Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 130 III 102



130 III 102

15. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile dans la cause X. contre
A. et B. (recours en réforme)

    4C.263/2003 du 16 décembre 2003

Regeste

    Art. 335d ff. OR und Mitwirkungsgesetz. Massenentlassung;
Geltungsbereich; Konsultation der Arbeitnehmervertretung.

    Zulässigkeit der Berufung im Bereich der Mitwirkungsrechte der
Angestellten bei Massenentlassungen (E. 1).

    Tragweite der in Art. 15 Abs. 3 Mitwirkungsgesetz vorgesehenen
Untersuchungsmaxime (E. 2).

    Die Bewilligung der provisorischen Nachlassstundung fällt nicht
unter Art. 335e Abs. 2 OR, so dass die Bestimmungen betreffend die
Massenentlassung auch in diesem Fall anwendbar sind (E. 3).

    Das Verfahren der Konsultation der Arbeitnehmervertretung muss
stattfinden, bevor endgültig über eine Massenentlassung entschieden ist,
und muss auf jeden Fall beendet sein, bevor die Kündigungen ausgesprochen
werden. Kriterien für die Bestimmung der Angemessenheit der vom Arbeitgeber
angesetzten minimalen Frist. Im vorliegenden Fall erweist sich die zur
Verfügung stehende Frist als nicht ausreichend (E. 4).

Sachverhalt

    Créée en 1999, la société X.  possédait plusieurs sites en Suisse,
dont l'un à Y., dans le canton de Vaud. Elle était liée aux syndicats
A. et B. par une convention collective de travail.

    Dès sa fondation, X. a connu des difficultés financières. Au début
du mois d'août 2002, elle s'est trouvée pratiquement en cessation de
paiement. Son conseil d'administration a alors commencé à réfléchir à
l'éventualité d'un sursis concordataire et d'un licenciement collectif
des travailleurs du site de Y.

    Le 12 septembre 2002, X. a décidé de demander un sursis concordataire,
ce qui entraînait la fermeture de certains sites et, le 13 septembre
2002, le licenciement des collaborateurs du site de Y. a été envisagé à
titre d'hypothèse.

    Le 20 septembre 2002, une demande de sursis concordataire provisoire
a été déposée auprès du tribunal compétent et il a été retenu que, dès
cette date, la décision de fermer le site de Y. était devenue irréversible.

    Le 22 septembre 2002, un sursis concordataire provisoire a été accordé
jusqu'au 22 novembre 2002.

    Le 23 septembre 2002, la commission du personnel de l'usine de Y. a
été informée oralement du projet de fermeture du site. En fin de journée,
X. a convoqué les commissions du personnel des différents sites à une
séance prévue le lendemain dans le canton de Berne.

    Lors de la séance du 24 septembre 2002 à laquelle aucun représentant
des sites romands n'était présent, des informations portant notamment sur
les licenciements envisagés ont été dispensées, mais ni la problématique
de la consultation du personnel, ni celle d'un plan social n'ont été
discutées.

    Par courrier posté le 24 septembre 2002 à la suite à cette séance,
X. a informé les commissions du personnel qu'elle envisageait de fermer
le plus rapidement possible deux sites, dont celui de Y. Sur les 132
employés occupés sur le site de Y. en septembre 2002, 8 avaient déjà été
licenciés et il était prévu d'annoncer 124 licenciements "en septembre
encore et dans certains cas au courant du mois d'octobre". Un délai au
vendredi 27 septembre 2002 a été fixé à la commission du personnel pour
soumettre ses propositions en vue d'éviter ou de limiter les licenciements,
ainsi que d'en atténuer les effets.

    Informé des mesures envisagées, le Service de l'emploi de l'État de
Vaud a relevé qu'un délai de consultation de trois jours était totalement
inhabituel dans le canton et il a invité l'entreprise à prolonger celui-ci.

    Le 25 septembre 2002, le président de la commission du personnel
de X. pour la Romandie a contesté ce délai. Finalement, X. a prolongé
celui-ci au lundi 30 septembre 2002 à 8 heures du matin.

    Le 26 septembre 2002, le syndicat A. a indiqué à X.  que le délai
fixé pour la consultation, même repoussé au 30 septembre 2002, n'était
pas acceptable.

    Le 27 septembre 2002, les représentants suisses-alémaniques du
personnel de X. ont fourni leurs observations sous forme de propositions
sommaires et peu élaborées.

    Le 30 septembre 2002, X. a licencié 76 travailleurs du site de Y. et,
dans le courant du mois d'octobre, elle a encore résilié les contrats de
27 autres employés.

    Ce n'est que le 7 novembre 2002 que la commission du personnel du site
de Y. a remis à X. son rapport concernant les licenciements collectifs.

    Le 22 novembre 2002, X. a obtenu un sursis concordataire définitif
pour une durée de six mois jusqu'au 22 mai 2003.

    Par contrat du 16 décembre 2002, une société tierce a repris l'usine de
Y. et, le 27 décembre 2002, X. a annoncé aux 88 collaborateurs travaillant
toujours sur le site que le plan de licenciement collectif était retiré,
ce qui entraînait l'annulation des congé notifiés à cette occasion. La
reprise est devenue effective le 20 janvier 2003.

    A la suite d'une demande en justice introduite par les syndicats
A. et B., le Tribunal de prud'hommes de l'arrondissement de Lausanne a
constaté, par jugement du 20 février 2003, que X. n'avait pas respecté
la procédure de consultation de la représentation des travailleurs en cas
de licenciement collectif en ce qui concernait le site de Y. Ce jugement
a été confirmé par la Chambre des recours du Tribunal cantonal vaudois,
par arrêt du 9 juillet 2003.

    Contre cet arrêt, X. interjette un recours en réforme au Tribunal
fédéral.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.

    1.1  Le présent recours est dirigé contre un jugement final rendu
en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 48 al. 1
OJ). Il porte sur le respect des droits de participation des salariés
en cas de licenciement collectif au sens des art. 335d à 335g CO, soit
sur une contestation civile (cf. ATF 129 III 415 consid. 2.1). La
question de savoir si celle-ci revêt un caractère non pécuniaire au
sens de l'art. 44 OJ (cf. sur cette notion POUDRET, Commentaire de la
loi fédérale d'organisation judiciaire du 16 décembre 1943, vol. II,
Berne 1990, n. 1.2 ad art. 44 OJ), auquel cas la voie du recours en
réforme devrait, sous réserve d'exceptions non réalisées en l'espèce, être
considérée comme ouverte d'emblée, peut demeurer indécise. En effet, même
si l'on devait retenir le caractère pécuniaire d'une telle contestation,
l'ampleur des licenciements collectifs en cause implique que la valeur
litigieuse ouvrant la voie du recours en réforme serait de toute manière
atteinte (cf. art. 46 OJ).

    1.2  Le recours a été interjeté par l'entreprise qui a succombé
dans ses conclusions libératoires à la suite d'une action en constatation
introduite par deux associations de travailleurs au sens de l'art. 15 al. 2
de la loi fédérale du 17 décembre 1993 sur l'information et la consultation
des travailleurs dans les entreprises (loi sur la participation; ci-après:
LPart.; RS 822.14). La défenderesse a donc qualité pour recourir.

    1.3  Comme toute voie de droit, le recours en réforme suppose
en outre que celui qui le dépose ait un intérêt à recourir (cf. ATF
120 II 5 consid. 2a). En l'occurrence, il ressort de l'arrêt attaqué
qu'à la suite du contrat de reprise conclu le 16 décembre 2002 entre la
défenderesse et une entreprise tierce, le plan de licenciement collectif
communiqué à la fin du mois de septembre 2002 a finalement été retiré
et les congés prononcés ont été annulés. Il a toutefois été retenu que
seuls 88 collaborateurs travaillant toujours sur le site à cette date
ont été concernés par cette annonce, alors qu'avant les licenciements
collectifs, ils étaient 132. Par conséquent, la défenderesse conserve un
intérêt à ce que la constatation selon laquelle elle a violé la procédure
de consultation en cas de licenciement collectif soit annulée.

    1.4  Déposé en temps utile compte tenu des féries (art. 34 al. 1
let. b et art. 54 al. 1 OJ) et dans les formes requises (art. 55 OJ),
le recours en réforme est donc en principe recevable.

Erwägung 2

    2.  A l'appui de son recours, la défenderesse présente un état de fait
qui s'écarte de celui ressortant de l'arrêt attaqué et, dans son dernier
grief, elle remet en cause certains éléments constatés, en invoquant une
violation du principe de la maxime inquisitoire découlant de l'art. 15
al. 3 LPart.

    2.1  Le Tribunal fédéral ne pouvant contrôler l'application du droit
fédéral que sur la base d'un état de fait clairement établi, il convient
d'examiner ces critiques en premier lieu.

    2.2  Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit mener son
raisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décision
attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve
n'aient été violées, qu'il y ait lieu de rectifier des constatations
reposant sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille
compléter les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a
pas tenu compte de faits pertinents, régulièrement allégués et clairement
établis (art. 64 OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c et l'arrêt cité).
Dans la mesure où une partie recourante présente un état de fait qui
s'écarte de celui contenu dans la décision attaquée, sans se prévaloir
avec précision de l'une des exceptions qui viennent d'être rappelées,
il n'est pas possible d'en tenir compte (ATF 127 III 248 consid. 2c). Il
ne peut être présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de
faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ).

    L'art 15 al. 3 LPart. reprend la règle posée à l'art.  343 al. 4 CO,
selon laquelle le juge établit d'office les faits (cf. FRITZ, Loi sur la
participation, Commentaire juridique et guides pratiques, Zurich 1994,
n. 3 ad art. 15 LPart.). Ces dispositions contiennent ainsi des règles
particulières en matière de preuve, dont la violation peut amener le
Tribunal fédéral, saisi d'un recours en réforme, à s'écarter des faits
constatés dans la décision attaquée. Elles imposent au juge de tenir
compte des faits juridiquement pertinents, même si les parties ne les
ont pas invoqués (cf. ATF 107 II 233 consid. 2b p. 236). L'obligation du
juge d'établir d'office les faits ne dispense cependant pas les parties
d'une collaboration active à la procédure. Il leur incombe de renseigner
le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuve
disponibles (ATF 107 II 233 consid. 2c p. 236; cf. s'agissant de l'art. 15
al. 3 LPart., ILG, Kommentar über das Mitwirkungsgesetz, Zurich 1999,
p. 99 s.). Les art. 15 al. 3 LPart. ou 343 al. 4 CO ne peuvent toutefois
servir à remettre en cause, dans une procédure de réforme, la façon dont
le juge a établi les faits ou apprécié les preuves (cf. ATF 129 III 618
consid. 3; 128 III 271 consid. 2b/bb p. 277 s.).

    2.3  La défenderesse soutient que la chambre des recours a méconnu
l'art. 15 al. 3 LPart., en retenant que la procédure de consultation
avait débuté le 25 septembre 2002 et non, comme elle l'avait allégué,
le 24 du même mois. En outre, les juges auraient dû mentionner qu'un
plan social avait été conclu en 1999, lorsqu'ils ont souligné que la
problématique d'un plan social n'avait pas été discutée lors de la séance
du 24 septembre 2002.

    S'agissant de la première critique, la défenderesse n'indique pas quel
moyen de preuve la chambre des recours aurait refusé d'administrer. Elle
se contente de remettre en cause l'établissement des faits, ce qui n'est
pas admissible. Quant à l'existence d'un plan social conclu en 1999,
il s'agit d'un élément non pertinent dont on ne peut donc reprocher aux
juges de n'avoir pas tenu compte. Lors de la séance du 24 septembre 2002,
c'est en effet l'absence de discussion sur la consultation du personnel
qui a été l'élément déterminant pour la chambre des recours, et non le
fait que la problématique du plan social n'ait pas été abordée, quelles
qu'en aient été les raisons.

    Les critiques qui auraient permis à la Cour de céans de s'écarter des
faits ressortant de l'arrêt attaqué étant dépourvues de tout fondement, les
autres griefs invoqués par la défenderesse seront examinés exclusivement
à la lumière des constatations cantonales.

Erwägung 3

    3.  La défenderesse reproche principalement à la chambre des recours
d'avoir violé l'art. 335e al. 2 CO en appliquant à la présente cause les
règles sur le licenciement collectif.

    3.1  Selon l'art. 335e al. 2 CO, les dispositions relatives au
licenciement collectif ne s'appliquent pas en cas de cessation d'activité
de l'entreprise intervenue sur ordre du juge. Dans un arrêt de principe, le
Tribunal fédéral a examiné les cas de figure visés par cet alinéa. Suivant
la doctrine, il a admis que les prescriptions sur le licenciement collectif
ne s'appliquent pas en cas de faillite, car les travailleurs, en tant que
créanciers, disposent alors de possibilités d'influence qui dépassent
les droits de participation prévus aux art. 335d ss CO, de sorte qu'il
ne fait guère de sens de conduire une procédure de consultation en vertu
de l'art. 335f CO parallèlement à la procédure de faillite (ATF 123 III
176 consid. 3a p. 178 s.). En revanche, la jurisprudence n'a pas tranché
la question controversée de savoir si une procédure concordataire peut
également exclure l'application des art. 335d ss CO. La Cour de céans a
toutefois relevé que cette éventualité n'était envisageable que lorsque
la faculté pour les créanciers de participer à la procédure devenait
effective. Or, dans le cadre d'un concordat, les créanciers ne peuvent
se prononcer qu'après l'octroi judiciaire du sursis, dans la phase
d'acceptation du concordat (cf. ATF 123 III 176 consid. 3a p. 179).

    La situation des créanciers en cas de sursis concordataire
provisoire n'est pas comparable à celle prévalant lors de l'acceptation
du concordat. Il ressort de l'art. 293 al. 3 LP qu'après avoir été saisi
d'une demande de concordat, le juge peut, lorsque cela s'avère justifié,
décréter un sursis provisoire de deux mois au plus et nommer un commissaire
provisoire. Ce sursis provisoire revêt ainsi les caractéristiques d'une
mesure conservatoire, dont le but est de permettre au juge de réunir les
éléments indispensables, afin de statuer sur la demande de concordat,
en sauvegardant les droits des intéressés (cf. art. 293 al. 3 in fine
et art. 294 LP; cf. GILLIÉRON, Commentaire de la loi fédérale sur la
poursuite pour dettes et la faillite, Lausanne 2003, n. 30 s. ad art. 293
LP; VOLLMAR, Commentaire bâlois, SchKG III, n. 31 ad art. 293 LP). Comme
la décision d'ouvrir une procédure concordataire n'est pas encore prise,
on ne peut parler de participation effective des créanciers à ce stade,
de sorte que les art. 335d ss CO demeurent applicables (cf. GEISER,
Arbeitsrechtliche Fragen bei Sanierungen, in Vito Roberto [éd.], Sanierung
der AG, Zurich 2003, p. 119 ss, 150; MEYER, Die Massenentlassung, thèse
Bâle 1999, p. 132).

    3.2  En l'espèce, la chronologie des événements fait apparaître
que le juge a accordé, le 22 septembre 2002, un sursis concordataire
provisoire jusqu'au 22 novembre 2002. Ce n'est qu'à cette dernière date
qu'une décision judiciaire portant sur l'octroi d'un sursis concordataire
définitif pour une durée de six mois a été rendue. Les licenciements
collectifs ont donc été annoncés aux représentations des travailleurs
concernées et ont été signifiés durant la phase du sursis concordataire
provisoire au sens de l'art. 293 al. 3 LP. Dès lors qu'à ce stade,
les créanciers ne disposent pas encore de possibilités d'influencer
la procédure concordataire de nature à rendre superflue l'application
simultanée des droits de participation de l'art. 335f CO (cf. supra
consid. 3.1), ce cas de figure ne saurait entrer dans l'hypothèse visée par
l'art. 335e al. 2 CO, contrairement à ce qu'invoque la défenderesse. Dans
son argumentation, celle-ci perd du reste de vue qu'au moment des faits,
le juge ne s'était pas encore prononcé de manière définitive sur le
sursis concordataire.

    C'est donc à juste titre que la chambre des recours a fait application
des dispositions concernant les licenciements collectifs.

Erwägung 4

    4.  A titre subsidiaire, la défenderesse soutient que, dans le cas où
la procédure serait régie par les art. 335d ss CO, la chambre des recours
a violé le droit fédéral en refusant de reconnaître que l'entreprise avait
procédé à la consultation des représentants des travailleurs à temps et
en estimant que le délai imparti pour qu'ils formulent leurs observations
était trop bref.

    4.1  La procédure de consultation de la représentation des travailleurs
est réglée à l'art. 335f CO. Selon cette disposition, l'employeur qui
envisage de procéder à un licenciement collectif est tenu de consulter la
représentation des travailleurs ou, à défaut, les travailleurs (al. 1). Il
leur donne au moins la possibilité de formuler des propositions sur les
moyens d'éviter les congés ou d'en limiter le nombre, ainsi que d'en
atténuer les conséquences (al. 2). La loi ne règle pas précisément
le moment auquel l'employeur doit mettre en oeuvre la procédure de
consultation, ni la durée dont doivent disposer les travailleurs ou
leur représentation pour formuler leurs propositions (WYLER, Droit du
travail, Berne 2002, p. 356). Il convient donc d'examiner quelles sont
les exigences posées par la pratique et si, comme elle le soutient,
la défenderesse s'y est conformée en l'espèce.

    4.2  S'agissant du moment auquel la procédure de consultation doit
être mise en oeuvre, la jurisprudence a déduit de l'art. 335f CO que
l'employeur ne peut attendre jusqu'à ce que le licenciement collectif
soit concrètement décidé, car le sens de la consultation est d'accorder
aux travailleurs la possibilité d'influer sur le processus décisionnel de
l'employeur. La consultation doit donc avoir lieu avant que l'employeur
ne prenne la décision définitive de procéder au licenciement collectif
(ATF 123 III 176 consid. 4a p. 180). Cette condition suppose d'établir
la volonté subjective de l'employeur à un moment donné, ce qui relève du
fait et lie le Tribunal fédéral en instance de réforme (cf. CORBOZ, Le
recours en réforme, SJ 2000 II p. 1 ss, 62; cf. ATF 123 III 165 consid. 3a
in fine).

    En l'espèce, il ressort des constatations cantonales que, dès le 13
septembre 2002, le conseil d'administration de la défenderesse a envisagé
l'hypothèse d'un licenciement des collaborateurs du site de Y. et, le 20
septembre 2002, la décision de fermer ce site est devenue irréversible. Ce
n'est toutefois que le 25 septembre suivant que la défenderesse a entamé
la procédure de consultation des salariés au sens de l'art. 335f CO. Il
en découle que la chambre des recours était fondée à admettre que la
défenderesse avait agi tardivement, dès lors qu'elle n'a consulté les
travailleurs qu'après avoir décidé, de manière irrévocable, de fermer
le site. Lorsque la défenderesse relève que la consultation ne doit
être mise en oeuvre qu'après la décision définitive de licencier prise
par l'employeur, elle adopte une position clairement contraire à la
jurisprudence et qui rendrait de plus la procédure de consultation vide
de sens.

    4.3  Quant à la durée de la consultation, elle n'est pas illimitée. Il
est unanimement admis que l'employeur peut fixer aux travailleurs un
délai pour leur prise de position (ATF 123 III 176 consid. 4b p. 181
et les références citées). La consultation doit en tout cas être
terminée avant le prononcé des licenciements (WYLER, op. cit., p. 356;
MÜLLER, Die neuen Bestimmungen über Massenentlassungen, Mitteilungen
des Instituts für Schweizerisches Arbeitsrecht [ArbR] 1995 p. 105
ss, 126). Comme dans l'exercice de tous les droits de participation,
la collaboration des parties en ce domaine est régie par le principe
de la bonne foi (cf. art. 11 al. 1 LPart.; ATF 123 III 176 consid 4b
p. 181; cf. également FRITZ, op. cit., n. 1 ad art. 11 LPart.; WYLER,
op. cit., loc. cit.). Les travailleurs doivent disposer du temps
nécessaire pour étudier les renseignements fournis par l'employeur (cf.
art. 335f al. 3 CO), formuler des propositions concrètes et les porter
à la connaissance de l'employeur. Les parties ont du reste un intérêt
concordant à ce que les propositions soient rapidement élaborées (ATF 123
III 176 consid. 4b p. 181 et les références citées). La jurisprudence n'a
pas fixé concrètement de délai minimal approprié, précisant que celui-ci
dépendait des circonstances, en particulier de la complexité des questions
à résoudre et de l'urgence du licenciement collectif envisagé. Toutefois,
si le licenciement collectif est devenu urgent parce que l'employeur a
entamé la procédure de consultation trop tard, cette urgence ne saurait
justifier un raccourcissement du délai de consultation (ATF 123 III
176 consid. 4b p. 181). Pour le Tribunal fédéral, un délai de 24 heures
s'avère manifestement trop bref, alors qu'une période de quatre à six
semaines paraît nettement trop longue (cf. ATF 123 III 176 consid. 4c
p. 182). Certains auteurs ont fixé des limites plus précises. Selon AUBERT,
sauf cas particuliers, le délai ne doit pas être inférieur à une dizaine
de jours (AUBERT, Commentaire romand, n. 8 ad art. 335f CO). WYLER, sur
lequel se fonde la défenderesse, considère que, pour une entreprise de
taille moyenne (moins de 300 salariés), un délai de consultation de sept
à dix jours est adéquat (WYLER, op. cit., p. 357). D'autres auteurs
enfin sont d'avis que trois à cinq jours ouvrables suffisent (GEISER,
Massenentlassung, in Geiser/Münch [éd.], Stellenwechsel und Entlassung,
Bâle 1997, p. 106; MEYER, op. cit., p. 169; MÜLLER, op. cit., p. 128).

    L'arrêt attaqué constate que, le 25 septembre 2002, la défenderesse a
tout d'abord imparti un délai au vendredi 27 septembre aux représentations
des salariés pour formuler leurs observations. Le président de la
commission du personnel pour la Romandie s'y étant opposé, la défenderesse
a finalement prolongé ce délai au lundi 30 septembre 2002 à 8 heures
du matin.

    Eu égard aux circonstances, on ne peut considérer que ce délai,
même prolongé, est conforme aux exigences légales. A supposer qu'une
durée de cinq jours pour permettre à la représentation des travailleurs
de fournir des observations puisse être tenue pour suffisante, ce qui est
fortement douteux, compte tenu de l'ampleur des licenciements envisagés,
qui concernaient les 132 personnes employées sur le site de Y., et du
fait que ce délai comprenait un week-end, l'attitude de la défenderesse
ne dénote pas une collaboration conforme aux règles de la bonne foi. Si
l'on comprend bien que, pour l'entreprise, il était important de clore la
procédure de consultation des travailleurs avant le 30 septembre 2002,
afin de pouvoir licencier une partie du personnel dans le mois courant,
celle-ci ne pouvait accorder une prolongation du délai initialement fixé
de seulement deux jours durant un week-end et faire expirer celui-ci le
lundi à 8 heures du matin. La défenderesse avait alors juste le temps de
procéder à la notification à l'office cantonal du travail exigée par l'art.
335g CO et de communiquer leur congé aux salariés présents sur le site
ce lundi, mais on ne peut concevoir que ce délai lui permettait également
d'examiner de manière sérieuse les propositions de la représentation des
travailleurs qui auraient dû lui parvenir le jour même. Les arguments
figurant dans le recours et tendant à démontrer l'inverse ne sont pas
concluants. Enfin, il convient de se montrer d'autant plus strict dans
l'appréciation de la durée du délai accordé en l'espèce que, comme il
l'a été exposé (cf. supra consid. 4.2), la défenderesse a entamé la
procédure de consultation tardivement. Celle-ci ne peut donc se prévaloir
d'une situation d'urgence qu'elle a elle-même générée.

    Il apparaît ainsi que la chambre des recours n'a pas violé le droit
fédéral lorsqu'elle a considéré que la défenderesse n'avait pas respecté
la procédure de consultation au sens de l'art. 335f CO, en impartissant
à la représentation des salariés un délai de consultation de cinq jours
qui arrivait à expiration le lundi 30 septembre 2002 à 8 heures du matin.

    4.4  Les arguments présentés par la défenderesse pour tenter de
démontrer l'existence d'un délai convenable sont du reste tous dépourvus
de pertinence.

    Ainsi, lorsqu'elle conteste qu'une opposition au premier délai fixé
au 27 septembre 2002 ait été présentée par les personnes compétentes,
elle oublie que c'est elle-même qui a accepté cette requête et qui a
prolongé le délai au 30 septembre, sans formuler d'objection.

    Le délai de consultation qui découle implicitement de l'art. 335f CO
commence à courir à partir du moment où l'employeur entame formellement la
procédure que lui impose la loi. On ne saurait admettre, comme le soutient
la défenderesse, que ce délai débute dès le moment où la commission du
personnel a eu vent du projet de licenciement collectif.

    Quant au plan social conclu en 1999, il ne justifie en rien l'octroi
d'un délai de consultation plus court, car ce document n'empêchait pas
les travailleurs ou leurs représentants de formuler d'autres propositions
à l'occasion de la consultation sur les licenciements collectifs.

    Enfin, on a vu qu'un sursis concordataire accordé à titre provisoire
n'entrait pas dans les hypothèses visées par l'art. 335e al. 2 CO,
de sorte que les dispositions sur les licenciements collectifs étaient
applicables (cf. supra consid. 3). La défenderesse ne peut donc invoquer
la spécificité propre au sursis concordataire pour se soustraire aux
obligations procédurales découlant de l'art. 337f CO.

    Le recours doit par conséquent être rejeté.