Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 130 III 222



130 III 222

27. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile dans la cause X. SA contre
Y. (recours en réforme)

    5C.141/2003 du 26 novembre 2003

Regeste

    Art. 64 Abs. 1 VVG; Ersatzwert in der Warentransportversicherung.

    Begriff des Ersatzwertes im Sinne von Art. 64 Abs. 1 VVG.

    Der Ersatzwert wird durch den Marktpreis bestimmt, unabhängig davon,
ob der Versicherte den vom befürchteten Ereignis betroffenen Gegenstand
zu verkaufen beabsichtigte.

Sachverhalt

    A.- La société X. SA a réalisé une montre à répétition, dénommée
"Montre Bugatti". Celle-ci a été remise, le 5 septembre 1996, à la société
R. SA, qui avait l'intention de la transporter au Royaume-Uni où elle
pensait avoir trouvé un acquéreur potentiel; cet acheteur, un Japonais
selon ses dires, devait se rendre à Londres.

    R. SA a assuré la montre auprès de la société Y. pour le compte de
X. SA. D'après la police d'abonnement, la valeur assurée était de 165'000
fr. Le 10 septembre 1996, R. SA a avisé X. SA que la montre avait disparu
durant son transfert peu après son arrivée à l'aéroport de Heathrow.

    Le 19 septembre 1996, X. SA a réclamé un montant de 159'750 fr.,
correspondant à la valeur de la montre (i.e. 150'000 fr.), augmentée
de la TVA. Y., après avoir demandé notamment des photographies de la
montre et des estimations à d'autres entreprises horlogères, a proposé de
verser 50'000 fr.; cette offre ayant été jugée trop modeste, l'intéressée
l'a retirée.

    B.- Le 28 octobre 1997, X. SA a introduit contre Y. une action en
paiement de la somme de 159'750 fr. avec intérêts à 5 % l'an dès le 6
mars 1997.

    Par jugement du 23 mai 2003, la IIe Cour civile du Tribunal cantonal
neuchâtelois a condamné la défenderesse à verser à la demanderesse la
somme de 50'000 fr. avec intérêts à 5 % l'an dès le 6 mars 1997.

    C.- Contre cette décision, la demanderesse exerce un recours en
réforme au Tribunal fédéral; elle reprend les conclusions formulées en
instance cantonale.

    La défenderesse propose le rejet du recours dans la mesure où il
est recevable.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.

    2.1  Après avoir rappelé la teneur des art.  62 et 64 al. 1 LCA
(RS 221.229.1), ainsi que de l'art. 13 GCMI (General Conditions of
Marine Insurance on Goods), dont l'application a été laissée indécise,
la cour cantonale a considéré que la valeur de remplacement de la
montre ne correspondait pas à la valeur d'assurance (165'000 fr.);
en effet, rien ne permet d'admettre que la valeur de remplacement de
l'objet assuré excéderait les chiffres mentionnés par les experts,
c'est-à-dire 46'000 fr. à 51'000 fr. pour la réalisation de la montre,
ou 44'000 fr. pour la réalisation d'une nouvelle pièce identique à celle
qui a été dérobée. En conséquence, il se justifie d'allouer la somme de
50'000 fr. à la demanderesse.

    2.2  En l'espèce, il s'agit de déterminer la valeur de remplacement,
en matière d'assurance des marchandises contre les risques de transport,
d'un bien qui a été dérobé. En ce domaine, ni les normes relatives à la
valeur d'assurance (art. 49 ss LCA) - encore que celle-ci puisse être
censée correspondre à la valeur de remplacement (cf. art. 13 GCMI) -,
ni le principe général de l'art. 62 LCA (valeur que représentait l'objet
assuré lors du sinistre) ne sont applicables; la disposition pertinente se
trouve à l'art. 64 al. 1 LCA, qui prévoit, à l'instar de l'art. 13 GCMI,
que la valeur de la chose au lieu de destination fait règle. Il faut
entendre ici la valeur marchande ou vénale qui aurait pu être réalisée
au lieu de destination si un objet présentant les mêmes caractéristiques
avait été vendu, dans des conditions ordinaires, à l'époque où la livraison
aurait dû intervenir; une telle valeur doit être en principe estimée sur
la base de critères objectifs, sans égard aux circonstances spéciales
du cas concret (ROELLI/JAEGER, Kommentar zum VVG, vol. II, Berne 1932,
n. 12 ad art. 64 LCA; BENZ, Kommentar zum schweizerischen Privatrecht,
Bundesgesetz über den Versicherungsvertrag, Bâle/Genève/Munich 2001,
n. 12/13 ad art. 64 LCA).

    Contrairement à l'opinion de l'autorité inférieure, la valeur ainsi
définie n'équivaut ni aux coûts effectifs de réalisation de l'objet dérobé,
ni aux coûts de réalisation d'une nouvelle pièce identique à celle-ci. Il
faut encore tenir compte, d'une part, des frais de transport, de douane
et d'assurance et, d'autre part, du bénéfice escompté (ROELLI/JAEGER,
ibid.; BERTHOUD, Assurance transport I, FJS no 863 p. 5). En particulier,
la marge bénéficiaire étant susceptible d'évaluation, sa couverture relève
du champ d'application de l'art. 64 al. 1 LCA et ne tombe pas, comme
le prétend la défenderesse, sous le coup de l'art. 64 al. 3 LCA; cette
dernière disposition concerne uniquement l'assurance d'un profit futur
de l'entreprise, à savoir l'assurance dite "interruption d'exploitation"
(à ce sujet, cf. BRUNNER, Kommentar zum schweizerischen Privatrecht,
Bundesgesetz über den Versicherungsvertrag, Bâle/Genève/Munich 2001,
n. 19 ad art. 64 LCA).

    La défenderesse ne saurait arguer du fait que la montre "n'était pas
vendue au moment du sinistre et qu'il n'était même pas prévu qu'elle le
soit" (cf. SJ 1980 p. 565 ss, spéc. p. 569 let. d: pour des antiquités,
la valeur de remplacement correspond au prix du marché, "même si le lésé
n'avait pas du tout l'intention de vendre les objets atteints par le
sinistre"). Ce qui est déterminant, c'est de savoir si l'objet assuré
a un prix de marché, quel que soit au demeurant le nombre des acheteurs
potentiels; dès le moment où une chose est négociable, elle possède une
valeur marchande, qui est représentée par le prix qu'un amateur serait
disposé à payer pour acquérir dans des conditions ordinaires un objet du
même type (cf. HAUSWIRTH/SUTER, Sachversicherung, 2e éd., Zurich 1990,
p. 79, 81 et 306). Or, la défenderesse ne conteste pas l'existence d'un
marché pour les montres de luxe, qu'il s'agisse d'un modèle unique ou d'une
série limitée; la montre litigieuse a donc bien une valeur marchande qui
doit être prise en considération sous l'angle de l'art. 64 al. 1 LCA.

    2.3  Vu ce qui précède, c'est à bon droit que la demanderesse se
plaint d'une violation de l'art. 64 LCA. La cour cantonale ayant fixé la
valeur de remplacement en fonction des coûts de fabrication, son jugement
ne renferme aucune constatation sur la valeur vénale de l'objet assuré
au lieu de destination ou sur un éventuel accord entre les parties quant
à la valeur de remplacement (cf. art. 65 al. 1 LCA). Faute d'éléments
permettant à la cour de céans de statuer elle-même au fond, il y a lieu
d'annuler la décision entreprise et de renvoyer l'affaire à la juridiction
précédente pour qu'elle complète l'état de fait (art. 64 al. 1 OJ).