Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 128 IV 232



128 IV 232

35. Extrait de l'arrêt de la Chambre d'accusation dans la cause X. et
consorts contre Ministère public de la Confédération et Procureur général
du canton de Genève

    8G.66/2002 du 27 août 2002

Regeste

    Art. 340bis StGB und Art. 260 BStP; umstrittene Zuständigkeit;
Legitimation des Geschädigten verneint.

    Die Verfahrensbestimmungen, die bei streitigen interkantonalen
Gerichtsständen gelten, sind bei umstrittener eidgenössischer oder
kantonaler Zuständigkeit anwendbar (E. 2).

    In Übereinstimmung mit der Rechtsprechung zu Art. 351 StGB muss der
Gesuchsteller, sobald er die erforderlichen Elemente kennt und es ihm
zugemutet werden kann, das Gesuch einreichen (E. 3.1).

    Die Legitimation zur Anfechtung des Gerichtsstandes oder der
Zuständigkeit hängt eng mit der Legitimation zur Nichtigkeitsbeschwerde
gemäss Art. 270 BStP zusammen; gemäss dem neuen Wortlaut dieser Bestimmung
ist die Legitimation des Geschädigten nun zu verneinen (E. 3.2).

Sachverhalt

    A.- Au mois d'octobre 1999, l'Office fédéral de la police a ordonné
le blocage des comptes de Sani Abacha (ex-président du Nigéria) et de
ses proches. Cette mesure résultait d'une demande d'entraide judiciaire
émanant de la République fédérale du Nigéria. Des comptes furent bloqués
à Genève et à Zurich.

    Le Nigéria a déposé une plainte pénale auprès du Parquet genevois
contre diverses personnes qui auraient détourné des fonds publics,
participé à une organisation criminelle et commis des brigandages.

    Au mois d'avril 2002, un règlement amiable entre le Nigéria et certains
proches de feu Sani Abacha a été envisagé. Dans ce cadre, le Procureur
général du canton de Genève était prié d'ordonner aux banques suisses de
virer un important montant à la Banque des règlements internationaux.

    B.- Le 2 mai 2002, X., administrateur unique d'une société canadienne,
a déposé devant le Procureur général du canton de Genève et parallèlement
devant le Ministère public de la Confédération une plainte pénale contre
différents proches de Sani Abacha dénoncés pour blanchiment d'argent,
recel, participation à une organisation criminelle, faux dans les titres,
escroquerie, brigandage, séquestration et tentative d'extorsion, voire
toute infraction à déterminer.

    Le plaignant X. a déclaré agir tant en son nom personnel (en sa
qualité d'administrateur unique de l'établissement précité) qu'en tant
que trustee de plusieurs personnes morales et physiques.

    Les plaignants se disent victimes de l'organisation criminelle mise
sur pied par Sani Abacha et soupçonnent que les fonds bloqués en Suisse
proviennent de ses activités délictueuses.

    C.- Le 6 mai 2002, le Procureur général du canton de Genève a invité
les plaignants à apporter plus de précisions quant à une éventuelle
compétence des autorités pénales suisses et a indiqué que l'argent devant
revenir aux proches de Sani Abacha serait probablement versé par un pays
autre que la Suisse.

    D.- Par une décision du 24 mai 2002, le Procureur général du canton
de Genève a informé les plaignants que leur cause était classée et que le
Ministère public de la Confédération (abrégé MPC) admettait la compétence
des autorités genevoises pour statuer sur ce dossier.

    Le Procureur général du canton de Genève précisait notamment que les
personnes mises en cause, condamnées ou inculpées dans la poursuite en
cours dans ce canton, ne correspondaient pas à celles incriminées par les
plaignants et que les valeurs patrimoniales saisies en Suisse paraissaient
provenir d'infractions commises au préjudice de l'Etat du Nigéria lui-même,
et non pas au détriment de tiers.

    E.- Par une lettre du 5 juin 2002 à l'avocat genevois des plaignants,
le MPC a formellement décliné sa compétence car, dans l'hypothèse
où il pourrait y avoir une relation entre les valeurs patrimoniales
confisquées (dans l'affaire Abacha et consorts) et le préjudice subi par
les plaignants, il serait contraire à l'efficacité de la poursuite pénale
de demander aux autorités judiciaires fédérales de traiter cette nouvelle
plainte; en outre, s'il n'y avait aucune relation entre les faits dénoncés
dans celle-ci et l'enquête Abacha et consorts, il n'y aurait aucun lien
avec la Suisse.

    F.- Le 11 juin 2002, X. et consorts ont saisi la Chambre d'accusation
du Tribunal fédéral d'une plainte contre la "décision" de refus de
compétence prise le 5 juin 2002 par le MPC (art. 105bis al. 2 en liaison
avec l'art. 214 PPF [RS 312.0] et avec l'art. 340bis CP). Ils demandent
l'annulation de cette décision, la suspension de tout transfert des
fonds bloqués, cela jusqu'à droit jugé dans la présente procédure, et la
réouverture de l'examen par le MPC de sa compétence, le tout sous suite
de frais et dépens.

    G.- Par une ordonnance du 14 juin 2002, le Président de la Chambre
de céans a rejeté la demande de suspension, considérant qu'un éventuel
effet suspensif relatif à la décision d'incompétence du MPC ne pouvait
avoir pour conséquence de générer un blocage de fonds qui n'a pas été
ordonné par le MPC.

    H.- Dans ses observations du 20 juin 2002, le Procureur général du
canton de Genève a conclu à l'irrecevabilité de la plainte du 11 juin 2002,
subsidiairement à son rejet sous suite de frais.

    I.- Le 24 juin 2002, le MPC a conclu au rejet de la plainte et a
indiqué qu'il renonçait à plaider.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.  D'après les plaignants, en bref, le MPC aurait décliné sa
compétence en violation de l'art. 340bis CP qui serait d'application
immédiate, faute de dispositions transitoires contraires; ainsi, la
plainte déposée après le 1er janvier 2002 serait régie par le nouveau
droit, lequel serait applicable à toutes les procédures introduites depuis
cette date. L'existence d'une organisation criminelle et son activité de
blanchiment en Suisse ne feraient aucun doute; le produit des infractions
commises contre les plaignants aurait vraisemblablement été blanchi en
Suisse et certains auteurs ou complices de ces actes figureraient parmi
les inculpés de la procédure ouverte en Suisse pour blanchiment. La
part prépondérante des crimes de cette organisation criminelle aurait
été commise à l'étranger au sens de l'art. 340bis al. 1 let. a CP. Vue
sous l'angle d'une délégation du MPC aux autorités genevoises, la décision
attaquée serait mal fondée car l'art. 18 PPF, en liaison avec les art. 340
et 340bis CP, ne permettrait pas un tel transfert de compétence dans une
enquête qui n'est pas simple au sens de l'art. 18bis al. 2 PPF.

Erwägung 2

    2.  Dans l'arrêt de principe ATF 128 IV 225, la Chambre de céans
a examiné certains aspects des conflits de compétence pouvant surgir à
la suite de l'introduction des nouvelles dispositions issues du "Projet
d'efficacité" (FF 1998 p. 1253 ss, Mesures tendant à l'amélioration de
l'efficacité et de la légalité dans la poursuite pénale). Il ressort de
cet arrêt notamment que l'absence d'une décision formelle du MPC sur sa
compétence - ce qui est la règle - rend la voie de la plainte prévue
à l'art. 105bis PPF impraticable, que l'art. 260 PPF (en vigueur dès
le 1er janvier 2002, RO 2001 p. 3073) est calqué sur l'art. 264 PPF et
qu'en conséquence les règles procédurales en matière de conflits de for
intercantonaux sont applicables; il s'ensuit que les plaintes au sujet de
la compétence doivent être traitées de la même façon que celles relatives
à l'art. 351 CP, et non pas comme une plainte prévue à l'art. 105bis PPF.

Erwägung 3

    3.  En l'espèce, les plaignants s'en prennent, par un recours
postérieur au 31 décembre 2001, à un accord intervenu entre le MPC et le
Procureur général du canton de Genève, aux termes duquel celui-ci a accepté
sa compétence vu la connexité de la nouvelle plainte avec une instruction
en cours à Genève. Le MPC n'a pas notifié aux plaignants une décision
formelle déclinant sa compétence; la lettre du 5 juin 2002 se limite
à les informer des raisons pour lesquelles il a décliné sa compétence,
sans mentionner une éventuelle voie de recours.

    3.1  D'après les règles valables pour résoudre les conflits de for
intercantonaux au sens de l'art. 351 CP, le plaignant n'est pas tenu
d'agir dans un délai précis mais dans un délai raisonnable à partir du
moment où il a connaissance des éléments nécessaires (ATF 120 IV 146
consid. 1). La plainte du 11 juin 2002 répond à cette exigence.

    3.2  Le lésé, le plaignant ou le dénonciateur sont en principe
dépourvus de la qualité pour porter plainte au sujet du for, sauf en cas
de conflit négatif; ils ne sont d'ailleurs pas mentionnés à l'art. 264
PPF. Il en va ainsi même s'ils ont déposé une plainte pénale du chef
d'infractions poursuivies sur plainte. L'ATF 116 IV 83 consid. 1b, où la
qualité du plaignant pour saisir la Chambre de céans a été admise, est
dépassé depuis la modification de l'art. 270 PPF entrée en vigueur le 1er
janvier 2001. En effet, selon la jurisprudence, la qualité pour contester
le for dépend étroitement de la qualité pour former un pourvoi en nullité.

    Le simple dénonciateur, c'est-à-dire celui qui n'est ni lésé ni
victime, n'a jamais eu la qualité pour former un pourvoi en nullité au
Tribunal fédéral. Le lésé et le plaignant n'ont plus cette qualité pour
recourir, cela depuis l'entrée en vigueur du nouvel art. 270 PPF, le 1er
janvier 2001; toutefois, le plaignant peut se pourvoir en nullité pour
autant qu'il s'agisse de son droit de porter plainte (RO 2000 p. 2719,
2722; loi du 23 juin 2000).

    L'ancienne jurisprudence découlant de l'art. 264 PPF (ATF 88 IV 143
p. 144) a reconnu au plaignant le droit de saisir la Chambre d'accusation,
bien qu'il ne soit pas mentionné dans cette disposition, cela parce
qu'il pouvait alors se pourvoir en nullité au Tribunal fédéral. Ce motif
a désormais disparu, ce qui conduit à dénier au plaignant et au lésé la
qualité pour agir en se fondant sur l'art. 260 ou 264 PPF.

    Il devrait en aller de même pour la victime au sens de l'art. 2 de
la loi fédérale du 4 octobre 1991 sur l'aide aux victimes d'infractions
(LAVI; RS 312.5) car celle-ci ne peut se pourvoir en nullité qu'à certaines
conditions prévues à l'art. 270 let. e PPF, dans sa teneur en vigueur dès
le 1er janvier 2001. Cette question peut toutefois demeurer indécise ici.

    3.3  En l'espèce, la plainte pénale déposée le 2 mai 2002 devant
le Procureur général du canton de Genève dénonce des personnes pour
blanchiment d'argent, recel, participation à une organisation criminelle,
brigandage, séquestration, tentative d'extorsion et toute infraction
à déterminer. Dans la plainte au sujet de la compétence, du 14 juin
2002, adressée à la Chambre de céans, les plaignants ne donnent aucune
explication établissant qu'ils seraient des victimes au sens des art. 2
LAVI et 270 let. e PPF et on ne discerne pas non plus en quoi ils le
seraient. Ils se plaignent en substance d'avoir été spoliés, mais ils
ne font pas valoir des atteintes directes à leur intégrité corporelle,
sexuelle ou psychique (art. 2 LAVI). Dès lors, leur qualité de victime
fait défaut. Ils doivent être considérés ici comme des lésés. Or, le lésé
n'a pas qualité pour saisir la Chambre de céans d'une plainte au sujet
de la compétence.

    Ainsi, la plainte est irrecevable.