Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 129 II 97



129 II 97

10. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public dans la cause
A. contre Juge d'instruction et Chambre d'accusation du canton de Genève
(recours de droit administratif)

    1A.210/2002 du 27 novembre 2002

Regeste

    Art. 14 EUeR, Art. 27 GwUe, Art. 28 IRSG, Art. 10 IRSV;
Begründungserfordernis bei einem Rechtshilfeersuchen wegen
Geldwäschereiverdachtes.

    Das Rechtshilfeersuchen braucht nicht notwendigerweise zu erwähnen,
worin die Vortat (Haupttat) bestehe; es genügt, wenn verdächtige
Finanztransaktionen dargelegt werden (E. 3).

Sachverhalt

    Le 22 novembre 1999, l'Office fédéral de la police (alors
compétent en cette matière) a transmis au Juge d'instruction genevois
une commission rogatoire délivrée par un Procureur de Londres pour
les besoins d'une instruction ouverte contre B., son époux C. et D.,
soupçonnés principalement de blanchiment d'argent, par le biais notamment
des sociétés E. et F.

    Le 17 juillet 2000, le juge d'instruction est entré en matière. Par
ordonnance de clôture du 10 avril 2002, il a décidé de transmettre à
l'autorité requérante les pièces relatives à un compte bancaire détenu
par la société A., sur lequel 28'000 US$ étaient parvenus, en provenance
de E. et F.

    Par ordonnance du 29 août 2002, la Chambre d'accusation genevoise a
confirmé cette décision. Les soupçons de blanchiment d'argent étaient
suffisamment exposés et permettaient de retenir une incrimination
correspondante en droit suisse.

    A. forme un recours de droit administratif contre cette dernière
ordonnance.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

Erwägung 3

    3.  Invoquant les art. 14 de la Convention européenne d'entraide
judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959 (CEEJ; RS 0.351.1) et 28 de
la loi fédérale du 20 mars 1981 sur l'entraide internationale en matière
pénale (EIMP; RS 351.1), la recourante estime que la demande d'entraide
serait insuffisamment motivée, ce qui empêcherait d'examiner si la
condition de la double incrimination est remplie. L'autorité requérante ne
donnerait aucune indication sur l'origine de ses soupçons, en particulier
les infractions dont le produit aurait été recyclé, alors que l'infraction
de blanchiment serait plus large, en droit anglais, que l'art. 305bis
CP dont l'application est limitée au produit de crimes (cf. également
la réserve formulée par la Suisse en rapport avec l'art. 6 ch. 4 de la
Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la
confiscation du produit du crime, conclue à Strasbourg le 8 novembre 1990
et entrée en vigueur le 11 septembre 1993 pour les deux Etats [CBl; RS
0.311.53]). L'autorité requérante ne pouvait pas se contenter d'indiquer
que des transactions n'avaient pas de justification. Au moment de l'envoi
de la commission rogatoire, D. avait déjà été entendu; les comptes de
E. et de F. avaient ensuite été examinés. Contrairement à ce qu'a retenu
la Chambre d'accusation, l'enquête n'en était donc pas à ses débuts. On
ne pourrait d'ailleurs exclure que la procédure soit actuellement terminée.

    3.1  Selon l'art. 14 CEEJ, la demande d'entraide doit notamment
indiquer son objet et son but (ch. 1 let. b), ainsi que l'inculpation et
un exposé sommaire des faits (ch. 2). Ces indications doivent permettre
à l'autorité requise de s'assurer que l'acte pour lequel l'entraide est
demandée est punissable selon le droit des parties requérante et requise
(art. 5 ch. 1 let. a CEEJ), qu'il ne constitue pas un délit politique ou
fiscal (art. 2 al. 1 let. a CEEJ), que l'exécution de la demande n'est pas
de nature à porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité, à l'ordre
public ou à d'autres intérêts essentiels du pays (art. 2 let. b CEEJ),
et que le principe de la proportionnalité est respecté (ATF 118 Ib 111
consid. 4b et les arrêts cités). Le droit interne (art. 28 EIMP) pose des
exigences équivalentes, que l'ordonnance du 24 février 1982 sur l'entraide
internationale en matière pénale (OEIMP; RS 351.11) précise en exigeant
l'indication du lieu, de la date et du mode de commission des infractions
(art. 10 OEIMP).

    3.2  Dans sa demande, le Procureur de Londres indique que B., C. et
D. sont soupçonnés, principalement, de blanchiment d'argent. Entre janvier
1997 et janvier 1999, la société E., dont C. était administrateur, avait
effectué pour 4 milliards de dollars de transactions sur son compte auprès
de la banque où travaillait son épouse. Les avoirs de E. auraient été
transférés à de très nombreuses sociétés. En particulier, la société F.,
apparemment vouée au commerce de porcelaine, avait reçu d'énormes sommes,
sans justifications.

    Si l'autorité requérante n'indique pas en quoi consisterait l'activité
criminelle dont ces agissements auraient pour but de blanchir le produit,
c'est sans doute qu'elle l'ignore encore elle-même, ce qui expliquerait
d'ailleurs qu'aucun des suspects n'ait encore été formellement mis en
examen. Il n'est pas rare qu'une activité criminelle (corruption, trafics
divers) soit découverte par le biais des profits réalisés, et l'entraide
est manifestement requise dans cette perspective. Cela correspond à la
notion d'entraide "la plus large possible" visée non seulement à l'art. 1
CEEJ, mais aussi aux art. 7 al. 1 et 8 CBl. Selon l'art. 27 al. 1 let. c
CBl, toute demande de coopération fondée sur cette convention doit préciser
la date, le lieu et les circonstances de l'"infraction". Contrairement à ce
que soutient la recourante, cette dernière notion se rapporte uniquement
à l'infraction de blanchiment, telle qu'elle est définie à l'art. 6 CBl,
et non aux agissements délictueux qui l'ont précédée: ceux-ci sont en effet
définis à l'art. 1 let. e CBl, sous l'appellation spécifique d'"infraction
principale" (Haupttat). Ainsi, lorsqu'elle soupçonne une activité de
blanchiment et sollicite l'entraide judiciaire à cet effet, l'autorité
requérante n'a pas à indiquer en quoi consisterait l'infraction principale
(arrêt du Tribunal fédéral 1A.245/1996 du 6 décembre 1996, consid. 4b). La
solution retenue par la cour cantonale est ainsi conforme tant à la
lettre qu'à l'esprit de la CBl. Elle permet à la Suisse d'accorder sa
collaboration lorsque le soupçon de blanchiment est uniquement fondé,
comme en l'espèce, sur l'existence de transactions suspectes. La réserve
formulée par la Suisse en rapport avec l'art. 6 ch. 4 CBl est sans
incidence sur la motivation des demandes d'entraide qui lui sont soumises.

    3.3  Cela étant, l'ampleur des transactions mentionnées dans la
demande, dénuées de justifications apparentes, l'utilisation de très
nombreuses sociétés réparties dans le monde entier, le fait également
que l'épouse de C. travaillait dans la banque où E. disposait de son
compte, pouvaient légitimement susciter des soupçons. Compte tenu des
renseignements dont dispose l'autorité requérante, celle-ci ne peut pas se
montrer plus précise, et il n'y a pas lieu de lui en faire grief. Qualifiés
notamment d'actes de blanchiment, les agissements soupçonnés tomberaient,
en droit suisse, sous le coup de l'art. 305bis CP, ce qui suffit pour
admettre la double incrimination. Quant à l'affirmation selon laquelle
la procédure pourrait être terminée, elle est purement gratuite et ne
repose sur aucun élément du dossier.