Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 130 V 532



130 V 532

79. Arrêt dans la cause CONCORDIA, Assurance suisse de maladie et accidents
contre B., notaire, en sa qualité d'exécuteur testamentaire des hoirs de
W., et Tribunal des assurances du canton de Vaud

    K 103/03 du 14 septembre 2004

Regeste

    Art. 32 Abs. 1, Art. 52 Abs. 1 KVG; Art. 65 Abs. 1 KVV; Art. 30
Abs. 1 lit. a, Art. 30a Abs. 1 KLV: Kostenübernahme für ein in der
Spezialitätenliste aufgeführtes Arzneimittel, das für eine Indikation
abgegeben wird, für welche es keine Zulassung besitzt (off-label-use).

    Aus dem System der Aufnahme in die Spezialitätenliste ergibt sich (Erw.
3.2 und 3.3), dass sich die Limitierung auf medizinische Indikationen
(Art. 73 KVV) durch das Bundesamt für Sozialversicherung (BSV) nur auf
therapeutische Indikationen beziehen kann, für welche Swissmedic die
Vermarktung des Produkts zugelassen hat (Erw. 5.2).

    Grundsätzlich werden die Kosten eines auf der Spezialitätenliste
aufgeführten Arzneimittels von der sozialen Krankenversicherung nur
übernommen, wenn dieses für von Swissmedic genehmigte medizinische
Indikationen verschrieben wurde. Tatsächlich ergibt sich aus dem System der
Aufnahme von Arzneimitteln in die Spezialitätenliste, dass sich die Prüfung
der Wirksamkeit, der Zweckmässigkeit und der Wirtschaftlichkeit eines
Arzneimittels durch das BSV und die Eidgenössische Arzneimittelkommission
nur auf die von Swissmedic geprüften und genehmigten therapeutischen
Indikationen bezieht (Erw. 3.2 und 3.3).

    Ein auf der Spezialitätenliste aufgeführtes Arzneimittel, das
für andere als jene Indikationen, auf welche sich die Bewilligung von
Swissmedic und die diesem Institut eingereichte Fachinformation beziehen -
d.h. "ausserhalb der Etikette" - eingesetzt wird, geht nicht zu Lasten
der obligatorischen Krankenpflegeversicherung. Gleichwohl sind hievon
zwei Ausnahmen anzuerkennen (Erw. 6).

Sachverhalt

    A.- W., né en 1945, était assuré auprès de la Concordia, Assurance
suisse de maladie et accidents (ci-après: la caisse) notamment pour
l'assurance obligatoire des soins et l'assurance des soins complémentaires
(Diversa et Natura).

    Atteint d'un adénocarcinome du cardia et présentant un status après
oesogastrectomie polaire supérieure (mars 1999) suivi de trois cycles
de Cisplatine-5FU, ainsi qu'une récidive métastatique ganglionnaire
et pleurale au niveau thoracique avec épanchements pleuro-bilatéraux,
un traitement de chimiothérapie associant le Taxotere et le Paraplatin
lui a été prescrit par son médecin traitant, le docteur T., dès le 15
octobre 2001.

    Après un échange de correspondances avec l'assuré, respectivement son
médecin traitant, la caisse a refusé de prendre en charge le Taxotere et
le Paraplatin, par décision du 8 avril 2002, au motif que ces médicaments
avaient été prescrits pour des indications non enregistrées auprès de
l'organe de contrôle des médicaments, Swissmedic.

    W. s'est opposé à cette décision, en produisant un rapport (du
30 avril 2002) du Professeur L., médecin-chef de la Fondation du
centre pluridisciplinaire d'oncologie, selon lequel l'association des
chimiothérapies utilisée chez l'assuré avait non seulement été utile
pour ce dernier, mais était également, de manière générale, extrêmement
efficace pour le type de maladie dont il souffrait. L'assuré a également
transmis à la caisse l'avis de l'Ombudsman de l'assurance-maladie sociale
(du 2 mai 2002), selon lequel dès lors que les deux médicaments en question
figuraient sur la liste des spécialités sans limitation, la caisse était
tenue d'en assumer le remboursement.

    La caisse a confirmé son point de vue par décision sur opposition du
2 juillet 2002.

    B.- W. a déféré cette décision au Tribunal des assurances du canton
de Vaud. Il est décédé en septembre 2002.

    Après avoir entendu les docteurs T. et L. (audience d'instruction du
15 mai 2003), le tribunal a admis le recours en ce sens que la caisse
est tenue de prendre en charge l'intégralité des frais des médicaments
en cause.

    C.- La caisse interjette recours de droit administratif contre ce
jugement, dont elle requiert l'annulation, en concluant, sous suite de
frais et dépens, à la confirmation de sa décision sur opposition du 2
juillet 2002.

    B.- , exécuteur testamentaire de feu W., conclut au rejet du recours,
tandis que l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS), Division
Maladie et accidents (intégrée, depuis le 1er janvier 2004, à l'Office
fédéral de la santé publique) en propose l'admission.

Auszug aus den Erwägungen:

                            Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.  La loi fédérale sur la partie générale des assurances sociales
(LPGA) du 6 octobre 2000, entrée en vigueur au 1er janvier 2003, n'est
pas applicable au présent litige, dès lors que le juge des assurances
sociales n'a pas à prendre en considération les modifications du droit
ou de l'état de fait postérieures à la date déterminante de la décision
litigieuse du 2 juillet 2002 (ATF 129 V 4 consid. 1.2 et les arrêts cités).

Erwägung 2

    2.

    2.1  Selon l'art. 25 LAMal, l'assurance obligatoire de soins prend en
charge les coûts des prestations qui servent à diagnostiquer ou à traiter
une maladie et ses séquelles (al. 1). Ces prestations comprennent notamment
les médicaments prescrits par un médecin (al. 2 let. b). Conformément à
l'art. 34 al. 1 LAMal, les assureurs ne peuvent pas prendre en charge,
au titre de l'assurance obligatoire des soins, d'autres coûts que ceux
des prestations prévues aux art. 25 à 33.

    2.2  Les prestations mentionnées à l'art. 25 LAMal doivent être
efficaces, appropriées et économiques; l'efficacité doit être démontrée
selon des méthodes scientifiques (art. 32 al. 1 LAMal). Une prestation est
efficace lorsqu'on peut objectivement en attendre le résultat thérapeutique
visé par le traitement de la maladie, à savoir la suppression la plus
complète possible de l'atteinte à la santé somatique ou psychique (ATF 128
V 165 consid. 5c/aa; RAMA 2000 n° KV 132 p. 281 consid. 2b). La question de
son caractère approprié s'apprécie en fonction du bénéfice diagnostique ou
thérapeutique de l'application dans le cas particulier, en tenant compte
des risques qui y sont liés au regard du but thérapeutique (ATF 127 V
146 consid. 5). Le caractère approprié relève en principe de critères
médicaux et se confond avec la question de l'indication médicale: lorsque
l'indication médicale est clairement établie, le caractère approprié
de la prestation l'est également (ATF 125 V 99 consid. 4a; RAMA 2000
n° KV 132 p. 282 consid. 2c). Le critère de l'économicité concerne le
rapport entre les coûts et le bénéfice de la mesure, lorsque dans le
cas concret différentes formes et/ou méthodes de traitement efficaces
et appropriées entrent en ligne de compte pour combattre une maladie
(ATF 127 V 146 consid. 5; RAMA 2004 n° KV 272 p. 111 consid. 3.1.2).

Erwägung 3

    3.

    3.1  Conformément à l'art. 52 al. 1 let. b LAMal (en corrélation avec
les art. 34 et 37e OAMal), l'office, après avoir consulté la Commission
fédérale des médicaments et conformément aux principes des art. 32 al. 1
et 43 al. 6 LAMal, établit une liste, avec des prix, des préparations
pharmaceutiques et des médicaments confectionnés (liste des spécialités);
celle-ci doit également comprendre les génériques meilleur marché qui
sont interchangeables avec les préparations originales. Aux termes de
l'art. 73 OAMal, l'admission dans une liste peut être assortie d'une
limitation; celle-ci peut notamment se rapporter à la quantité ou aux
indications médicales. De telles limitations constituent des instruments
de contrôle de l'économicité et non pas une forme de rationalisation
des prestations (RAMA 2001 n° KV 158 p. 158 consid. 2d; GEBHARD EUGSTER,
Krankenversicherung, in: Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR],
Soziale Sicherheit, p. 101, n. 436). Elles ont également pour but d'exclure
ou de limiter la possibilité d'utiliser de manière abusive des médicaments
de la liste des spécialités (ATF 129 V 42 consid. 5.2 in fine; RAMA 2004 n°
KV 272 p. 113 consid. 3.3.1; cf. aussi ATF 128 V 167 consid. 5c/bb/bbb).

    3.2  Parmi les dispositions d'exécution formelles et matérielles
édictées par le Conseil fédéral aux art. 64 ss OAMal, respective- ment le
Département (fondé sur les art. 65 al. 3 et 75 OAMal) aux art. 30 ss OPAS
(dans leur teneur en vigueur à partir du 1er juillet 2002), en rapport
avec la liste des spécialités, l'art. 65 OAMal (dans sa teneur en vigueur
à partir du 1er juillet 2002, adapté formellement aux changements survenus
avec l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2002, de la loi sur les produits
thérapeutiques [LPTh; RS 812.21]; en particulier, reprise de l'Office
intercantonal de contrôle des médicaments [OICM] par Swissmedic, Institut
suisse des produits thérapeutiques, art. 91 LPTh) prévoit les conditions
d'admission d'un médicament prêt à l'emploi dans la liste des spécialités.
Un médicament peut être admis dans la liste des spécialités s'il dispose
d'une autorisation valable de Swissmedic (art. 65 al. 1 OAMal).

    3.2.1  La loi fédérale sur les médicaments et les dispositifs médicaux
vise à garantir la mise sur le marché de produits thérapeutiques de
qualité, sûrs et efficaces, en vue de protéger la santé de l'être humain et
des animaux (art. 1 al. 1). Sous réserve des dispenses prévues à l'art. 9
al. 2 LPTh, tout médicament doit avoir été autorisé par Swissmedic pour
pouvoir être mis sur le marché en Suisse (art. 9 al. 1 LPTh). Quiconque
sollicite l'autorisation de mise sur le marché d'un médicament doit
apporter la preuve que le médicament est de qualité, sûr et efficace
(art. 10 al. 1 let. a LPTh). Un médicament ne sera pas autorisé s'il
ressort du dossier qu'il présente un rapport bénéfice-risque négatif lors
de l'usage auquel il est destiné, s'il n'a pas l'efficacité thérapeutique
voulue ou si celle-ci n'est pas suffisamment prouvée, ou encore si sa
composition ne correspond pas à celle qui est indiquée (message concernant
une loi fédérale sur les médicaments et les dispositifs médicaux du 1er
mars 1999, FF 1999 3151 ss, 3193).

    Selon l'art. 11 al. 1 LPTh, la demande d'autorisation de mise sur le
marché doit comporter, entre autres documents, la désignation du médicament
(let. a), les effets thérapeutiques et les effets indésirables (let. e),
ainsi que l'étiquetage, l'information, le mode de remise et le mode
d'administration (let. f). Parmi les exigences relatives à l'information
destinée aux professionnels, soit aux personnes habilitées à prescrire,
à remettre ou à utiliser des médicaments à usage humain (art. 13 de
l'ordonnance sur les exigences relatives aux médicaments [OEMéd; RS
812.212.22]), le requérant doit mentionner les indications et possibilités
d'emploi du médicament (art. 3 de l'annexe 4 à l'OEMéd). La notice destinée
aux professions médicales est en règle générale publiée dans le Compendium
suisse des médicaments (voir art. 2 de l'annexe 4 à l'OEMéd et ch. 331.3
des Instructions de l'OFAS concernant la liste des spécialités).

    Swissmedic communique au requérant un préavis sur l'issue favorable
de l'examen du médicament sous l'angle médical (art. 6 de l'ordonnance
sur les médicaments [OMéd; RS 812.212.21]), avant d'autoriser la
mise d'un médicament sur le marché si les conditions sont remplies
(art. 16 al. 1 LPTh); l'avis de décision comprend notamment un
document récapitulant les principaux aspects matériels et juridiques de
l'autorisation (récapitulation des caractéristiques du produit; art. 7
al. 1 OMéd). Lorsque, par la suite, le titulaire de l'autorisation de
mise sur le marché entend modifier l'information professionnelle ou une
indication ou adjonction de données, il doit requérir l'approbation de
Swissmedic (art. 2 al. 1 let. 3 et 4 de l'annexe 7 à l'OEMéd; art. 22a
OEMéd; art. 10 al. 1 OMéd).

    3.2.2  Il ressort du système d'autorisation de mise sur le marché
d'un médicament que l'admission de celui-ci se rapporte toujours à des
indications médicales précises. L'exigence d'un lien entre le médicament
et une application concrète et déterminée de celui-ci est inhérente
au système de l'autorisation, puisqu'un médicament est, par définition,
destiné à agir médicalement sur l'organisme humain et sert à diagnostiquer,
à prévenir ou à traiter des maladies, des blessures et des handicaps
(art. 4 al. 1 let. a LPTh). En plus de la qualité du médicament, une autre
des conditions de l'autorisation est l'efficacité du produit thérapeutique
(art. 10 al. 1 let. a LPTh), soit sa capacité à atteindre le résultat
thérapeutique visé par rapport à une maladie déterminée. La mise sur
le marché d'un médicament n'est donc autorisée qu'en relation avec les
maladies pour le diagnostic, la prévention ou le traitement desquelles
le requérant a apporté la preuve que le médicament était efficace. Si le
requérant entend par la suite étendre le champ d'application du médicament
au bénéfice d'une autorisation à d'autres indications, il doit en faire
la demande. Les indications pour lesquelles le médicament a été autorisé
sont mentionnées dans la notice destinée aux professions médicales et
approuvée par Swissmedic. Elles font également l'objet du préavis délivré
par Swissmedic précisant l'autorisation que cet institut entend donner,
ainsi que les indications et les dosages qui seront autorisés. La notice
et le préavis font partie des documents qui doivent par la suite être
présentés à l'OFAS avec la demande d'admission du médicament dans la
liste des spécialités (art. 30a al. 1 let. a et b OPAS).

    3.3  L'autorisation de Swissmedic constitue une première condition
d'admission du médicament dans la liste des spécialités, nécessaire mais
pas suffisante. En soi, elle ne fonde en effet pas un droit à ce que le
médicament en question figure dans la liste, pas plus que l'autorisation
pour une indication supplémentaire n'a pour effet une modification
obligatoire de la liste par l'OFAS (RAMA 2001 n° KV 158 p. 160 consid. 5b
et l'arrêt cité).

    3.3.1  En effet, pour être admis dans la liste, les médicaments prêts
à l'emploi doivent répondre aux exigences de la loi, soit être efficaces,
appropriés et économiques (art. 65 al. 2 OAMal; art. 30 al. 1 let. a
et 32 ss OPAS; pour les autres conditions, voir l'art. 65 al. 6 et les
art. 30 ss OPAS), ces notions étant précisées pour les médicaments aux
art. 32 ss OPAS. En particulier, selon les art. 32 et 33 al. 2 OPAS,
pour juger de l'efficacité d'un médicament et de sa valeur thérapeutique,
l'OFAS s'appuie sur les documents qui ont fondé l'autorisation accordée
par l'Institut suisse des produits thérapeutiques. A cet égard, la demande
d'admission dans la liste doit notamment contenir le préavis délivré par
Swissmedic précisant l'autorisation qu'il entend donner, les indications
et les dosages qui seront autorisés (art. 30a al. 1 let. a OPAS), la
notice destinée aux professions médicales qui a été fournie à Swissmedic
(art. 30a al. 1 let. b OPAS; cf. ci-avant consid. 3.2.1), ainsi que le
résumé de la documentation sur les études cliniques qui a été fournie à
Swissmedic (art. 30a al. 1 let. d OPAS). Avant d'admettre un médicament
dans la liste des spécialités, l'OFAS soumet en règle générale les demandes
à la Commission fédérale des médicaments, composée, entre autres membres,
d'experts scientifiques, de médecins et de pharmaciens, qui le conseille
pour l'établissement de la liste (art. 37e OAMal, 31 al. 1 OPAS).

    3.3.2  L'examen de l'OFAS est ainsi fondé principalement sur
l'autorisation délivrée par Swissmedic et les documents sur la base
desquels celui-ci a accordé l'autorisation de mise sur le marché; les
données relatives aux indications médicales et les dosages autorisés du
médicament en sont inséparables. L'examen de l'efficacité, du caractère
approprié et de l'économicité d'un médicament s'effectue dès lors toujours
concrètement par rapport à l'effet et à la valeur thérapeutique d'un
médicament pour le traitement d'une symptomatologie déterminée, et non
pas dans l'abstrait. De même, lorsqu'il examine l'exigence du caractère
économique du médicament en cause, l'OFAS doit, notamment, prendre en
compte son efficacité thérapeutique par rapport à d'autres médicaments
dont les indications sont identiques ou les effets similaires et son
coût par jour ou par traitement par rapport à ceux des médicaments dont
les indications sont identiques ou similaires (art. 34 al. 2 let. b et c
OPAS). L'équivalence thérapeutique des médicaments à comparer est également
appréciée dans un cadre très précis, soit par rapport à des indications
médicales ou des effets déterminés, qui doivent être similaires à ceux
du produit en cause.

    3.4  La liste des spécialités a un caractère à la fois exhaustif et
contraignant (cf. ATF 128 V 161 consid. 3b/bb). D'une part, les coûts
des médicaments qui ne sont pas mentionnés dans la liste ne doivent
en principe pas être pris en charge par l'assurance obligatoire des
soins (RAMA 2004 n° KV 272 p. 112 consid. 3.2.1 et l'arrêt cité;
SVR 2004 KV n° 9 p. 30 consid. 4.2, non publié dans la RAMA 2004 n°
KV 276 p. 143). D'autre part, au regard du système de listes déduit de
l'art. 34 al. 1 LAMal (cf. à ce sujet, ATF 125 V 29 consid. 5b; RAMA 2002
n° KV 196 p. 9 consid. 3b/cc, 2001 n° KV 158 p. 159 consid. 4b et les
références), la liste des spécialités contient une énumération exhaustive
des différentes positions. Ainsi, lorsqu'un médicament est inclus dans
la liste des spécialités avec une limitation de son utilisation à des
indications déterminées, on ne saurait admettre un devoir de prester par
un raisonnement analogique si le médicament est prescrit en vue d'autres
indications que celles figurant dans la liste, à moins que celle-ci ne
prévoie - par l'emploi du terme "etc." - la possibilité d'un complément par
les autorités d'application (ATF 125 V 30 consid. 6a; cf. RAMA 2002 n° KV
196 p. 11 consid. 3c/aa in fine et les références). Un médicament utilisé
pour d'autres indications que celles énoncées, sous forme de limitation,
dans la liste des spécialités doit être considéré comme un médicament "hors
liste" (sous l'empire de la LAMA: ATF 118 V 279 consid. 2b in fine) et
n'est, partant, pas soumis à l'obligation de remboursement de l'assurance
obligatoire des soins (arrêt A. et B. du 17 mars 2003, K 123/02).

Erwägung 4

    4.  La recourante fonde l'essentiel de son argumentation sur le fait
que les deux médicaments en question ont été prescrits à l'assuré pour
une indication qui ne correspond pas à celles pour lesquelles ils ont été
enregistrés auprès de Swissmedic. Selon elle, un médicament figurant sur
la liste des spécialités sans limitation ne saurait être prescrit pour
une indication autre que celle qui a été approuvée par Swissmedic. Cela
découlerait également de la Directive 03/2 de l'OFAS du 28 janvier 2003,
complétée le 28 avril 2003, selon laquelle, hormis les cas exceptionnels
(complexe thérapeutique et menace pour la vie), un médicament admis en
Suisse, mais utilisé en dehors des indications autorisées par Swissmedic
(usage hors étiquette), constituerait également un médicament hors liste
des spécialités.

Erwägung 5

    5.

    5.1  Comme l'ont exposé les premiers juges, le Taxotere et le
Paraplatin figurent tous deux sans limitation dans la liste des spécialités
(groupe 07.16. Oncologica). Cela ne signifie toutefois pas que toute
application possible de ces produits doive être considérée comme indiquée
sous l'angle de l'efficacité et du caractère approprié et économique,
chaque fois et aussitôt qu'il existe une certaine chance de succès sur la
base de constatations cliniques ou de valeurs d'expérience. Au contraire,
il y a lieu de partir du principe que le Taxotere et le Paraplatin ont été
inclus dans la liste des spécialités pour les indications autorisées par
Swissmedic. Pour ces indications, les produits en question peuvent être
considérés comme efficaces, appropriés et économiques (cf. RAMA 2004 n°
KV 272 p. 117 consid. 4.3.1.1) et doivent en conséquence être remboursés
par l'assurance obligatoire des soins. En effet, avant d'admettre ces
médicaments dans la liste des spécialités, l'OFAS, en collaboration
avec la Commission fédérale des médicaments, en a examiné l'efficacité,
le caractère approprié et l'économicité par rapport aux indications et
dosage autorisés par Swissmedic, soit au regard des caractéristiques de
ces produits résultant notamment de la notice destinée aux professions
médicales et approuvées par l'institut.

    5.2  A l'inverse, la prise en charge de ces médicaments pour des
indications qui ne sont pas couvertes par l'autorisation de Swissmedic, dès
lors qu'elles n'ont pas été examinées lors de leur admission dans la liste
des spécialités, ne doit en principe pas être admise. En effet, il ressort
du système d'admission des médicaments dans la liste des spécialités
(voir ci-avant consid. 3.3) que l'autorisation délivrée par Swissmedic
pour l'utilisation d'un produit pour certaines indications médicales
constitue une condition nécessaire pour l'admission de celui-ci dans
la liste. L'examen du caractère économique et de la valeur thérapeutique
du médicament effectué par l'OFAS, en collaboration avec les spécialistes
de la Commission fédérale des médicaments, au moyen des documents, et donc
sur la base des indications autorisées par Swissmedic, implique que ledit
produit ne sera considéré, une fois admis dans la liste des spécialités,
comme efficace, approprié et économique que pour lesdites indications. Cet
examen n'est en effet pas effectué de manière abstraite, mais toujours
par rapport aux caractéristiques concrètes du médicament; font notamment
partie de celles-ci, les indications médicales pour lesquelles la mise
sur le marché a été autorisée parce que l'efficacité thérapeutique en a
été démontrée pour une ou plusieurs pathologies déterminées.

    En outre, si l'OFAS entend assortir l'admission d'un médicament dans
la liste des spécialités d'une limitation quant aux indications médicales
(cf. art. 73 OAMal), il ne peut s'agir que d'une limitation par rapport
aux indications thérapeutiques qui ont fondé l'autorisation accordée par
Swissmedic et sur lesquelles a porté son propre examen. En effet, c'est
au regard de ces indications uniquement que le médicament a été estimé
suffisamment de qualité, sûr et efficace, pour pouvoir être mis sur le
marché, et non pas pour un ensemble non défini de maladies. On ne saurait
du reste déduire d'une limitation par rapport à un certain traitement
(par exemple, pour les gonadotrophines et analogues [LS 07.08.10.] :
"Non admis pour le traitement de l'adiposité") que le médicament en
question est efficace, approprié et économique pour tout autre traitement
sur lequel la limitation ne porte pas. La prise en charge du médicament
par l'assurance obligatoire des soins ne peut alors concerner que des
traitements et indications en dehors de la limitation prévue dans la liste,
mais pour lesquels sa mise sur le marché a été autorisée.

    Enfin, lorsqu'il examine l'exigence du caractère économique du
médicament en cause, en particulier l'équivalence thérapeutique des
médicaments à comparer, l'OFAS se fonde sur les documents fournis et
approuvés lors de la procédure d'autorisation de mise sur le marché,
en particulier la notice destinée aux professions médicales (voir
ch. 331.3 des instructions de l'OFAS). L'examen du caractère économique
d'un médicament se rapporte donc exclusivement aux indications médicales
pour lesquelles le produit en question et les autres médicaments servant
de comparaison ont été autorisés.

    5.3  On peut déduire de l'ensemble de ces éléments que l'admission
d'un médicament dans la liste des spécialités ne peut se rapporter qu'aux
indications médicales ayant été examinées au préalable par Swissmedic
et pour lesquelles le produit a été autorisé. L'examen des conditions de
l'efficacité, de l'adéquation et du caractère économique d'un médicament
ne s'effectue en effet pas dans l'abstrait, mais toujours par rapport à
une ou plusieurs indications médicales concrètes, dans le cadre déterminé
par l'autorisation de Swissmedic et la notice destinée aux professionnels;
il ne s'étend pas à d'autres indications médicales n'y figurant pas. Dès
lors, un médicament inclus dans la liste des spécialités, utilisé pour
d'autres indications que celles sur lesquelles portent l'autorisation de
Swissmedic et la notice destinée aux professionnels, doit être considéré
comme un médicament administré "hors étiquette" et n'est, en principe,
pas soumis à l'obligation de remboursement de l'assurance obligatoire
des soins.

    5.4

    5.4.1  En l'espèce, le Taxotere est indiqué, en association à la
doxorubicine, pour le traitement du cancer du sein localement avancé
ou métastatique (chimiothérapie en 1re ligne); en monothérapie dans le
traitement du cancer du sein localement avancé ou métastatique, après
échec d'une chimiothérapie antérieure (chimiothérapie en 2e ligne);
pour le traitement de patients souffrant d'un carcinome bronchique non à
petites cellules (CBNPC) localement avancé ou métastatique, après échec
d'une chimiothérapie antérieure (Compendium suisse des médicaments,
2003, p. 2634). Quant au Paraplatin, les indications prévues sont : en
monothérapie ou en association dans le traitement du carcinome ovarien,
du carcinome bronchique à petites cellules, de tumeurs au niveau ORL
et du cancer du col de l'utérus; pour les cancers du domaine ORL, la
monothérapie devrait être associée à une radiothérapie; en cas de cancer de
la vessie, Paraplatin est indiqué uniquement en association avec d'autres
cytostatiques (Compendium suisse des médicaments, 2003, p. 2030).

    L'intimé était atteint d'un adénocarcinome du cardia, status après
oesogastrectomie polaire supérieure, récidive métastatique ganglionnaire
(N1 métastase ganglionnaires périoesophagiennes 4/8 et coeliaques 2/6) et
pleurale au niveau thoracique avec épanchements pleuro-bilatéraux. Après
avoir été traité, à la suite de l'oesogastrectomie, par une chimiothérapie
additionnelle avec deux médicaments conventionnels (Cisplatine et
5FU), il avait bénéficié d'une rémission jusqu'en octobre 2001. Une
récidive métastatique avait alors été diagnostiquée au niveau de la
cage thoracique avec des adénopathies médiastinales multiples et des
épanchements pleuraux-bilatéraux. Avec l'accord du patient, le médecin
traitant avait opté pour une polychimiothérapie associant docetaxel,
carboplatine et 5FU en perfusion continue plutôt que pour une combinaison
paclitaxel, cisplatine et 5FU pour des raisons de meilleure tolérance,
un mode d'administration moins lourd pour le patient et une meilleure
économicité (courrier du docteur T. du 25 octobre 2002 au médecin-conseil
de la recourante).

    5.4.2  Il n'est pas contesté que la pathologie de l'intimé ne
correspondait pas aux indications respectives du Taxotere et du Paraplatin,
telles que mentionnées dans le Compendium suisse des médicaments. La
prescription de ces médicaments par le médecin traitant dans le cadre
d'une polychimiothérapie palliative constituait donc une administration
de ces médicaments "hors étiquette" qui n'est, en principe, pas soumise
à l'obligation de remboursement par l'assurance obligatoire des soins.

Erwägung 6

    6.

    6.1  Cela étant, il convient d'examiner s'il existe des exceptions
au principe du non-remboursement d'un médicament admis dans la liste
des spécialités, mais utilisé "hors étiquette". Le Tribunal fédéral
des assurances a déjà admis, sous l'empire de la LAMA, l'obligation de
l'assureur-maladie d'accorder, à certaines conditions, des prestations pour
un traitement avec un médicament qui n'est pas remboursé par l'assurance
obligatoire des soins, en particulier lorsque ce médicament constitue une
mesure préparatoire indispensable à l'exécution d'une prestation prise en
charge par l'assurance obligatoire des soins ("complexe thérapeutique";
RAMA 1998 n° KV 991 p. 305 consid. 3). En dehors de cette exception,
qui peut être appliquée au régime de la LAMal et en particulier au
remboursement d'un médicament utilisé hors étiquette lorsqu'il existe
un lien étroit avec une prestation de l'assurance obligatoire des soins
dans le cadre d'un complexe thérapeutique, il faut reconnaître une seconde
exception, à l'instar de ce que préconise l'OFAS. Il existe des situations
dans lesquelles il apparaît nécessaire de prescrire un médicament figurant
dans la liste des spécialités pour une indication autre que celles pour
lesquelles il a été autorisé, lorsqu'une maladie entraînant une menace
pour la vie du patient ou une atteinte à sa santé grave et chronique
ne pourrait pas être traitée autrement de manière efficace, par manque
d'alternatives thérapeutiques. Le médicament ne pourra toutefois être
administré à charge de l'assurance obligatoire des soins que s'il existe
des raisons sérieuses pour admettre que le produit en question présente une
utilité thérapeutique importante (curative ou palliative). A cet égard,
on peut s'inspirer des conditions auxquelles Swissmedic peut autoriser
pour une durée limitée la distribution ou la remise de médicaments contre
des maladies mortelles qui ne sont pas autorisés à être mis sur le marché.
Selon l'art. 9 al. 4 LPTh, une telle autorisation pour une durée limitée
est admise lorsqu'elle est compatible avec la protection de la santé,
qu'une grande utilité thérapeutique est attendue de l'administration de
ces médicaments et qu'il n'existe pas de médicament équivalent.

    6.2  En l'occurrence, le traitement administré à l'intimé,
qui était atteint d'une maladie mortelle, remplit l'exigence de
l'utilité thérapeutique. En particulier, il ressort des explications
du docteur T. que, sur le plan scientifique, les dérivés du platine
(cisplatine, carboplatine) sont utilisés en association avec le 5FU
dans la chimiothérapie pré- ou post-opératoire en cas de résection
de cancer oesophagien ou gastrique, cette notion étant fondée sur des
études randomisées et enseignée dans les manuels d'oncologie. Selon le
spécialiste, l'efficacité des taxanes (paclitaxel et docetaxel, dont est le
Taxotere) avait été démontrée pour de multiples types de cancer (ovarien,
broncho-pulmonaire, prostate), en particulier les cancers digestifs.
L'efficacité du traitement prescrit en l'espèce a également été confirmée
par le Professeur L. qui s'est référé à différentes études et publication,
notamment du groupe de recherche oncologique suisse (procès-verbal
d'audience du 15 mai 2003). Quant au bénéfice thérapeutique obtenu, on
relèvera qu'aux dires du médecin traitant, confirmés par le Professeur L.,
l'existence de W. a pu être prolongée grâce à la chimiothérapie prescrite,
qui lui avait procuré une rémission quasi complète sur le plan radiologique
jusqu'en avril 2002. Au demeurant, le médecin conseil de la recourante a
lui-même admis que le traitement ordonné avait été efficace et approprié
au sens de l'art. 32 LAMal (procès-verbal d'audience du 15 mai 2003).

    En ce qui concerne une éventuelle alternative thérapeutique, le docteur
T. a indiqué qu'il était possible de choisir, à la place du Taxotere,
le Taxol, combiné au Cisplatine et au 5FU (procès-verbal d'audience du 15
mai 2003). Ce médicament figure également dans la liste des spécialités
sans limitation. Les indications ou possibilités d'emploi de ce produit
correspondent toutefois, dans les grandes lignes, à celles posées pour le
Taxotere (carcinome ovarien, carcinome bronchique non à petites cellules,
carcinome du sein; Compendium suisse des médicaments, 2003, p. 2631), de
sorte qu'il aurait également été administré "hors étiquette". Dès lors,
en l'absence d'une autre possibilité de traitement qui aurait été évoquée
au cours de la procédure administrative ou cantonale de recours, il y a
lieu de retenir que l'exigence de l'absence d'alternative thérapeutique
est remplie.

    En conséquence, il y a lieu d'admettre, à titre exceptionnel, la
prise en charge, par l'assurance obligatoire des soins, du traitement
administré à l'intimé au moyen des produits Taxotere et Paraplatin.

Erwägung 7

    7.  Il résulte de ce qui précède que le jugement entrepris n'est pas
critiquable dans son résultat. Partant, le recours est mal fondé.

Erwägung 8

    8.  (Dépens)