Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 131 III 572



131 III 572

74. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile dans la cause Sabrina
Lombardo contre Fernanda Simao/Simao Institut de Beauté Atlantis (recours
en réforme)

    4C.120/2005 du 7 septembre 2005

Regeste

    Art. 956 OR; Schutz der Firma.

    Geografischer Schutzumfang der Einzelfirmen nach Art. 956
OR. Darstellung der Pflichten, die den Inhaber einer Einzelfirma gegenüber
dem Inhaber einer früher im Handelsregister eingetragenen Geschäftsfirma
treffen. Umschreibung der Begriffe der unmittelbaren und der mittelbaren
Verwechslungsgefahr (E. 3).

    Die Bestimmung von Art. 956 OR kann auch gegen den Inhaber
einer Einzelfirma angerufen werden, der nicht im Handelsregister
eingetragen ist (E. 4.1). Fälle, in denen Familiennamen, die in der
Geschäftsfirma an die erste Stelle gesetzt werden, nicht geeignet sind,
das Unternehmen zu individualisieren (E. 4.2). Das Wort "Atlantis"
stellt eine Fantasiebezeichnung dar, wenn es in der Einzelfirma
eines Schönheitsinstituts verwendet wird (E. 4.3). Bejahung der
Verwechslungsgefahr zwischen zwei konkreten Geschäftsfirmen, die eine
identische Fantasiebezeichnung enthalten und sich im gleichen geografischen
Umkreis konkurrenzieren (E. 4.4).

Sachverhalt

    A.

    A.a Fernanda Simao, qui exploite depuis octobre 2000 à la rue de la
Servette, à Genève, un institut de beauté dispensant des soins esthétiques
corporels ainsi que des drainages lymphatiques, a procédé, le 13 février
2001, à l'inscription au Registre du commerce de Genève de la raison
individuelle "Simao Institut de beauté Atlantis"; l'inscription a paru
dans la Feuille Officielle Suisse du Commerce (FOSC) du 19 février 2001.

    Cet institut figure au répertoire des entreprises du canton de Genève
sous la dénomination "Institut de beauté Atlantis".

    Fernanda Simao fait de la publicité pour son institut au moyen de
cartes de visite sur lesquelles le terme "Atlantis", entouré de deux
lignes courbes pouvant faire penser à des vagues, est mis en évidence
dans la partie gauche teinte en bleu.

    A.b Sabrina Lombardo exploite à compter de la mi-janvier 2001, au
2 rue des Grandes Portes, à Onex, un institut de beauté délivrant des
soins similaires à ceux mentionnés ci-dessus, auxquels s'ajoute la mise
à disposition d'un solarium.

    L'entreprise de Sabrina Lombardo n'est pas inscrite au Registre
du commerce genevois. Elle apparaît dans le répertoire des entreprises
genevoises sous la dénomination "Institut de beauté Atlantis". Ladite
entreprise est inscrite dans le répertoire téléphonique de Swisscom sous
la mention "Atlantis Lombardo Sabrina", laquelle figure juste au-dessus
de celle afférente à l'institut exploité par Fernanda Simao; ces deux
inscriptions sont séparées par un placard publicitaire portant le vocable
"Atlantis" écrit sur 3 cm en lettres majuscules avec des caractères gras de
1 cm de hauteur, surmontant, en très gros chiffres, le numéro de téléphone
de l'institut ouvert par Sabrina Lombardo (art. 64 al. 2 OJ).

    Sabrina Lombardo publie des encarts publicitaires dans un journal
distribué dans les communes d'Onex et Lancy, lesquels mettent en évidence
le terme "Atlantis", imprimé en bleu sur fond blanc, dont le trait incurvé
figure au-dessous de la silhouette d'une sirène.

    Il a été constaté que le vocable "Atlantis" apparaît dans 97 raisons
sociales, existantes ou radiées, répertoriées par l'Office fédéral du
registre du commerce, qui sont utilisées également par des entreprises
déployant des activités sans lien direct avec la mer.

    L'utilisation sur Internet du moteur de recherche Google donne 1510
occurrences sur l'ensemble du Web si le mot-clé "Atlantis" est associé
à l'expression "institut de beauté".

    A.c En avril 2003, Fernanda Simao est intervenue en vain auprès de
Sabrina Lombardo pour que cette dernière modifie son enseigne.

    Des confusions entre les deux instituts de beauté sont intervenues,
en ce sens que de la marchandise commandée par Sabrina Lombardo a été
par erreur livrée à l'adresse de Fernanda Simao.

    B.- Le 26 février 2004, invoquant principalement la violation de son
droit à l'usage exclusif de sa raison de commerce au sens de l'art. 956
CO, Fernanda Simao a déposé devant la Cour de justice du canton de Genève
à l'encontre de Sabrina Lombardo une action en cessation de trouble et
en dommages-intérêts. La demanderesse a conclu à ce qu'il soit ordonné
à la défenderesse "de faire procéder sans délai à la modification ou
la radiation de l'inscription n° 2231654 au registre des entreprises
du canton de Genève sous menace des peines prévues à l'art. 292 CP",
de cesser d'utiliser le nom "Institut de beauté Atlantis" sous la menace
des mêmes sanctions, Sabrina Lombardo étant condamnée à verser à Fernanda
Simao un dédommagement - fixé par la cour cantonale - pour le préjudice
subi en raison de l'usurpation de la raison de commerce de cette dernière,
des actes de concurrence déloyale subis et des frais d'avocat encourus,
ainsi qu'à titre "de remise de gain pour gestion d'affaire".

    S'engageant à ne faire usage que de la raison individuelle "institut
de beauté Atlantis Sabrina Lombardo", la défenderesse a sollicité le
rejet de l'action.

    Par arrêt du 18 février 2005, la Chambre civile de la Cour de justice,
statuant en instance unique, a ordonné à Sabrina Lombardo de faire procéder
sans délai à la modification ou à la radiation de l'inscription n° 2231654
au Registre des entreprises du canton de Genève, lui a fait interdiction
d'utiliser le nom "institut de beauté Atlantis" à titre d'enseigne ou de
raison sociale et l'a condamnée à verser à la demanderesse 1'200 fr. au
titre d'indemnité pour les frais d'avocat exposés avant procès.

    C.- Sabrina Lombardo exerce un recours en réforme au Tribunal
fédéral. Elle conclut à ce que la demanderesse soit déboutée de
toutes ses conclusions relatives à son action en cessation de trouble
et dommages-intérêts. Elle requiert également qu'il lui soit donné acte
qu'elle s'engage à ne faire usage que "de l'entier de sa raison sociale,
soit Sabrina Lombardo Institut de beauté Atlantis".

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                          Extrait des considérants:

Erwägung 3

    3.  L'inscription au registre du commerce de la raison de commerce
notamment d'un particulier confère à l'ayant droit l'usage exclusif de
celle-ci (art. 956 al. 1 CO). Celui qui subit un préjudice du fait de
l'usage indu d'une raison de commerce peut demander au juge d'y mettre fin
et, s'il y a faute, réclamer des dommages-intérêts (art. 956 al. 2 CO). Est
donc prohibé non seulement l'usage d'une raison de commerce identique
à celle dont le titulaire a le droit exclusif, mais aussi l'utilisation
d'une raison semblable, qui ne se différencie pas suffisamment de celle
inscrite au point de créer un risque de confusion (arrêt 4C.197/2003 du 5
mai 2004, consid. 5.3 non publié à l'ATF 130 III 478). Constitue un usage
à titre de raison de commerce toute utilisation du signe distinctif qui
se trouve en relation immédiate avec l'activité commerciale, comme par
exemple l'emploi d'une enseigne (art. 48 de l'ordonnance du 7 juin 1937
sur le registre du commerce [ORC; RS 221.411]) reproduisant le signe en
cause, l'inscription de celui-ci sur des papiers d'affaires à l'instar
des catalogues, des listes de prix, des prospectus et des cartes de
recommandation et l'utilisation du signe dans des répertoires d'adresses
ou des annuaires téléphoniques (ATF 103 IV 202 consid. 1).

    A teneur de l'art. 946 al. 1 CO, la protection conférée par l'art. 956
CO aux titulaires de raisons individuelles se limite à la localité où
leur raison est enregistrée. Par localité, il faut entendre la commune
politique dans laquelle l'entreprise individuelle a son siège, y compris
l'espace économique qui y est immédiatement rattaché (CHRISTIAN HILTI,
Firmenrecht, in Schweizerisches Immaterialgüter- und Wettbewerbsrecht
[SIWR], vol. III, Kennzeichenrecht, p. 299; MARTINA ALTENPOHL, Commentaire
bâlois, n. 5 ad art. 946 CO; PHILIPPE GILLIÉRON, Les divers régimes de
protection des signes distinctifs et leurs rapports avec le droit des
marques, thèse Lausanne 2000, ch. 106, p. 131/132).

    Le titulaire d'une raison individuelle n'est pas soumis aux règles
de l'art. 951 CO sur les raisons sociales. Mais il doit respecter les
droits conférés par l'art. 956 CO au titulaire de la raison de commerce
inscrite au registre du commerce. Autrement dit, il doit éviter, par une
différenciation suffisante, les risques de confusion avec ladite raison.

    Savoir si deux raisons de commerce se distinguent clairement
se détermine sur la base de l'impression d'ensemble qu'elle donne
au public. Les raisons ne doivent pas seulement se différencier
par une comparaison attentive de leurs éléments, mais aussi par
le souvenir qu'elles peuvent laisser (ATF 128 III 401 consid. 5;
127 III 160 consid. 2a). Il convient surtout de prendre en compte
les éléments frappants que leur signification ou leur sonorité mettent
particulièrement en évidence, si bien qu'ils ont une importance accrue pour
l'appréciation du risque de confusion (ATF 127 III 160 consid. 2b/cc;
122 III 369 consid. 1). Cela vaut en particulier pour les désignations
de pure fantaisie, qui jouissent généralement d'une force distinctive
importante, à l'inverse des désignations génériques appartenant au domaine
public. Toutefois, les raisons de commerce dont le contenu consiste
essentiellement en de telles désignations génériques bénéficient en
principe de la protection de leur usage exclusif selon l'art. 956 CO
(ATF 128 III 224 consid. 2b p. 226 s.). Aussi celui qui emploie comme
éléments de sa raison sociale des désignations génériques identiques à
celles d'une raison plus ancienne a-t-il le devoir de se distinguer avec
une netteté suffisante de celle-ci en la complétant avec des éléments
additionnels qui l'individualiseront (arrêt 4C.197/2003 du 5 mai 2004,
consid. 5.3 non publié à l'ATF 130 III 478; ATF 122 III 369 consid. 1).

    A cet égard, ne sont généralement pas suffisants les éléments
descriptifs qui ont trait à la forme juridique ou au domaine d'activité
de l'entreprise (arrêt 4C.197/2003 du 5 mai 2004, consid. 5.3 non publié à
l'ATF 130 III 478; ATF 100 II 224 consid. 3; 97 II 153 consid. 2b-g; arrêt
4C.206/1999, consid. 2a, publié in sic! 5/2000 p. 399 s.). Il a ainsi été
jugé que l'ajout "Frauenfeld", en raison de la faible force distinctive
de cette indication de lieu, ne présentait pas une individualisation
suffisante à l'endroit de la raison "Merkur Immobilien AG" (ATF 88 II
293 consid. 3). Il en va de même de l'adjonction "Finanz" à propos de la
raison sociale "Aussenhandels AG" (ATF 100 II 224 consid. 3). Il a encore
été admis qu'il n'était pas suffisant de faire précéder de l'article
défini allemand "Die" le substantif "Wache", élément principal de la
raison sociale plus ancienne "Wache AG" (ATF 128 III 224 consid. 2d). Les
exigences posées quant à la force distinctive de ces éléments additionnels
ne doivent pourtant pas être exagérées. Du moment que le public perçoit
au premier abord les désignations génériques comme de simples indications
sur le genre et l'activité de l'entreprise et qu'il ne leur attribue
donc qu'une importance limitée en tant qu'élément distinctif, il accorde
plus d'attention aux autres composants de la raison sociale. Il suffit
déjà d'un ajout revêtu d'un caractère distinctif relativement faible
pour créer une distinction conforme au droit à l'endroit d'une raison
antérieure renfermant la même désignation générique (ATF 122 III 369
consid. 1). Dans ce contexte, le Tribunal fédéral a nié tout risque de
confusion entre les raisons sociales "SMP Management Programm St. Gallen
AG" et "MZSG Management Zentrum St. Gallen" en particulier au motif
qu'il y avait une nette distinction entre les acronymes "SMP" et "MZSG"
(ATF 122 III 369 consid. 2b).

    D'après la jurisprudence, la notion de danger de confusion est
identique dans l'ensemble du droit des biens immatériels. Le risque de
confusion signifie qu'un signe distinctif, à considérer le domaine de
protection que lui confère le droit des raisons de commerce, le droit
au nom, le droit des marques ou le droit de la concurrence, est mis
en danger par des signes identiques ou semblables dans sa fonction
d'individualisation de personnes ou d'objets déterminés. Ainsi, des
personnes qui ne sont pas titulaires du droit exclusif à l'usage d'un
signe peuvent provoquer, en utilisant des signes identiques ou semblables
à celui-ci, des méprises en ce sens que les destinataires vont tenir les
personnes ou les objets distingués par de tels signes pour ceux qui sont
individualisés par le signe protégé en droit de la propriété intellectuelle
(confusion dite directe). La confusion peut également résider dans le fait
que, dans le même cas de figure, les destinataires parviennent certes à
distinguer les signes, par exemple des raisons sociales, mais sont fondés à
croire qu'il y a des liens juridiques ou économiques entre l'utilisateur de
la raison et le titulaire de la raison valablement enregistrée (confusion
dite indirecte; ATF 128 III 146 consid. 2a; 127 III 160 consid. 2a).

Erwägung 4

    4.

    4.1  Il résulte de l'état de fait définitif (art. 63 al. 2 OJ) que la
défenderesse est inscrite dans le registre des entreprises du canton de
Genève au regard de la dénomination "Institut de beauté Atlantis". Cette
dernière constitue clairement une enseigne commerciale, laquelle se
rapporte au local affecté à l'entreprise concernée, et non à l'entrepreneur
(ATF 130 III 58 consid. 5.2; GILLIÉRON, op. cit., ch. 84, p. 107).

    La recourante figure dans le répertoire téléphonique de Swisscom sous
la désignation "Atlantis Lombardo Sabrina". Il s'agit là de la raison de
commerce de son entreprise individuelle, laquelle doit contenir comme
élément essentiel de sa raison le nom de famille du titulaire avec ou
sans prénom (art. 945 al. 1 CO) et n'a l'obligation d'être inscrite
au registre du commerce, vu son domaine d'activité, que si son chiffre
d'affaires est supérieur à 100'000 fr. (art. 934 CO; art. 54 ORC).

    La recourante fait encore de la publicité pour son institut de beauté
dans un journal distribué dans les communes d'Onex et Lancy, en mettant
en évidence le terme "Atlantis".

    Il s'ensuit que la défenderesse utilise bien le signe distinctif
"Atlantis" dans sa raison de commerce et fait une utilisation commerciale
de ce signe sur son enseigne, dans le répertoire des entreprises genevoises
ainsi que dans des encarts publicitaires publiés dans des journaux locaux.

    Il a été retenu que la demanderesse a inscrit en février 2001 au
registre du commerce la raison individuelle "Simao Institut de beauté
Atlantis", alors que la défenderesse n'a pas inscrit son entreprise audit
registre. Dans ces conditions, l'intimée bénéficie indubitablement de
la protection conférée à sa raison de commerce par l'art. 956 CO. Il
n'importe en effet que celui qui porte atteinte au droit exclusif du
titulaire de la raison individuelle enregistrée ne soit lui-même pas
inscrit au registre du commerce (HILTI, op. cit., p. 290 in medio).

    4.2  La recourante prétend que l'élément qui attire l'attention
du public dans les raisons de commerce des parties n'est pas le terme
"Atlantis", mais bien le patronyme des intéressées, de sorte qu'il n'y
aurait aucun risque de confusion entre les deux entreprises. La recourante
fait référence en particulier à l'ATF 114 II 432.

    4.2.1  Il est vrai que les noms de personne sont considérés en
principe comme des éléments frappants ou "forts", c'est-à-dire susceptibles
d'individualiser l'entreprise, surtout s'ils sont mis à la première place
de la raison de commerce, et ne sont pas usuels à l'exemple de "Martin",
"Müller", etc. (cf. HILTI, op. cit., p. 300/301; GILLIÉRON, op. cit.,
ch. 96 et n. 276, p. 121).

    4.2.2  Dans l'ATF 114 II 432 consid. 2c, le Tribunal fédéral a jugé
que la raison sociale "Lacoste Alligator SA" se distinguait nettement de la
raison individuelle "Pierre Keller Alligator publicité", car le patronyme
"Lacoste" - lequel, on le rappelle, était porté par un célèbre joueur
de tennis français - était notoire et connu. La recourante ne peut rien
tirer de ce précédent, étant donné que le nom de famille de l'intimée,
soit "Simao", n'a certainement pas cette caractéristique, du moins en
Suisse. Il n'est d'ailleurs même pas bien connu dans la région genevoise,
comme c'était le cas du patronyme "Graber" dans le canton de Neuchâtel
(cf. à ce propos ATF 88 II 28 consid. III/1 let. b).

    A cela s'ajoute que la recourante ne met pas en première place dans
sa raison de commerce le nom "Lombardo", puisqu'elle est inscrite dans
le répertoire de Swisscom sous la mention "Atlantis Lombardo Sabrina"
(cf., sur ce point, ATF 74 II 235 consid. 2c p. 239 in initio). De plus,
comme on l'a vu, la forme juridique des entreprises exploitées par les
parties est identique, ce qui renforce le danger de confusion (ATF 74 II
235 consid. 2c p. 239 in medio).

    Au vu de ce qui précède, le terme "Atlantis" constitue l'élément
frappant de la raison individuelle de la recourante, étant donné que
les compléments "Institut de beauté" ne font allusion qu'à l'activité de
l'entreprise en cause (arrêt 4C.197/2003 du 5 mai 2004, consid. 5.3 non
publié à l'ATF 130 III 478).

    4.2.3  Même si l'intimée, dans sa raison individuelle, met en premier
son patronyme (i.e. "Simao") avant la dénomination "Institut de beauté
Atlantis", il apparaît nettement que le public va diriger son attention sur
le vocable "Atlantis". De fait, cette désignation de fantaisie (cf. consid.
4.3 ci-dessous) prend le pas sur l'impression laissée par le nom de famille
"Simao", qui n'est pas particulièrement connu dans le canton de Genève.

    4.3  Le terme "Atlantis" est un mot latin ayant pour équivalent
français "Atlantide", île fabuleuse, dont parle Platon dans le Timée et le
Critias, qui se serait située au-delà des colonnes d'Hercule (Gibraltar)
et aurait été engloutie dans un cataclysme gigantesque.

    Ce mot, en dépit des affirmations de la recourante, ne donne
aucune indication générale sur le genre d'activité de l'entreprise ainsi
désignée. Il a certes été constaté qu'il est utilisé assez fréquemment en
association avec des instituts de beauté ou de thalassothérapie. Pourtant,
il évoque dans le public, par association d'idées, un rapport à la mer ou
l'océan, qui peut parfaitement concerner des entreprises d'une tout autre
nature, comme des agences de voyages, des établissements publics offrant
des produits de la mer, des magasins de sport, voire des entreprises
d'import-export.

    Il convient ainsi de reconnaître que le mot "Atlantis" est doté
d'une certaine originalité lorsqu'il constitue la partie frappante de
la raison individuelle d'un institut de beauté, à l'instar de celui de
la demanderesse, de sorte qu'il doit être assimilé à une désignation
de fantaisie.

    4.4  La jurisprudence se montre particulièrement exigeante quant à
la distinction de deux raisons de commerce comprenant des désignations
de fantaisie, eu égard aux plus grandes possibilités de choix qui sont à
disposition parmi des termes revêtus d'une force distinctive (ATF 122 III
369 consid. 1 p. 371; 118 II 322 consid. 1 p. 324/325; arrêt 4C. 339/1996
du 2 décembre 1996, consid. 5a, publié in sic! 1/1997 p. 69 s.).

    Le risque de confusion doit être jugé de manière plus stricte lorsque
les entreprises ont des activités identiques ou similaires ou qu'elles
exercent leurs activités dans un périmètre géographique restreint (ATF
118 II 322 consid. 1; 97 II 234 consid. 1; cf. également KAMEN TROLLER,
Précis du droit suisse des biens immatériels, p. 92).

    Comme on vient de le voir, le mot "Atlantis" est l'élément saillant
tant de la raison individuelle de l'intimée que de l'enseigne et de la
raison de commerce de la recourante, ce qui peut donner l'impression
erronée qu'il existe une relation juridique ou économique entre les deux
entreprises. Ce sentiment est encore accentué par la circonstance que les
deux instituts se suivent immédiatement dans le répertoire téléphonique de
Swisscom et qu'ils ne sont séparés que par un imposant placard publicitaire
portant, en lettres majuscules et en gras, le terme "Atlantis". Ces
éléments suffiraient déjà pour que soit admis le danger de confusion.

    Mais il y a bien plus.

    Les deux entreprises en question délivrent toutes deux des soins
esthétiques corporels et des drainages lymphatiques, de sorte qu'elles
s'adressent rigoureusement à la même clientèle.

    La recourante fait grand cas qu'elle exerce son art à Onex, alors
que sa partie adverse exploite son institut à Genève. En pure perte. En
effet, la localité dans laquelle le droit à l'usage exclusif de la raison
individuelle inscrite est protégé (cf. art. 946 al. 1 CO) comprend la
commune et son espace économique. MARTINA ALTENPOHL écrit ainsi que,
par localité, il faut entendre, par exemple, l'agglomération de la ville
de Zurich (op. cit., n. 5 ad art. 946 CO). Dès l'instant où la commune
genevoise d'Onex n'est séparée de la ville de Genève que par le Rhône,
il n'est nul besoin de longues explications pour admettre que le risque
de confusion est encore accru par le fait que les titulaires des raisons
de commerce sont actives dans le même périmètre géographique.

    Ainsi que l'a retenu la Cour de justice, le risque de confusion est
en l'occurrence patent.

    C'est donc sans violer le droit fédéral que la cour cantonale a admis
l'action en cessation de trouble de la demanderesse fondée sur l'art. 956
al. 2 CO.