Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 130 III 694



130 III 694

93. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile dans la cause A. contre
Banque X. (recours en réforme)

    4C.131/2004 du 9 septembre 2004

Regeste

    Kontokorrentkreditvertrag; Anatozismusverbot (Art. 105 Abs. 3, 117
Abs. 2 und 314 Abs. 3 OR)

    Beim Kontokorrentvertrag sind Zinsen und Kommissionsgebühren nur
dann zinstragend, wenn sie durch Neuerung Bestandteile des Kapitals
geworden sind. Die Parteien können vereinbaren, dass Teilzahlungen zuerst
die Kapitalschuld und dann erst die geschuldeten Verzugszinsen tilgen;
diesfalls wird nach Tilgung der Kapitalschuld der aufgelaufene Verzugszins
durch Neuerung zu Kapital, das Verzugszinsen trägt (E. 2).

Sachverhalt

    A.- A. a conclu, le 6 février 1984, avec la Banque Y. un contrat
de crédit en compte courant d'un montant de 40'000 fr. à taux fixe, une
commission trimestrielle étant due sur le solde débiteur le plus élevé
au cours du trimestre. La ligne de crédit a successivement été élevée
jusqu'à 140'000 fr., et les parties sont également convenues d'une clause
d'amortissement (500 fr. par mois) et d'un taux d'intérêts variable.

    Le 10 juin 1992, la Banque Y. a dénoncé le compte de crédit et fixé
à A. un délai au 24 juillet 1992 pour verser la somme de 158'187 fr. 70,
correspondant au solde débiteur du compte au 31 mars 1992. Les parties ont
tenté en vain de trouver une solution à l'amiable pour le remboursement du
crédit. Le 7 janvier 1994, la Banque X., issue de la fusion de la Banque Y.
et de la Banque Z., a retenu la dernière proposition faite par le débiteur
de verser 500 fr. mensuellement et 5'300 fr. deux fois par an. La première
mensualité devait intervenir le 12 janvier 1994. A. a versé 500 fr. le
17 janvier 1994, puis jusqu'en mars 1997, irrégulièrement, des montants
totalisant la somme de 40'915 fr. Par courrier du 1er février 2001, la
banque a mis A. en demeure de régler, avant le 28 février 2001, le montant
de 250'059 fr., correspondant au solde du compte au 31 décembre 2000.

    B.- Le 10 avril 2003, le Tribunal de première instance du canton de
Genève a admis à hauteur de 146'433 fr. avec intérêts à 5 % dès le 1er
février 2001 la demande de la banque visant à condamner A. à lui verser
le montant de 250'059 fr. 20 avec intérêts à 7,25 % dès le 1er janvier
2001. Le Tribunal a également levé, à due concurrence, l'opposition
formée par celui-ci au commandement de payer que lui avait fait notifier
la banque.

    Statuant sur appel de la banque, la Cour de justice a fait
intégralement droit, par arrêt du 13 février 2004, aux conclusions de
celle-ci, qui, en appel, avait repris ses conclusions de première instance
en fixant toutefois le point de départ des intérêts au 1er février (et
non au 1er janvier) 2001.

    C.- A. interjette un recours en réforme contre cet arrêt. Il demande
à ce que celui-ci soit réformé dans le sens où il doit être condamné à
verser à la banque le montant de 146'433 fr. avec intérêts à 5 % dès le
1er février 2001. La banque conclut au rejet du recours, sous suite de
frais et dépens.

    Admettant le recours, dans la mesure où il est recevable, le Tribunal
fédéral a annulé l'arrêt attaqué et condamné le défendeur à payer à la
demanderesse le montant de 158'187 fr. 70 avec intérêts à 5 % dès le 25
juillet 1992, sous déduction de la somme de 40'915 fr. avec intérêts à
5 % à partir du 1er septembre 1995. Il a en outre levé définitivement,
dans cette mesure, l'opposition au commandement de payer.

Auszug aus den Erwägungen:

                          Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.  Selon l'autorité cantonale, le contrat de crédit en compte
courant a été dénoncé le 10 juin 1992 et le défendeur était en demeure
dès le 25 juillet 1992. Les courriers et les négociations qui ont suivi
tendaient à obtenir le remboursement de la dette, intérêts et frais
compris. Même si l'on suivait l'opinion du premier juge, qui estimait
que le 7 janvier 1994 la banque avait offert de renoncer aux intérêts,
il conviendrait de constater que cette offre, faute d'avoir été acceptée
dans le délai échéant le 12 janvier 1994, était devenue caduque. Partant,
la banque était fondée à réclamer le capital, les intérêts et commissions
trimestrielles composés depuis la résiliation.

    2.1  Le défendeur se plaint de la violation de l'art. 117 CO. L'extrait
de compte du 31 décembre 2000, qui a déterminé le montant de la créance
de la banque, ne lui aurait jamais été communiqué. Or, le fondement
de la relation de compte courant résiderait précisément dans le fait
que la communication et l'accord des parties sur le solde du compte
feraient naître, par novation, la créance. Selon les conditions générales
applicables au crédit de compte courant, un extrait trimestriel du compte
aurait dû parvenir au défendeur. Dès lors que celui-ci n'en aurait plus
reçu depuis octobre 1992, la cour cantonale aurait violé l'art. 117 CO
en se fondant sur l'extrait de compte du 31 décembre 2000 produit par
la banque en cours de procédure. Elle aurait en outre violé l'art. 105
al. 3 CO, qui interdit l'anatocisme, en considérant que la dette pouvait
porter des intérêts composés après la dénonciation du contrat en 1992.

    2.2  La demanderesse a octroyé au défendeur une ligne de crédit en
compte courant, à taux variable, comportant une clause d'amortissement
et prévoyant une commission trimestrielle perçue sur le solde débiteur
le plus élevé.

    2.2.1  Dans un contrat d'ouverture de crédit en compte courant,
le montant du prêt est variable, car il est déterminé par le preneur du
crédit, qui peut, dans la limite qui lui est fixée, effectuer, selon ses
besoins, des retraits et devenir débiteur de la banque. Les retraits
et les remboursements sont comptabilisés en compte courant. Quant aux
intérêts débiteurs, ils sont fonction de l'utilisation effective de la
limite de crédit (cf. DANIEL GUGGENHEIM, Les contrats de la pratique
bancaire suisse, 4e éd., p. 255). Le contrat conclu en l'espèce présente
ces caractéristiques.

    2.2.2  Dans un compte courant, les prétentions et contre-prétentions
portées en compte s'éteignent par compensation, si bien qu'une nouvelle
créance prend naissance à concurrence du solde. Il y a novation lorsque
le solde du compte a été arrêté et reconnu (art. 117 al. 2 CO). Les
parties peuvent convenir d'une reconnaissance tacite (ATF 129 III 118
consid. 2.3 p. 121; 127 III 147 consid. 2b p. 150; 104 II 190 consid. 2a
p. 194; ATF 100 III 79 consid. 3 p. 83; cf. aussi CARLO LOMBARDINI,
Droit bancaire suisse, p. 200).

    2.2.3  L'interdiction de l'anatocisme n'est pas applicable aux contrats
de compte courant (art. 314 al. 3 CO; cf. SCHÄRER/MAURENBRECHER, Basler
Kommentar, n. 7 ad art. 314 CO, selon qui cette interdiction n'est pas
applicable "im laufenden Kontokorrentverhältnis"). Le Tribunal fédéral
a toutefois précisé que les intérêts ne sont susceptibles de rapporter
eux-mêmes des intérêts que si, par novation, ils sont devenus des éléments
du capital. A défaut de reconnaissance du solde, les intérêts ne peuvent
donc pas porter intérêts (ATF 53 II 336 consid. 2 p. 341; arrêt 4C.200/2001
du 31 octobre 2001, consid. 3; cf. aussi AEPLI, Zürcher Kommentar, n. 60
ad art. 117 CO avec les références; LAURENT ETTER, Le contrat de compte
courant, thèse Lausanne 1992, p. 51, estime même que l'art. 314 al. 3 CO
est superflu puisque le principe du compte courant consiste précisément à
faire naître, avec la reconnaissance du solde, une nouvelle créance). Les
commissions perçues régulièrement sur le capital mis à disposition sont
traitées comme des intérêts (BERNHARD CHRIST, Schweizerisches Privatrecht,
vol. II/2, p. 266; R.H. WEBER, Mélanges pour Max Keller, Gedanken zur
Verzugsschadensregelung bei Geldschulden, p. 326 s.); elles ne peuvent
donc également devenir capital que par novation. La fin du contrat de
compte courant transforme en solde la position du compte existant à ce
moment-là (ETTER, op. cit., p. 239).

    La doctrine considère, au sujet de l'art. 105 al. 3 CO (interdiction
de l'anatocisme en matière d'intérêts moratoires), que les parties peuvent
convenir que les paiements partiels effectués par le débiteur éteignent
tout d'abord la créance principale avant d'éteindre la dette en intérêts
moratoires; dans ce cas, une fois la dette principale éteinte, l'intérêt
moratoire échu se transforme par novation en un montant en capital, sur
lequel l'intérêt moratoire convenu est dû (SPAHR, L'intérêt moratoire,
conséquence de la demeure, in RVJ 1990 p. 372; GAUCH/ SCHLUEP/SCHMID/REY,
Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, vol I, 8e éd., n.
2996). Il doit toutefois y avoir entente des parties à cet égard; une
simple comptabilisation en compte courant n'est pas suffisante (SPAHR,
loc. cit.; R.H. WEBER, op. cit., p. 326).

    2.3  Les parties ne contestent pas que la banque a dénoncé le contrat
le 10 juin 1992 et invité le défendeur à s'acquitter, au plus tard le
24 juillet 1992, de la somme de 158'187 fr. 70 correspondant au solde
débiteur au 31 mars 1992. En vertu de l'art. 9 des conditions générales,
les extraits de compte sont tenus pour approuvés à défaut de réclamation
présentée dans les dix jours. Il ne ressort pas de l'arrêt entrepris que
le défendeur, qui a reçu le relevé au 31 mars 1992 (le dernier avant la
dénonciation), l'aurait contesté; il ne le prétend d'ailleurs pas. Il y
a donc eu novation de la dette comportant le capital, les intérêts et
les commissions trimestrielles courus au 31 mars 1992. Aucune clause
contractuelle ne stipule que les éventuels versements opérés par le
débiteur après la fin du contrat doivent d'abord être imputés sur le
capital, ni qu'une fois celui-ci remboursé, les intérêts et commissions
trimestrielles courus jusqu'alors forment un capital sur lequel des
intérêts moratoires seraient dus. Ainsi, une fois le contrat de compte
courant résilié, les intérêts et commissions ne pouvaient plus devenir
capital par novation et porter eux-mêmes des intérêts. C'est donc à
tort que l'autorité cantonale a considéré que le cours des intérêts et
des commissions composés pouvait se poursuivre après la dénonciation
intervenue en 1992.