour (arrêt 2A.77/2000
du 8 mai 2000, consid. 4c). Il apparaît donc que, dans le cas présent,
la requête tendant à obtenir une autorisation de séjour en invoquant
l'art. 7 al. 1 LSEE sort du cadre de cette disposition. La recourante
demande une autorisation de séjour uniquement pour pouvoir rendre visite
plus aisément à son mari privé de liberté. Cet objectif ne correspond pas
au but poursuivi par le législateur lorsqu'il a adopté l'art. 7 al. 1
LSEE. Dès lors, la requête de l'intéressée ne peut pas se fonder sur
cette disposition et doit être écartée, même si elle ne constitue pas à
proprement parler un abus de droit au sens où l'entend la jurisprudence
(cf. consid. 4.2, ci-dessus).

Erwägung 5

    5.  Reste à examiner si la recourante peut déduire un droit à une
autorisation de séjour durable de l'art. 8 par. 1 CEDH qui consacre le
droit au respect de la vie privée et familiale, mais pas de façon absolue
(cf. art. 8 par. 2 CEDH).

    Le droit au mariage garanti par l'art. 12 CEDH (cf. art. 14 Cst.) ne
comporte pas le droit de vivre une véritable union conjugale. Durant
la détention ou l'internement, les rapports entre époux se limitent
aux contacts personnels, téléphoniques et épistolaires autorisés par
le règlement de l'établissement où réside le conjoint privé de liberté.
L'exécution de la peine ou de la mesure d'internement prime le droit de
réaliser une communauté conjugale. Dans l'arrêt précité du 8 mai 2000
(2A.77/2000), le Tribunal fédéral a débouté la femme étrangère d'un
détenu suisse qui voulait obtenir une autorisation de séjour en Suisse,
en rappelant que la protection de l'art. 8 par. 1 CEDH présupposait une
relation étroite et effective entre un étranger et une personne de sa
famille ayant un droit de présence en Suisse et qu'une telle relation
était exclue dans ce cas puisque le mari de l'intéressée était détenu
(cf. aussi ATF 118 Ib 145 consid. 4b p. 152). Lorsqu'un des conjoints est
privé de liberté, la protection de la vie familiale consiste à garantir un
minimum de contacts entre époux par les modalités d'exécution de la peine
ou par l'aménagement de l'application des mesures d'internement. Il ne
ressort du reste pas de la jurisprudence relative à l'art. 8 CEDH qu'il
faille accorder au détenu des relations intimes régulières avec son
conjoint (LUZIUS WILDHABER, Internationaler Kommentar zur Europäischen
Menschenrechtskonvention, n. 411 ad art. 8 CEDH). Ainsi, on ne peut pas
déduire de l'art. 8 par. 1 CEDH un droit à l'octroi d'une autorisation
de séjour durable en faveur de l'épouse étrangère d'un détenu suisse,
afin de lui faciliter l'exercice de son droit de visite.

    Sur la base de l'art. 8 par. 1 CEDH, la recourante n'a par conséquent
pas le droit de séjourner de façon permanente en Suisse pour visiter
plus aisément son mari. En revanche, elle peut exiger qu'on lui permette
d'entretenir des relations convenables avec lui. Elle pourra donc continuer
à lui rendre visite comme elle l'a d'ailleurs déjà fait, en tout cas deux
fois en février 2003, avant de séjourner en Suisse.