Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 130 IV 1



130 IV 1

1. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale dans la cause
X. contre Procureur général du canton du Jura (pourvoi en nullité)

    6S.313/2003 du 11 novembre 2003

Regeste

    Art. 41 Ziff. 2 Abs. 1 StGB; Weisungen betreffend Berufsausübung.

    Die Weisung gegenüber einem wegen Handels mit Hanf Verurteilten,
während der Probezeit jegliche Geschäftstätigkeit mit Hanfprodukten
zu unterlassen, verstösst nicht gegen Bundesrecht. Angesichts der
unterschiedlichen Zielsetzung schränkt Art. 54 StGB den Anwendungsbereich
von Art. 41 Ziff. 2 StGB nicht ein und gibt dem Verurteilten keinen
Anspruch darauf, einen Beruf auszuüben, der keiner behördlichen Bewilligung
bedarf (E. 2).

Sachverhalt

    A.- Depuis septembre 1999, X. exploitait à Delémont un magasin, où
il vendait des produits à base de chanvre, en particulier des habits,
des produits alimentaires, des produits cosmétiques et du matériel de
culture du chanvre. Dès mai 2000, à la suite de nombreuses demandes de
clients et de propositions de plusieurs fournisseurs, il a commencé à
vendre des sachets de chanvre; le 6 mars 2001, il a vendu deux kilos de
chanvre pour le prix de 19'500 FF à deux ressortissants français.

    B.- Par jugement du 20 février 2003, le Tribunal correctionnel
jurassien de première instance a condamné X., pour infraction grave à la
loi fédérale sur les stupéfiants, à une peine de 18 mois d'emprisonnement,
avec sursis pendant cinq ans, ainsi qu'à une amende de 6'000 francs. A
titre de règle de conduite, il lui a interdit, pendant le délai d'épreuve,
d'exercer toute activité lucrative liée au commerce de chanvre ou au
commerce de produits à base de chanvre ou au commerce de produits en
rapport avec le chanvre.

    Par arrêt du 7 juillet 2003, la Cour pénale du Tribunal cantonal
jurassien a confirmé le jugement de première instance.

    C.- X. forme un pourvoi en nullité au Tribunal fédéral. Invoquant
la violation de l'art. 41 ch. 2 CP, il conclut à l'annulation de l'arrêt
attaqué. En outre, il sollicite l'effet suspensif.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le pourvoi dans la mesure où il était
recevable.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.

    2.1  Selon l'art. 41 ch. 2 al. 1 CP, le juge qui accorde le sursis à
l'exécution d'une peine privative de liberté peut non seulement astreindre
le condamné à un patronage, mais il peut également lui imposer, pendant le
délai d'épreuve, des règles de conduite, notamment quant à son activité
professionnelle, à son lieu de séjour, au contrôle médical, à l'abstention
de boissons alcooliques et à la réparation du dommage dans un délai
déterminé (cf. aussi les art. 44 al. 2 et 94 du nouveau Code pénal,
adopté par les Chambres fédérales le 13 décembre 2002, FF 2002 p. 7658).

    Cette disposition donne donc au juge, lorsqu'il octroie le sursis, la
faculté de fixer, pour la durée du délai d'épreuve, une règle de conduite
adaptée au but du sursis, qui est l'amendement durable du condamné. La
règle de conduite ne doit pas avoir un rôle exclusivement punitif et son
but ne saurait être de porter préjudice au condamné. Elle doit être conçue
en premier lieu dans l'intérêt du condamné et de manière à ce qu'il puisse
la respecter. Elle doit par ailleurs avoir un effet éducatif limitant
le danger de récidive (ATF 108 IV 152 consid. 3a p. 152/153; 106 IV
325 consid. 1 p. 327/328 et les arrêts cités). Dans ce cadre, c'est à
l'autorité cantonale qu'appartiennent le choix et le contenu des règles
de conduite. S'agissant, sur ce point, d'une question d'appréciation,
le Tribunal fédéral n'intervient que si l'autorité cantonale a abusé de
son pouvoir en la matière (ATF 106 IV 325 consid. 1 p. 328).

    2.2  Selon le recourant, la règle de conduite qui lui est imposée
correspondrait à une extension de la peine accessoire prévue à l'art. 54
CP. En effet, selon cette disposition, le juge ne peut interdire que
l'exercice d'une profession, d'une industrie ou d'un commerce, subordonné
à une autorisation officielle. Or, le commerce de chanvre ne nécessite
aucune autorisation.

    Les buts visés par l'art. 54 CP (interdiction d'exercer une profession)
et l'art. 41 ch. 2 CP (règles de conduite) sont différents. Bien
qu'elle soit classée parmi les peines accessoires, l'interdiction
d'exercer une profession sert avant tout à protéger le public contre de
nouveaux abus (ATF 78 IV 217 consid. 2 p. 222; cf. également TRECHSEL,
Schweizerisches Strafgesetzbuch, Kurzkommentar, 2e éd., Zurich 1997,
n. 2 ad art. 54 CP; LOGOZ, Commentaire du Code pénal suisse, Partie
générale, 2e éd., Neuchâtel/Paris 1976, p. 303/304 n. 1). La règle de
conduite en revanche doit être conçue dans l'intérêt du condamné. Elle
doit faciliter l'amendement de celui-ci pendant le délai d'épreuve lié au
sursis (SCHNEIDER, Basler Kommentar, Strafgesetzbuch I, n. 170 ad art. 41
CP). Compte tenu de ces buts différents, l'art. 54 CP ne saurait limiter
le champ d'application de l'art. 41 ch. 2 CP et garantir au condamné
le droit de poursuivre l'exercice d'une profession non soumise à une
autorisation spéciale (RSJ 43/1947 n. 121 p. 255).

    En conséquence, il est tout à fait admissible d'interdire, au titre
d'une règle de conduite, une activité professionnelle, si celle-ci
n'est pas compatible avec le but du sursis et ce qu'elle soit ou non
soumise à une autorisation officielle. Il a été ainsi jugé que la règle
de conduite imposant à celui qui est condamné pour avoir fait commerce
d'objets obscènes (art. 204 aCP) de s'abstenir pendant le délai d'épreuve
d'exploiter ou de faire exploiter pour lui une affaire d'articles d'ordre
sexuel ne violait pas le droit fédéral (ATF 105 IV 289, approuvé par
STRATENWERTH, Schweizerisches Strafrecht, Allgemeiner Teil II, Berne 1989,
n. 92 ad § 4). De même, en matière de libération conditionnelle, la règle
de conduite (art. 38 ch. 3 CP) imposant, durant le délai d'épreuve, au
détenu libéré conditionnellement de soumettre sa correspondance commerciale
au patronage a été considérée comme étant licite (ATF 107 IV 88).

    Cependant, le juge ne pourra ordonner qu'avec retenue des règles de
conduite limitant l'activité professionnelle du condamné, dès lors que
celles-ci sont propres à entraver ses possibilités de gain. Le choix de
la règle de conduite trouve sa limite dans l'interdiction de l'arbitraire
ainsi que dans l'interdiction de poursuivre un but étranger à l'institution
du sursis (SCHNEIDER, op. cit., n. 161 ad art. 41 CP). Il sera ainsi
inadmissible d'interdire, comme règle de conduite, une profession, en vue
de punir le condamné ou de protéger la collectivité publique (RSJ 43/1947
n. 121 p. 255). Au demeurant, le principe de la proportionnalité commande
qu'une règle de conduite raisonnable en soi n'impose pas au condamné,
au vu de sa situation, un sacrifice excessif et qu'elle tienne compte
de la nature de l'infraction commise et des infractions qu'il risque
de commettre à nouveau, de la gravité de ces infractions ainsi que de
l'importance du risque de récidive (ATF 107 IV 88 consid. 3a p. 89).

    2.3  Selon l'autorité cantonale, la règle de conduite qui a été imposée
au recourant peut seule permettre de poser un pronostic favorable quant
à l'amendement du recourant. A ses yeux, cette règle doit permettre de
contrôler l'activité professionnelle du recourant de manière à lui éviter
de commettre de nouvelles infractions. En effet, en continuant à faire
le commerce d'articles liés au chanvre, le recourant s'expose à franchir
les limites permises à la suite de demandes de clients et de propositions
de fournisseurs. Les juges cantonaux relèvent à cet égard que la vente
illicite des sachets de chanvre constituait une part importante du chiffre
d'affaires du recourant et que celui-ci ne saurait vivre uniquement du
commerce licite de chanvre. Il s'agit là d'une question de fait qui lie la
Cour de céans. Dans la mesure où le recourant prétend le contraire, son
grief est irrecevable. Les motifs justifiant la règle de conduite imposée
au recourant apparaissent donc légitimes. En imposant au recourant comme
règle de conduite de cesser tout commerce d'articles liés au chanvre,
l'autorité cantonale ne peut se voir reprocher d'avoir méconnu les buts
du sursis.

    Se pose encore la question de la proportionnalité de cette mesure. Si
le recourant admet encore que l'on puisse fixer comme règle de conduite
l'interdiction de vendre tout produit licite dérivé du chanvre pouvant
être consommé, que ce soit sous forme de fumée ou de boisson, il estime
en revanche excessif d'étendre cette interdiction aux autres produits
tirés du chanvre tels qu'aux habits en fibres de chanvre, aux sandales en
chanvre ou à la littérature sur le chanvre. Il s'agit là d'une question
délicate. Le risque d'être tenté de poursuivre son commerce illicite de
chanvre subsiste cependant, même si le magasin se limite aux produits à
base de chanvre non comestibles, dès lors que le recourant resterait en
contact avec des acheteurs et des fournisseurs potentiels de chanvre. Ce
risque serait même accru, dès lors qu'un commerce limité aux articles de
chanvres non comestibles n'apparaît guère viable. En outre, l'application
d'une telle règle de conduite serait difficile, la délimitation entre les
produits à base de chanvre, comestibles et non comestibles, pouvant, dans
certains cas, s'avérer délicate. En conséquence, on ne saurait reprocher
à l'autorité cantonale d'avoir violé le principe de la proportionnalité,
même si la règle de conduite en question limite la liberté d'action
du recourant.