Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 127 V 484



127 V 484

70. Extrait de l'arrêt du 23 novembre 2001 dans la cause Secrétariat d'Etat
à l'économie contre F. et Tribunal administratif du canton de Fribourg

Regeste

    Art. 15 Abs. 2, Art. 94, 95 und 99 AVIG; Art. 15 Abs. 3 und
Art. 124 AVIV: Rückerstattung von Arbeitslosenentschädigungen im
Anschluss an die rückwirkende Zusprechung einer Invalidenrente. Richtet
die Arbeitslosenkasse vorschussweise Taggelder aus und spricht die
Invalidenversicherung dem Versicherten später rückwirkend für dieselbe
Zeitspanne eine Rente zu, fordert die Arbeitslosenkasse die ausbezahlten
Entschädigungen zurück. Sie verrechnet alsdann ihre Rückforderung mit der
Rentennachzahlung und erlässt, sofern ihre Forderung durch die Verrechnung
nicht vollständig getilgt wird, für den Rest eine gegen den Versicherten
gerichtete Rückerstattungsverfügung. Die in Art. 95 Abs. 4 AVIG vorgesehene
fünfjährige Verwirkungsfrist beginnt in solchen Fällen erst zu laufen, wenn
die Rentenverfügung der Invalidenversicherung rechtskräftig geworden ist.
Auslegung dieser Bestimmung im Sinne einer teleologischen Reduktion.

Sachverhalt

    A.- Du 1er novembre 1993 au 31 octobre 1998, F. a perçu des indemnités
de chômage de la Caisse publique de chômage du canton de Fribourg
(ci-après: la caisse publique). Le 9 août 1993, il avait déposé une
demande de prestations auprès de l'Office de l'assurance-invalidité du
canton de Fribourg. A la suite de la décision du 8 mars 2000 de l'office
de l'assurance-invalidité lui reconnaissant un taux d'invalidité de
68 pour cent à compter du 1er novembre 1993, la Caisse de compensation
interprofessionnelle AVS de la Fédération romande des syndicats patronaux
(FRSP-CIFA) a communiqué à la caisse publique le montant des arrérages
de rentes en faveur de F. (164'784 francs).

    Par décision du 26 mai 2000, la caisse publique a réclamé à l'assuré
la restitution, jusqu'à concurrence de 66'502 fr. 65, des indemnités
versées du 1er novembre 1993 au 31 octobre 1998. Le montant soumis à
restitution était proportionnel au degré de l'incapacité de gain retenu
par l'assurance-invalidité (68 pour cent). Le même jour, la caisse
publique a requis de la FRSP-CIFA la compensation avec des paiements
rétroactifs de l'assurance-invalidité de 65'542 fr. 20, montant qui
lui a été versé. La différence, par 960 fr. 45, devait être remboursée
directement par l'assuré.

    B.- F. a recouru contre cette décision devant le Tribunal administratif
du canton de Fribourg. Il concluait à son annulation, subsidiairement à sa
modification pour tenir compte de la péremption et/ou de la prescription
partielle de la créance en restitution.

    Dans sa réponse au recours, la caisse publique a accepté de ramener
à 163 fr. 60 (au lieu de 960 fr. 45) le montant à restituer directement
par l'assuré, pour cause de péremption partielle.

    Statuant le 25 janvier 2001, le tribunal administratif a admis le
recours. Il a pris acte de la réduction de la prétention de la caisse
publique en ce qui concerne le montant à rembourser directement par
l'assuré. Il a en outre condamné la caisse publique à restituer à ce
dernier 19'448 fr. 10. Enfin, il a accordé à l'assuré une indemnité de
dépens de 2152 francs. Le tribunal a considéré que le remboursement,
par compensation, des prestations versées pour la période antérieure
au 25 mai 1995 (19'448 fr. 10) ne pouvait plus être exigé, en raison de
l'écoulement du délai de péremption de cinq ans.

    C.- Le Secrétariat d'Etat à l'économie (seco) interjette recours de
droit administratif contre ce jugement dont il demande principalement
l'annulation. A titre subsidiaire, il conclut au renvoi de la cause à la
caisse publique pour examiner la question de la surindemnisation.

    F. conclut au rejet du recours avec suite de dépens. Il demande
en outre au tribunal de lui accorder des intérêts moratoires sur les
montants de 19'448 fr. 10 et de 2152 francs. Quant à la caisse publique,
elle se rallie aux conclusions du seco.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- a) En vertu de l'art. 15 al. 2 LACI, le handicapé physique ou
mental est réputé apte à être placé lorsque, compte tenu de son infirmité
et dans l'hypothèse d'une situation équilibrée sur le marché de l'emploi,
un travail convenable pourrait lui être procuré sur ce marché. Le Conseil
fédéral règle la coordination avec l'assurance-invalidité. D'après
l'art. 15 al. 3 première phrase OACI, lorsque, dans l'hypothèse
d'une situation équilibrée sur le marché du travail, un handicapé
n'est pas manifestement inapte au placement et qu'il s'est annoncé à
l'assurance-invalidité ou à une autre assurance selon l'art. 15 al. 2 OACI,
il est réputé apte au placement jusqu'à la décision de l'autre assurance.

    La présomption légale instituée par cette réglementation entraîne,
pour l'assurance-chômage, une obligation d'avancer les prestations à
l'assuré, cela par rapport aux autres assurances sociales. Il s'agit d'un
cas de prise en charge provisoire (ou préalable) des prestations. Quand
l'assuré au chômage s'annonce à l'assurance-invalidité, cette prise en
charge provisoire vise à éviter qu'il se trouve privé de prestations
d'assurance pendant la période de carence d'une année selon l'art. 29
al. 1 let. b LAI et plus généralement pendant le temps nécessaire à
l'assurance-invalidité pour statuer sur la demande dont elle est saisie
(THOMAS NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in: Schweizerisches
Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, ch. 228; GERHARDS,
Kommentar zum Arbeitslosenversicherungsgesetz, vol. I, note 99 ad
art. 15 LACI; voir aussi UELI KIESER, Die Taggeldkoordination im
Sozialversicherungsrecht, in: PJA 2000 p. 256).

    b) Lorsque, par la suite, l'autre assureur social requis octroie
des prestations, la correction intervient selon les art. 94 al. 2 LACI
(compensation) et 95 LACI (restitution des prestations). Ainsi, l'assuré
qui reçoit des indemnités de chômage pour une certaine période et qui,
ultérieurement, est mis au bénéfice d'une rente de l'assurance-invalidité
pour la même période est tenu de restituer les indemnités perçues; lorsque
l'assuré, malgré le versement d'une rente, disposait d'une capacité
résiduelle de gain susceptible d'être mise

à profit, le montant soumis à restitution est proportionnel au degré de
l'incapacité de gain (DTA 1998 no 15 p. 82 consid. 5, 1988 no 5 p. 38
consid. 4c et d).

    La restitution s'opère, en tout ou partie, par compensation avec des
arriérés de rentes de l'assurance-invalidité. A cet égard, l'art. 124 OACI
prévoit en effet que lorsqu'une caisse verse des indemnités de chômage
et qu'ultérieurement une autre assurance sociale fournisse, pour la même
période, des prestations qui ont pour effet d'entraîner le remboursement
de l'indemnité de chômage, la caisse exige la compensation en s'adressant à
l'assureur compétent. Conformément au principe de la concordance temporelle
exprimé par cette disposition réglementaire, seuls les jours pour lesquels
l'assuré a été indemnisé par l'assurance-chômage peuvent être pris en
considération pour la compensation et non pas toute la période de chômage
coïncidant avec celle pendant laquelle la rente de l'assurance-invalidité a
été versée (DTA 1999 no 39 p. 231 consid. 3a). Si la créance en restitution
n'est pas entièrement éteinte par la compensation, la caisse de chômage
est fondée à rendre à l'endroit de l'assuré une décision de restitution
pour le solde, aux conditions de l'art. 95 al. 1 LACI et sous réserve
d'une remise prévue à l'art. 95 al. 2 LACI.

Erwägung 3

    3.- a) Dans le cas particulier, l'assuré a requis l'octroi
d'allocations de chômage, peu de temps après avoir déposé une demande
de prestations auprès de l'assurance-invalidité. Dès lors, conformément
à l'art. 15 al. 3 OACI, les indemnités de chômage versées depuis le
1er novembre 1993 doivent être considérées comme des avances de la
caisse publique jusqu'à droit connu sur la demande de prestations de
l'assurance-invalidité. Ce n'est qu'à la suite de la décision du 8
mars 2000 de l'office de l'assurance-invalidité reconnaissant un taux
d'invalidité donnant droit à une rente entière et portant effet rétroactif
au 1er novembre 1993 que la caisse publique a demandé la restitution à
due concurrence des prestations qu'elle avait avancées.

    Les premiers juges ont fait application de l'art. 95 al. 4 LACI
et considéré que - pour partie - la créance de la caisse publique
était périmée en raison de l'écoulement du délai de plus longue
durée de cinq ans. Le recourant soutient que durant la procédure
devant les organes de l'assurance-invalidité, le délai de cinq ans est
interrompu; subsidiairement, il invoque, selon ses termes, l'"exception
de surindemnisation" en cas de concours de prestations de deux assurances
sociales.

    Pour l'essentiel l'intimé se rallie aux considérants des juges
cantonaux.

    b) aa) Selon l'art. 95 al. 1 LACI, première phrase, la caisse
est tenue d'exiger du bénéficiaire la restitution des prestations de
l'assurance auxquelles il n'avait pas droit. Le droit de répétition se
prescrit une année après que l'organe qui a payé a eu connaissance des
faits, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation
(art. 95 al. 4 LACI, première phrase). Le texte de cette disposition
est, quant au fond, analogue à la disposition correspondante de la LAVS
si bien que la jurisprudence rendue à propos de l'art. 47 al. 1 LAVS
s'applique par analogie à la restitution d'indemnités indûment touchées
dans l'assurance-chômage (cf. ATF 124 V 382 consid. 1 et les références).

    bb) La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre. Toutefois,
si le texte n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations de
celui-ci sont possibles, il faut alors rechercher quelle est la véritable
portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer,
soit notamment les travaux préparatoires, le but et l'esprit de la
règle, les valeurs sur lesquelles elle repose, ainsi que sa relation
avec d'autres dispositions légales (ATF 127 V 92 consid. 1d, 126 II 80
consid. 6d, 126 III 104 consid. 2c, 126 V 58 consid. 3). Pour rendre la
décision répondant de manière optimale au système et au but de la loi,
le Tribunal fédéral utilise, de manière pragmatique, une pluralité de
méthodes, sans fixer entre elles un ordre de priorité (ATF 125 II 244
consid. 5a et les arrêts cités). Au besoin, une norme dont le texte est à
première vue clair se verra étendre par analogie à une situation qu'elle
ne vise pas ou au contraire ne sera pas appliquée à une situation visée
par une interprétation téléologique restrictive. Une interprétation
de ce type constitue, selon les conceptions actuelles, un acte de
création du droit par le juge et non une ingérence inadmissible dans
la compétence du législateur (ATF 123 III 218 consid. 5b, 121 III 224
consid. 1d/aa; ERNST A. KRAMER, Teleologische Reduktion - Plädoyer für
einen Akt methodentheoretischer Rezeption, in: Rechtsanwendung in Theorie
und Praxis, Symposium zum 70. Geburtstag von Arthur Meier-Hayoz [RDS,
supplément 15], Bâle 1993, p. 65 ss et p. 73 ss).

    cc) Si l'on s'attache au texte même de l'art. 95 al. 4 LACI, le délai
de péremption de cinq ans commence à courir à la date du versement de la
prestation. L'art. 95 LACI - de même que l'art. 47 LAVS - vise typiquement
des situations où le caractère indu des prestations existe déjà au moment
de leur paiement, que ce soit au moment

de leur octroi initial ou - s'agissant de prestations périodiques -
à une date ultérieure, à la suite d'un changement de circonstances,
comme par exemple le remariage d'une personne au bénéfice d'une
rente de veuve ou de veuf (cf. MEYER-BLASER, Die Rückerstattung von
Sozialversicherungsleistungen, in: RJB 1995 p. 477). Dans de telles
situations, le Tribunal fédéral des assurances a toujours interprété de
manière littérale la notion de versement, en jugeant par exemple que le
délai de péremption de plus longue durée de cinq ans prévu à l'art. 47
al. 2 LAVS commençait à courir dès le moment où la prestation a été
effectivement versée et non pas celui où elle aurait dû être payée selon
la loi (ATF 112 V 182 consid. 4a, 111 V 17 consid. 3 in fine, 108 V 4).

    En revanche, quand c'est le paiement de prestations arriérées par
une assurance sociale qui justifie la restitution de prestations d'une
autre assurance - en application des règles légales de coordination -
le caractère indu des prestations sujettes à remboursement n'apparaît
qu'après coup. Ainsi, dans le cas présent, aussi longtemps que
l'assurance-invalidité n'avait pas pris sa décision, les prestations
allouées par l'assurance-chômage n'étaient pas indues, bien au
contraire, puisqu'il s'agissait d'avances auxquelles l'assuré avait
droit. Jusqu'au moment de la décision de l'assurance-invalidité, la caisse
d'assurance-chômage n'avait aucune base juridique pour fonder une décision
en restitution. D'un point de vue littéral, l'art. 95 al. 4 LACI ne tient
pas compte de ce cas de figure particulier.

    dd) Les prétentions découlant du droit public sont soumises à
prescription ou à péremption afin d'assurer - comme en droit privé - une
stabilité juridique et d'empêcher la remise en cause de situations qui
ont duré pendant une certaine période (voir ANDREA BRACONI, Prescription
et péremption dans l'assurance sociale, in: Droit privé et assurances
sociales, Fribourg 1990, p. 215). En interprétant l'art. 95 al. 4 LACI
selon la méthode téléologique restrictive, il convient de constater que
si le législateur a voulu instaurer un délai de péremption absolue de
cinq ans, pour mettre - passé ce délai - un point final à un rapport
d'obligation entre l'assurance et le débiteur, il n'a assurément pas
voulu que ce délai commence à courir à partir d'un quelconque versement
de prestations, mais seulement dès l'instant où l'on est en présence
d'un paiement opéré à tort et où les conditions d'une restitution sont
susceptibles d'être remplies. En ce sens, il y a corrélation nécessaire
entre les alinéas 1 et 4 de l'art. 95 LACI, le point de départ du délai de
péremption étant subordonné à la naissance d'une obligation de restituer
l'indu. Une application

indifférenciée de la notion de versement à tous les cas de restitution,
comme le préconisent en fait les premiers juges, est de nature à
paralyser de manière inadmissible les objectifs de coordination entre
l'assurance-chômage et l'assurance-invalidité. Elle aurait de surcroît
comme conséquence absurde de fixer le point de départ du délai de cinq
ans à une date où le paiement n'était pas indu.

    Il convient ainsi de limiter la teneur littérale de l'art. 95 al. 4
LACI en ce sens que le mot "versement" dont use cette disposition doit
être compris comme exigeant le paiement d'une prestation à laquelle le
bénéficiaire n'avait pas droit. Par conséquent, lorsque la restitution
d'indemnités de chômage est justifiée par l'allocation avec effet
rétroactif d'une rente de l'assurance-invalidité, le délai de cinq ans
ne peut commencer à courir qu'à partir du moment où il apparaît que ces
indemnités sont indues et donc sujettes à restitution, c'est-à-dire au
moment de l'entrée en force de la décision de rente.

    c) En l'espèce, la décision de l'office de l'assurance-invalidité
date du 8 mars 2000. La créance de la caisse publique n'était donc pas -
même partiellement - éteinte par la péremption. Partant, la caisse était
en droit de compenser sa créance avec des arriérés de rentes et de réclamer
directement à l'assuré la restitution du solde non compensable.

    S'agissant du montant soumis à restitution, il n'est pas contesté
et il n'apparaît du reste pas sujet à discussion; il en va de même en ce
qui concerne les modalités de la compensation (voir à ce sujet DTA 1999
no 39 p. 227). C'est dire, en conclusion, que la compensation pouvait
s'opérer sur la totalité du montant de 65'542 fr. 20 et que la caisse
était fondée à rendre à l'endroit de l'assuré une décision de restitution
pour le solde de sa créance, par 960 fr. 45.

    Le recours de droit administratif est dès lors bien fondé.