Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 129 IV 119



129 IV 119

15. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale dans la cause
X. contre Ministère public du canton du Valais et Y. (pourvoi en nullité)

    6S.391/2002 du 23 décembre 2002

Regeste

    Art. 125 StGB; Sorgfaltspflichtverletzung.

    Unterscheidung zwischen Begehungs- und Unterlassungsdelikt (E.  2.2).

    Der Direktor einer Firma, die Kontakte zwischen Sportveranstaltern
und potentiellen Kunden vermittelt und entsprechende sportliche
Aktivitäten organisiert, verletzt seine Sorgfaltspflicht, wenn er einen
Sportveranstalter empfiehlt, der nicht über die notwendigen amtlichen
Bewilligungen verfügt (E. 2.3 und 2.4).

Sachverhalt

    A.- Z. est directeur d'un camp de vacances au Valais. Il accueille des
jeunes du monde entier et leur propose notamment, à l'occasion de leurs
vacances, de pratiquer diverses activités sportives. En automne 2000,
il a pris contact, afin d'organiser une descente du Rhône en radeau, avec
la société A., sorte d'organisation faîtière, dont l'activité consiste à
se faire l'intermédiaire entre diverses organisations sportives et des
clients potentiels et à organiser avec les uns et les autres certaines
activités sportives. Y., qui dirige cette organisation, a recommandé
à Z. la société B., qui ne possédait cependant pas les autorisations
obligatoires conformément à l'art. 73 de l'ordonnance sur la navigation
dans les eaux suisses (RS 747.201.1) et aux directives de l'Association
des services cantonaux de la navigation; ces directives posent notamment
certaines normes de construction des radeaux et disposent que l'autorité
qui délivre l'autorisation doit inspecter la sécurité (stabilité et
portance) des radeaux avant leur mise à l'eau.

    Une descente en radeau a été organisée le 6 juillet 2001.  Alerté par
les conditions climatiques défavorables, Z. a téléphoné à Y., qui lui
a répondu que "pour lui, les conditions étaient bonnes". Vers 17h30, le
groupe d'enfants auquel appartenait X. a été confié aux moniteurs de la
société B. La descente s'est déroulée dans un premier temps normalement. A
environ 500 mètres du pont de Dorénaz, les moniteurs du radeau de
X. ont perdu la maîtrise de leur embarcation et le radeau a heurté une
palplanche métallique quelque quinze mètres plus loin. X. et une autre
jeune vacancière se sont trouvées coincées dans les cordages d'assemblage
du radeau, la tête sous l'eau. Alors que cette dernière est décédée,
X. a pu être sauvée. Victime d'une noyade avec arrêt cardio-vasculaire,
elle a cependant été sérieusement atteinte dans sa santé. En dépit de
l'amélioration survenue dans l'intervalle, elle souffre de séquelles
neurologiques qui persistent encore aujourd'hui, et on ne sait à ce jour
si elle guérira.

    B.- Le 8 octobre 2001, X. a déposé plainte pénale.

    Le 4 décembre 2001, elle a demandé l'ouverture d'une information
pénale à l'encontre de Y. Par décision du 8 janvier 2002, le magistrat
instructeur a refusé de donner suite à la dénonciation déposée contre
Y. Statuant sur plainte de X., la Chambre pénale du Tribunal cantonal du
Valais a confirmé cette décision le 29 août 2002.

    C.- X. forme un pourvoi en nullité contre cette dernière décision.

    Dans ses déterminations du 10 décembre 2002, Y. conclut au rejet du
pourvoi. Par lettre du 4 décembre 2002, le Ministère public valaisan a
renoncé à se déterminer.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.  La recourante X. demande l'ouverture d'une information pénale
à l'encontre de l'intimé Y. pour lésions corporelles par négligence
(art. 125 CP) et toutes autres dispositions pénales qui seraient réalisées
en l'espèce. Elle reproche à l'intimé en particulier d'avoir omis de
vérifier si les guides qu'il recommandait disposaient des autorisations
nécessaires; l'intimé occuperait, selon elle, une position de garant, du
fait du contrat de sous-mandat qu'il aurait conclu avec le directeur du
camp et aurait commis une infraction punissable en omettant de procéder
à toute vérification.

    2.1  L'art. 125 CP punit, sur plainte, celui qui, par négligence,
aura fait subir à une personne une atteinte à l'intégrité corporelle ou
à la santé; l'alinéa 2 prévoit que si la lésion est grave, l'auteur sera
poursuivi d'office. Le délit de lésions corporelles commis par négligence
suppose, d'une part, que l'auteur ait violé les règles de prudence que les
circonstances lui imposaient pour ne pas excéder les limites du risque
admissible et, d'autre part, qu'il n'ait pas déployé l'attention et les
efforts que l'on pouvait attendre de lui pour se conformer à son devoir
(art. 18 al. 3 CP; ATF 122 IV 145 consid. 3b p. 147).

    Pour déterminer plus précisément les devoirs imposés par la prudence,
on peut se référer à des normes édictées par l'ordre juridique pour assurer
la sécurité et éviter les accidents; à défaut de dispositions légales
ou réglementaires, on peut se référer à des règles analogues qui émanent
d'associations privées ou semi-publiques lorsqu'elles sont généralement
reconnues (ATF 122 IV 17 consid. 2b/aa p. 20). Un comportement viole
le devoir de prudence lorsque l'auteur, au moment des faits, aurait pu,
compte tenu de ses connaissances et de ses capacités, se rendre compte de
la mise en danger d'autrui et qu'il a simultanément dépassé les limites
du risque admissible (ATF 121 IV 10 consid. 3 p. 14). C'est donc en
fonction de la situation personnelle de l'auteur que l'on doit apprécier
son devoir de diligence. Peu importe toutefois que l'auteur ait pu ou dû
prévoir que les choses se passeraient exactement comme elles ont eu lieu
(ATF 115 IV 199 consid. 5c p. 207). S'il y a eu violation des règles de
la prudence, encore faut-il que celle-ci puisse être imputée à faute,
c'est-à-dire que l'on puisse reprocher à l'auteur, compte tenu de ses
circonstances personnelles, d'avoir fait preuve d'un manque d'effort
blâmable (ATF 122 IV 17 consid. 2b/ee p. 22).

    2.2  Le délit défini à l'art. 125 CP suppose en général un comportement
actif qui cause des lésions corporelles. On admet toutefois qu'il peut
être commis par omission lorsque l'auteur avait une obligation juridique
d'agir découlant d'une position de garant (ATF 122 IV 17 consid. 2b/aa
p. 20; CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. I, Berne 2002, n. 3
ad art. 125 CP p. 146). La distinction entre l'omission et la commission
n'est cependant pas toujours facile à faire et on peut souvent se demander
s'il faut reprocher à l'auteur d'avoir agi comme il ne devait pas le
faire ou d'avoir omis d'agir comme il devait le faire (CORBOZ, op. cit.,
n. 5 ad art. 117 CP p. 65). Pour apprécier dans les cas limites si un
comportement constitue un acte ou le défaut d'accomplissement d'un acte,
il faut s'inspirer du principe de la subsidiarité et retenir un délit de
commission chaque fois que l'on peut imputer à l'auteur un comportement
actif (ATF 121 IV 10 consid. 2b p. 14; 120 IV 265 consid. 2b p. 271;
115 IV 199 consid. 2a p. 203 s.; TRECHSEL, Kurzkommentar, n. 31 ad art. 1
CP p. 11 s.; KILLIAS, Précis de droit pénal général, 2e éd., Berne 2001,
n. 421, p. 58; GRAVEN, L'infraction punissable, 2e éd., Berne 1995, p. 78).

    En l'espèce, dans la mesure où l'intimé a recommandé à Z.  des guides
pour organiser une descente en radeau, il a eu, contrairement à ce que
prétendent l'autorité cantonale et la recourante, un comportement actif et
non un comportement passif. Ce faisant, il a certes omis de vérifier si
les guides qu'il recommandait disposaient des autorisations nécessaires;
cela ne saurait cependant transformer son comportement en une omission. Il
n'y a donc pas lieu d'examiner les règles particulières en cas de délit
d'omission et en particulier la position de garant.

    2.3  En matière civile, la doctrine et la jurisprudence considèrent
que celui qui fournit des renseignements est astreint au devoir de vérité
(ENGEL, Traité des obligations en droit suisse, 2e éd., Berne 1997,
p. 222). Donner des renseignements inexacts viole une règle de droit non
écrite selon laquelle "celui qui est interrogé sur des faits qu'il est
bien placé pour connaître doit donner un renseignement exact, dès qu'il
est reconnaissable pour lui que le renseignement a ou peut avoir pour
celui qui le demande une signification grosse de conséquences" (SCHÖNLE,
La responsabilité des banques pour renseignements financiers inexacts,
in Mélanges en l'honneur de Henri Deschenaux, Fribourg 1977, p. 387 ss,
399 s.). Sur le plan strictement juridique, l'obligation de fournir
des renseignements exacts peut résulter d'une disposition expresse de
la loi, d'un accord contractuel ou de la bonne foi (ENGEL, op. cit., p.
352; ATF 116 II 431 consid. 3a p. 434). Si le fait présuppose science,
technique ou compétence conférant une certaine suprématie au partenaire,
le devoir de celui-ci d'informer l'autre de manière exacte s'impose avec
plus de sévérité (ENGEL, op. cit., p. 353). Celui qui est interrogé est
placé devant l'alternative de s'abstenir ou d'engager sa responsabilité
contractuelle, précontractuelle ou encore délictuelle (ENGEL, op. cit.,
p. 723; SCHÖNLE, op. cit., p. 399 s.).

    2.4  En l'espèce, l'intimé est guide de montagne, professeur de ski,
pilote et moniteur de parapente. Il dirige la société A., dont l'activité
consiste à se faire l'intermédiaire entre diverses organisations sportives
et des clients potentiels et à organiser avec les uns et les autres
certaines activités sportives. De par sa fonction et son expérience, il
occupe donc une position particulière. Les clients, et en particulier
Z., qui s'adressent à cette organisation, font confiance à l'intimé,
et celui-ci se doit en conséquence de les renseigner de manière exacte;
le cas échéant, il doit procéder à des vérifications et cela d'autant plus
lorsque, comme en l'espèce, l'activité en cause est une activité sportive
nouvelle, qui présente à l'évidence certains risques. En recommandant
des personnes qui ne sont pas en ordre sur les plans technique et
administratif, conformément à ce que pouvait attendre Z., qu'il savait
particulièrement soucieux de la sécurité de ses pensionnaires, il a commis
une faute.

    Cependant, il ne suffit pas d'établir que l'intimé a commis une faute,
il faut encore que celle-ci soit en relation de causalité naturelle et
adéquate avec le résultat. La recourante affirme que, si le radeau avait
été adéquatement construit, il se serait disloqué sans risquer de coincer
ses occupants dans ses cordages et de les noyer. L'autorité cantonale,
qui a dénié toute position de garant à la charge de l'intimé, et, en
conséquence, toute violation fautive de son devoir de diligence, ne s'est
pas prononcée sur l'influence qu'a pu jouer le défaut d'autorisation sur
l'accident. Sur la base de l'état de fait, on ne peut cependant exclure
tout lien de causalité. Le refus de suivre prononcé par l'autorité
cantonale apparaît donc prématuré. Le pourvoi doit dès lors être admis
sur ce point, le dossier étant renvoyé à l'autorité cantonale pour
complément d'instruction, afin qu'elle détermine si le fait que les
guides ne disposaient pas des autorisations nécessaires a influé sur la
survenance de l'accident.