Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 129 IV 197



129 IV 197

28. Extrait de l'arrêt de la Chambre d'accusation dans la cause X. contre
Ministère public de la Confédération

    8G.32/2003 du 2 avril 2003

Regeste

    Art. 100 Abs. 3 und 5 und Art. 105bis Abs. 2 BStP; Verfügung, mit
der einer Anzeige keine Folge gegeben wird, Rechtsmittel.

    In Anwendung von Art. 100 Abs. 5 BStP kann nur das Opfer im Sinne des
OHG Beschwerde führen gegen eine Verfügung, mit der einer Anzeige keine
Folge gegeben wird. Der Anzeigeerstatter, der durch die in Frage stehende
Straftat geschädigt worden sein soll, ohne Opfer im Sinne des OHG zu sein,
kann gestützt auf Art. 105bis Abs. 2 BStP gegen eine solche Verfügung
keine Beschwerde führen. Präzisierung der in BGE 128 IV 223 publizierten
Rechtsprechung (E. 1).

    Art. 270 StGB; Angriffe auf schweizerische Hoheitszeichen.

    Die Verwendung einer Schweizerfahne durch eine Privatperson auf dem
Umschlag ihres Buches fällt nicht unter Art. 270 StGB (E. 2).

Sachverhalt

    A.- Au début 2003, Stuart Eizenstat, ancien sous-secrétaire d'Etat
américain qui était intervenu dans l'affaire des fonds en déshérence,
a fait paraître un livre intitulé "Imperfect Justice". En couverture
y figure un drapeau suisse, dont la croix fédérale est recouverte de
lingots d'or, la transformant en croix gammée.

    Plusieurs personnes se sont insurgées de l'offense pour la Suisse que
représentait la couverture du livre. Elles s'en sont plaintes auprès du
Ministère public de la Confédération. X. est l'une d'elles.

    B.- Le 28 février 2003, le Ministère public de la Confédération a rendu
une ordonnance de ne pas donner suite (art. 100 al. 3 PPF) en tant que les
plaintes pénales concernaient l'infraction d'atteinte aux emblèmes suisses
(art. 270 CP). S'agissant d'une éventuelle application de la loi fédérale
du 5 juin 1931 pour la protection des armoiries publiques et autres signes
publics (LPAP; RS 232.21), il a transféré les plaintes aux autorités
genevoises, car la législation précitée relève de la compétence cantonale.

    C.- X. recourt à la Chambre d'accusation du Tribunal fédéral. Il
conclut à l'annulation de l'ordonnance et au renvoi de la cause au
Ministère public de la Confédération, pour ouverture d'une enquête à
raison de l'art. 270 CP.

    Le Tribunal fédéral a déclaré le recours irrecevable.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.

    1.1  Le recourant est d'avis que la couverture du livre tombe sous
le coup de l'art. 270 CP. Cette disposition réprime de l'emprisonnement
ou de l'amende le comportement de celui qui, par malveillance, aura
enlevé, dégradé, ou aura par des actes outragé un emblème suisse de
souveraineté arboré par une autorité, notamment les armes ou le drapeau
de la Confédération ou d'un canton. Contenue dans le titre treizième
du Code pénal, cette infraction ressortit à la compétence directe de la
juridiction fédérale si elle est commise contre la Confédération ou une
autorité fédérale (cf. art. 340 ch. 1 al. 7 CP).

    1.2  L'art. 100 al. 1 PPF prévoit que chacun a qualité pour dénoncer
les infractions poursuivies d'office en vertu de la législation fédérale.
Selon l'alinéa 3 de cette disposition, s'il n'existe pas de motif d'ouvrir
une enquête, le Ministère public de la Confédération (le procureur général)
ne donne aucune suite à la dénonciation. Cela peut être le cas par exemple
si le comportement n'est à l'évidence pas punissable ou si les autorités
cantonales sont compétentes (cf. FF 1998 p. 1253 ss, 1281). Ces hypothèses
sont précisément à l'origine de l'ordonnance attaquée, qui a été rendue
en vertu de l'art. 100 al. 3 PPF parce que l'art. 270 CP apparaissait
d'emblée non applicable et que la LPAP ressortissait à la compétence
cantonale. La première question à résoudre ici est de déterminer si le
recourant a qualité pour attaquer une telle décision devant la Chambre
d'accusation du Tribunal fédéral.

    1.3  Le recourant fonde sa qualité pour recourir sur l'art. 105bis
al. 2 PPF. Selon cette disposition, les opérations et les omissions
du procureur général peuvent faire l'objet d'une plainte à la Chambre
d'accusation du Tribunal fédéral en vertu des art. 214 à 219 PPF;
l'art. 214 al. 2 PPF ouvre une plainte aux parties, ainsi qu'à toute
personne à qui la décision du procureur général fait subir un préjudice
illégitime; le délai pour recourir est de cinq jours (art. 217 PPF).

    1.4  Récemment, le Tribunal fédéral a jugé que la loi n'ouvre pas la
voie du recours au dénonciateur en tant que tel, même si celui-ci doit
être informé selon l'art. 100 al. 4 PPF de la décision par laquelle il
n'est pas donné suite à sa dénonciation (art. 100 al. 3 PPF); tout au plus
le dénonciateur qui est simultanément un lésé direct de l'infraction en
cause pourrait subir un préjudice illégitime au sens de l'art. 214 al. 2
PPF en raison de la décision de ne pas donner suite à sa dénonciation; il
pourrait ainsi être légitimé à recourir en vertu de l'art. 105bis al. 2
PPF; le Tribunal fédéral n'a toutefois pas approfondi cette question
(ATF 128 IV 223 consid. 2 p. 224/225).

    1.5  A l'égard d'une décision par laquelle le procureur général
ne donne pas suite à une dénonciation (art. 100 al. 3 PPF), la loi
ouvre clairement une voie de recours à la victime au sens de l'art. 2
de la loi fédérale sur l'aide aux victimes d'infractions (LAVI; RS
312.5). L'art. 100 al. 5 PPF prévoit en effet qu'une décision au sens de
l'alinéa 3 doit être notifiée à la victime LAVI, qui peut recourir dans
un délai de dix jours à la Chambre d'accusation du Tribunal fédéral. Le
délai de recours selon l'art. 100 al. 5 PPF (dix jours) est le double de
celui découlant de l'art. 105bis al. 2 PPF (par le renvoi à l'art. 217
PPF). Il est douteux que le but de l'art. 100 al. 5 PPF soit simplement
d'assurer à la victime LAVI un délai de recours plus étendu. Contre une
décision prise selon l'art. 100 al. 3 PPF, on peut ainsi se demander si
l'art. 100 al. 5 PPF n'est pas exclusif de toute autre voie de recours,
en particulier celle de l'art. 105bis al. 2 PPF.

    A réception d'une dénonciation, le Ministère public de la
Confédération doit soit ordonner par écrit l'ouverture d'une enquête en
raison de soupçons suffisants (art. 101 al. 1 PPF), soit décider de ne
pas donner suite à la dénonciation s'il n'existe pas de motif d'ouvrir
une enquête (art. 100 al. 3 PPF). Il est tenu d'adopter l'une de ces
deux options (cf. FELIX BÄNZIGER/LUC LEIMGRUBER, Le nouvel engagement
de la Confédération dans la poursuite pénale - Commentaire succinct du
"Projet d'efficacité", Berne 2001, n. 241 ad art. 100 PPF et n. 244 ad
art. 101 PPF). Il est admis qu'avant de décider de ne pas donner suite à la
dénonciation (art. 100 al. 3 PPF), le Ministère public de la Confédération
puisse procéder à des recherches préliminaires (cf. BÄNZIGER/LEIMGRUBER,
op. cit., n. 241 in fine ad art. 100 PPF). Mais il ne s'agit pas là d'actes
d'investigation dans le cadre d'une enquête ouverte selon l'art. 101 al. 1
PPF. Or, la systématique de la loi impose de rattacher d'une part la voie
de recours de l'art. 100 al. 5 PPF à une décision appliquant l'art. 100
al. 3 PPF et, d'autre part, la voie de l'art. 105bis al. 2 PPF à un acte de
l'enquête, après l'ouverture de celle-ci selon l'art. 101 al. 1 PPF. Aucun
amalgame entre les deux voies de recours n'est envisageable. L'intention du
législateur à ce propos est établie par le message du Conseil fédéral du
28 janvier 1998. Il en ressort que l'art. 100 al. 5 PPF ouvre un recours
contre une décision prise en vertu de l'art. 100 al. 3 PPF, alors que
l'art. 105bis al. 2 PPF assure la possibilité d'un contrôle judiciaire par
le Tribunal fédéral de l'activité du procureur général dans la procédure
d'investigation, autrement dit après l'ouverture d'une enquête en vertu
de l'art. 101 al. 1 PPF (cf. FF 1998 p. 1281/1282 et p. 1275/1276,
auxquelles renvoie le commentaire de l'art. 105bis al. 2 PPF). Il s'ensuit
que la question laissée ouverte dans l'arrêt publié aux ATF 128 IV 223
d'une possibilité de recourir en vertu de l'art. 105bis al. 2 PPF doit
être tranchée négativement. Autrement dit, même un dénonciateur qui serait
directement lésé par l'infraction en cause ne saurait se fonder sur l'art.
105bis al. 2 PPF pour recourir contre une décision de ne pas donner suite
au sens de l'art. 100 al. 3 PPF. Conformément à l'art. 100 al. 5 PPF,
le recours n'est ouvert qu'à la victime LAVI.

    A noter par ailleurs qu'il importe peu qu'au pied de l'ordonnance
attaquée, le Ministère public de la Confédération ait mentionné la
faculté de recourir sur la base de l'art. 105bis al. 2 PPF, une indication
erronée ne pouvant pas créer un recours qui n'existe pas (ATF 129 III 88
consid. 2.1 p. 89; 117 Ia 297 consid. 2 p. 299).

    1.6  Il reste à examiner si le recourant est une victime LAVI, ainsi
que l'exige l'art. 100 al. 5 PPF. Par victime LAVI, on entend toute
personne qui a subi, du fait d'une infraction, une atteinte directe à
son intégrité corporelle, sexuelle ou psychique (ATF 128 IV 188 consid. 2
p. 190).

    L'art. 270 CP fait partie du titre treizième du Code pénal concernant
les crimes ou délits contre l'Etat et la défense nationale. Le bien
juridique protégé par cette norme est l'honneur ainsi que l'autorité de
l'Etat (cf. STEFAN WEHRENBERG, Basler Kommentar, Strafgesetzbuch II, 2002,
n. 8 ad art. 270 CP). Le titulaire du bien juridique est donc l'Etat,
à l'exclusion des personnes privées qui ne peuvent le cas échéant qu'être
atteintes indirectement. Il s'ensuit que l'infraction en cause n'est pas
susceptible de léser directement le recourant dans un intérêt personnel
et juridiquement protégé. Le recourant n'est donc à l'évidence pas une
victime LAVI, ne pouvant se réclamer d'une atteinte directe à son intégrité
corporelle, sexuelle ou psychique.

    1.7  Faute d'être une victime LAVI, le recourant n'a pas qualité pour
attaquer une décision de ne ne pas donner suite à sa dénonciation. Son
recours est donc irrecevable.

Erwägung 2

    2.  Au demeurant, c'est à bon escient que le Ministère public de
la Confédération a conclu que l'infraction réprimée par l'art. 270 CP
n'était pas réalisée. L'une des conditions objectives fait en effet
défaut. Aux termes de cette disposition (cf. supra, consid. 1.1),
l'auteur doit s'en être pris à un emblème de souveraineté arboré par
une autorité. La doctrine unanime observe que, selon cette formulation,
l'usage par une personne privée d'un tel emblème n'est pas concerné (cf.
BERNARD CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. II, Berne 2002,
n. 3 ad art. 270 CP; JÖRG REHBERG, Strafrecht IV, 2e éd., p. 219; GÜNTER
STRATENWERTH, Schweizerisches Strafrecht, Bes. Teil II, Berne 2000, §
45 n. 9; STEFAN TRECHSEL, Kurzkommentar, 2e éd., n. 1 ad art. 270 CP;
STEFAN WEHRENBERG, op. cit., n. 11 ad art. 270 CP). L'usage d'un drapeau
par un particulier en couverture de son livre échappe donc à l'art. 270 CP.

    Cela étant, comme le mentionne l'ordonnance attaquée, la couverture
du livre serait éventuellement susceptible de tomber sous le coup de
la LPAP. Selon l'art. 15 al. 1 LPAP, la poursuite et le jugement des
infractions à cette loi incombent aux cantons. Faute de compétence en cette
matière, le Ministère public de la Confédération devait, comme il l'a fait,
transmettre le dossier aux autorités cantonales (cf. art. 107 PPF).